Chapitre 4 : la catastrophe ambulante.
Deux heures plus tard,
Le self était à moitié vide comme tous les jours de vacances.
- Alors par où commencer ? s'interrogea Nel. Ah oui ! Pourquoi êtes-vous sortie hier ?
Je plaçai le plat devant moi et plantai ma fourchette dans les pâtes.
- J'ai ressentis le besoin de prendre l'air, répondis-je.
- Mais bien sûr.
Je pris une bouchée avant de lui lancer :
- C'est quoi ce « mais bien sûr » ?
- Oh juste que j'ai entendu parler d'une fête foraine.
- Et ?
Il prit son temps pour mâcher et avaler sa bouchée puis déclara tranquillement :
- Je vois bien que Callen ne vous laisse pas indifférente.
Je faillais m'étrangler avec mes pâtes.
- Qu... quoi ? balbutiai-je.
- Dois-je vous rappeler que vous devez vous marier avec un obscurien ou un sorcier ?
- Ouais... ouais... tu m'as déjà saoulée avec ça.
- C'est très sérieux.
- Je sais.
- Vous êtes la dernière héritière du Chaos, tout repose sur vos épaules.
- Je sais.
- Si vous mourez alors qu'il n'y a pas d'héritier, ce sera la fin du Chaos.
- Je sais !
- Alors vous ne pouvez pas et, même, je vous interdis de sortir avec Callen !
- Je ne veux PAS sortir avec lui ! Qui est-ce qui t'as mis cette idée en tête ?
- Je vous l'ai dit ! Vous êtes amoureuse de lui. De plus, votre « quoi » semblait approuver mon affirmation.
- J'étais tout simplement surprise que tu puisses penser une bêtise pareille.
Grillée...
- Et puis, tu me peux me dire le rapport avec le fait que je sois sortie hier ? rajoutai-je en tentant ainsi de ramener la conversation sur un chemin moins dangereux.
- Un rendez-vous que vous auriez eu avec lui.
- C'est tout bonnement débile.
- Arrêtez de nier princesse : vous êtes amoureuse de lui.
- Ah ouais ? Moi amoureuse ? Tu es tombé sur la tête mon pauvre Nel !
- Je sais très bien reconnaître une femme amoureuse alors arrêtez de jouer la comédie. Vous avez l'air ridicule.
- Et je peux savoir depuis quand tu sais reconnaître cela ?
Un air de fierté se dessina sur son visage tandis qu'il répondait :
- Je tiens à vous signaler que dans le royaume, je suis connu pour ma beauté et mon charme. Nombres d'obscuriennes et sorcières me font la cour.
Je crachai ma gorgée d'eau de surprise. Je plaçai mes mains devant ma bouche pour me retenir d'éclater de rire.
- Qu'est-ce que vous avez ? Vous êtes surprise ? Vous venez de vous rendre compte de l'étendu de mon charme ravageur ?
C'en était trop.
J'éclatai de rire et tombai de ma chaise. La douleur de ma chute n'était rien comparé au mal de ventre.
- J'aurais du me douter que vous réagiriez comme ça...
Avec ma main, j'attrapai ma serviette que j'agitai en criant :
- Je... je... je m... je me rends !
- Qu'est-ce que tu as encore fait Nel ? demanda une voix familière.
Je m'arrêtai immédiatement de rire.
- Oh rien. Elle se moque juste de moi alors que je n'ai fais que dire la vérité !
En la voyant, mes yeux pétillèrent.
- Eve !
Sur ces mots, je me relevai en vitesse pour me jeter à son cou. Son plateau dansa dangereusement dans ses mains mais elle réussit à l'arrêter.
- Oula ! Attention Linoa ! me dit-elle. Mon repas allait finir par terre !
- Ça fait UNE semaine que je ne t'ai pas vue ! Tu es partie si mystérieusement ! Qu'est-ce qui s'est passé ? Où étais-tu ?
Ses yeux émeraude se remplirent de tristesse. Il ne m'en fallut pas plus pour deviner.
- Tes parents, murmurai-je.
Elle acquiesça.
- Ils ont voulu me voir pour me proposer un marché, expliqua-t-elle. J'ai naturellement refusé mais ils m'ont retenu un moment en espérant que je changerais d'avis.
Elle posa son plateau à côté de Nel tandis que je reprenais ma place.
- À cause de « ce que tu as fait », intervient celui-ci.
Elle acquiesça.
- Tu ne nous a jamais dit ce que c’était, lui fis-je remarquer.
- Juste des histoires de famille, répliqua-t-elle.
- Et moi qui croyais être ta meilleure amie…, lui lançai-je.
- Tu l’es. C’est juste que je ne veux pas vous impliquer, Nel et toi, dans ses histoires.
- Des histoires de familles que…, commença l’obscurien.
- Il y a des places là-bas ! cria une voix féminine.
Telle une fusée, une jeune fille passa près de notre table.
- Il y a des places partout ma chérie, répliqua une voix masculine.
Lorsque le blond passa près de nous, Nel tendit sa jambe pour lui faire une croche patte. Il faillit tomber mais il se rattrapa de justesse. Il se retourna vers le démon et lui lança un regard meurtrier ce par quoi le concerné lui répondit par un sourire.
- Ne fait pas attention à lui, Théodore, lui lança une nouvelle voix féminine.
Toujours égale à elle-même, elle arborait un visage sérieux et hautain.
- Ce serait lui faire trop d’honneur, rajouta-t-elle.
- Tu as raison.
Sur ces mots, il partit rejoindre l’autre fille qui s’était installée à une table.
- Linoa…
Elle me toisa de haut en continuant froidement :
- … tiens Nel en laisse.
Je lui lançai un regard noir avant de répliquer sèchement :
- Je n’ai pas d’ordre à recevoir de toi, Éden.
Elle me fixa un moment avant de continuer sa route comme si de rien n’était.
Entre nous, c’était une grande histoire d’Amour avec un grand « A ». Comme tous les héritiers du Chaos et de l’Harmonie je suppose.
C’étaient la même chose avec Théodore et Nel. Après tout un ange et un démon ça s’entend si bien ensemble !
- Enfin bref ! lança Nel. Pour en revenir à votre petite sortie…
- Oui ?
- Vous n’avez pas le droit si je ne vous accompagne pas et ceux jusqu’à ce que vous maîtriser des sorts basiques. Histoire de sécurité.
- Tu peux te détendre : Astroméria est là pour me protéger.
Il fronça les sourcils.
- Et pourquoi elle ferait cela ?
- Bah… elle adore l’équilibre du monde… doit le préserver.
D’un geste de main circulaire associée à ses paroles, je tentai maladroitement de lui faire deviner.
- Super, marmonna-t-il visiblement mécontent.
En même temps je pouvais comprendre sa réaction : à ce que j’avais comprit, elle voulait le bien du Chaos et de l’Harmonie.
- Bon, elle a baissé dans ton estime mais elle doit être hyper adroite et tout et tout !
- Comment tu peux qualifier Astroméria « d’adroite » ? s’étonna Eve.
Je lui fis les gros en yeux en me tournant vers elle.
- Tu connais Astroméria ?
- Oui et…
Elle sembla choisir ces mots.
- … disons que c’est… enfin je ne veux pas t’effrayer mais…
- Mais ? répétai-je.
- AAAAAAAAAAAAAAAAAH
Je me tournai vers le cri qui avait retentit derrière moi.
Astroméria, qui avait perdu l’équilibre, lutta pour le retrouver. Dans sa tentative, elle percuta un cuisinier revenu mettre un pot de ketchup. Celui-ci bouscula à son tour son collègue ce qui fit glisser le sac de son épaule.
Une explosion de farine embruma alors la scène.
Seul au milieu de ce désastre, Callen avait réussit à rattraper des éléments du plateau de la gardienne. Celle-ci finit par tomber sur lui, l’entraînant dans les abscisses du nuage de farine dans un cri commun.
- Aïeuh…, gémit-elle.
- Une catastrophe ambulante…, murmurai-je.
- C’est ça.
Mon attention se reporta sur Eve.
- Astroméria est une catastrophe ambulante, rajouta-t-elle. Le pire c’est qu’elle ne s’en rends même pas compte.
- Je vais mourir…
- Quelle ironie ! lança Nel. Celle censée vous protéger vous mènera à votre perte.
- Super…
Quelques instants plus tard, les deux arrivèrent à notre table.
- Eve ! s’écria Astroméria.
Mais avant qu’elle n’ait le temps de faire quoi que ce soit, Callen cria :
- STOP !
Puis il sembla reprendre son sang froid devant le regard surprit de la jeune fille.
- Pose ce plateau sur la table. DOUCEMENT. Et assieds toi par pitié !
Sans un mot, elle obéit en le fixant comme pour vérifier qu’elle le faisait correctement. Une fois cela fait, il poussa un PROFOND soupir de soulagement.
- On l’a échappé belle, murmura-t-il en s’installant entre moi et la gardienne.
Soudain, Astroméria se leva violemment. Callen poussa un petit cri de douleur, leva son genoux qui percuta la table lui faisant lâcha un autre cri.
Au même moment la gardienne se rata, tombant sur le bord du plateau d’Eve et ceci avec une telle violence que le couteau vola en direction du pauvre brun. Il l’évita de justesse.
Le couvert, devenu alors une arme par accident, se planta dans le poteau derrière.
GROS BLANC.
Astroméria, inconsciente de la nouvelle catastrophe, continua comme si de rien n’était.
- Eve ça fait si longtemps ! Je suis troooooop contente !
- Moi aussi Astroméria, finit par répondre la jeune brune en se penchant sur le côté. Linoa, tu pourrais récupérer mon couteau ?
- Pas de problème.
Je reculai un peu avec ma chaise et l’attrapait. Heureusement, il n’était pas planté profondément.
- Bah, que fais ton couteau ici ? s’étonna la gardienne.
Sa déclaration fut suivit de longs soupirs.
- Bah quoi ?
- Oublie Astroméria, lui dit doucement Eve. Ce n’est rien.
Je retrouvai ma place et lui passait le couvert.
- Hum…
Les coudes posés contre la table, les mains croisées et le menton posé dessus, l’obscurien semblait plongé dans un grande réflexion.
- … En fait je retire ce que j’ai dit : elle ne va pas vous tuer, Linoa. Elle va tuer Callen.
Le concerné fit la moue.
- Super…, murmura-t-il.
- Est-ce que je dois être content de sa mort prochaine au vu des circonstances actuelles ou ne pas l’être vu que je m’entends quand même bien avec lui.
- Merci de ta sympathie Nel, lui lança-t-il.
- En espérant que tu te trompes, intervins-je.
- Je ne me trompe pas. Au vu de ce qui s’est passé on peut supposer que toute personne proche d’elle, et qui est entraînée au moins une fois dans une de ses catastrophes, s’y retrouvera à VIE.
- On ne peut pas parler de quelque chose de plus joyeux ? lança Callen. Parce que parler de la probabilité que je meurs prochainement ça ne m’enchante pas trop vous voyez.
Il se tourna vers moi.
- Par exemple, Linoa, tes parents vont venir à la réunion parent/prof qui a lieu dans un mois ? me demanda-t-il.
- Mon père reviendra en France spécialement pour y assister.
- Il est où actuellement ? m’interrogea la gardienne.
- Quelque part en Amazonie.
- En Amazonie ? répéta Callen surprit. Qu’est-ce qu’il fait en Amazonie ?
- Oh… il cherche un temple pour la pierre du soleil ou un truc dans ce genre, répondis-je avec un mouvement circulaire de la main.
- Okay… c’est une sorte d’Indiana Jones quoi.
- Oui c’est ça. Et toi, tes parents ?
- Oh… ils ne vont pas venir. Beaucoup trop occupés.
C’est alors, qu’en observant son visage, je remarquai quelque chose.
- Callen, c’est quoi ce pansement sur ta joue ?
Ses doigts effleurèrent celui-ci.
- Ah ça… murmura-t-il.
- C’est en tombant avec Astoméria tout à l’heure ?
- Nope, répliqua la concernée. Il l’avait déjà et il n’a pas voulu me dire pourquoi.
- Parce que ce n’est rien.
Puis en plantant sa fourchette dans le demi œuf de sa salade, il rajouta :
- Rien de grave.
À ce moment-là, j’eus la désagréable impression qu’il me cachait quelque chose.
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