Chapitre 2

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Pan !

Le signal était donné. Tous les groupes se ruèrent en même temps dans la pinède. On criait comme des fous, sûrement pour montrer aux autres qu'on était les meilleurs. Il existait trois parcours de difficulté et de balises différentes : noires pour le plus difficile, rouges pour le moyen et vertes pour le plus facile. Je me dirigeai comme à mon habitude vers celui du milieu, quand on m'agrippa le bras.

  • Viens ! Nous on prend le premier sinon ce n'est pas drôle, m'entraîna Tania.

J'avais failli lâcher un cri de surprise : sa main était glacée. Elle s'aperçut de mon malaise et la retira.

Nous nous engageâmes donc dans le parcours numéro 1. Un frisson d’adrénaline me traversa : cela changeait vraiment des autres années !

Peu de groupes l'avaient choisi. Il faut dire que certaines énigmes étaient compliquées. De plus, cette partie de la forêt était plus ombragée, ce qui rendait difficile le repérage des balises noires. On devait progresser doucement pour ne pas les rater. Enfin, les autres élèves préféraient arriver en premier au buffet.

Je n'arrivais pas à m'enlever la désagréable sensation du contact de la main de Tania, sa fraîcheur m'intriguait. La température ambiante n'était pourtant pas basse...

Nous arrivâmes à la première balise. Le petit écriteau de bois clair présentait l'énigme gravée en noir :


« Par les sentiers étroits tu iras et à la clairière tu t’arrêteras. Le rond de bois tu chercheras.

À droite il sera. »


  • Pff, dit Mike, c'est ça qu'ils appellent une énigme ? Autant nous indiquer directement le chemin !
  • C'est clair, renchérit Jack, je pensais que le parcours noir serait plus difficile que ça !
  • Vous comprenez maintenant pourquoi je ne suis pas enthousiaste chaque année. Ils m'ont presque dégoûté des intrigues, dis-je.

En fait, j'étais un peu déçu par la simplicité de l'épreuve, mais je ne le montrais pas. Enfin, au moins Mike et Jack partageaient mon avis. Les autres groupes semblaient tout heureux d'avoir compris par où il fallait aller. Deux équipes firent même la course entre elles : quatre garçons contre quatre filles. Classique, pensai-je. Je me retournai vers Jack et Mike, qui n'avaient pas l'air de vouloir bouger. Je me sentais presque en colère contre eux de ne pas participer à la course. Pourquoi, alors que j'étais disposé à être comme tout le monde, c'était mon propre groupe qui me freinait ?

Je me tournai vers celle qui n'avait encore rien dit dans l'espoir qu'elle change la donne ; de nous quatre, c'était la plus motivée. Mais je n’eus pas le temps de parler. Avec un air de malice, elle nous dit d'un ton étrange : « Venez ! Nous allons prendre un raccourci ». Elle gloussa, mais au lieu de rire comme Mike et Jack, j’eus un peu peur. Je comprenais que je n'étais pas à ma place. Peu importe ce qui allait se passer après, ce que je savais c'est que j'aurais tout fait pour être avec les autres élèves de mon collège. Il y avait quelque chose d'anormal dans l'attitude de Tania. Jack et Mike n'avaient pas l'air de s'en apercevoir. Comme envoûtés par la belle.

Je secouai la tête. N'importe quoi ! Je nageai en plein délire. Il fallait que je profite de cette journée, je m'en étais fait la promesse.

Nous la suivîmes donc et coupâmes à travers les pins. Il n'y avait pas de sentier et les fougères rendaient la progression ardue. Tania nous guidait, elle avait l'air de savoir où elle allait. Pourtant il était difficile de se repérer. On n’entendait plus les autres : notre groupe était isolé. Je n'avais aucun repère et je finis par me demander si nous n'étions pas paumés.

Je n'avais de cesse de me retourner, car je fermais la marche. Ou plutôt, la course ! Tania ne se fatiguait visiblement pas alors que mes poumons étaient en feu. Un coup d’œil rapide me permit d'évaluer que Jack était dans le même état que moi. Quant à Mike, sa respiration était si forte que je n'avais même pas besoin de le regarder.

Quand allait-on s’arrêter ?

Les brindilles, qui me cinglaient le visage, commençaient à me taper sur les nerfs. Pourtant je n'osais pas demander à Tania si cette course hors sentier était vraiment nécessaire. Qu'avait-elle en tête ? Son « raccourci » ressemblait plus à un détour. Mike demanda à Tania si on pouvait s’arrêter un moment. Mais la fille ne prit même pas la peine de lui répondre. Déçu, il se tut et nous continuâmes malgré nous.

Alors que je songeais à m’arrêter, Tania se stoppa net et se retourna brusquement vers nous. Elle ne souriait plus du tout. Lentement elle leva son bras et pointa son doigt vers la droite, un peu derrière elle. D'une voix étrange et sombre elle nous dit :

  • On va jouer à un petit jeu... Derrière moi se trouve l'arrivée. Je vais compter jusqu'à soixante et vous devrez courir le plus vite possible aux balises de fin. Si par malchance vous n’atteignez pas les balises, fiez-vous à votre instinct de survie. Elle gloussa d'un rire malfaisant.

Mike était devenu tout blanc et son nez était pincé. Dans d'autres circonstances cela m'aurait fait beaucoup rire, mais pas ce jour-là. À côté de moi, Jack restait calme et cherchait visiblement à savoir si c'était une blague. Il m'interrogea du regard, mais Tania répondit à ma place et conforta notre angoisse :

  • Courez tant que vous le pouvez ! Dès que j'aurais fini de compter vos vies seront en danger. Faites en sorte de ne pas tomber, car si vous trébuchez vous êtes à moi. Ne tentez pas de me résister, vous n'êtes pas à la hauteur. Ah et autre chose, jouez-la perso pour éviter de perdre votre temps. Assez parlé, nous sommes suffisamment éloignés des autres pour que personne ne vous entende crier à l'aide. Il n'y a pas de réseau et de toute façon, j'ai piqué vos portables.

Instinctivement je portai ma main à ma poche et constatai avec stupeur qu'elle était vide !

Je me remémorai alors notre rencontre, mais ne parvenais pas à comprendre comment elle avait fait. Elle me répondit avec amusement :

  • Ne cherche pas, je t'ai volé ton téléphone pendant que tu écoutais d'un air lointain le proviseur. Il ne m'a pas été difficile de leur prendre les leurs non plus.

Mike et John vérifiait également leur poche, en vain.

  • Ah ah, quelle belle équipe de vainqueurs... Malheureusement je ne crois pas que vous gagnerez cette course. "Il est temps de vous mettre sur la ligne de départ !", imita-t-elle le proviseur.

Elle riait maintenant, toute excitée comme une petite fille qui viendrait d'avoir ses nouvelles poupées. Seulement nous étions de chair et d'os et je n'avais pas envie de finir en morceaux. La peur me paralysait. Je devais réfléchir et vite.

Calme-toi, inspire profondément et analyse rationnellement la situation. Mais je n'arrivais pas à me concentrer, imaginant le danger partout. Je suffoquais, si bien que pendant un instant j'avais arrêté de respirer !

Mike commença à pleurer ce qui fit rire de plus belle Tania :

  • Mais je n'ai encore rien fait ! Ah ah, regardez-moi ce looser.

Jack, qui n'avait jusqu'alors pas bougé, la regarda droit dans les yeux et d'un air menaçant dit :

  • Ta blague n'est pas drôle ! Et tu es folle, on est trois contre toi. Alors je te conseille d’arrêter et de...

Mais il n'eut pas le temps de finir. Tania qui l'écoutait avec attention, s'était arrêtée de rire et le fixait. Sa main fouilla dans son chemisier et elle sortit un pistolet.

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