Les aveux de Charlie

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On se rhabille avant que je pose les yeux sur elle. Ses joues rosies et ses cheveux polaire en bataille reflètent une jeune femme heureuse. Oui j’en suis persuadée, ses lèvres charnues sont encore plus gonflées. Elle remet sa robe cache-cœur et dans un élan de tendresse je passe ma main au niveau de sa mâchoire, ses yeux olive se posent sur moi, brillants et souriants. Mon cœur se gonfle à mon tour d’un bonheur que je n’aurais jamais pensé retrouver. Elle est si belle, jeune aussi, que deviendra-t-elle si nous restions ensemble ? Elle ne poursuivrait pas ses études à Rome : la Villa Medicis ! Briser ses rêves et en être le coupable ? Mais que ferais-je sans elle ? Pourrais-je de nouveau vivre sans ce nouvel amour qui m’a fait tant revivre. Amour ? Est-ce cela ? Ou de la passion ? Je suis bien près d’elle, bien que l’affaire de Lauren me trotte dans la tête, j’aime passer du moment avec Charlie. Cette jeune prodige qui arrive à fermer le caquet à tellement de personnes. Je ris intérieurement. Impulsive, ambitieuse, fougueuse, imprévisible. Je l’embrasse et l’étreins de toutes mes forces.

— Tout à l’heure, une de tes étudiantes t’a clairement fait comprendre que ton avenir tenait entre ses mains. Je t’ai observé, tu n’as pas cillé et cela ne t’a procuré aucune émotion, aucune crainte, ni bégaiement, ni colère. Comment fais-tu pour ne pas faire attention à ce que l’on pense de toi ? me lance-t-elle, après notre étreinte.

Je prends un temps d’arrêt pour réfléchir à la question tout en me dirigeant vers le frigo pour nous servir deux grands verres d’eau.

— Je considère que personne ne doit valider ma vie. Mes choix ne dépendent de personne d’autres : on l’accepte ou pas. Quoique tu décides de faire, tu seras critiqué car les gens ne voient qu’à travers leurs expériences, leurs peurs et leurs perceptions qu’ils ont de la vie. Ils m’induiront en erreur car ça ne sera pas ma vie et mes envies. Il n’y a que moi qui sais ce qui est bon pour moi ou non. Je fais ce qu’il me semble juste, le reste ne m’apporte rien. Il ne me donne pas à manger, ne paye pas mon loyer. Il n’y a que l’avis des gens que j’aime qui compte.

— J’en fais partie ? demande-t-elle, des étoiles plein les yeux.

— Un prof n’a pas de leçons à recevoir de son étudiante.

Je ricane tandis qu’elle me tape sur l’épaule. Puis nos sourires restent sous-entendus, elle le sait, je le sais qu’elle en fait partie mais les mots, les affirmations ne font pas partie de notre relation. Nous devinons, nous analysons c’est tout. Enfin, jusqu’à ce qu’il ne soit plus possible de déduire par le non-verbal.

— Et toi, qu’est-ce qui ta tracasse lorsqu’on te juge ? demandé-je.

— J’ai peur de l’humiliation, que l’on m’insulte de pute, de folle, de menteuse, alors que… c’est faux, ajoute-t-elle, tout bas.

Je la sens hésiter à me parler d’un sujet mais j’attends patiemment, avec calme, en lui attrapant la main avec douceur. Elle soupire et je vois son visage blêmir.

— Quand ces trois mecs m’ont violé, que le jugement soit passé. J’ai été montré du doigt, je me pensais assez forte pour montrer un visage au viol. Mais les gens sont mauvais, cela a fait effet inverse. On dirait que les gens aiment faire du mal, aller à l’encontre de la vérité et s’amuser de l’atrocité. Pour eux, il est inconcevable que son petit ami viole, vu que je l’aimais, il était normal de coucher avec. Comme j’avais un peu bu, certains de leurs amis ont jugé bon de lancer une rumeur comme quoi je n’avais attendu que ça, que je faisais la sainte ni-touche et que je n’assumais pas mes fantasmes alors que mon ex ait crié ses excuses au tribunal, hein ! C’est une période horrible pour moi. Bastien, Iban m’ont relevé, m’ont appris à m’aimer, puis il y a eu toi….

Elle lève les yeux vers moi.

— Regarde ce que je t’autorise à me faire… est-ce normal ? ajoute-t-elle avant d’éclater en sanglots.

Je la prends dans mes bras et lui réponds.

— Si tu souhaites ne plus le faire, je ne le ferai plus. Mais oui, c’est normal. Le viol est une chose, avoir un rapport avec quelqu’un qui nous plaît en est une autre. Tu as voulu dépasser tes craintes et vivre pleinement ta sexualité en passant outre le traumatisme. Tu y prends du plaisir ?

— Oui

— Alors pourquoi te poses-tu cette question ? Pourquoi te faire souffrir davantage ? Les autres avaient tort : tu ne voulais pas de rapports avec ces trois hommes, mais avec Bastien et moi, oui. C’est à toi de choisir ton partenaire et ta sexualité. Et qu’en bien même, tu aimerais te faire prendre par deux hommes, cela ne regarde que toi, tes fantasmes. Cela ne veut pas dire que tu ne te respectes pas, qui a dicté qui l’on a le droit d’aimer ? Qui a dicté que l’on ait le droit d’avoir des relations pudiques, habillés en missionnaire uniquement et de désirer qu’une seule personne dans sa vie ? Personne. Ce sont, ce qu’on appelle, des croyances limitantes et c’est comme ça que l’on crée des frustrations et ainsi dont des personnes malheureuses dans leur sexualité, en couple etc… la peur du jugement des autres fait que l’on passe à côté de la vie et des plaisirs de la vie, et cela concerne d’autres domaines que la sexualité ou l’amour.

— Tu me crois alors ? Tu ne me prends pas pour folle.

— Non, je trouve que tu es une femme forte, avec beaucoup de courage, d’amour-propre et de combativité. Tu iras loin dans la vie, Charlie, je peux t’en assurer.

Elle sourit, essuie ses larmes et me caresse la joue en me murmurant :

— Près de toi, mon cœur et mon être sont en paix, ne me quitte jamais je t’en supplie.

Pour seule réponse, je l’embrasse et l’entoure de mes bras. Un long moment passe et je vois derrière elle, sa petite valise près de la salle de bains.

— Ca fait une semaine qu’elle est ici, il y a de la place dans l’armoire pour y poser quelques vêtements le sais-tu ?

D’une démarche de gazelle, elle se retourne et me sort :

— Quand tu me demanderas en mariage j’y poserai mes vêtements, professeur Taylor.

— Tu ne m’as demandé en mariage, que les miens ont trouvé refuge dans ta chambre.

— Oui, d’ailleurs tu as oublié ton appareil photo.

— Je le récupérerai quand tu m’inviteras demain chez toi.

Elle rit avant de regagner la salle de bains.

Mon appareil a servi durant quelques soirées à prendre Charlie en photo : au petit déjeuner, sous la douche, endormie, en éclats de rire et tant de ses expressions et situations que nous partageons. Iban en a pris quelques-unes de nous également. Une seule d’elle nue à peine recouvert du drap, restera précieusement avec moi. Moi aussi, mon cœur et mon être se retrouvent en paix près d’elle.

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