Chapitre XXI

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« Les Akshus sauvèrent, aux côtés des Salpes et des Bilberins, le monde des griffes des monstruosités qui l’arpentaient. Menés par le divin Arsha ils consentirent à subir l’assaut des créatures des ténèbres tandis que leurs alliés détruisirent la source du mal. Le prix de l’abnégation fut lourd et de tous les peuples survivants ce furent eux qui finirent les moins nombreux. Le sacrifice auquel ils avaient consenti dans la guerre se perpétua néanmoins dans la paix. Ils ne créèrent nulle nation et laissèrent aux autres peuples tant les richesses que les souffrances qui y sont liées. Les Akshus vécurent ainsi dans d’innombrables contrées qui jamais ne furent les leurs. Ils développèrent des gouts simples et troquèrent volontiers le luxe et l’opulence contre une saine frugalité.

Oh Akshus qui lit ces lignes, n’oublie jamais que ta race s’est offerte à l’humanité et que la convoitise et l’envie doivent déserter ton cœur car telle est la voix que tes ancêtres ont tracée pour toi ! »

Chroniques des ancêtres.

L’ambiance au palais consulaire était délétère. Militaires et généraux ne cessaient de se présenter et de repartir, non sans avoir auparavant déverser plus ou moins ouvertement leur rage tandis que les consuls, ministres et conseillers les vilipendaient en retour sans plus de retenue. Deux divisions avaient été perdues à l’est et civils et militaires s’en rejetaient mutuellement la faute dans des disputes dignes des plus grandes et vulgaires scènes de ménage.

La plus importante d’entre elles eut lieu lorsque le connétable Rakarth en personne se présenta et qu’il fut reçut par le premier consul Prario Talmin lui-même. L’importances de leur fonction eut laisser penser que leur discussion, qui plus est en public, aurait été moins brutale que celles des gens œuvrant sous leurs ordres ; il n’en fut rien :

« - Comment osez-vous vous présentez ici sans avoir été convoqué, qui plus après pareil désastre ? asséna le Bilberin.

- Plaît-il ? répondit le Rachnir. Si vous n’aviez pas empêché nos forces de régler ce problème il y a trois mois jamais pareil catastrophe ne serait arrivée ! Vous avez temporisé alors que l’ampleur du danger ne faisait que croitre et maintenant que nous devons affronter les conséquences de vos choix désastreux vous faites porter la responsabilité à autrui !

- Vos armées n’ont reçu nulle autorisation pour se mouvoir ainsi à l’est ! Si elles étaient demeurées disciplinées rien de tel ne serait arrivé ! Votre défaite met en péril notre position à l’ouest ! Que penserons nos ennemis si nous sommes ainsi défaits ! Par votre faute nous risquons de cesser d’être craint et donc respecté !

- Par ma faute ? La maladie se répand à travers tout l’Empire et des cas ont été recensés jusqu’à Balior ! Des créatures oubliées depuis près de deux siècles ressurgissent sans que rien ni personne ne les arrête ! Une horde d’êtres démoniaques a passé nos frontières ! L’armée n’a fait que son devoir en se pressant au-devant du danger mais vous, qu’avez-vous fait ? Rien ! Et vous accusez les fidèles serviteurs de l’Empire de ne pas en avoir fait autant ! Vous ne devez pas connaître la honte pour continuer à porter ainsi la toge d’or de premier consul !

- Je ne tolérerai pas que l’on m’insulte sous mon toit ! Puisque l’armée a cessé d’obéir à mes ordres et que, de toute évidence elle tient à faire endosser la responsabilité de ses déboires aux fidèles serviteurs de l’Empereur, j’en appelle à son jugement ! Que notre Saint souverain tranche ! »

A ces mots le connétable regarda l’homme qui lui faisait face et, ne faisant rien pour cacher ni son dégoût, ni son mépris, ni sa haine à son encontre ; il répondit simplement « Va ! » et s’en retourna avec son escorte.

Ni Falia, ni ses amis ni qui que ce soit au palais n’avait manqué cette altercation. Pour la première fois depuis son arrivée en ces lieux, elle réalisait pleinement l’importance des personnages qui y vivaient et leur immense influence sur la vie de millions de personnes. Un caprice dans un cabinet signifiait une hausse des impôts dans une ville. La bonne humeur d’un conseiller pouvait mener à la création d’une route et la mésentente entre un général et un consul à un désastre comme celui de la bande de Zala. Des milliers de soldats étaient morts et la nouvelle n’était parvenue à la capitale que grâce à la fuite de quelques cavaliers. Pareille défaite n’était pas survenue depuis presque un siècle et elle couvrait de honte chaque citoyen de l’Empire.

Balia, la meilleure amie de Falia au palais, avait notamment été chargé de soigner un des rescapés qui n’avait dû son salut qu’à un calepin qu’il portait sur lui et qui avait amorti un coup qui aurait dû lui être fatal. Il avait été très chanceux d’autant plus qu’il n’avait pas contracté le grismal. Ce n’était pas le cas de tous ses camarades. Quelle tristesse, survivre à pareil massacre pour se voir dépérir à cause de la maladie. Ce fut lorsque la guérisseuse appris à la Fitale que des contaminés séjournaient aux portes de la capitale qu’elle ressentie pour la première fois la peur de cette maladie dont elle avait déjà entendu parler mais qui lui semblait jusque-là si lointaine. Désormais des malades dormaient à quelque pas de là et la contamination n’était plus impossible ni même improbable.

Certes il se disait que les malheureux n’avaient pas passé les murs, qu’ils étaient retenus dans une grange isolée de tout mais qui sait ? Peut-être qu’un des gardes qui les avait contrôlés avait contracté le mal ? Peut-être qu’un animal passant par-là s’était chargé de le transmettre aux habitants de la cité ? Cette pensée jamais éteinte n’affectait pas que la prestidigitatrice mais semblait hanter l’esprit de chacun ici et seule la peur de passer pour un couard empêchait la panique de se répandre. Rares étaient ceux entrant dans le palais et encore plus rares étaient ceux qui en sortaient. Les portes de la cité elles-mêmes aveint été fermées et nul ne les franchissait plus. Deux fois ces dernières semaines des émeutes avaient éclaté dans la cité suite à de fausses alertes quant à la présence de contaminés.

Ce fut lors de ces évènements que Falia découvrit une autre façade de la capitale qu’elle ignorait : le racisme n’était pas éteint même au cœur de la plus grande cité du Saint Empire. Les Bilberins accusaient les Salpes de Madélion d’avoir fui l’est et d’avoir propagé la maladie alors que la plupart vivaient ici depuis plusieurs générations. Ces derniers rétorquaient que les Bilberins, en ayant refusé d’avoir envoyé l’armée, avaient provoqué ce chaos. La plupart n’avaient pourtant pas plus d’influence sur le premier consul qu’une pomme. Les Akshus étaient accusés de par leur pauvreté et leur mode de vie nomade de répandre la maladie alors que ceux de la capitale étaient aussi riches et implantés que les autres tandis que les Rachnirs subissaient les insultes de ceux qui les accusaient de couardise. Pas une race n’était épargnée par la suspicion des autres et il sembla qu’il n’avait fallu qu’une rumeur d’épidémie pour que tout l’édifice patiemment construit par l’Eglise de la salvation ne tremble sur ses fondations.

Les prêtres avaient beau prêcher l’entraide, la solidarité et l’union ; de moins en moins nombreux étaient ceux qui les écoutaient. Cependant, alors que sa condition de Fitale avait, pendant un temps, fait craindre à Falia de devenir le bouc émissaire idéal de cette crise, elle réalisa vite que le nombre extrêmement faible de ses représentants dans la capitale et plus encore au palais la protégeait : bien que tiraillés par leurs affects les plus primaires, il restait suffisamment de raison à la plupart des gens pour réaliser qu’un groupe aussi peu nombreux et influent ne pouvaient pas y être pour beaucoup dans le danger qui les guettait. Balia avait une autre interprétation :

« - Vous êtes trop peu nombreux pour pleinement satisfaire leur soif de courroux. Je pense que tu as trop de foi en la bonté de ces gens. Ce que tu vois là n’est qu’un début. Regarde comme ils s’entre accusent à mot couvert. La religion, censée cimenter notre pays, sert même de prétexte à notre division, chacun accusant l’autre de ne pas être assez pieux. Regarde comment chacun épie celui avec lequel il travaille. Regarde comment tous se méfient de ceux à côté desquels ils mangent. Pourtant il n’y a jusqu’ici aucun cas avéré dans notre cité. J’ai eu des lettres de médecins œuvrant dans des cités infectées. A Marbouk, Pachtin et Kilmo les Akshus ont été expulsés. A Malliard il y a eu des affrontements entre Salpes et Rachnirs tandis qu’à Toulto le prêtre local lui-même a brulé une dizaine de Ganashs accusées d’avoir, par leurs péchés, attiré le mal sur eux.

- Penses-tu que l’Eglise n’est pas allé assez loin ? Que son enracinement n’est pas encore assez profond ?

- Au contraire, je pense que c’est une erreur immense de vouloir forcer des peuples différents à vivre ensemble. « Les différences d’aujourd’hui sont les différents de demain » disait Marc de la Rochefonte, un auteur naturellement banni en ces lieux. Les Akshus le savent, eux qui n’ont jamais eu de pays et qui ont sans cesse été rejeté au moindre prétexte. Ton maître doit sans doute en être de plus en plus conscient. Tu n’es pas aveugle, tu vois comme il est dévisagé à chaque instant. Tu vois comme celui qui était auparavant adulé ne provoque désormais plus que méfiance et répulsion. Cependant ce n’est pas totalement absurde non plus. Comment imaginer qu’un peuple à moitié nomade n’y est pour rien dans la transmission d’une maladie ?

- Tu y crois sérieusement !? Tu penses qu’Anrash a participé à répandre le grismal !? hurla l’enfant.

- Naturellement non. Je pense simplement que d’autres de son peuple ont pu et l’ont sans doute fait, bien que sans même le réaliser. Toutefois il est ardu de savoir qui est responsable et qui ne l’est pas. Il est plus aisé de les haïr en groupe et de les rejeter en bloc. Le même raisonnement s’applique naturellement pour les Salpes qui ont fui leur pays. Le plus triste est que, bien qu’instinctive, cette répulsion n’est peut-être pas la pire des solutions, bien qu’elle ne soit probablement pas la meilleure.

- N’as-tu pas la foi ? Ne crois-tu pas au salut des âmes pour proférer pareilles paroles ?

- Bien sûr que j’ai la foi ! Mais est-ce lutter contre le salut de l’humanité que de dire qu’elle vivrait probablement mieux divisée qu’unie ? « Qui fait le bien durant sa vie le récupérera à l’heure de sa mort. » Peut-être que je me trompe, je l’espère, mais je pense que, si la crise continue à s’aggraver, l’Empire qu’on croyait puissant et uni se fissurera et s’effondrera comme un château de cartes. Jamais nous n’avons subi de grandes défaites. Je ne parle pas là d’une simple bataille mais bien d’une conjonction de facteurs négatifs. Comment notre nation, la plus jeune de toute, réagira-t-elle si les revers continuent à s’enchainer et que la maladie se mêle aux guerres et à la famine ? Pourquoi me dévisages-tu comme cela ? Penses-tu vraiment que si nos terres les plus fertiles sont ravagées par ces hordes venues de l’est et que les rares paysans restants succombent à la maladie nous aurons de quoi nourrir tout notre peuple ? A ton avis, selon quels critères seront distribués les vivres restants ? »

Falia était devenue blême. L’exposé de son amie était apocalyptique. Son réconfort provenait jusque-là du calme relatif des officiels du palais mais était-il possible qu’ils pensent tous la même chose ? Oeuvraient-ils pour le bien commun ou seulement pour qu’eux et leurs proches puissent survivre aux épreuves qui s’annonçaient ? Soudain chaque ministre, consul et notable se transforma en conspirateur prêt à sacrifier son pays sur l’autel de son intérêt et de sa survie.

Le pessimisme gagna la Fitale et ni ses amis, ni son maître dont elle voyait son visage de plus en plus rongé par la colère et la tristesse ne la réconfortait pleinement. Leurs représentations s’en ressentaient et le chant guilleret des oiseaux avait petit à petit laissé la place aux échos mélancoliques des baleines et aux hurlements des loups pleurant la mort de leur aimée.

L’atmosphère ne s’apaisa pas, au contraire, jusqu’au jour de l’arbitrage impériale. Consuls, ministres et notables préparaient leur argumentaire et n’avaient pas de mots trop durs pour les militaires tandis que ces derniers ne cessaient de parader et de se pavaner en bas du palais. Certains allaient même jusqu’à aiguiser leur sabre sur les marches de la pyramide. Les provocations de part et d’autre étaient telles que même le plus simple et naïf des habitants de la ville ne pouvait pas ignorer l’hostilité qui existait entre les institutions consulaires et militaires. Le matin de la confrontation Falia contempla les plus grands dignitaires se vêtir de leurs plus beaux atours et défiler devant elle. Ce fut donc avec une grande surprise qu’elle apperçut un valet s’approcher d’elle et non de l’un d’eux :

« - Vous êtes bien Falia, l’assistante d’Anrash ?

- En effet, répondit-elle interloquée.

- La maison impériale me charge de vous informer que vous êtes convoquées à l’arbitrage. »

Devant l’incrédulité de la jeune fille le valet renchérit :

« Il serait de bon ton de vous parer d’habits plus séants pour pareille occasion ! »

Aussitôt, le cœur battant la chamade, Falia monta dans sa chambre, enfila une des robes qu’elle utilisait pour ses représentations et descendit avant que le cortège n’ait fini de se rassembler. Elle attira à elle tous les regards mais nul ne lui fit la moindre remarque, les désirs impériaux faisant loi. Seul Anrash se précipita vers elle d’un air à la fois pressé et plein de sollicitude :

« - Falia, tu es bien chanceuse ! Te rends-tu comptes que tu vas sans doute assister à l’un des évènements les plus importants de notre temps ? N’en rate pas une miette ! Je compte sur toi pour tout me raconter à ton retour !

- Je veux bien mais pourquoi m’a-t-on convoqué ? Ai-je fait quelque chose ?

- J’ai ma petite idée là-dessus. Tu sais, la maison impériale n’est pas composée uniquement de Shilam…

- Vous pensez que la princesse…

- Je ne vois pas d’autre explication. Tu en auras vite le cœur net lorsque tu la verras ! Le palais impérial est désespérément vide et elle a dû voir dans cette confrontation une opportunité de faire venir ce qui se rapproche le plus d’une amie à ses yeux. Profites-en ! Si ce que je dis est vrai alors la proximité qui pourrait naître entre toi et Ashmalla pourrait valoir davantage que tout l’or que nous n’ammasserons jamais ! »

Falia sourit et, après s’être vu remis en place ses accoutrement par son maître, s’en alla avec le reste de la délégation.

Les trois dizaines de personnes qui s’avançaient avec elle vers la grande pyramide s’étaient toutes vêtues de leurs tenues les plus chères et ne manquaient pas d’attirer sur eux les regards de la foule, à la fois admiratifs et inquiets. Sur l’avenue de la foi le premier consul et son escorte, dont faisait d’ailleurs parti Granik, l’ami de Falia, croisèrent la douzaine de généraux accompagnant le connétable. Aux vêtements de soie et de velours des civils répondaient chez eux les armures, les capes et les médailles dont l’éclat surpassait presque celui des bijoux que portaient leurs rivaux du jour. Chacun se toisa avec un profond mépris et, sans s’adresser une seule parole, pénétra dans le palais impérial entouré par la foule de laquelle rien si ce n’est le chuchotement des rumeurs ne ressortait.

L’accueil fut glacial, comme on pouvait s’y attendre. Rares étaient les fois où l’Empereur était appelé à résoudre une querelle par son jugement et c’était généralement signe d’une mauvaise entente au plus haut niveau de l’état. Le chambellan escorta donc l’ensemble des personnes convoquées jusqu’à la salle du trône où les attendaient Shilam II, une dizaine d’éprouvés ainsi que deux grands prêtres, tous dénués de toute parure ou richesse superflue. Chacun s’agenouilla devant sa majesté et, comme le veut la coutume, jura de se soumettre sans réserve au jugement du Saint Souverain.

« En ce jour moi, Empereur Shilam II, Saint Souverain du Saint Empire, protecteur de la foi et guide du genre humain, promets de vous juger équitablement et de prendre une décision qui n’aura pour seul objectif que la préservation de l’intérêt supérieur de la nation et de l’humanité. Que chacun des partis s’exprime ! »

Le premier consul Prario s’avança alors et déclama :

« Vôtre Majesté ! Si je viens devant vous c’est pour plaider la cause de l’Empire ! En effet je crains que les vues et les actions des cercles dirigeants notre armée ne soient plus fiables. J’ai toutes les raisons de penser que la constitution même du corps des officiers, en particulier à son plus haut niveau, nous menace tous par sa constante insoumission et son orgueil ! Mes ministres ici présents ont scrupuleusement notifié chacune des insubordinations, manquements à leurs devoirs et refus d’obtempérer dont ces généraux se sont rendus coupables ces dernières décennies ! La patience, la dignité et une certaine tolérance mal placée à leur égard m’avaient jusqu’ici retenu de vous en faire part mais avec la défaite de la bande de Zala un tel comportement n’est plus défendable. Le seul tort que j’admettrai est d’avoir trop attendu avant d’en référer à votre Majesté et de n’avoir ainsi pas su empêcher le trépas de milliers de braves soldats de l’Empire ! »

Le connétable paraissait impassible mais Falia percevait qu’il utilisait une grande part de son énergie à contenir ses tremblements de rage. Lorsque le premier consul eut fini son exposé Rakarth s’avança à son tour :

« Sire ! L’armée que mes prédécesseurs et moi-même avons eu l’honneur de commander n’a jamais failli ! Il nous est arrivé de subir des revers mais jamais nous n’avons perdu une guerre ! Pourquoi ? Parce que la confiance qui nous liait à la couronne est toujours demeurée intacte ! Du moins jusqu’à ce que la famille Talmin n’obtienne le titre de premier consul et qu’elle en fasse une charge héréditaire. Cependant même cela s’avère trop peu pour eux désormais ! Leur administration n’a eu de cesse de nous diffamer et de nous affaiblir. Rappelez-vous qu’il y a dix ans ils nous ont envoyé guerroyer contre le royaume d’Amadre après avoir drastiquement réduit nos moyens ! Rappelez-vous comment, après notre triomphe d’autant plus glorieux, ils ont amputé notre victoire en signant une paix de compromis alors que nous aurions pu déferler sur ce royaume et l’annexer tout entier ! Enfin et surtout, rappelez-vous que jamais nous ne nous sommes plaints et que, malgré l’adversité qui s’exerçait sur nous et ce même depuis notre propre camp, nous n’avons jamais ni failli ni faiblit ! Sire, le premier consul parle d’insubordination, moi je parle de trahison lorsque ce dernier interdit à notre d’armée d’intervenir lorsque notre pays est envahi ! »

Des huées montèrent aussitôt en provenance du corps civil tandis que des insultes fusèrent en retour en provenance des militaires. Avant même que l’Empereur Shilam n’ait pu faire cesser ces altercations le premier consul s’en chargea et fit venir un valet de sa maison. Ce dernier apportait avec lui une pile de documents de laquelle n’émergeait que difficilement sa chevelure brune. Prario lui ordonna alors de lire ce qu’il y avait inscrit sur ces feuilles :

« Le Général Farcho, commandant de la septième division d’infanterie ; a été découvert en train de vénérer le faux dieu Granar au premier jour de cet été. Le Général Mandar, chef du deuxième corps, a, en dépit de compétences manifestes, écarté deux Salpes et un Bilberin d’une promotion au rang d’officier pour favoriser trois Rachnirs notoirement incapables lors de ce même été. Le Général Mirkoda, commandant de la deuxième armée, a énoncé pas moins de six discours prônant la supériorité des Rachnir sur les autres peuples au cours de l’année, discours qui n’ont d’ailleurs été contesté par aucun des officiers de sa race… »

Le premier consul leva alors la main et aussitôt le valet se tut.

« - Nous pourrions rester sur cette liste des heures durant sans jamais qu’elle ne se répète mais l’essentiel est dit : notre armée est gangrénée par la sédition et l’apostasie. Il nous semble fort probable que le culte des ancêtres que nous pensions avoir éradiqué ne prospère en fait au sein même du corps des officiers. L’orgueil des Rachnirs entretenu depuis des décennies par un népotisme racial entre en totale contradiction avec notre foi. La défaite que nous venons de subir n’est hélas que la première des terribles conséquences qui s’abattront sur nous si nous ne reprenons pas en main notre armée ! Sire, je vous en conjure, c’est en tant que père de la nation mais plus encore en tant que protecteur de l’Eglise que je vous implore d’écarter cette clique de la tête de nos forces !

- Menteurs ! Aboya un général à la droite du connétable.

- Oh, ne vous en faites pas, nous avons votre nom aussi glissa sèchement Prario.

- C’est de la calomnie votre majesté !

- Vraiment ? Et bien nous verrons cela. Nous avons une foule de témoins et de documents signés par vous-même prouvant nos allégations ! Restez quelques jours encore et vous verrez qui de nous trahit et qui sert sincèrement l’Empire !

- Il suffit ! hurla Shilam. J’en ai assez entendu pour aujourd’hui, nous continuerons cette entrevue demain. En attendant je refuse que ne se produise le moindre incident ! Je serai intraitable sur ce point ! Que chacun rentre chez soi ! »

A ces mots Falia jeta un regard au souverain qui ne la remarqua même pas. Elle espérait, sans doute bien naïvement, qu’il fasse une exception pour elle afin qu’elle puisse retrouver la princesse mais il n’en fut rien. Elle dû s’en aller comme les autres, sous le regard inquisiteur des éprouvés. Au moins se consolait-elle, se disant que la princesse qu’elle n’avait pas même pu voir aujourd’hui serait peut-être présente le lendemain. Concernant les délégations pas un mot ne fut échangé dans les couloirs puis dans les rues. Falia était persuadée que, sans cette ultime menace de l’Empereur, tout ce beau monde se serait égorgé sans remord une fois le pas de la porte franchit.

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