Chapitre 7
Loup et Imane chevauchaient en suivant le Néez vers Juncalas. La petite route serpentait sur les flancs des premiers contreforts des Pyrénées. Le soleil avait du mal à percer et les ombres guettaient la progression des deux investigateurs. Loup sentait un mauvais pressentiment l’envahir progressivement. Les bois poussaient de l’autre côté du torrent et accentuaient cette sensation d’étouffement. Ils parvinrent enfin au hameau où nichaient quelques maisons en pierres sèches, aux toits en ardoises. Un silence inquisiteur les accompagna quand ils traversèrent la seule rue pour s’arrêter à la fontaine et y remplir les gourdes pendant que les chevaux se désaltéraient. Quelques volets bougèrent alors qu’il n’y avait pas le moindre souffle de vent et Loup perçut des regards furtifs dans les encoignures des portes des étables. Il fit signe à Imane de remonter en selle : ils ne tireraient aucune information ici.
Il leur fallut deux heures pour parvenir à destination. Loup se perdit à deux reprises mais un groupe de bergers, bien armés, lui indiquèrent le chemin, ravis de constater que le comte de Bigorre mandait des chevaliers pour enquêter. Le guerrier ne voulait pas rejoindre le château, mais le lieu où la première disparition s’était produite. Les indications étaient assez bonnes pour déboucher dans une petite vallée blottie entre deux imposants versants de la montagne. Les chevaux refusèrent d’avancer dès qu’ils franchirent le dernier virage. Ils piaffaient et frappaient la rocaille de leurs sabots, apeurés. Loup pouvait sentir les muscles de Myrtille tressaillir entre ses jambes.
— Ils n’iront pas plus loin. Nous risquons de nous blesser et de les blesser pour rien. On va les laisser libres, ils rentreront tranquillement et seront menés au comte… Je vais écrire un mot…
Loup attrapa une sacoche qu’Imane venait de désangler pour y piocher de quoi rédiger des instructions pour celui qui trouverait les chevaux. Ils déguerpirent avec un soulagement manifeste. Loup et Imane passèrent leur sac au dos, vérifièrent les torches et les armes et cherchèrent un chemin praticable entre les bois touffus.
— Quand j’étais petit, mon père me menait souvent ici, mais cela a bien changé. Je ne comprends pas pourquoi le paysage a évolué ainsi en si peu de temps. Les arbres n’étaient pas aussi nombreux, et ils n’ont pas pu pousser aussi vite…
— Tes souvenirs d’enfant sont peut-être erronés… Ou alors, nous allons affronter le même monstre que celui qu’on m’avait chargée d’éliminer.
Loup fit une pause et ferma les yeux pour tenter de se rappeler les expéditions avec son paternel, à la recherche de la source ferrugineuse. Il s’arrêta et d’un geste sec ordonna à Imane de faire de même.
— Nous ne sommes pas du bon côté. J’arrivais par l’autre versant, plus bas. Ici, nous sommes au-dessus d’où vient sourdre la source. Il faut redoubler de prudence.
Imane acquiesça et sortit de son sac deux masques en cuir qui, une fois mis, leur recouvraient le nez et le bas du visage. Une poche au niveau de la bouche abritait un filtre créé par Imane afin de pouvoir respirer sans crainte les émanations les plus courantes. Ils avancèrent, courbés en deux, scrutant la moindre anfractuosité dans le sol.
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