Maintenant, retournons à nos moutons… enfin, à notre loup.

Le soleil tente de percer le feuillage vert des arbres aux larges troncs caramélisés. Sacha se cache derrière un sucrabec, arbre aux senteurs de miel et dont les bonbons ronds, de couleurs pastel, ornent chaque branche. De ses yeux de fouine, il observe une modeste cabane en bois de pin, au cœur d’une prairie où violettes et primevères décorent le sol tel de précieux bijoux. Au bout de quelques minutes, le loup a la satisfaction d’apercevoir un vieillard à la longue barbe blanche parée de petits oiseaux arc-en-ciel.

L’homme n’est autre que le célèbre Merlin, créateur et ancien roi du pays des merveilles. Aujourd’hui à la retraite, il est devenu le meilleur ami de la Bonne Fée. Il va justement boire le thé chez elle et porte sous le bras, un léger paquet contenant un foulard qu’il compte lui offrir.

Profitant de son absence, Sacha se faufile jusqu’à la cabane. Il tourne la poignée de la porte qui bien entendu est fermée. Le loup ne s’avoue pas vaincu. Il glisse une griffe dans la serrure, ce qui lui permet d’ouvrir et d’accéder à l’intérieur de la maison.

Merlin, confiant dans la nature humaine, n’a pas mis d’alarmes ou systèmes magiques faisant fuir les cambrioleurs. Sacha pénètre donc tranquillement dans toutes les salles. Sans salon, la cuisine fait office de pièce centrale. Tout en bois clair, éclairée par une petite baie vitrée, l’ensemble est déstructuré par un canapé en tissu. Une fenêtre de forme arrondie avec de jolis rideaux crème domine le dessus de l’évier. Il n’y a que le strict nécessaire, mais le tout forme un lieu accueillant et chaleureux. Un long couloir mène à une dernière pièce circulaire aux papiers peints fleuris et aux mobiliers bariolés. Un lit en baldaquin blanc trône au milieu, maître du sommeil. Une petite porte cachée donne sur la salle de bains, d’un bleu printanier.

Sacha fouille dans tous les meubles, vide les tiroirs, laissant un fouillis de vêtements et accessoires sur le sol. Au bout d’un quart d’heure de recherche, il n’a rien trouvé. En plus de l’agacement que cela lui procure, il s’inquiète du retour de Merlin. Ce dernier peut revenir n’importe quand et là ce serait terrible ! Si l’Enchanteur le surprend en plein cambriolage, il risque d’y avoir une confrontation ! Merlin, avec ses pouvoirs, peut le blesser ou bien Sacha le mutiler avec ses griffes ! Dans les deux cas, l’issue serait épouvantable. Le plus sage serait donc d’éviter cet éventuel conflit. Sacha secoue la tête, il veut couper court à ses sombres pensées et mener sa mission au mieux. Dans la chambre, il glisse une main sous le matelas du lit, jette un coup d’œil derrière les tableaux et miroirs… toujours rien. Dérouté, il arrête son regard sur la porte des commodités et y pénètre. Il se sent légèrement ridicule devant les toilettes en faïence blanche. Sacha a vu beaucoup de films policiers où les voyous cachent leur arme dans le couvercle du réservoir de la chasse d’eau. Il le soulève et retient un grognement de satisfaction lorsqu’il aperçoit, protégé dans un plastique, un livre à la couverture gondolée, et légèrement vieilli par les années. Il dérobe l’objet qu’il dissimule dans la plus grande poche de son veston rouge et laissant la maison de Merlin en désordre, quitte les lieux … comme un voleur !