Chapitre 32 - La peine de Circella
C’est bien la première fois que Circella éprouve du chagrin. La mort de sa mère remonte à trop loin pour qu’elle en soit encore touchée et elle n’aurait jamais pensé que le décès de sa sœur puisse lui faire autant de mal… pourtant c’est le cas. Son cœur aussi noir qu’un morceau de fusain semble battre dans une poche de froid glacial. Des larmes qu’elle ne sent pas coulent en continu le long de ses joues fardées.
— Mais je l’aimais ! constate la sorcière, surprise.
Dans le château des sœurs Sinistrel, il y a une pièce servant de caveau familial, où quelques membres du foyer sont enterrés, incinérés ou éparpillés. Là est la place de sa cadette, songe Circella. Hélas, il ne reste de la défunte qu’une mare écarlate et des bouts de vêtements.
— Sangar Rangar, incante la Magicienne.
Aussitôt, tout se mélange et l’ensemble se métamorphose en cendres qui s’élèvent dans les airs en tournoyant. Circella fait apparaître une urne en bois de santal où le tourbillon s’engouffre. Refermant l’objet, la sorcière se hâte vers le caveau afin d’y déposer la précieuse amphore. Une fois cette tâche accomplie, elle se trouve à nouveau seule avec ses sombres pensées.
Châtier Sacha, le voir souffrir, voilà ce qui l’aurait soulagée, mais Merlin l’a interdit, promettant de s’en occuper. Oh, l’ensorceleuse ne se fait pas d’illusions, jamais l’Enchanteur ne tuera la bête. Certes, il punira le loup, mais sans verser de sang… les gentils ne font jamais ça.
Circella a un reniflement de mépris. Elle-même ne touchera pas l’animal. L’unique personne qu’elle craint est Merlin et elle ne veut pas subir son courroux si jamais elle venait à lui désobéir. Pourtant il faut qu’elle fasse souffrir quelqu’un, c’est pour elle le seul moyen d’aller mieux. Oui, mais qui ? La perverse femme y réfléchit quelques minutes puis un désagréable rictus éclaire son visage. Elle a choisi sa victime.
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