Prologue
Vous connaissez l'asphyxie ? Celle qui vous oppresse, rend le passage de l'air impossible, fait se rétracter vos poumons dans un mouvement compulsif ? L'angoisse, la vraie, qui vous fait paniquer, vous entraîne au sol, seul à seul avec votre souffle erratique et vos peurs alors qu'autour de vous, les gens ont besoin que vous soyez valide, prêt à agir ?
Un pompier doit ressentir ça. Un militaire aussi, un policier peut-être.
Mais pourquoi moi ?
On scande mon nom, à travers la musique et les cris. La lumière des stroboscopes au plafond renvoie sur la piste de danse des flashs colorés qui, au-delà de me déchirer les rétines, rend sa localisation impossible. Les gens, la foule m'encerclent pour ne rien arranger à mon état second.
Je cherche l'air, ne le trouve pas, panique encore plus.
— J'arrive pas à bloquer l’hémorragie ! hurle quelqu'un sur ma droite.
La quoi ?
Quelqu'un marche sur ma main. Aucune douleur. Anesthésié, ma vie file entre mes doigts, à travers un écran de fumée et de larmes.
— Quelqu'un a appelé les urgences ?
Nouveaux cris.
Dehors, les sirènes de police, de plus en plus proches, de plus en plus stridentes. Nouveau coup de feu, hallucination ? Réalité ?
Mon visage s'enfouit d'instinct dans mes paumes : je tremble de façon inexpliquée, et surtout inarrêtable. De violents spasmes me secouent comme une poupée désarticulée. L'air me manque, encore.
Des mains se plaquent sur mes épaules, me secouent d'avant en arrière.
— Reste avec nous, hé !
Des larmes dévalent mes joues ; là aussi, comme la main écrasée, je ne sens rien, je ne contrôle plus rien, impuissant. Tout ce vide dans mes entrailles me terrifie et me déchire. Ne pas savoir, ne pas réussir à me relever pour aller vérifier, ne même pas pouvoir l'appeler, articuler son nom.
Je crois que je suis mort, en fin de compte.
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