Bon baiser de l'au-delà (part.3)

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 Lorsqu’elle sort enfin de sa salle d’eau, elle s’en revient en compagnie de l’agent jusque dans la pièce centrale où, stupéfaite, elle retrouve son père couché au sol sur le dos, un couteau de boucher à la main et le second policier penché sur lui pour chercher à le maîtriser.

 — Mais ça ne va pas ? Papa ! qu’est-ce que tu fais ? demande telle démunie.

 — Qu’est-ce que ces inconnues font chez moi ? Miko ? grogne le veille homme qui se relève avec peine et regarde fixement sa fille encore en larmes.

 — Papa, c’est Yuko… elle a disparu sur le chemin de l’école.

 — QUOI ? comment ça, elle a disparu ? ce n’est pas possible ! Elle n’a que trois ans ! s’exclame l’ancien qui retombe sur ses genoux et se met lui aussi à larmoyer.

 — Papa, elle a fêté ses six ans le mois dernier !

 Laissant ensuite son paternel à ses tumultes, la mère se volte et répond aux questions des agents de polices. Elle leurs donne des habilles, imprégné de son odeur qui aidera les chiens déjà sur place, ainsi qu’un petit tas de photos placées ci et là à titre décoratif, pour permettre l’identification de la fillette.

 Entre indignations, pleurs et investigation, s'en sont aller trois jours et deux nuits, durant lesquels la jeune femme n’a quitté ni son téléphone ni la petite fenêtre donnant sur l’escalier menant à l’entrée de l’immeuble. L’espoir toujours bien présent de revoir sa fille s’en revenir de l’école, toute joyeuse, son cartable ballottant sur ses épaules. L’un des plus beau souvenir qu’elle garde d’elle.

 Ce soir-ci, pourtant, tandis que les lumières des lampadaires éclairent la ruelle en dessous de chez elle comme chaque soir, un bruit sourd résonne dans l’appartement. Un éclat inquiétant qui émane de la chambre de son géniteur et contraint Miko à courir, pour voir ce qu’il s’y passe.

 Comme elle s’en doutait déjà, son père est tombé du lit. Or, elle s’avance pour l’aider à se recoucher, mais ce dernier, lorsqu’elle le retourne, la regarde en haletant et en se maintenant la poitrine. Une crise cardiaque ! En un instant, elle ouvre le tiroir de la table de chevet et y sort une boite de Bufferin, composé à base d’Aspirine. Elle en extrait deux pour les faire avaler à son père, consciente qu’ils pourront l’aider à tenir jusqu’à l’arrivée des secours. Trop tard ! Avant même de parvenir à lui enfiler les comprimés dans la bouche, le vieux lui dépose une main sur le bras et envoi :

 — Vit… pour nous.

 Arrive ainsi son dernier souffle, à l’instant où sa fille enroule ses bras par-dessus ses épaules pour le soulever dans une dernière tentative de le sauver. Le vieux sénile s’en est bel et bien allez, sans lui laisser le temps de comprendre le sens de son message. Sans lui avoir laisser le temps de lui dire adieu. Redoublant ainsi les larmes de cette mère déjà endeuillée. Une Miko qui, après quelques minutes, la tête de celui qui a veillé sur elle pendant des années posée sur ces jambes, appelle finalement les ambulanciers qui, une fois sur place, ne peuvent rien faire d’autre que la consoler.

 Trois jours plus tard, les yeux rougis par l’excédent de larmes versés, elle se rend à l’enterrement de son père, où toute la famille éloignée est déjà présente. Là aussi où, l’un après l’autre, ils ravivent le chagrin par inadvertance, lorsqu’ils lui demandent pourquoi sa fille ne se trouve pas avec elle.

 Le cœur déchiré et gavée par les condoléances qui n’en finissent plus, elle fausse compagnie aux invités et s’en retourne chez elle avant la fin du cérémonial. Puis, à peine arrivée et le regard détrempé, elle se met à boire un café, debout derrière son rideau blanc à regarder les escaliers empruntés chaque jour par Yuko. Au bout du compte, exténuée par le flagrant manque de sommeil ainsi que le contre-effet du café, elle part se coucher dans le lit de sa fille, serrant tout contre sa poitrine l’inséparable doudou de cette enfant qui fut sienne. Un vieux torchon rayé de bleu et de blanc, garni d’une petite boule centrale en forme de tête d’ours polaire.

 — Maman, réveille-toi !

 Tel est le murmure qui la sort brusquement de son sommeil. Face à elle, plongés dans les siens, les yeux noirs de Yuko qui lui souris.

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