Lundi 09 Mars 2020

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Je suis tirée en sursaut de mon sommeil par des cris. Lançant des regards affolés autour de moi, je me rends compte que le bus que j'ai pris pour Tontouta ne passe pas par mon arrêt : au lieu de rentrer dans le village de Païta, la P4 Tontouta continue sur la SAV Expresse en direction du village de Tontouta. L'homme qui crie se plaind depuis le fond du bus, soit un siège derrière et sur la gauche du mien, que la conductrice n'est pas passée par le village. Il descend lui aussi à Païta. Elle lui répond que son trajet est constitué ainsi, ce n'est pas la P4 Tontouta via Païta mais la P4 Tontouta Express! Je ne dis rien mais en moi la colère commence à monter et avec une envie de frapper cette incompétente de conductrice. Cette conne n'avait pas précisé le "Express" sur l'affichage de sa destination! Comment elle veut qu'on sache qu'elle ne passe pas par le village?!

L'individu ne décolère pas pour autant. Il lui ordonne de s'arrêter et de le laisser descendre du bus tant qu'on est encore prêt de l'entrée du village. Ce à quoi elle rétorque qu'elle n'a pas le droit de s'arrêter sur la SAV Express et de déposer un passager s'il n'y a pas d'arrêt de bus. Elle conseille de descendre au prochain arrêt.

[...] Ma colère manque de briser ma retenue silencieuse lorsque je vois que le "prochain arrêt", situé juste avant l'arrêt de bus de la Tamoa, est à plus d'une heure de marche de Païta. Mais je n'ai pas le choix. C'est descendre là et rejoindre Païta village à pied ou aller jusqu'au terminus et espérer qu'elle me laisse faire le retour avec elle même si je n'ai plus assez d'argent pour payer un autre voyage. Je me rassure en me rappellant que Tontouta fait partie de la commune de Païta, je suis née dans cette commune et y ai passé toute ma vie, j'y suis donc techniquement chez moi.

L'homme, que la colère rend sec envers n'importe qui, passe un coup de fil. Sans doute pour demander à un proche de venir le récupérer. Mais je ne peux pas me permettre le même luxe. Premièrement je n'ai plus de crédit dans mon portable même pour envoyer un SMS. Deuxièmement, si j'appelle ma mère au secours elle me lancera sa colère à la figure comme si la mienne ne valait rien et me rabacherai que j'aurais du l'écouter et ne pas aller à une sortie entre amis aussi loin de la maison. Après quoi, elle me fera injustement la moral et m'interdirait les prochaines sorties avec mes potes. Et être majeur et vaccinée ne comptera que pour du beurre. Sans compter ma fiertée héréditaire qui m'en empêche sans avoir avant tenté de me débrouiller par moi-même. C'est donc en ralant mentalement contre ma malchance et en injuriant cette idiote de conductrice que je me met en marche pour la maison. Je dois me dépêcher, sinon la nuit me cueillera avant que je n'atteigne le centre du village de Païta.

[...] Je ne remercie pas le ciel, mais plutôt ma débrouillardise et mon habitude de marcher rapidement sur de longues distances pour être arrivée encore de jour. J'ai même le temps de passer par le cimetière faire un coucou à mon grand-père maternel enterré là avant qu'il ne fasse nuit noir.

" Bonjour pépé. Ça va? Désolée, je passe un peu tard. Je te dérange peut-être alors que tu te mettais au lit. Haha. En fait, je passais par là quand j'ai décidé d'en profiter pour venir te voir. Depuis le temps que je pense à me recueillir sur ta tombe. Mais entre le travail, les travaux à la maisons et les études qui viennent de reprendre, je n'ai pas vraiment pu profiter de mes vacances de fin d'année."

Un silence s'installe. Je regarde autour de moi. Bien entendu à une telle heure de la soirée, alors que les derniers rayons du soleil éclairent faiblement encore les alentours laissant la nuit prendre lentement le dessus, il n'y a personne. Le cimetière est vide. Qui irait sur une tombe de nuit? Ça m'avait parus être une bonne idée au début, je n'aime pas parler à mon grand-père en publique. Mais maintenant, je prends conscience que si je me fais attaquer, mon sac et mon corps épuisé par cette longue marche ne me permettront pas de distancer l'éventuel agresseur. Si agression il y a.

" Tu sais, aujourd'hui j'ai marché de presque la Tamoa jusqu'ici. Comme une grande. Ce que je suis. Si maman l'apprend, elle sera folle. Mais si je ne dis rien elle ne s'énervera pas. De toute façon, s'il ne m'arrive rien en chemin je n'ai aucune raison de lui en parler. C'est pas comme si je racontais tout de mes malheurs à maman."

Ma voix tremblotte. J'ai encore le souffle court de cette marche érintante. Je vais pour continuer quand un bruissement attire mon attention sur ma droite. On aurait dis des pas. Je tourne la tête et pousse un crix de surprise et de peur mêlées. Là devant moi se tient un vieille homme squelettique vêtut de haillons. Je m'éloigne précipitamment de plusieurs pas. J'ai vraiment peur, il n'y a personne et nous sommes trop éloignés de la route pour qu'on entende mes crix. Je veux fuir mais je sais que ce serait inutil. La peur fait bondir mon coeur hors de sa cage.

" Toi."

L'homme pointe un doigt sale en ma direction. Seigneur, je vais mourir sans même avoir terminé la saison trois de Kuroko no Basket?!

" Demain... tu seras morte."

Il ne m'en faut pas plus pour que des ailes me poussent aux pieds et que mon corps disparaît avant que mon cerveau ne transmette le signal de fuite.

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