Confiance II

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Les flammes de torches éclairent le château plongé dans la nuit. Assis sur les marches d'un escalier, j'écoute Eren nous livrer ses impressions :

- Jusqu'à ce qu'ils me montrent de l'hostilité, je ne m'étais pas aperçu. . . à quel points nos coéquipers n'ont pas confiance en moi.

- Rien de plus normal, tu sais, lui dit le caporal-chef Livaï, adossé au mur sur notre gauche. C'est pour ça que je les ai choisis pour faire partie de mon escouade. Dans le bataillon d'exploration, on pense qu'on devient un éclaireur accompli quand on revient vivant de mission. On est toujours pris au dépourvu quand on est confronté à un titan. On a beau réfléchir, on manque toujours d'informations et il y a bien de choses qu'on ne comprend pas. Il faut donc toujours agir très vite et décider dans l'urgence en anticipant le pire, mais contrairement à ce que vous pourriez croire, ça ne veut pas dire qu'on a un coeur de pierre, n'allez pas imaginer qu'ils n'ont rien ressenti en pointant leurs lames vers toi, Eren, je suis certain que ça leur a fait quelque chose.

- Oui. J'ai montré de l'hostilité à leur égard en m'opposant à eux parce que la seule chose qui comptait pour moi à ce moment-là était de les empêcher de te tuer, Eren, mais j'ai bien vu. . . qu'ils t'en voulaient de les contraindre à réagir ainsi.

- Caporal-chef Livaï, nous interrompt une voix dans notre dos.

Nous tournons la tête pour découvrir Moblit dans les marches.

- Hmm Hmm ? fait Livaï pour le presser de dire ce qu'il a à dire.

- Le chef Hansi vous attend.

Eren et moi nous levons pour emboîter le pas aux deux hommes. Nous remontons les marches et entrons dans le réfectoire, où sont réunis Hansi et les subordonnés du caporal-chef. Ce dernier lâche :

- Eh ben. . . Il était temps. T'as des problèmes de transit ?

- Euh. . . non, pas du tout, répond la femme à lunettes, mais merci de t'inquiéter pour ma santé. J'ai dû apporter des explications aux supérieurs. Bref, peu importe, dit-elle en posant sur la table un mouchoir blanc, qu'elle déplie en poursuivant : Regardez ça, plutôt.

- Une cuillère à thé ? s'étonne mon frère.

- Exact. Eren, la main droite du titan que tu as fait apparaître tenait cette cuillère de cette manière : entre l'index et le pouce, exactement comme ça, explique-t-elle en montrant l'exemple. C'est très difficile de croire qu'i s'agit là d'une coïncidence, tu ne penses pas ? Et on ne constate aucune déformation dûe à la chaleur ou à la pression. As-tu une explication ?

- Euh. . . Je me souviens avoir voulu la ramasser et m'être transformé en titan juste après.

- Je vois. Voilà sans doute pourquoi tu n'as pas pu te transformer, quand tu étais dans le puits. Tuer des titans, bloquer un obus, soulever un rocher. . . Dans toutes ces situations, tu avais une bonne raison de te transformer. L'auto-mutilation ne doit certainement pas être le seul déclencheur de cette métamorphose. Il te faut sûrement également une raison ou un objectif précis à atteindre.

- Je dois reconnaître que cette dernière transformation ressemblait étrangement à celle quand j'ai intercepté l'obus. Seulement. . . Me transformer en titan pour ramasser une cuillère ? ! Je ne comprends pas, soupire-t-il.

- Un autre détail m'intrigue, avoué-je. Comme l'a si bien souligné Hansi, la cuillère n'a pas été abîmée par la pression ou la chaleur, alors qu'elle aurait logiquement dû l'être et à Trost, quand tu nous a pris dans tes bras au moment de te transformer, nous étions si proches de toi que j'ai craint que l'on soit blessés. . . voir même pire, par le souffle de ta transformation, mais nous étions totalement indemnes une fois le corps de ton titan formé. C'est comme si lorsque ton but en te transformant est de protéger une personne ou un objet se trouvant à proximité de toi, ta métamorphose s'arrange pour épargner ce quelqu'un ou cette chose. Je suis sûre que si ton but en te transformant n'est pas de me protéger ou que tu ignores ma présence à proximité, je serais blessée ou tuée par le souffle. Ceci dit, ne t'en fais pas, ajouté-je avec un sourire rassurant face à son inquiétude, je ne suis pas suffisamment stupide ou folle pour me mettre dans une telle situation.

Un long silence suit, que Gunther brise :

- Finalement, ce qui s'est passé était indépendant de ta volonté, tu n'as pas transgressé les ordres.

- Bien sûr que non !

Le brun pousse un soupir, puis les membres de l'escouade Livaï échangent un regard et se mordent tous la main les uns à la suite des autres, sous nos expressions stupéfaites.

- Mais arrêtez ! panique Eren. Qu'est-ce qui vous prend de faire ça ?

Seul le caporal-chef ne semble pas surpris, observant tout ce qui se déroule avec son habituel expression détachée.

- Ça fait super mal ! s'exclame Gunther.

- C'est particulier, faut être motivé, comprend Erd. Eren. . . Chapeau ! Je ne sais pas comment tu fais pour te mordre comme ça.

- Je crois bien qu'on a fait une erreur d'appréciation, Eren. Nous mordre était notre modeste dédommagement. Je comprends parfaitement que ça puisse vous paraître bizarre.

- Mais notre job consiste à te garder sous contrôle ! lui rappelle Auruo. Et pour ça, on a rempli notre mission ! Alors, ne la ramenez pas, gamins !

- Acceptez nos excuses, Eren, Éléonore, ajoute Petra d'une voix douce, mais nous avons vraiment eu peur, vous savez. Nous vous avons certainement déçus. . . continue-t-elle en baissant la tête. Normal, dit-elle en la relevant aussitôt. Nous avons mal réagi, mais quoiqu'il en soit, nous, on compte sur vous et on souhaite que vous continuez à compter sur nous ! Il faut que vous nous fassiez confiance. . . Croyez en nous !

- Eren ! s'impatiente le caporal-chef Livaï ! Qu'est-ce que tu attends ? ! Tu dois prendre une décision !

- Je continue d'avancer ! crie-t-il en fermant les yeux.

Je souris, heureuse qu'il ait pris la même décision que moi : la plus sûre pour lui, et qu'il croit tout autant que moi en nos nouveaux camarades, mais quand un autre soldat est violemment écrasé par le titan féminin, en hurlant d'agonie pendant que son sang gicle sur les troncs, je peux lire dans son regard remords et culpabilité.

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