Épisode 22 - Adorable petit Chat…
— Ok, alors fais comme chez toi. Ta chambre est par là… Désolé, y a pas de salle de bains attenante, par contre. Sinon, ben comme tu peux le voir, la cuisine et là, le salon… Y’a la télé si jamais tu veux mater un truc… Même si vu ta tête, je pari que la télé c’est pas ton kiff... Y’a pourtant plein de programmes pour les vieux croutons ronchons !
Lars fusilla le petit Chat en réponse. Le gamin ricana comme un idiot tandis que le vortex derrière eux se refermait dans un nuage de fumée violette. Il se débarrassa ensuite de sa veste qu’il jeta sur le canapé du salon, puis s’étira en soupirant de contentement.
Lars essaya de ne pas s’attarder sur la sensualité de son geste, mais plus facile à dire qu’à faire ! Le petit Chat ne portait plus que son pull et le vêtement était si près du corps qu’il ne laissait aucune place à l’imagination. Comme dans une scène au ralenti, Lars voyait parfaitement bien ses muscles rouler sous le tissu. Misère… c’était terriblement sexy !
Par les dieux, cet abominable blondinet était vraiment une tentation ambulante.
Lorsque Lars avait affirmé qu’il se “tiendrait tranquille” et attendrait patiemment que le petit Chat vienne à lui, ce n’était pas des paroles en l’air. Lars le pensait vraiment. Mais il commençait à se dire que ce ne serait pas aussi simple que ça. A croire que cet idiot faisait exprès de se donner en spectacle sous ses yeux !
Le magicien finit par détourner le regard au prix d’un terrible effort. Il valait mieux se concentrer sur autre chose. Tiens, la déco par exemple ! Malheureusement pour Lars, l’appartement dans lequel ils venaient de débarquer était aussi froid et impersonnel qu’une salle d’attente. Les murs étaient d’un blanc immaculé, le mobilier d’un gris fade, le coin cuisine brillait avec autant d’éclat qu’un sou neuf… Une large baie vitrée occupait tout un pan de mur et donnait sur une petite terrasse. L’endroit était désespérément moderne et monochrome. Aucune trace de photo, de plantes vertes ou autres babioles nulle part.
Le petit Chat vivait vraiment ici ?!
— Je vais prendre une douche, annonça ce dernier. Je crois qu’il y a encore du jus et de la bière dans le frigo si jamais t’as soif… Après on peut se commander à bouffer si tu veux.
Il s’engagea ensuite dans le couloir qui menait aux chambres et à la fameuse salle de bains. Lars le suivit en traînant des pieds. Cet endroit ne lui plaisait pas du tout. Il n’arrivait pas à croire que son adorable Chaton, si vivant et si lumineux, puisse habiter ici.
On se croirait dans un hôpital. Déprimant.
Le gamin s’engouffra dans la dernière porte au bout du couloir, laissant Lars en plein dilemne face aux deux portes restantes. Sa chambre était laquelle déjà ?! Ah et puis zut ! Il poussa le battant le plus proche d’un geste brusque et pénétra dans une pièce propre, lumineuse, bien rangée… mais qui n’en restait pas moins désagréable. La chambre était à l’image du reste des lieux : c'est-à-dire vide, impersonnelle. D’une tristesse infinie.
Bon, le petit Chat avait quand même dû personnaliser la sienne, ne serait-ce qu’un peu. Donc celle-ci devait forcément être celle des invités. Et Lars se permit d’ouvrir les placards à la recherche d’il ne savait quoi. Rien du tout à vrai dire, il était juste curieux.
C’est avec surprise qu’il constata que les étagères étaient toutes occupées. Des vêtements aux couleurs sombres occupaient entièrement les deux rangées du haut. Une intéressante collection de dagues et de poignards s’alignait sur l’étagère en dessous.
Mais Lars s’en désintéressa bien vite, attiré malgré lui par l’impressionnante pile de magazines qui s’entassait sur la dernière rangée. Des bandes-dessinées ? Sérieusement ! Mais quel gamin vraiment ! Surtout que les personnages se pavanaient dans des accoutrements des plus ridicules. Tiens, comme ce type incroyablement musclé qui portait une espèce de slip rouge par-dessus des collants bleus.
Lars secoua la tête, affligé par tant de mauvais goût.
Il écarta aussitôt le magazine (cette horreur vestimentaire était un véritable supplice pour ses pauvres yeux !) pour en saisir un autre dont le titre l'interpella immédiatement : “Doctor Strange”. Ce nom lui disait quelque chose… Ah oui, le petit Chat avait parlé de ce fameux Docteur machin truc lors de leur première rencontre. Il avait osé comparer Lars à cette espèce de… magicien du dimanche avec sa cape ridicule. N’importe quoi ! Bon. Au moins le personnage était nettement mieux habillé que l’autre et son slip. C’était déjà ça…
— Mais putain, l’Aristo ! Qu’est-ce tu fous dans ma chambre, merde ?!
La voix furieuse du petit Chat explosa soudain dans la pièce, faisant sursauter Lars malgré lui. Le gamin se précipita pour lui arracher la bande-dessinée des mains. Il la remit aussitôt à sa place avant de refermer le placard avec un claquement sec.
— C’est entièrement ta faute, répliqua Lars en croisant les bras sur son torse avec toute la mauvaise foi du monde. Tu n’avais pas précisé laquelle des deux exactement est ma chambre. Comment aurais-je pu deviner que la tienne serait si triste et imperso…
Le dernier mot mourut cependant dans sa gorge lorsqu’il réalisa soudain que l’autre était à moitié nu face à lui. Cet imbécile ne portait en tout et pour tout qu’un short qui descendait très bas sur sa taille et c’était vraiment… tout simplement… Par les cornes méritées de Loki ! La vision qui s’étalait sous les yeux éberlués de Lars était juste… enchanteresse !
Le petit Chat arborait un physique fin et musclé. Le corps d’un jeune fauve fait pour frapper, esquiver, réagir vite. Lars s’attarda sur ses épaules et ses bras taillés pour le combat, se posèrent sur son torse lisse aux muscles si bien dessinés. Des runes et des symboles celtiques s’entrecroisaient partout sur sa peau encore humide et légèrement bronzée, allant même jusqu’à s’enrouler autour de son cou.
Les yeux de Lars glissèrent ensuite le long de ses abdominaux en V… Par tous les Dieux d’Asgard ! Le petit Chat était tout simplement magnifique. Apollon et toutes les autres divinités de la beauté n’avaient plus qu’à aller se rhabiller. Lars avala difficilement sa salive, essaya de regarder ailleurs. Sans succès. Tout ce qu’il trouva à faire c’était se passer nerveusement la langue sur les lèvres en se reculant légèrement.
— L’Aristo, je te parle ! Dégage de ma chambre tout de suite !
— Oh ça va, cracha le magicien en arrivant enfin à lever la tête pour foudroyer son interlocuteur d’un regard noir. Pas la peine d’être aussi désagréable. Je m’en vais !
Partagé entre l’agacement, la colère et la frustration, il se détourna dans un geste plein de dédain. Mais son esprit traître eut quand même le temps de constater à quel point le petit Chat était encore plus sexy lorsqu’il était fâché… Misère !
Et Lars s’enfuit plus qu’il ne quitta cette maudite chambre. Encore un peu et il lui sautait dessus comme un adolescent en rut. Il se sentait ridicule et il n’aimait pas du tout ça.
Alors oui, ce n’était pas la première fois qu’il avait le plaisir d’admirer le corps d’un beau mâle, mais ce gamin… cet homme aux magnifiques émeraudes dégageait un charisme d’une sensualité folle qui le mettait apparemment dans tous ses états.
Lars en était sérieusement à se demander si le petit Chat ou quelqu’un d’autre (Ørjan par exemple !) ne lui aurait pas jeté un sort. Ce qui expliquerait cette soudaine… obsession qu’il semblait nourrir pour cet enquiquineur de première.
N’importe quoi, se morigéna-t-il aussitôt en claquant la porte de sa chambre avec plus de force que nécessaire. Tu es Lars Strøm ! C’est toi qui envoûte les gens et non l’inverse !
Lars prit une grande inspiration dans une vaine tentative de se reprendre, puis tira sur le col de sa chemise en grimaçant légèrement. Il faisait atrocement chaud dans cette maison. Il détestait ça ! Bon, il avait vraiment besoin d’une douche froide. En espérant que la salle de bains du petit Chat ne soit pas une boîte à sardines…
***
Lars ne consentit à revenir dans le salon qu’une heure plus tard. Une fois ses nerfs calmés et les neurones de son cerveau reconnectés. Sans parler de ses hormones en folie !
Il retrouva le petit Chat attablé devant une canette de bière et négligemment perché sur un tabouret de cuisine. Dieu merci, il avait enfilé un t-shirt ! Le nez plongé dans une des ces horreurs technologiques qu’ils appelaient ordinateur, il était très occupé à pianoter dessus avec application. Il affichait un air très concentré et Lars ne put s’empêcher de le trouver adorable. Il fut pris d’une soudaine envie de passer la main dans ses mèches folles…
Le magicien lâcha un grognement exaspéré. Adorable, adorable… mais pourquoi diable ce mot lui venait constamment en tête lorsqu’il pensait à cet abominable gamin ?! Ri-di-cule.
— Ah t’es enfin là, fit celui-ci en levant les yeux vers lui. Mais tu foutais quoi ?
— Rien qui t’intéresse, grinça Lars avec humeur. Et toi, qu’est-ce que tu fabriques devant cette… chose ?! Concentre-toi plutôt sur Ørjan !
— Qu’est-ce que tu crois que je fais là ?! répliqua aussitôt l’autre, le regard noir. Je suis en ligne avec un contact qui… m’enfin, le plus important c’est que si ce type a décidé de jouer à cache-cache parmi les “humains”, magie ou pas magie, quelqu’un du Réseau l’aura sûrement croisé… Donc je me renseigne… Ouais, mais en attendant des nouvelles, je propose qu’on se commande à bouffer. J’ai la dalle. Tu veux manger quoi ?
Tout en parlant, le gamin quitta son tabouret pour attraper son téléphone, une espèce de petit boitier tout plat et qui ne le quittait apparemment jamais. Lars haussa les épaules. Il n’avait pas vraiment faim. Noro les avait presque gavé de force avant de les laisser partir pour Portland… Portland ! Le magicien laissa échapper un petit soupir contrarié.
Orjan s’était donné le mot pour corser le jeu. Non seulement cet imbécile avait décidé de faire mumuse chez les humains (alors qu’il les méprisait cordialement !), mais il choisissait également cette vaste et horrible contrée qu’étaient les Etats-Unis pour jouer à cache-cache. Et voilà que Lars se retrouvait désormais perdu dans un des millionièmes Etats du pays. L’Oregon ou quelque chose comme ça.
Toute cette situation ne lui plaisait pas du tout. Mais alors pas du tout !
Il ne connaissait rien des règles de la communauté surnaturelle américaine. Tout ce qu’il savait c’était que les Dieux mineurs n’avaient aucune influence ici. Le territoire appartenait aux Neuf Princes des enfers de Dante et leurs sbires démoniaques. Lars était donc plus ou moins “hors de sa juridiction” et si Ørjan faisait vraiment alliance avec des démons…
Autant dire que la partie risquait d’être compliquée et éreintante. Mais bon, heureusement que l’autre Serpent ne brillait pas pour sa patience. Lars savait parfaitement que cet idiot finirait bien par sortir de son trou si jamais la partie venait à s’éterniser…
Bref ! Penser à tout cela le fatiguait déjà. Et Lars avait peut-être un peu faim finalement. Voyons voir ce que le petit Chat stockait dans les placards de sa si charmante cuisine.
— J’espère pour toi qu’il n’y a aucun cafard qui traîne ! J’ai horreur de ces bestioles, lança-t-il en fouinant et farfouillant partout sans la moindre gêne.
Ses recherches ne furent cependant pas très fructueuses. Il n’y avait que des sachets de pâtes et des boîtes de conserve. Cela ne l’étonnait même pas de la part de son hôte.
— Euh… attends. Tu veux cuisiner ? demanda celui-ci en le dévisageant avec surprise.
— Bien sûr. Il est hors de question pour moi de sortir et me mêler à tous ces gens ! Surtout qu’en cette période de Noël, l’ambiance est d’une mièvrerie ! C’est insupportable !
— Je pensais surtout à commander un truc à livrer, mais OK, pas de problème. Je crois qu’il y a encore du fromage dans le frigo. On peut se faire un gratin si tu veux.
— C’est mieux que rien. Bon, mettons-nous au travail. On n’a pas toute la nuit non plus !
Aussitôt dit, aussitôt fait. Lars et le petit Chat s’activèrent. Ce dernier sortit les casseroles et un plat à gratin que Lars lui arracha aussitôt des mains. Il s’empressa d’y vider un paquet de pâtes, puis agita une main et de l’eau se déversa dans le plat. Il ajouta ensuite une pincée de sel, versa la presque totalité du sachet de fromage râpé que lui tendit l’autre…
— Euh… tu fais quoi, exactement ? demanda ce dernier, la mine perplexe.
— Je cuisine, ça ne se voit pas ? grogna Lars, sans cesser de s’activer. Et maintenant, écarte-toi. On ne sait jamais, il se pourrait que ça ne marche pas et que le plat explose…
— T’es sérieux ?! La gazinière et le four sont juste là, j’te signale !
Blablabla, Lars n’avait pas du tout l’intention d’utiliser ces installations avec pleins de boutons partout et au fonctionnement incompréhensible. Il esquissa un geste d’impatience vers le petit Chat qui se recula légèrement, les yeux brillants d’une vive curiosité. Malgré une certaine appréhension, il avait clairement hâte de voir ce que Lars comptait faire.
Le magicien tendit les deux mains vers leur futur gratin. Son aura illumina ses iris et ses paumes tandis qu’un cercle de runes se traçait autour du récipient en porcelaine.
— Forsivere, murmura-t-il et une vive lumière lumière enveloppa leur potentiel dîner.
Des bulles et de la vapeur se formèrent peu à peu au-dessus du plat de pâtes crus. Et puis l’ensemble se mit à bouillonner doucement… puis de plus furieusement… avant de finalement exploser dans un bruit de succion des plus dégoûtants.
Lars eut juste le temps de créer un bouclier devant lui pour éviter de se prendre une giclée de pâtes et de fromage bouillis en plein visage. Mais zut alors ! Le sort de transmutation avait échoué ! Mais pourquoi ?! Il y arrivait pourtant très bien avec le vin !
Lars tapa du pied comme un enfant tandis que le petit Chat explosait de rire face à lui.
— OK, chef Strøm, on arrête le massacre culinaire pour aujourd’hui, s’esclaffa-t-il alors que Lars s’apprêtait à rouvrir un autre sachet de pâtes pour leur préparer ce fichu dîner. Tu sais quoi ? Je vais nous faire des sandwiches. J’ai pas envie que tu fasses péter tout l’appart.
Sur ces mots, il remit toutes les casseroles, paquets et autres boîtes de conserve dans les placards. Jeta la parodie de gratin, ou plutôt ce qui en restait, à la poubelle, puis mit le plat dans l’évier. Il fourra ensuite une éponge et un chiffon dans les mains de Lars. Toujours sans cesser de ricaner comme un idiot. Au moins il ne prenait pas ombrage à propos de l’état de sa cuisine. Il y avait de la bouillie de pâtes au fromage partout.
— Moi je vais faire la bouffe et toi tu vas nettoyer tout ce bazar, annonça-t-il entre deux fous rires. Allez hop, on se met au boulot ! On n’a pas toute la nuit non plus !
Son attitude aurait dû vexer Lars au plus haut point. Et pourtant le magicien se surprit à rire à son tour, tant la bonne humeur de son hôte était contagieuse. Il ne savait même pas pourquoi il avait essayé de cuisiner à l’aide de ses pouvoirs. Il n’avait jamais été doué en magie domestique, la preuve avec ce malheureux gratin raté. La prochaine fois, il se rabattrait sur la gazinière et le four que le petit Chat lui avait si gentiment suggéré d’utiliser.
Il se mirent au travail, sans cesser de pouffer comme des gamins. Lars vaquait distraitement à ses occupations, le regard rivé sur le petit Chat en train de préparer leurs sandwiches. Le bout de la langue coincé entre ses dents, le blond s’activait avec application, mais dans de grands gestes désordonnés.
Il fourra des tranches de jambon et de fromage dans le pain, ajouta une généreuse quantité de sauce, de la salade… Il posa le tout sur deux assiettes qu’il enfourna ensuite dans une des machines infernales qui équipaient sa cuisine, attendit quelques minutes, puis récupéra leur repas désormais bien chaud. Et Lars dut admettre que le résultat n’était pas mal du tout. Ça avait l’air bon. Très bon même.
— Et voilà, claironna fièrement le petit Chat en déposant une assiette devant lui. Tu veux boire quoi ? J’ai de la bière, du soda, du jus de fruits…
— Du jus de raisin ? demanda Lars en se décidant à attaquer son sandwich.
— Non, du jus de pomme…
— Bon, ce n’est pas grave. Je vais faire avec, merci.
Le petit Chat lui tendit une bouteille, Lars la déposa sur la table. Il relança son sort de transmutation pour changer le jus en cidre. Ce fut une réussite et c’est avec la plus grande satisfaction qu’il versa une bonne rasade d’alcool dans deux verres, sous l'œil ébahi de son hôte. Ce dernier ne fit cependant pas de commentaires, préférant mordre dans son sandwich avec entrain. Ses yeux ne lâchaient cependant pas Lars du regard.
— Alors comme ça tu connais Tiān Huā ? demanda-t-il soudain. Et donc… c’est ton mec ?
— Tiān et moi sommes amis depuis très longtemps… et non, ce n’est pas mon “mec” comme tu dis, mais oui, nous sommes amants, répondit Lars avec un petit rire. Mais dis-moi… en quoi la réponse à la dernière question est importante exactement ?
— Ben quoi ? Je suis curieux, c’est tout ! répliqua aussitôt l’autre, sur la défensive, mais Lars constata avec beaucoup de satisfaction que ses joues étaient un peu rouges. Et donc Tiān Huā… j’ai toujours su que ce type n'était pas humain ! C’est un sorcier comme toi ?
— Je ne suis pas un sorcier ! grinça Lars en agitant une main agacée. Et Tiān, non plus.
— Magicien et sorcier, c’est pas la même chose ? Mais ouais, bon, tu m’expliqueras tout ça plus tard ! Là, j’ai surtout envie que tu me parles de ton Serpent. J’ai besoin d’en savoir plus sur lui, de comprendre ce qui le motive… Pour pouvoir le traquer plus facilement.
— D’abord, ce n’est pas MON Serpent ! fit Lars avec irritation.
Le petit Chat haussa les épaules, attaquant à nouveau son sandwich. Il prit le temps de bien savourer avant d’avaler. Il but ensuite sa bière au goulot, puis revint à l’assaut.
— Alors ?
Lars ne répondit pas, distrait par cette fâcheuse tendance que le petit Chat avait de se passer la langue sur les lèvres après avoir bu quelque chose. A chaque fois, le spectacle était terriblement érotique. Il avait une soudaine et folle envie de l’embrasser…
Concentration Lars, concentration !
— Ørjan… est un demi-dieu, finit-il par lâcher de but en blanc, dans une tentative pitoyable de masquer son trouble. C’est le fils de Thor et d’une humaine.
— Attends… sérieux ? Thor ?! Tu veux dire… comme le type de Marvel ?
— Marquoi ?! Pourrais-tu arrêter avec… tes références puériles et incompréhensibles, s’il te plait ?! s’énerva Lars en se retenant pour ne pas lui flanquer une tape sur sa jolie tête. Je te parle de Thor, le dieu nordique de la foudre et du tonnerre !!
— Ouais, ça va. Je le sais ! Pas la peine de t’énerver, non plus, grogna l’autre en roulant exagérément des yeux. Donc… Thor et les Dieux existent pour de vrai ! C’est dingue !
Il but à nouveau sa bière d’une traite, comme pour digérer la nouvelle. Puis reporta son attention sur Lars, l’air vraiment très intéressé. Aucune peur ni incrédulité n’émanaient de lui. Il semblait même ravi à l’idée de traquer un demi-dieu psychopathe. Et Lars ne savait pas s’il devait s’inquiéter de l’inconscience totale du gamin. Puis il se souvint des paroles de Tiān : le petit Chat avait un don pour tuer… et il aimait clairement ça.
Mais avait-il seulement une chance contre Ørjan ? Aucune. Ce n’était qu’un humain. Un jeune et faible humain dont ce vil serpent ne ferait qu’une bouchée. Et Lars se demanda si c’était vraiment une bonne idée d’avoir entraîné le petit Chat dans cette galère. Sur le coup, il n’avait pas réfléchi, trop obnubilé par l’idée de retrouver l’autre. Mais maintenant qu’Ørjan voulait jouer, l’incursion du petit Chat le mettrait dans une colère noire…
— Je sais très bien à quoi tu penses, l’Aristo : que je ne suis qu’un pauvre et pathétique humain qui ne fait pas le poids face à un demi-dieu hyper badass. Tu ne devrais pas me sous-estimer. Quand je veux tuer quelqu’un, j’arrive toujours à mes fins.
Tout en parlant, le petit Chat continuait de fixer Lars dans un mélange d’agacement et de défi. Le magicien haussa un sourcil irrité en réponse. Mais quelle arrogance !
— Alors, que les choses soient claires, petit Chat : personne ne t’a demandé de tuer Ørjan. Ton travail consiste juste à trouver où il se cache. La suite, j’en fais mon affaire. Évites surtout de t’approcher de lui si tu ne veux pas mourir dans d’atroces souffrances. Ørjan est complètement fou. Mais surtout, il hait les humains. Je peux le comprendre sur ce dernier point : les hommes font preuve d’une ignoble cruauté envers les "bâtards" divins.
Lars prononça les derniers mots avec amertume. Parler de tout cela évoquait de très mauvais souvenirs. Il saisit son verre de cidre d’un geste nerveux et le but d’une traite.
— Mais… pourquoi ? fit le petit Chat en fronçant un sourcil étonné. Les enfants des dieux ne sont pas vénérés ? Je veux dire… du sang divin coule dans leurs veines. J’aurais pensé qu’ils seraient traités comme des rois ou je sais pas.
Lars ne put retenir un rire désabusé. Il y a avait des moments où le petit Chat faisait preuve d’une telle innocence et naïveté ! Traiter les "bâtards", les “monstres”... les “abominations” comme des rois ? L’idée était si drôle que Lars redoubla d’hilarité en secouant la tête.
— Petit Chat… les Dieux eux-mêmes ne veulent pas de nous, murmura-t-il d’une voix douce, mais vibrante de ressentiment. Pourquoi les humains nous placeraient sur un piédestal ? Ils nous méprisent et nous craignent. Ils nous persécutent dès notre plus jeune âge dans l’espoir d’étouffer l’immense pouvoir qui bouillonne dans nos veines et qui les terrorise. Crois-moi, être un demi-dieu est tout sauf une bénédiction.
— Tu veux dire que toi aussi…
— Pour ce qui est des choses à savoir sur Ørjan… reprit Lars d’une voix forte. Sache que c’est quelqu’un de sournois et impitoyable. La source de sa magie est le feu. Il a plus de 500 ans d’expérience dans le meurtre et la torture. Quoi aussi ? Ah oui : il me hait.
— Hum… pourquoi le dernier détail ne me surprend même pas ? grogna le petit Chat en terminant sa bière. J’en ai rencontré des chieurs, mais toi t’es à un level au dessus !
— Pardon ?! C’est moi que tu OSES traiter de “chieur” ? s’offusqua Lars, les yeux désormais plissés de colère. Non, mais je rêve ! Tu te crois charmant peut-être ?
— Plus que toi en tout cas.
Le petit Chat se leva en ricanant dans l’intention de se chercher à boire. Son attitude était tellement puéril, sans parler de sa provocation stupide. Et pourtant, Lars sentit la moutarde lui monter au nez, il ne put s’empêcher de réagir comme un parfait imbécile.
— Sale chat de gouttières ! Je ne suis pas un chieur ! s’écria-t-il en bondissant sur ses pieds, au moment où des lianes de lumière surgissaient du sol en direction du petit Chat.
Celui-ci parvint à les esquiver de justesse, mais les tentacules revinrent à l’assaut, en réponse aux ressentiments de Lars. Le magicien ne savait même pas pourquoi il agissait ainsi, mais il se sentait soudain à fleur de peau. La frustration peut-être ? Et pendant ce temps, le gamin s’amusait à rajouter de l’huile sur le feu. Mais quel crétin.
— Bien sûr que si ! Y a que les chieurs qui traitent les gens de chat de gouttières ! Et qui attaquent déloyalement juste parce qu’ils sont vexés ! rétorqua-t-il sans se démonter.
Tout en chouinant, il évitait les tentacules avec une habilité toujours aussi fascinante. Il se mouvait avec une rapidité et une grâce féline, magnifique. Nul doute qu’avec de l’entraînement, il ferait un chasseur de démons des plus redoutables…
Lars ne fut même pas surprit lorsque le gamin se retrouva derrière lui. Il n’opposa aucune résistance quand ses bras l’entourèrent et le maitrisèrent dans un étonnant mélange de douceur et de fermeté. Il pourrait très bien l’envoyer valser à l’autre bout de la pièce mais n’en fit rien. Sa colère s’était envolée à l’instant précis où le petit Chat l’avait plaqué contre son torse. Lorsqu’il sentit son nez s’enfouir dans ses cheveux. Et qu’il se pencha vers lui…
— Juste par curiosité, l’Aristo… chuchota le petit Chat tout contre son oreille. Tes yeux… Quand ils brillent comme ça… Tu peux lancer des lasers avec ? Tu sais comme Superman.
Superqui ?! Et le voilà qui continuait avec son charabia auquel Lars ne comprenait absolument rien ! Le magicien tourna la tête dans l’intention de le toiser avec dédain, mais il croisa ses iris verdoyants et se tut, subjugué malgré lui. Ils étaient si beaux…
Leurs regards s’accrochèrent. Les deux émeraudes brillaient d’une vive curiosité… mais il y avait aussi autre chose. Quoi exactement ? Désir ? Fascination ? Émerveillement ? Lars ne saurait le dire. Mais cela le captivait. Ses yeux posés sur lui ne le laissaient pas indifférent. Plonger dans cet océan de verdure l’excitait profondément. Une douce chaleur se répandit dans tout son corps, des milliers de frissons picotèrent agréablement sa peau.
Il mourrait d’envie de rapprocher son visage, l’embrasser… mais se retint. Il ne souhaitait pas l’effrayer et encore moins le faire fuir. Il voulait que le petit Chat vienne de lui-même.
— Mon adorable Chaton… ne put que murmurer Lars. Tu n’as même pas idée de tout ce que je sais faire… Mais surtout de tout ce que je pourrais faire… pour ton plaisir.
Tout en parlant, il ouvrit une paume devant lui dans un geste lent, presque langoureux. Une douce lumière irradia sa peau, s’éleva dans les airs, prit l’apparence de minuscules loups violets. Ces derniers se mirent à gambader joyeusement tout autour d’eux, laissant des trainées lumineuses dans leur sillage. Et pendant ce temps, les yeux de Lars restaient ancrés dans ceux du petit Chat. Il restèrent ainsi pendant de longues secondes.
— Montre-moi, lança soudain le blond.
Sa voix était rauque, comme s’il avait la gorge nouée. Ses iris dardaient Lars avec intensité. Il se passa de nouveau la langue sur les lèvres. Lentement. Sensuellement.
— Montre-moi tout ce que tu sais faire.
Hello ! Nouvel épisode (très long) pour ASG ! Avec Lars et Leo qui continuent de se tourner autour... me demande ce que Larsounet va montrer à notre Leochou dans le prochain épisode XD A très bientôt jespere lol
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