La chaleur de la canicule était étouffante. Chaque année, elle commençait un peu plus tôt et terrassait un peu plus l’Humanité. Humanité qui ne trouvait rien de mieux à faire que d’augmenter la clim, nourrissant ce cercle vicieux. Cette année, les fortes chaleurs avaient commencé en avril.

Chloé, à moitié avachie sur son canapé, tout juste vêtue d’une culotte et d’un soutien gorge, regardait les infos à la télé. Il n’y avait rien de vraiment nouveau : des incendies, des récoltes qui s’annonçaient de plus en plus maigres, l’augmentation du coût de la survie et des morts, toujours plus de morts… D’un geste machinal, Chloé essuya la couche de sueur qui couvrait son ventre et son buste. Elle jeta la serviette trempée et malodorante à côté d’elle, tandis qu’elle se penchait en avant pour se saisir de la télécommande, elle en avait assez d’entendre les mêmes mauvaises nouvelles et il lui fallait reprendre le télétravail. Pourtant, elle interrompit son geste lorsqu’elle vit les yeux de la présentatrice s’écarquiller en écoutant un message à son oreillette.

« Mesdames, messieurs. L’heure est grave. Nous venons tout juste d’apprendre que plusieurs centrales nucléaires viennent d’exploser à travers le monde ! La raison serait un refroidissement devenu inefficace. A l’heure où je vous parle, les gouvernements et autres organisations mondiales envisagent la mise en place du rationnement de l’électricité selon les besoins, voire d’heures nocturnes où l’électricité serait coupée dans certaines régions. »

Chloé était atterrée par la nouvelle, son cœur battait la chamade. Elle habitait en Normandie, où plusieurs centrales étaient actives. Enfin, derrière le babillage de la présentatrice, une carte de la France se dessina. Trois centrales clignotaient : Marcoule, Tricastin et Cruas. La tension dans sa nuque se relâcha quelque peu… Mais elle n’était pas dupe. Les conséquences se ressentiraient partout en France. Avant qu’elle n’ait le temps d’approfondir ses réflexions, une autre carte se superposa : les Etats Unis avec pas moins de dix-huit centrales clignotantes ! L’horreur se poursuivit avec la carte du Japon, de la Chine, de la Russie, de l’Inde, etc.

Elle n’eut pas le courage d’écouter la suite, elle éteignit son poste, plongeant son petit appartement dans l’obscurité. Un silence étouffant l’enveloppa. Dévastée, tremblant des pieds à la tête, elle prit la commande de son climatiseur et l’activa. L’Humanité allait connaître des jours… des semaines… des années sombres. Elle voulait profiter une dernière fois de la sensation de fraîcheur avant que le gouvernement ne la prive d’électricité.