Interrogatoire

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FBI Office, Las Vegas Nevada

Mardi 30 décembre 1980, 18h00

Marco di Verona avait appelé deux de ses agents dans son bureau. Quelques minutes plus tôt, il avait reçu un appel du manager du Flamingo l’avertissant de l’arrivée de Richard Bauer.

« Le Flamingo vient de m’appeler, l’homme que nous recherchons vient de s’enregistrer à l’hôtel.

— Ils ont accepté de collaborer avec nous ? demanda Bart Hammer, l’un des agents.

— Du temps de Bugsy Siegel[1] ça n’aurait pas été la même chose, c’est sûr, mais aujourd’hui le groupe Hilton se veut respectable. Ils ne peuvent pas trop jouer avec nous.

— Quelles sont les consignes ? demanda John Brown, le second agent.

— Nos collègues de Tulsa ont été saisis d’une affaire qui a commencé avec le vol de l’arme d’un shérif en Louisiane. Cette arme a servi au moins deux fois, en Oklahoma et ici dernièrement. Ce Richard Bauer peut nous mener à la fille qui a utilisé ce flingue et abattu Bob Frantelli chez lui il y a deux semaines. On ne sait pas si Bauer est son véritable nom, mais l’adresse qu’il a donnée à l’hôtel ne correspond pas. Il a probablement des liens avec le milieu, en particulier la prostitution. C’est lui qui a mis la fille et Frantelli en relation.

— Donc on essaie de déterminer sa véritable identité et de lui faire dire où on peut trouver la tireuse ?

— C’est cela.

— Vous croyez qu’il va nous dire ça gentiment ? Il va demander son avocat tout de suite et invoquer le cinquième amendement ! objecta Brown.

— C’est probable, en effet, pour le moment on n’a rien contre lui directement, on veut juste l’entendre comme témoin dans l’affaire Frantelli. On trouvera bien un moyen de récupérer ses empreintes et de les comparer aux fichiers fédéraux. Une fois qu’on saura qui il est réellement, on aura peut-être plus de moyens de pression. Je sais que c’est délicat, je compte sur vous pour l’aborder sans le braquer. »

Une heure plus tard, les deux agents se présentaient à la réception du Flamingo. Le réceptionniste les mit immédiatement en contact avec le directeur.

« Nous ne souhaitons pas créer de trouble dans votre établissement, mais nous avons besoin de parler avec Monsieur Bauer. Pouvez-vous vérifier s’il est dans sa chambre et nous y faire accompagner ? demanda Hammer.

— Oui, bien sûr, répondit le manager en prenant le téléphone. Oui, il est là, chambre 701, je vais appeler un groom pour vous conduire.

— Merci pour votre compréhension. »

Un jeune homme en uniforme se présenta très vite et les précéda jusqu’à l’ascenseur. La chambre 701 était située sur le vaste palier, juste en face de l’ascenseur.

« C’est une suite de luxe, précisa le garçon. Voulez-vous que je frappe ?

— Non merci, vous pouvez y aller, répondit Brown. »

Hammer remarqua un bouton de sonnette et le pressa.

« Je n’ai rien commandé, répondit une voix de l’intérieur, si c’est pour le lit, repassez plus tard.

— Ce n’est pas le room service, Monsieur Bauer, c’est le FBI. Nous voudrions avoir une conversation avec vous.

— À quel sujet ?

— Si vous ouvriez cette porte, ce serait plus facile, vous ne croyez pas ? Sauf si vous préférez que nous ayons cet échange chez nous. »

Les agents entendirent le bruit de la chaine de sureté avant que la porte s’ouvre. L’homme était en bras de chemise, les cheveux encore humide.

« Merci de nous accorder un peu de votre temps, Monsieur Bauer, c’est bien ça ? entama Hammer.

— Oui, qui voulez-vous que ce soit ? répondit l’autre d’un ton un peu agressif.

— Simple vérification, ne vous inquiétez pas, nous souhaitons juste quelques éclaircissements sur la soirée du 16 décembre.

— Que s’est-il passé de spécial le 16 décembre ?

— Vous avez bien diné avec Monsieur Frantelli au restaurant Pamplemousse ?

— Oui, en effet.

— Vous étiez accompagné d’une jeune femme, nous a-t-on dit. Vous confirmez ?

— Oui, c’est exact, j’avais fait sa connaissance la veille, ici même, et nous avons sympathisé. Sa compagnie était agréable et j’ai pensé que Bob, enfin monsieur Frantelli, l'apprécierait aussi. Je ne vois pas où est le problème.

— Que pouvez-vous nous dire sur cette jeune femme ? C’est une call-girl ou une escort ?

— Je n’en sais rien, on s’est rencontrés au bar, je lui ai offert un verre, on a bavardé un moment avant d’aller dans ma chambre.

— Vous l’avez payée pour ça ?

— Je dois vraiment répondre à cette question, je pourrais vous mettre dehors et appeler mon avocat.

— Ce n’est pas le sujet, en effet, intervint Brown. Ce qui nous intéresse surtout c’est ce qui s’est passé après ce diner.

— Nous sommes repartis tous les trois au domicile de Frantelli que j’ai quitté rapidement car je devais me lever tôt le lendemain. Le chauffeur m’a raccompagné ici. Il pourra vous le confirmer. La fille est restée chez Bob. Il y avait deux autres femmes quand nous sommes arrivés.

— Monsieur Bauer, savez-vous que Monsieur Frantelli est mort ? Qu’il a été abattu chez lui ce soir-là ? demanda Hammer en regardant son interlocuteur en face.

— Vraiment ? je l’ignorais, répondit Bauer sans sourciller. Et vous croyez que c’est cette Becky qui l’a tué ?

— C’est vous qui l’avez appelée Becky. Que savez-vous d’elle ?

— Rien, je vous dit qu’on a juste passé une nuit ensemble, elle est repartie le matin et ensuite je l’ai revue pour le diner.

— Elle vous a donné une adresse ? Si c’est une professionnelle, elle a du vous laisser ses coordonnées.

— Non, elle m’a juste dit qu’on pouvait lui laisser des messages dans un bar à Barstow. J’ai essayé de le faire, une fois, il y a quelques jours. Je voulais l’inviter pour la fin de l’année, mais elle n’a jamais rappelé.

— Une dernière chose, Monsieur Bauer, vous venez régulièrement à Las Vegas, n’est-ce pas ?

— Oui, je travaille pour une société qui fabrique des machines pour les casinos. Je viens régulièrement visiter mes clients.

— Votre employeur est généreux, le gouvernement est plus regardant sur les notes de frais.

— En fait, je suis l’un des associés de la compagnie.

— Oui, bien sûr, ça explique la chambre. Verriez-vous un inconvénient à nous donner une adresse où on pourra vous joindre en cas de nécessité ?

— Pas de problème, répondit Rick en sortant un étui en argent. Voici ma carte de visite professionnelle.

— Est-ce que ça vous ennuierait de noter votre adresse personnelle ? insista Brown en tendant un stylo laqué.

— Pas du tout, dit Bauer en prenant l’objet.

— Nous vous remercions de votre coopération monsieur Bauer. Juste une dernière chose, ce bar à Barstow, vous vous souviendriez du nom ?

— Le Roy’s Cafe, je crois. »

[1] Dirigeant de la Mafia qui a fait construire le Flamingo en 1946

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