La quête
Lorsqu'Emerson acheva de tomber – ou plutôt, lorsque sa chute fut stoppée par l'apparition soudaine d'un sol ferme sous ses pieds – elle rouvrit les yeux et constata, son bref étonnement aussitôt étouffé par une immense fierté, qu'elle avait atteint le redoutable quai que foulaient les rêveurs. Pourtant, le paysage qu'elle découvrait abrogeait ses attentes. L'horizon s'étendait au large sur une mer calme et un ciel clair. Allant et venant entre les vaguelettes ondulantes et le pâle gris des cieux, les embruns virevoltaient, charriant dans leur sillage un vent de nostalgie.
Tandis qu'elle arpentait l'embarcadère, un beau navire à trois mâts accosta. On déploya la passerelle et une foule de silhouettes effacées, comme des esquisses que l'on aurait gommées, descendirent en file du navire pour disparaître, évaporées, quelque part au bord du rêve. Un homme au faciès canin fermait la marche. Quand la dernière silhouette eut disparu, lui, demeura. D'un pas nonchalant, il se tourna vers Emerson et demanda :
— C'pour embarquer ?
Il rappelait vaguement à la jeune femme un cartoon de son enfance ; cela la rassura.
— Absolument, opina-t-elle.
— Hmm.
Comme pris d'un doute, le chien s'était mis à la scruter. Elle répondit à ses sourcils froncés par un regard interrogateur, sans parvenir à contenir son agacement. Au bout du compte, l'homme-chien lâcha un soupir grognon et lui fit signe de le suivre.
Ainsi, Emerson mit les voiles vers la Cité où elle espérait retrouver sa bien-aimée.
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