CHAPITRE 12 : Les résonances de la vérité
Le vent mordant de Brooklyn fouettait le visage d’Iris alors qu’elle ajustait la sangle de son sac sur son épaule. La nuit semblait plus froide que d’habitude, chaque rafale semblant porter un murmure d’avertissement. Devant elle, le café désigné par Jonathan était une tache de lumière rougeâtre au milieu des rues sombres. Son enseigne en néon clignotait irrégulièrement, projetant des reflets saccadés sur les trottoirs humides.
— Tu es sûre de toi ? demanda Serena, son ton plus grave que d’habitude.
Elle se tenait près de sa moto, une main sur le guidon, l’autre croisée sur sa poitrine. Ses cheveux roux dansaient légèrement dans le vent, mais ses yeux restaient fixés sur Iris avec une intensité protectrice. Elle portait une veste de cuir noire, mais ses poches n’étaient pas particulièrement remplies d’équipements. Il était évident qu’elle n’avait pas l’habitude de gérer des situations dangereuses.
Iris inspira profondément, serrant la lanière de son sac.
— Pas vraiment, admit-elle. Mais je n’ai pas le choix.
Serena posa une main hésitante sur son bras, comme si elle cherchait les mots justes.
— Si tu as le moindre doute, je suis là. Un regard, un mot, et je débarque… enfin, je ferai de mon mieux, ajouta-t-elle en baissant légèrement les yeux, comme si elle se demandait si elle serait réellement capable de l’aider.
Iris hocha la tête, touchée par la sincérité de Serena. Elle savait que, même sans expérience, sa présence à ses côtés était un soutien précieux.
— Merci, murmura-t-elle avant de se tourner vers le café.
Elle poussa la porte avec hésitation, le tintement de la cloche au-dessus résonnant étrangement fort dans l’air lourd. L’intérieur était petit, presque exigu, avec des murs tapissés de photos jaunies et des tables en bois usées par le temps. L’odeur du café brûlé flottait dans l’air, mêlée à celle du bois vieilli. Un jukebox au fond jouait une mélodie lointaine, presque imperceptible sous le brouhaha des conversations discrètes.
Iris balaya la pièce du regard. Les clients semblaient indifférents, plongés dans leurs mondes. Puis, elle l’aperçut : Jonathan Armitage. Assis au fond, à une table isolée, il semblait presque se fondre dans les ombres. Son visage marqué portait les stigmates du temps et des épreuves, et ses épaules légèrement voûtées trahissaient un poids qu’il portait depuis longtemps.
Elle s’approcha lentement. Jonathan leva les yeux vers elle et l’accueillit d’un geste simple de la main.
— Miss Wolfe, dit-il, sa voix rauque mais distincte. Vous êtes ponctuelle. C’est une bonne chose.
— Merci de me recevoir, répondit Iris en s’asseyant, posant son sac sur ses genoux. J’ai beaucoup de questions.
Jonathan esquissa un sourire triste, ses mains calleuses se croisant sur la table.
— Je n’en doute pas. Vous voulez savoir ce qu’est réellement l’Observatory, n’est-ce pas ?
Iris hocha la tête, l’estomac noué.
— Oui. Elliot Grayson semble tout contrôler, mais je ne comprends pas pourquoi il s’intéresse à moi. Pourquoi à d’autres artistes avant moi ? Vous faisiez partie de son monde. Qu’est-ce qui vous est arrivé ?
Jonathan poussa un long soupir, son regard se perdant dans la lumière tamisée.
— L’Observatory, murmura-t-il, n’est pas qu’un lieu d’art. C’est une machine. Grayson attire ceux qui ont cette étincelle, ce potentiel brut qu’il peut modeler. Il les pousse à se surpasser, à créer des œuvres extraordinaires. Mais tout cela a un prix.
Iris sentit son cœur se serrer, une tension sourde montant en elle.
— Quel genre de prix ? demanda-t-elle, presque en chuchotant.
Jonathan baissa les yeux, sa voix se brisant légèrement.
— Il prend tout. Pas seulement leurs œuvres. Leur identité, leur histoire, leur vie. Il les rend dépendants de lui : de ses contacts, de son argent, de son influence. Et s’ils essaient de partir, il trouve un moyen de les briser. Moi… j’ai essayé de fuir. Et il a tout détruit. Ma carrière, ma réputation… tout ce que j’avais construit.
Il marqua une pause, son regard hanté fixant la table. Iris sentit un frisson glacé parcourir son échine. Elle chercha à comprendre, à assembler les pièces de ce puzzle terrifiant.
— Pourquoi me dire tout ça ? demanda-t-elle, sa voix tremblante.
Jonathan releva les yeux, une lueur de détermination dans son regard.
— Parce que je vois ce qu’il essaie de faire avec vous. Vous êtes différente, Miss Wolfe. Il veut plus que vos œuvres. Il veut votre esprit. Et si vous ne faites pas attention, il prendra tout.
Iris serra les poings sous la table, tentant de contenir la peur et la colère qui montaient en elle.
— Alors, que dois-je faire ? Comment puis-je me protéger ?
Jonathan se pencha légèrement, sa voix baissant d’un ton.
— Trouvez ses failles. Grayson est puissant, mais il n’est pas invincible. L’Observatory est la clé. Ce lieu est au centre de tout ce qu’il cache. Si vous pouvez découvrir ce qu’il y dissimule, vous aurez une chance de l’arrêter.
Avant qu’Iris ne puisse répondre, un mouvement à l’entrée du café attira son attention. Une silhouette se détachait dans l’ombre. Elle ne pouvait pas distinguer le visage, mais quelque chose dans la posture lui sembla menaçant. Jonathan suivit son regard et se redressa brusquement.
— Vous devez partir, dit-il précipitamment. Maintenant.
— Mais… je dois en savoir plus ! protesta Iris.
— Vous en savez assez pour commencer, répliqua Jonathan, sa voix basse mais ferme. Si vous restez, ils vous trouveront. Allez-y. Soyez prudente.
Il se leva et disparut dans une porte dérobée avant qu’Iris ne puisse ajouter un mot. La silhouette près de l’entrée avança légèrement, et Iris sentit son sang se glacer. Elle attrapa son sac et sortit rapidement par une autre porte.
Serena était déjà là, près de sa moto, alertée par l’agitation d’Iris.
— Qu’est-ce qui se passe ? demanda-t-elle, ses yeux scrutant la rue.
— On doit partir, maintenant, répondit Iris en grimpant derrière elle.
La moto rugit et s’élança dans la nuit froide, les rues de Brooklyn défilant dans un flou d’ombres et de lumières. Iris serra les bras autour de Serena, son esprit en ébullition. Elle avait franchi une ligne. Jonathan lui avait donné des réponses, mais elles ne faisaient que soulever de nouvelles questions.
Elle ferma les yeux un instant, sentant le vent froid sur son visage, et murmura à elle-même :
— Je découvrirai ce qu’il cache. Peu importe le prix.
La moto de Serena rugissait dans la nuit, avalant les rues de Brooklyn à une vitesse vertigineuse. Iris, blottie contre elle, jetait des regards frénétiques par-dessus son épaule. Elle ne pouvait pas ignorer la sensation oppressante d’être suivie. Une voiture noire, discrète mais constante, semblait les suivre à une distance calculée, ses phares s’éteignant sporadiquement dans les intersections.
— Serena, murmura Iris, la voix tremblante. Je crois qu’on est suivies.
— Je sais, répondit Serena d’un ton sec, ses mains fermes sur les poignées de la moto. Tiens-toi bien.
Elle accéléra brusquement, forçant la moto à prendre un virage serré qui projeta Iris contre son dos. Les bâtiments de Brooklyn défilèrent dans un flou de briques et de lumière, les bruits de la ville engloutis par le vrombissement du moteur. Mais la voiture noire restait là, tenace.
Serena bifurqua dans une ruelle étroite, où les murs rapprochés amplifiaient le grondement de leur fuite. La lumière des phares s’atténua un instant derrière elles, mais pas pour longtemps. La voiture réapparut au bout de la ruelle, accélérant pour réduire la distance.
— Ils sont sérieux, souffla Serena entre ses dents. Accroche-toi, Wolfe.
Iris resserra sa prise, son esprit cherchant désespérément un plan, une échappatoire. La moto bondit sur une bosse, atterrissant lourdement alors qu’elles s’engouffraient dans une rue plus large et animée. Les lumières des enseignes et les silhouettes des piétons formaient un chaos visuel, mais Serena semblait imperturbable, zigzaguant entre les obstacles avec une précision effrayante.
— Où est-ce qu’on va ? cria Iris par-dessus le bruit du vent.
— Loin d’ici, répondit Serena. Mais on doit les semer d’abord.
La voiture noire les suivait toujours, gagnant du terrain dans les avenues plus larges. Serena pivota brusquement dans une rue adjacente, dérapant légèrement mais maintenant son équilibre. Elle lança un regard rapide à un miroir latéral, ses yeux plissés d’évaluation.
— On va devoir les coincer, Wolfe. Prépare-toi à courir si je te le dis.
— Quoi ? Non, pas question ! protesta Iris.
— Pas de discussion ! Si ça tourne mal, tu cours et tu ne te retournes pas.
Serena accéléra à nouveau, contournant un parc avant de ralentir soudainement à un croisement. Elle balaya rapidement les alentours du regard, repérant un entrepôt abandonné avec une porte entrouverte. Elle vira brusquement et s’y engouffra, éteignant les phares de la moto au dernier moment.
L’intérieur était plongé dans une obscurité presque totale, seulement éclairée par quelques fuites de lumière des réverbères extérieurs. Serena coupa le moteur et fit signe à Iris de descendre.
— Reste silencieuse, murmura-t-elle, ses yeux fixant la porte.
La voiture noire arriva quelques secondes plus tard, s’arrêtant devant l’entrepôt. Les phares illuminèrent brièvement l’intérieur, mais Serena avait déjà entraîné Iris derrière une pile de caisses poussiéreuses. Des portes claquèrent, et deux silhouettes descendirent de la voiture, avançant prudemment.
— Ils sont armés, chuchota Serena, sa voix trahissant une inquiétude évidente. Elle jeta un regard autour d’elle, cherchant une idée ou un objet qui pourrait leur servir.
Iris sentit son cœur s’emballer. Elle ne savait pas si c’était la peur ou l’adrénaline, mais son esprit semblait étrangement clair. Elle attrapa instinctivement son appareil photo dans son sac, vérifiant qu’il était prêt. Ce n’était pas une arme, mais c’était tout ce qu’elle avait.
— Qu’est-ce que tu fais ? souffla Serena en la voyant ajuster l’objectif.
— Des preuves, répondit Iris, son ton ferme malgré ses mains tremblantes. S’ils travaillent pour Elliot, on doit savoir qui ils sont.
Serena hocha la tête, cherchant à masquer son propre stress face à la situation. Elle se redressa légèrement pour observer les silhouettes, qui se rapprochaient lentement, leurs pas résonnant sur le sol en béton.
— Fouillez l’entrepôt, entendirent-elles l’un des hommes dire d’une voix basse mais autoritaire. Ils doivent être ici.
Serena saisit doucement le poignet d’Iris, l’entraînant vers une autre pile de caisses. Elles avancèrent lentement, leurs mouvements calculés pour éviter de faire le moindre bruit. À chaque pas, Iris sentait l’adrénaline monter en elle, chaque son devenant plus aigu, chaque ombre plus menaçante.
L’un des hommes s’approcha dangereusement, son faisceau de lampe torche balayant la zone où elles se cachaient. Serena se tendit, prête à agir, mais le faisceau passa finalement au-dessus de leurs têtes sans s’arrêter.
— Rien ici, dit l’homme, mais sa voix trahissait une frustration croissante.
L’autre répondit quelque chose qu’Iris n’entendit pas, mais le bruit des pas s’éloigna lentement. Serena fit un signe hésitant à Iris, son regard scrutant la porte latérale comme si elle évaluait la meilleure manière de fuir.
Elles sortirent silencieusement dans une ruelle adjacente, le froid de la nuit les frappant comme une gifle. Serena démarra rapidement la moto, et Iris grimpa derrière elle. Elles s’éloignèrent en silence, le bruit du moteur semblant cette fois une protection plutôt qu’un signal d’alarme.
Quand elles furent enfin loin, Serena arrêta la moto dans une impasse tranquille. Elle se tourna vers Iris, essuyant la sueur qui perlait sur son front malgré le froid.
— Wolfe, je ne sais pas si tu es folle ou courageuse, mais ce que tu viens de faire était risqué.
Iris sortit son appareil photo et vérifia les clichés qu’elle avait pris. Les visages des hommes étaient flous mais reconnaissables. Elle leva les yeux vers Serena, une lueur de détermination dans le regard.
— Ces risques, je vais devoir les prendre. Si Elliot est derrière tout ça, je dois savoir pourquoi. Et toi, tu es prête à continuer ?
Serena soupira, un sourire fatigué se dessinant sur ses lèvres.
— Toujours.
Iris hocha la tête. La nuit était loin d’être terminée, mais pour la première fois, elle avait l’impression de tenir un fil dans cet enchevêtrement de mystères. Le combat venait de commencer.
La moto s’arrêta brusquement devant l’entrée du loft, le moteur vrombissant une dernière fois avant que Serena ne le coupe. Iris descendit rapidement, jetant un coup d’œil nerveux dans la rue déserte. Chaque ombre semblait plus profonde, chaque recoin plus menaçant après ce qu’elles venaient de vivre.
Serena attrapa son sac et ouvrit la porte d’entrée, l’entraînant à l’intérieur sans un mot. Elle verrouilla derrière elles avec des gestes rapides, puis tira les rideaux des fenêtres, ne laissant aucun espace visible. L’atmosphère, tendue mais étrangement rassurante, semblait les envelopper.
— Tu es sûre qu’ils ne nous ont pas suivies ? demanda Iris, sa voix légèrement tremblante.
Serena se retourna, son regard perçant.
— Aussi sûre qu’on peut l’être dans ce genre de situation, répondit-elle en retirant sa veste. Mais on reste vigilantes. Je ne prends aucun risque.
Iris posa son sac sur la table et sortit immédiatement son appareil photo. Elle connecta la carte mémoire à son ordinateur portable et fit défiler les images. Les photos prises dans l’entrepôt étaient sombres et un peu floues, mais les visages des deux hommes étaient visibles. Elle agrandit l’une des images, essayant de discerner davantage de détails.
— Tu penses que ce sont des hommes de Grayson ? demanda Serena en se penchant par-dessus son épaule.
— Probablement, répondit Iris, son regard rivé sur l’écran. Mais je ne comprends pas pourquoi ils auraient suivi Jonathan ou moi. Qu’est-ce qu’ils essaient de protéger ?
Serena croisa les bras, réfléchissant.
— Peut-être qu’ils ne protégeaient pas quelque chose. Peut-être qu’ils cherchaient à te faire peur. Te rappeler qu’ils te surveillent.
Cette idée fit frissonner Iris. Elle détourna les yeux de l’écran, son esprit retournant aux paroles de Jonathan dans le café.
— Il m’a dit qu’Elliot voulait plus que mes œuvres. Qu’il voulait mon esprit, mon essence, murmura-t-elle. Comment quelqu’un peut-il vouloir ça ? Ce n’est pas seulement de la manipulation. C’est… malsain.
Serena posa une main sur son épaule, un geste rassurant mais ferme.
— Écoute-moi bien, Wolfe. Ce type est dangereux. Ce que Jonathan a dit confirme ce qu’on soupçonnait déjà. Grayson ne s’arrêtera pas tant qu’il n’aura pas ce qu’il veut. Mais ça ne veut pas dire qu’il est invincible.
— Jonathan a mentionné des failles, répondit Iris en relevant les yeux. Quelque chose qu’il cache à l’Observatory. Mais il n’a pas eu le temps de me dire quoi. C’est là que tout se joue, Serena. Je dois découvrir ce qu’il cache.
Serena fronça les sourcils, son expression devenant plus grave.
— C’est risqué, Wolfe. Si Grayson est prêt à envoyer des hommes pour te surveiller, imagine ce qu’il fera si tu fouilles dans ses affaires.
Iris serra les poings, une détermination brûlant dans ses yeux.
— Alors je serai prête. Je ne peux pas laisser ça continuer, Serena. Je dois savoir.
Un silence s’installa entre elles. Serena la fixa longuement, comme si elle cherchait à évaluer la force de cette détermination. Finalement, elle soupira et hocha la tête.
— Très bien, dit-elle. Mais on fait ça ensemble. Pas question que je te laisse y aller seule.
Iris sentit une vague de soulagement mêlée de gratitude. Elle hocha la tête, un mince sourire se formant sur ses lèvres.
— Merci.
Serena se détourna, ouvrant un tiroir de la cuisine où elle rangeait divers objets utiles. Elle en sortit un plan détaillé de Manhattan et le posa sur la table.
— On commence par ça, dit-elle en désignant un point au centre du plan. L’Observatory. Tu veux savoir ce qu’il cache ? Alors on va devoir trouver un moyen d’y entrer sans attirer l’attention.
Iris se pencha sur le plan, son esprit déjà en ébullition.
— Et si on cherchait des accès secondaires ? Une livraison, un événement, quelque chose qui pourrait nous donner une ouverture.
Serena esquissa un sourire, bien qu'une ombre d'incertitude passe dans son regard face aux risques à venir.
— Maintenant, tu commences à penser comme une stratège.
Alors qu’elles discutaient des détails, le téléphone d’Iris vibra sur la table, brisant le silence concentré. Elle attrapa l’appareil, un numéro inconnu s’affichant à l’écran. Elle échangea un regard avec Serena avant de répondre.
— Allô ?
Une voix basse résonna à l’autre bout.
— Miss Wolfe ? C’est Jonathan. Écoutez-moi attentivement. Vous êtes en danger.
Iris sentit une bouffée de peur mêlée d’urgence.
— Jonathan ? Où êtes-vous ? Que voulez-vous dire ?
— Ils savent ce que je vous ai dit, répondit-il rapidement. Ils vous surveillent. Ne restez pas là trop longtemps. Grayson est plus proche que vous ne le pensez. Et une dernière chose… trouvez l’aile nord de l’Observatory. C’est là que tout commence.
La ligne se coupa brusquement avant qu’Iris ne puisse répondre. Elle resta figée un moment, le téléphone encore dans sa main. Serena, qui avait tout entendu, fronça les sourcils.
— L’aile nord ? Qu’est-ce qu’il voulait dire par là ?
Iris posa le téléphone, le regard lointain.
— Je ne sais pas. Mais c’est là que je vais commencer.
Le loft était plongé dans une obscurité relative, les lumières de la ville filtrant à travers les rideaux tirés. Iris, assise sur le canapé, fixait le plan de Manhattan étalé devant elle. Les mots de Jonathan résonnaient encore dans son esprit : «L’aile nord de l’Observatory… C’est là que tout commence.»
— Tu sais que ça ne sera pas facile, dit Serena en rompant le silence, sa voix calme mais empreinte de gravité.
Iris releva la tête, ses doigts jouant nerveusement avec un stylo.
— Rien de ce qui en vaut la peine ne l’est, répondit-elle, son ton déterminé.
Serena se rapprocha et s’assit à côté d’Iris, les mains jointes comme si elle tentait de garder son calme. Elle posa une main sur son épaule, son regard se durcissant légèrement.
— Alors écoute-moi. Si on fait ça, on le fait intelligemment. Pas d’héroïsme inutile, pas de risques idiots. Grayson est un manipulateur, mais il ne faut pas sous-estimer sa capacité à anticiper nos mouvements. Tu es peut-être son prochain «projet», mais ça ne veut pas dire que tu es seule.
Iris sentit une vague de gratitude l’envahir. Elle posa sa main sur celle de Serena, un sourire faible mais sincère éclairant son visage.
— Merci, murmura-t-elle. Pour tout.
Serena se redressa, une étincelle de défi dans les yeux.
— Alors repose-toi un peu. On commence dès demain. Si on veut découvrir ce que cache l’aile nord, on va avoir besoin de toutes nos forces.
Iris acquiesça et se leva à son tour, éteignant les lumières du salon avant de se diriger vers sa chambre. Mais même après s’être allongée dans son lit, elle ne trouva pas le sommeil. Les images des visages qu’elle avait capturés, les paroles de Jonathan, et les ombres du passé de l’Observatory tournaient en boucle dans son esprit.
Tard dans la nuit, alors que la ville s’endormait enfin, Iris ouvrit les yeux et fixa le plafond. Elle sentait le poids de ce qu’elle avait appris, mais aussi une étrange clarté. Elle n’était plus seulement une artiste prise dans le filet d’Elliot Grayson : elle était une actrice de ce jeu complexe, une pièce qu’il ne pouvait plus manipuler à sa guise.
L’aile nord. Tout commence là.
Elle serra les dents, une lueur déterminée brillant dans ses yeux. Peu importe le danger, peu importe le prix. Elle découvrirait la vérité, et elle la révélerait au grand jour.
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