CHAPITRE 17 : Les ombres en mouvement

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L’air était chargé de tension dans le loft. Les preuves contre Elliot avaient été envoyées sur plusieurs canaux, et déjà, Iris et Serena pouvaient voir des échos en ligne. Des messages cryptiques circulaient sur les forums d’artistes anonymes, certains relayant les informations, d’autres exprimant un mélange de peur et de curiosité.

Mais Iris savait que cette victoire initiale n’était que temporaire. Elliot allait réagir, et il le ferait vite.

Le téléphone d’Iris vibra brusquement sur la table. Elle attrapa l’appareil, le cœur battant, en voyant un numéro inconnu s’afficher.

— Allô ? répondit-elle, sa voix plus forte qu’elle ne l’aurait voulu.

Un silence tendu suivit, puis une voix grave et glaciale se fit entendre.

— Miss Wolfe. Vous jouez à un jeu dangereux.

Iris sentit son sang se glacer. Elle n’avait jamais entendu cette voix auparavant, mais elle savait qu’elle était liée à Elliot.

— Qui êtes-vous ? demanda-t-elle, tentant de garder son calme.

— Quelqu’un qui agit dans l’intérêt de Mr. Grayson, répondit la voix. Vous avez commis une erreur en exposant ces documents. Vous pensez que cela va le détruire ? Vous vous trompez. Vous n’avez aucune idée de ce dont il est capable.

— Si c’est une menace, elle ne m’impressionne pas, rétorqua Iris, sa voix tremblant légèrement malgré ses efforts.

— Ce n’est pas une menace, Miss Wolfe. C’est une promesse. Reprenez-vous, ou nous vous reprendrons.

La ligne se coupa avant qu’Iris ne puisse répondre. Elle resta un instant, figée, le téléphone encore dans sa main, puis leva les yeux vers Serena, qui avait entendu suffisamment pour comprendre la situation.

— Ils savent, dit Serena, sa mâchoire serrée. Et ils veulent te faire taire.

— Ils ne réussiront pas, répondit Iris, ses poings se serrant. Je refuse de me laisser intimider.

Serena se leva et commença à marcher dans la pièce, réfléchissant rapidement.

— Si Grayson sait ce qu’on a fait, il va tenter deux choses, dit-elle. D’abord, il essaiera de nous localiser pour récupérer les documents originaux. Ensuite, il va essayer de discréditer les preuves. Il va dire que tout est faux, que c’est une attaque personnelle contre lui.

— Alors, que fait-on ? demanda Iris.

Serena se tourna vers elle, ses yeux brillants de détermination.

— On double la mise. On diffuse encore plus d’informations. Plus de gens doivent voir ces preuves. Si assez de personnes en prennent connaissance, Grayson ne pourra pas tout étouffer.

Iris hocha la tête, mais une nouvelle inquiétude la traversa.

— Et s’ils s’en prennent à Rachel ? Elle est en première ligne maintenant.

Serena posa une main rassurante sur son épaule.

— Rachel savait dans quoi elle s’engageait. Mais on peut lui donner un coup d’avance. Envoie-lui un message. Dis-lui de se cacher pour un moment.

Iris composa rapidement un message sur son téléphone, détaillant les menaces reçues et conseillant à Rachel de quitter son bureau pour travailler depuis un endroit plus sûr. Quelques secondes plus tard, une réponse arriva.

«Reçu. Je me déplace maintenant. Merci pour l’info.»

Alors qu’Iris et Serena continuaient de planifier, un bruit soudain les fit sursauter. Quelqu’un frappait à la porte du loft.

— Qui est là ? demanda Serena, sa voix ferme.

— C’est Sam, répondit une voix familière. Ouvrez, c’est urgent.

Serena jeta un regard à Iris, puis ouvrit la porte avec précaution. Sam entra précipitamment, visiblement essoufflé, une lueur d’inquiétude dans les yeux.

— On a un problème, dit-il immédiatement. Grayson a activé ses réseaux. Il efface les traces des comptes offshore, mais ce n’est pas tout. Il a engagé des équipes pour retrouver les témoins. Jonathan est en danger.

— Jonathan ? répéta Iris, le cœur battant plus vite. Où est-il ?

— Je ne sais pas exactement, répondit Sam. Mais il m’a envoyé un message crypté. Il dit qu’il a encore des informations cruciales, mais qu’il est traqué.

Serena serra les poings.

— Où est ce message ?

Sam tendit son téléphone, montrant une série de coordonnées. Serena les examina rapidement.

— C’est un endroit près du port, dit-elle. Si Grayson le cherche, on doit le trouver avant eux.

En quelques minutes, Iris, Serena, et Sam étaient sur la route, la voiture filant dans la nuit vers les coordonnées indiquées. Le vent froid giflait leurs visages, mais l’urgence de la situation les poussait à ignorer l’inconfort. Le port de Manhattan, avec ses entrepôts et ses quais déserts, semblait s’étendre à l’infini dans l’obscurité.

— Il doit être là-bas, dit Serena en désignant un bâtiment isolé au bout d’une jetée.

Ils descendirent de la voiture et avancèrent prudemment, utilisant l’obscurité pour se dissimuler. À l’intérieur de l’entrepôt, une lumière vacillante filtrait à travers une fenêtre brisée.

Serena fit signe à Iris et Sam de rester en arrière, puis s’approcha de l’entrée. La porte était entrouverte, et des voix basses se faisaient entendre à l’intérieur. Serena jeta un coup d’œil discret : deux hommes en costumes sombres fouillaient le bâtiment, leurs armes visibles sous leurs vestes.

— Ils sont déjà là, murmura Serena en revenant vers les autres. Mais Jonathan pourrait être encore en vie. On doit les contourner.

Ils se glissèrent à l’intérieur par une porte latérale, avançant dans le labyrinthe de caisses et de machines abandonnées. Enfin, dans un coin sombre, ils trouvèrent Jonathan, caché derrière une pile de palettes. Il était étendu, le dos appuyé contre une caisse, une large plaie ensanglantée zébrant son flanc. Sa chemise était déchirée et imbibée de sang, son visage pâle et marqué par la douleur.

Sa respiration était haletante, et ses yeux semblaient avoir du mal à se concentrer. Il ouvrit légèrement les lèvres, mais ses mots furent à peine audibles.

— Wolfe… murmura-t-il en voyant Iris s’approcher. Vous… êtes… venue…

Sa tête bascula sur le côté, ses paupières papillonnant comme s’il luttait pour rester conscient. Iris s’agenouilla précipitamment à ses côtés, son cœur battant à tout rompre.

— Jonathan ! s’exclama-t-elle en lui tenant le visage pour capter son regard. Restez avec moi ! Vous perdez beaucoup de sang.

Jonathan gémit faiblement, tentant de bouger sa main vers son flanc blessé, mais son bras retomba, tremblant et sans force. Serena se pencha pour examiner la plaie, ses doigts tremblants alors qu’elle déchirait un morceau de tissu pour improviser un bandage.

— On doit arrêter le saignement, dit-elle, sa voix tendue.

Jonathan reprit une respiration sifflante, son visage se tordant de douleur. Ses mots étaient décousus, entrecoupés de gémissements :

— Ils… ils savent… Je… je n’ai pas pu…

Ses yeux se fermèrent brièvement, et Iris le secoua doucement.

— Non, Jonathan, pas maintenant ! Vous devez rester éveillé !

Il ouvrit les yeux à moitié, son regard trouble fixant un point derrière elle.

— Des noms… encore… sur… l’USB…

Sa voix se perdit, et il sembla sombrer à nouveau. Sam posa une main ferme sur l’épaule d’Iris.

— On doit le sortir d’ici, maintenant, dit-il. Sinon, il ne tiendra pas.

Jonathan grogna légèrement lorsque Serena serra le bandage improvisé autour de sa taille. Il tenta de parler, mais aucun mot ne sortit, juste un souffle rauque. Ses paupières se fermaient malgré les efforts de Sam pour le maintenir éveillé.

— Jonathan, on est là, murmura Iris, son ton aussi rassurant que possible malgré son inquiétude. On va vous sortir de là. Tenez bon.

Jonathan émit un faible gémissement en réponse, mais il ne bougea pas davantage. Sam et Iris le soulevèrent précautionneusement, sentant son poids s’appuyer lourdement sur eux. Chaque mouvement lui arracha un grognement étouffé de douleur.
Jonathan gémit doucement en tentant de se relever, serrant son côté blessé. Iris et Sam le soutinrent de chaque côté, sentant la chaleur du sang imbiber leurs mains.

— On doit sortir d’ici, maintenant. Avant qu’ils ne nous trouvent.

Alors qu’ils aidaient Jonathan à se relever, un bruit de pas précipités retentit derrière eux. Les hommes de Elliot Grayson les avaient repérés.

Serena se plaça devant les autres, serrant une barre de fer, qu’elle venait de ramasser en vitesse, d’une main tremblante. Elle savait qu’elle n’avait aucune chance contre ces hommes, mais elle ne pouvait pas reculer. Son souffle était irrégulier, ses jambes flageolaient, mais elle restait là, espérant gagner quelques précieuses secondes.

Pendant ce temps, à l’extérieur de l’entrepôt, Iris était assise dans la voiture, jetant des regards nerveux vers la porte du bâtiment. Elle tenait Jonathan, affalé sur le siège arrière, sa chemise imbibée de sang. Ses gémissements faibles lui brisaient le cœur, et elle pressait une veste contre sa plaie, essayant désespérément de ralentir l’hémorragie.

— Tenez bon, Jonathan, murmura-t-elle, son regard alternant entre lui et l’entrepôt. Ils vont revenir. Serena et Sam vont nous sortir de là.

Mais une part d’elle n’était pas sûre. Cela faisait plusieurs minutes qu’ils étaient entrés, et aucun d’eux n’était réapparu. L’angoisse montait en elle, chaque seconde semblant une éternité. Elle tapota nerveusement sur le volant, guettant le moindre mouvement à travers la pénombre.

Les deux hommes s’avançaient méthodiquement, leurs gestes précis et coordonnés. Le premier dégaina un pistolet, tandis que le second, légèrement en retrait, observait attentivement les mouvements de Serena, prêt à réagir. Ils n’étaient pas des amateurs.

— Laissez-nous tranquilles ! lança Serena, sa voix trahissant sa peur.

A l’intérieur, le premier homme ne répondit pas. Il pointa calmement son arme sur elle, sans précipitation. Serena paniqua. Elle attrapa une boîte métallique sur une pile de caisses et la lança dans leur direction. La boîte ricocha sur une étagère avant de tomber au sol, inutile.

À l’extérieur, Iris sursauta en entendant le bruit métallique. Elle se redressa brusquement, posant une main sur l’épaule de Jonathan.

— Ça vient de l’intérieur, murmura-t-elle, les yeux écarquillés. Qu’est-ce qu’il se passe ?

Jonathan ouvrit un œil, son visage pâle et marqué par la douleur.

— Ils sont… en danger… murmura-t-il. Grayson… envoie… les meilleurs.

Iris serra les poings, son cœur s’accélérant. Elle hésita à sortir de la voiture, mais le regard de Jonathan la retint. Il était trop faible pour être laissé seul, et elle savait que sans Serena et Sam, elle n’aurait aucune chance de survivre.

— Reviens, Serena, s’il te plaît…

Dans l’entrepôt, le premier homme avançait d’un pas, son pistolet toujours levé. Il leva la main pour faire signe à son coéquipier.

— Couvre-moi, dit-il d’une voix calme mais autoritaire.

Le deuxième homme acquiesça, tirant un couteau de sa ceinture. Il contourna Serena avec précision, cherchant à la prendre en tenaille. Serena sentit son souffle se couper. Elle tenta de balancer la barre de fer vers l’un d’eux, mais son geste maladroit manqua largement sa cible. Le deuxième homme éclata de rire.

— Pas mal, dit-il. Pour une débutante.

Au moment où Serena essayait de se ressaisir, le premier homme avança rapidement sur elle. D’un geste sec, il la poussa en arrière, la faisant trébucher et tomber lourdement sur le sol. Le deuxième homme se précipita pour la maîtriser.

C’est alors que Sam surgit de l’ombre.

— Lâchez-la ! hurla-t-il, abattant une planche de bois sur l’épaule du premier homme.

À l’extérieur, Iris s’immobilisa en entendant un bruit sourd provenant de l’entrepôt. Cette fois, c’était clair : un combat avait éclaté. Elle tapota nerveusement le volant, regardant l’ombre imposante du bâtiment.

— Serena… qu’est-ce que tu fais ?

Jonathan gémit à l’arrière, attirant son attention. Elle se retourna vers lui et tenta de le calmer.

— Restez avec moi, Jonathan. On va s’en sortir.

Mais son angoisse pour Serena et Sam augmentait.

À l’intérieur de l’entrepôt, Serena haletait, le dos appuyé contre une caisse, les mains tremblantes. Elle fixait Sam, qui finissait de maîtriser le dernier assaillant, incapable de bouger.

— On doit partir, maintenant, Serena, dit Sam en lui tendant une main.

Serena le regarda sans réagir pendant une seconde, ses yeux écarquillés, perdus. Son souffle était rapide et irrégulier, presque sifflant. Elle ouvrit la bouche pour répondre, mais aucun mot ne sortit. Ses jambes refusaient de bouger.

— Serena ! insista Sam, sa voix plus forte cette fois.

Elle sursauta légèrement, comme si elle revenait d’un rêve. Elle tendit une main hésitante, que Sam attrapa fermement pour la hisser sur ses pieds. Ses jambes vacillaient, et elle dut s’appuyer sur lui pour ne pas tomber. La barre métallique qu’elle avait utilisée était toujours au sol, mais elle n’osa même pas la ramasser.

— Ça va aller, murmura Sam, presque pour lui-même. Tu as fait ce que tu pouvais.

Serena hocha la tête faiblement, mais son visage était marqué par une expression de terreur. Ses yeux faisaient des allers-retours rapides entre les deux hommes à terre, comme si elle craignait qu’ils se relèvent soudainement.

En sortant de l’entrepôt, l’air froid de la nuit lui gifla le visage, mais cela ne la réveilla pas complètement de son état de choc. Elle trébucha sur une petite pierre, manquant de tomber, et Sam l’attrapa avant qu’elle ne s’effondre.

— Hé, doucement, dit-il. Respire.

Serena inspira profondément, mais sa respiration restait rapide. Quand elle aperçut Iris, debout près de la voiture, elle sentit un nœud dans sa gorge. Iris s’approcha, les yeux remplis d’inquiétude.

— Serena ! Est-ce que ça va ? demanda-t-elle en posant une main sur son épaule.

— Je… Je crois, murmura Serena, mais sa voix tremblait. Je ne sais pas…

Ses mains étaient encore tremblantes, et elle les serra contre elle comme pour se protéger. Iris l’attrapa doucement par les bras et la guida vers la voiture. Serena s’effondra presque sur le siège avant, sa tête tombant contre la vitre. Elle regarda dans le vide, incapable de se concentrer.

Dans le silence tendu qui suivit, Jonathan gémit à l’arrière, attirant l’attention d’Iris et de Sam. Mais Serena restait figée, ses pensées tournant en boucle. Elle revoyait l’homme lever son arme, les rires moqueurs de leurs assaillants, et elle sentait encore le poids du deuxième homme qui l’avait clouée au sol.

— Je n’aurais pas dû… murmura-t-elle, plus pour elle-même que pour les autres.

— Quoi ? demanda Iris doucement, en se penchant vers elle.

— Je n’aurais pas dû essayer… Je ne savais pas quoi faire. J’ai failli tout gâcher, répondit Serena, sa voix à peine audible.

Iris échangea un regard inquiet avec Sam, mais elle posa une main rassurante sur celle de Serena.

— Tu as fait ce que tu pouvais, Serena. C’est fini maintenant. Tu es là, avec nous. Et on s’en est sortis, dit-elle, sa voix ferme mais douce.

Serena ne répondit pas. Elle hocha lentement la tête, mais ses yeux restaient fixés sur le vide, son souffle toujours irrégulier. Elle ne pouvait pas s’empêcher de penser que si Sam n’était pas intervenu, elle ne serait pas là pour entendre ces mots.

Iris démarra en trombe, laissant derrière eux l’ombre inquiétante de l’entrepôt.

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