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Peu avant que l’astre du matin jette ses rayons premiers à travers les vitrages de la vaste salle des restaurations - autrefois du trône, éclairée jusque alors par des chandelles et les chandeliers des chambres que chacun avait apportés, les restes froids des mets du dîner de la veille étaient servis avec des boissons chaudes et quelques liqueurs sur la grande table, autour de quoi tous attendaient, un feu encore timide crépitant dans l’âtre que le valet nourrissait de bûches, de brindilles et de tisons.

L’écuyer les avait rejoint puis chacun finissait de s’habiller en s’équipant pour la chevauchée – bottes, gants, veste ou pardessus, écharpe de laine, casque ou bonnet ou rien, cravache ou fouet, arc ou arbalète, parfois une javeline* et pour quelques uns le pistolet à mèche sinon le fusil à salpêtre comme pour le baron et les deux jeunes. Les dames préférant les armes moins tonitruantes. Et pour tous un poignard ou un coutelas dans son étui de cuir ficelé à la cuisse…

On inspectait en compagnie du connétable les chevaux pour s’assurer qu’ils étaient effectivement en mesure de galoper une matinée ou une journée entière, dans la cour dès lors lumineuse à souhait. Puis on partait, avec ou sans les éventuels conviés par l’unique sentier qui menait aux forêts.

C’était entendu que le sire Freyn n’en détenait guère la totalité, or ç’eut été fort difficile d’en marquer précisément les limites et les contours afin de s’en tenir strictement à ce qui n’était que de son territoire pour chasser. On tuait alors un peu tout ce qui se trouvait à portée de regard et de tir, de flèche, de pique ou de carreau – lapins, lièvres, cerfs, chevreuils, biches, faisans, ours et loups pour la peau quand s’annonçait l’hiver et quelquefois l’une des espèces rares issues des altitudes pour s’abreuver, comme le bouquetin et la marmotte.

« Dîtes, sire – souffla le connétable au baron, le tirant légèrement à lui par le coude, les rennes de son destrier à bout de bras – y’aurait-il un peu de vrai dans ce qui se dit à propos de monsieur le comte… qui a disparu sans laisser de trace ? ».

— Vous commencez à me courir avec vos quémanderies, vos diatribes et vos demi mots sous le manteau, Alfred ! – répliqua l’autre trois tons plus hauts en le repoussant vivement à l’épaule – montez à votre animal et ne m’adressez plus la parole avant le zénith ou que je vous le dise ! Allez, allez tous, nous y allons maintenant !

Le baron sauta sur sa selle en peau, le fusil au dos, la poudre au ceinturon, un filet à grandes mailles et un lasso enroulé arrimés à la croupe de la monture, et ouvrit la marche pour sa compagnie dans un geste ample et souple du bras disant de suivre.

Pour ce jour, il eut le supplément de trois visiteurs : un duc, son épouse et leur fille.

Ils partirent à neuf.

À suivre...

* * *

* Javeline : petit javelot (type de lance légère pour cavalier)