8. "I won't let you get me down" - Sia

6 minutes de lecture

[chanson : Never give up - Sia]

Emma

« Aller, viens danser avec nous ! »

Mes amies étaient en arc de cercle autour de moi, me suppliant d'aller danser avec elles. Puis les images devinrent étranges, plus floues, les corps de mes amies bougeaient de gauche à droite, comme flottant dans les airs.

« Les filles, pourquoi bougez-vous ainsi ? » questionnai-je, d'une voix apeurée.
Elles se regardèrent avant d'éclater de rire, un rire non habituel, un rire quelque peu effrayant.

Je me réveillai en sursaut, tout en sueur. Ma respiration était rapide, comme si je venais de courir un marathon. Je me levai en vitesse et me dirigeai vers la salle de bain pour me passer de l'eau sur le visage afin de retrouver mes esprits. Puis je m'appuyai sur le lavabo, fixant mon reflet livide dans le miroir. Je reprenais mon souffle petit à petit. J'avais le teint pâle à en réveiller un mort, les yeux rougis par les nombreuses heures à pleurer. J'essayai de me répéter que ce n'était qu'un mauvais rêve, mais mon environnement m'empêchait de me rassurer. Ce n'était pas qu'un mauvais rêve, je me trouvais bien dans cette chambre d'hôpital impersonnelle, vide, angoissante.

En retournant me coucher, je m'aperçus qu'il faisait encore nuit. Je m'allongeai, espérant me rendormir rapidement, mais mes yeux restaient grands ouverts. Ma tête était pleine d'images des derniers mois et le sommeil ne venait pas. Je me relevai et sortis de la pièce, pieds nus. Le calme plat qui régnait dans le couloir me saisit. Je me mis à marcher sur la pointe des pieds vers la cabine téléphonique.

Je composai le numéro de la maison. J'avais peu d'espoirs que quelqu'un ne décroche à cette heure avancée de la nuit, mais qui ne tente rien n'a rien.

Première sonnerie. Mon cœur accéléra, il battait de plus en plus fort.

Deuxième sonnerie. Je sentais la crise d'angoisse montée en moi. Ma respiration se faisait plus saccadée. Je fermais les yeux pour me reprendre.

Troisième sonnerie. L'espoir qu'elle décroche s'échappait peu à peu.

Quatr...

« Allô ? »

J'entendis enfin sa voix. Les larmes me montèrent aux yeux. Cela faisait deux semaines que je ne l'avais pas entendu. Mon cœur s'apaisa. Et j'essayai de me rassurer en me répétant que tout irait bien.

« Maman, chuchotai-je, c'est moi, Emma. »

Silence.

Elle ne voulait pas me parler. Une larme coula sur ma joue lorsque je pris conscience de cette triste réalité mais je la séchais rapidement, refusant de me morfondre pour quelqu'un qui ne se préoccupait plus de moi.

« Maman, s'il te plait, dit quelque chose » suppliai-je.

Mais je restais sans réponse. Ma voix se mit alors à trembler. Mon cœur manqua plusieurs battement. Je le sentais se briser à mesure que le silence s'installait. On eût été si proche elle et moi...

« Maman, fais moi sortir, s'il te plait. Je te promets que je ne recommencerai pas, je me tiendrai bien.

- Au revoir, Emma. »

Puis elle raccrocha. Je restai quelques instants avec le combiné collé à mon oreille, le « bip » incessant dans les tympans. Puis je raccrochai rageusement et courrai vers ma chambre, les larmes dévalant mon visage. J'avais envie de crier, de hurler. Il fallait que ça sorte, toute cette haine que je contenais.

Une fois dans ma chambre, je jetai de colère tout ce qui me passait sous la main. Puis je me mis à crier, c'était plus fort que moi, je devais extérioriser ma rage, ma peine, ancrée au plus profond de moi.
Très vite, j'entendis les portes du couloir s'ouvrir, mais ma colère ne redescendait pas.

« Mademoiselle, calmez-vous ! » entendis-je gronder derrière moi.

Mais je ne pouvais, ni ne voulais me calmer. Je détestais cet endroit et tout ce qu'il représentait. Je détestais les gens qui s'y trouvaient et qui prétendaient vouloir nous aider.

De rage, je jetai sur lui ce que je tenais à la main : mon livre Harry Potter et le prince de sang mêlé, en lui sommant de sortir de ma chambre. Il recula, effrayé et c'est alors que William arriva en courant, alerté par tant de bruit. Il se fraya un chemin à travers le groupe qui s'était formé dans l'encadrement de ma porte pour être le mieux placé afin d'assister au spectacle que je leur offrais.

« Laissez-moi m'en occuper », dit-il à l'oreille de l'homme qui continuait de me regarder, à la fois apeuré et énervé. Il se décida enfin à sortir de la chambre en criant après tous les autres de partir de là, qu'il n'y avait rien à voir.

A la vue de William, ma tension retomba et, petit à petit, je me calmai. Ma respiration ralentit. Il ferma la porte et nous nous retrouvions plus que tous les deux. Il se retourna vers moi, et je sentis de l'énervement dans son regard.

« Qu'est-ce qu'il te prend d'affoler le centre comme ça ? » dit-il sèchement.

Je ne m'attendais pas à une réaction si dure de sa part. J'espérais qu'il me comprendrait, ou du moins qu'il essayerait avant de s'énerver. Je le fixai, essayant de comprendre la dureté de sa voix. Il croisa les bras sur sa poitrine, signe d'attente, le regard toujours noir.

Je me ressaisis, il était hors de question que ce psychologue ait le dessus sur moi. Je ne me laisserais pas faire !

« Si c'est pour m'engueuler, tu ferais aussi bien de retourner te coucher ! » m'exclamai-je aussi froidement que possible. Cela sembla le radoucir et il laissa tomber ses bras le long de son corps avant de s'approcher de moi.

« Que t'est-il arrivé ? » questionna-t-il d'une voix plus posée, plus calme.

Mais je restai sur la défensive. C'était trop facile de me crier dessus et puis d'être tout mielleux par la suite. Je lui répondis alors simplement que j'avais fait un cauchemar. Il ne sembla pas me croire le moins du monde. Il se dirigea vers mon lit et s'assit. Cette nuit allait se transformer en thérapie !

« Tu as fait un cauchemar, et c'est pour cela que tu envoyais tout valser dans ta chambre, allant même jusqu'à agresser le psychologue référent ? »

Je restai silencieuse et gardai mes yeux bien rivés dans les siens. S'il croyait que j'allais me confier à lui après la façon dont il m'avait parlé... C'était mal me connaître !
Je restai debout, bras croisés sur ma poitrine, profondément déçue par sa réaction. Et il allait le comprendre !

« Écoute, je suis désolé de la façon dont je t'ai parlé en arrivant. Mais je me permets de te rappeler que nous avons fait un pacte toi et moi. Je t'ai parlé d'un moment très difficile de ma vie, j'estime que tu peux au moins m'expliquer ce qu'il t'est arrivé. »

Il semblait peiné. Je l'avais déçu. Se confier sur la mort de sa petite sœur n'avait en effet pas dû être simple pour lui, je me devais de faire un effort de mon côté.
Je me radoucis.

« Ma mère ne veut plus me parler » expliquai-je en allant m'asseoir à ses côtés. La tête baissée vers mes pieds, je ne savais pas comment continuer. Je n'avais pas le droit à un contact extérieur pendant un mois, alors lui raconter ce qu'il s'est passé serait admettre que j'ai enfreint une règle.

Je décidai que le plus simple était encore de lui dire d'un coup, comme lorsqu'on enlève un pansement.

« J'ai appelé ma mère » continuai-je, confuse, comme un animal qu'on dispute lorsqu'il a fait une grosse bêtise. Puis je relevai la tête pour lui faire face, me préparant à une quelconque remontrance. Mais rien ne vint. William restait muet. Attendait-il une suite ou cherchait-il une punition adaptée ?

Ce long silence devenant pesant, je décidai de continuer.

"Mes parents ont tellement honte de moi qu'ils ont raconté à tout le monde que j'étais partie faire un stage de quelques mois en Australie.

- Et tes amis ? Tu n'en avais pas ?"

Je baissai la tête. Ce n'était pas un sujet que je souhaitais évoqué ce soir.

« Je suis fatiguée » mentis-je, espérant qu'il comprenne que ce n'était pas un thème que je voulais aborder pour le moment. L'abandon de mes parents était déjà assez difficile à accepter. Il n'insista pas et se leva.

« Alors bonne nuit » dit-il simplement avant de quitter la pièce, me laissant à nouveau seule avec mes démons.

________________________________________________________________________________________________________

Titre = "Je ne te laisserais pas m'abattre"

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 4 versions.

Vous aimez lire Klaire.DBS ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0