Chapitre 20 (4/4)

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Les préparatifs pour la nuit s’achevaient lentement. Bastien agrippa le bras de Caitlin quand elle passa à sa hauteur en direction du « dortoir aménagé » dans l’aile des filles.

— Wait, I have… I have a favor to ask...

— To me?

Sa voix était voilée, signe qu’elle relâchait la pression, comme tout un chacun ici. Mais pas sa vigilance. Caitlin le dévisagea étrangement, comme s’il lui manquait une case au milieu de tout ce chambardement. Bastien était nerveux, mais ne la lâcha pas.

— Why should I help you? What have you done for me to this extent?

— We’re on the same team, plaida piteusement Bastien. Ce genre d’excuses, ça passe ou ça casse. And you don’t know what it is. I haven’t asked you. Yet.

— Don’t ask, then. From what I see, you don’t mean to apologize. I don’t believe in this team bullshit thing. It’s not a mirror that will determine what I am or where I belong.

— Neither do I. It’s clear that you and I started off on the wrong foot from the start. You don’t like me, I don’t like you either. And I’d hate to be indebted to someone, especially to you. But we have to help each other; we don’t have any other options. Even I, I know it. What happened to Florian could have happen to Stephen as well, you’re aware of that, right? I’m so grateful for what you did for him, you guys. So sorry for everything and let’s make peace tonight... on enterre la hache de guerre comme on dit chez nous.

Caitlin le dévisagea, suspicieuse.

— Let me ask: What do you want from me?

— Actually, it’s Florian who needs your help. I know you would ask me the same for your friends.

Cate se tortilla, mal à l’aise de ces circonvolutions obscures. Bastien tournait intentionnellement autour du pot pour ne pas la heurter, lui-même assuré de la folie de sa requête.

— If things go wrong, only if it goes wrong, promise me we could count on you.

— What for? What is your point?

— If his heart has another failure, and if the cardiac massage doesn’t work, could you restart it? I know you can do it.

Elle lui accorda un regard vide. Puis les répercussions l’atteignirent. Elle papillonna des yeux, épouvantée.

— No way. You lost your mind. That’s it.

Elle essaya de retirer son bras. Il tenait bon, sans forcer. Elle aurait pu se dégager facilement, elle n’en fit rien. Elle ne voulait pas lui rendre la partie trop facile. Elle lui jeta un regard auréolé d’une drôle de lueur, en proie à un conflit intérieur.

— For what you’re asking me, you would be in debt for life.

— See? Isn’t that a mark of trust? I’m asking you to save my friend.

— Right. No pressure if he dies, huh? It’ll not be your responsibility but mine. It’s just insane. Take him to a hospital, ask a surgeon, but not to me. I could kill him by crashing his heart. This is not a game.

— No one will hold you responsible for anything since he won’t die. And you might not even have to restart his heart. You’re right, it’s insane. I’m just trying to considerate all the possibilities. There’s no way I’m letting him die!

Caitlin le fixa dans les yeux.

— No one here will let him down. Everyone will do what’s in its power to save him. Why do you think Luke was so upset about Nat’s idea? Because it was insane. Just like what you proposed. Just like what I proposed to him.

Elle lâcha un rire cynique devant sa tête.

— Oh please! I’m not a complete jerk! Do you think I wouldn’t have had that idea myself? I would have done it myself, by any cost if I could save him. But thanks God, Nat’s idea worked. I didn’t have to do it by myself.

Au tour de Bastien d’être perdu.

— Then, why are you refusing it?

— There is a huge difference between doing it when there is any no solution, and asking me to do it now. He will survive without my help. If I had his heart between my hands, for real, I don’t know if I could have endured it.

— What scares you the most? Not being able to save him? Or to be more capable than you would like?

Caitlin inclina la tête, fascinée.

— So you get it.

— I know how it feels, opina Bastien.

Elle fit la moue. S’échappa de son emprise, légère, éthérée et enfonça ses mains caméléonnes dans ses poches.

— Call me if you’re in trouble tonight.

— So it a yes? That how’s it sounds to me.

— I didn’t say I would. Just, make sure you don’t need me. And maybe we could be partners, then, confirma-t-elle en lui tendant la main.

Au contact de leur poignée de mains, ses doigts se matérialisèrent doucement dans sa paume comme pour sceller leur pacte.

— Remember your promise. You’d do the same for me and my friends.

— Anytime. You believe me, right?

— If you don’t mind, I’m going to bed, now. And you’ve got a duty to do, so...

Il s’effaça pour la laisser passer. Cate le contourna prudemment.

— Tu parles très bien anglais, lui lança-t-elle par-dessus son épaule dans un français presque impeccable. Mais « enterrer la hache de guerre », c’est « bury the hatchet », by the way. Get that inside your head.

*

Florian dérive. La douleur surnage. Reflue. Avant de repartir à l’assaut le long de sa colonne vertébrale.

Tout son être est en feu. Sa conscience oscille entre délires et brefs flashs de réalité de derrière ses paupières douloureuses. Il est dans sa chambre, peut-être. Ou n’importe où ailleurs. Il ne se sent plus d’attaches.

C’est comme s’il se floutait à lui-même par moments. Se disjoncte intentionnellement pour éviter la souffrance, la confiner de loin en loin.

Une fille pénètre dans la pièce et s’arrête en son centre. Elle marche ou elle flotte, Florian n’en sait rien. Il ne sait pas si elle appartient à ses hallucinations ou si elle fait partie du décor environnant. Mais il la voit ; du coin des yeux, ou dans les recoins embrumés de son cerveau, elle est là. Elle atteint Florian, elle l’approche.

Il la reconnaît. Il ne la connaît pas. Il croit savoir pour quoi elle se tient devant lui, céleste en ange démoniaque. Il voudrait fermer les yeux pour l’accueillir mais il n’y tient pas. D’ailleurs, il n’y arrive pas.

Elle sort de sa gaine argentée un petit poignard d’agate cendrée du pommeau à la garde. Elle l’élève lentement et encore. La lame rencontre l’aurore qui se faufile à travers l’interstice de la vieille fenêtre. Elle étincelle en infinis petits cristaux sous la lumière chétive.

La fille tient le couteau au-dessus de la poitrine de Florian, au niveau du cœur presque. L’instant dure et s’allonge avec régularité.

Fais-toi plaisir, vas-y. Tu es venue m’achever de toute façon.

J’aurais préféré, confie-t-elle à regret. Sincèrement.

Elle abaisse délicatement le poignard. La lame sonde le corps de Florian, en quête d’un signe. Elle tremble, soudain, et la pointe s’en retrouve bleutée. C’est le signal qu’elle guettait. Sans hésitation, la fille frappe Florian au niveau du flanc.

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