21 novembre 2014 - 17 heures 25

Caroline Martin se battait pour que les agresseurs soient jugés et pour que les blessures infligées à leurs victimes soient dûment considérées. Mais en filigrane, derrière sa volonté de dénoncer et de punir à tout crin, elle exorcisait son mal et se déchargeait de son fardeau.

Car oui ! Quoi de mieux que d'expliquer son propre cas et de parler de ses propres expériences ? Quoi de mieux que de participer aux progrès de la médecine en se faisant du bien ?

En choisissant d'aider le professeur Bernard dans ses recherches, Caroline se libérait de ses peines. Sauf que, trop faible pour relater l'ensemble de son calvaire, elle avait ressorti son journal intime de dessous ses oreillers puis, d'une main molle, elle l'avait tendu au professeur Bernard.

— Voilà l'histoire de ma dramatique union... Pfft... l'avait-elle informé d'un ton désabusé. Ce journal, je l'ai démarré un an et demi après mon mariage... mais je ne l'ai pas rempli par date ni chronologiquement selon les évènements... Pfft... J'ai couché en vrac sur le papier mes ressentis, les humiliations qui m'ont le plus marquée, les phases par lesquelles je suis passée..., mes états d'âme, mes prises de conscience, la montée de l'emprise, et d'autres choses encore... Mais, durant mes sept années avec Pierre, il y a eu de longues périodes où je n'ai eu ni l'énergie nécessaire... Pfft... ni le mental pour écrire le moindre mot. C'est un peu en vrac, mais je pense y avoir mis l'essentiel...

Avide d'informations, le spécialiste des troubles mentaux s'était saisi du précieux journal qui, il l'espérait, renfermait en majeur partie le long supplice de la patiente et contenait moult détails sur sa relation toxique. Le carnet rouge en mains, le spécialiste des maux s'était empressé de l'ouvrir. Puis, sans demander l'autorisation à son auteure, il avait plongé dans les mots. Bien vite, celle-ci l'avait coupé dans son élan.

— Attendez docteur... l'avait-elle interrompu en agitant ses doigts. Avant de vous laisser en prendre connaissance, j'aurais deux faveurs... Pfft... La première est que vous lisiez l'intégralité ce soir, devant moi... La deuxième est que vous le fassiez à haute voix et aussi le plus doucement possible... Oui... Afin que je puisse intervenir si besoin, sur certains passages... Pfft... Êtes-vous d'accord avec cela ?

Préparé à veiller tard et à répondre aux exigences de la patiente, le professeur Bernard avait agréé la demande d'un " OUI " de la tête et l'avait confirmé d'un "C'est comme vous le souhaitez".

Après un signe de la main de Caroline, il avait débuté la lecture.