38. Coup de tonnerre
Miléna
Une détonation et je me retrouve à nouveau chez moi. Je sais que je rêve, mais je n’arrive pas à en sortir. Ma vue se brouille alors que le corps de Vahik tombe, inerte, sur le sol de notre chambre. Je suis incapable de bouger, pétrifiée par ce que je viens de voir. Tout est ma faute. Sans moi, Vahik serait encore en vie. Pourquoi a-t-il absolument voulu aller vérifier s’il ne s’agissait que de voleurs ? Pourquoi n’est-il pas venu avec moi dans la salle de bain pour fuir par la fenêtre, comme nous en avions convenu ? Pourquoi ai-je publié ce foutu article ? Un nouveau bruit. La porte de la salle de bain vient de cogner contre le meuble derrière lui. Un homme me regarde de haut depuis le chambranle, et je vois la moquette beige se couvrir de rouge derrière lui. Une vague de sang s’abat sur mes pieds et je n’arrive pas à bouger. L’homme lève son arme dans ma direction, le regard mauvais. Je m’entends supplier, mais aucun son ne sort de ma bouche. Je pleure, mais aucune larme ne coule le long de ma joue. J’ai l’impression que mes jambes cèdent, mais je reste debout. Foutue fierté que j’ai gardée jusqu’au bout, publiant malgré les avertissements, balançant mes découvertes malgré l’opposition de Vahik.
Je me réveille en sursaut en entendant le tonnerre s’abattre non loin de là. Les larmes sont finalement sur mes joues et je tremble comme une feuille. Pourquoi faut-il encore que je vive cette horrible nuit, même dans mes rêves ? Est-ce que me torturer l’esprit chaque jour à ce sujet n’est pas amplement suffisant ?
Un éclair illumine ma chambre et je sais que je ne me rendormirai pas facilement. Je me lève et vais me rafraîchir à la salle de bain avant de descendre piquer un cookie dans le pot que nous avons rempli avec Lili. Je me plante devant l’une des fenêtres de la cuisine et constate qu’il y a pas mal de vent, sans parler de la pluie qui arrose tout sur son passage. J’ouvre la grande fenêtre et respire cette odeur que j’adore en tentant de retrouver un peu de sérénité. Ces cauchemars me mettent en vrac à chaque fois, ça m’énerve. J’essaie de tourner la page, mais toujours, ils se manifestent et me rappellent que j’ai perdu Vahik, que j’aurais pu mourir, que si je retourne là-bas, je pourrais y passer. Instinctivement, j’attrape mon collier et fais rouler la bague entre mes doigts. Je n’arrive pas à m’en séparer. J’ai bien essayé, de le ranger dans mon sac, de le poser sur ma table de chevet. J’ai l’impression qu’il me manque quelque chose à chaque fois que je le laisse dans ma chambre.
Quand je remonte les escaliers, je me plante dans le couloir et jette un œil dans la direction des suites de Maxime et des enfants. Si je suis totalement honnête, c’est surtout celle du châtelain que je vise. Depuis le temps qu’on “papouille”, il serait peut-être temps de passer à l’étape supérieure. Je joue ma Cendrillon tous les soirs avec l’espoir qu’il me propose de partager son lit. C’est une étape que j’aimerais passer, sans oser prendre les devants. Mais je comprends qu’il n’ose pas être plus entreprenant, j’ai plutôt le don de refroidir ses ardeurs en général.
De manière impulsive, je bifurque à droite plutôt qu’à gauche et m’enfonce dans le couloir pour me planter devant la porte de sa chambre. J’hésite encore un moment avant de frapper doucement. Forcément, aucune réponse à l’horizon. Il faut dire qu’il est juste deux heures du matin et que frapper à la porte avec douceur n’est pas vraiment s’annoncer de la meilleure des façons. J’hésite encore un instant avant d’entrer doucement dans la chambre. Maxime n’a pas fermé le rideau et je profite d’un éclair pour constater qu’il est allongé en plein milieu de son lit, sur le ventre, et que ses draps ne cachent pas grand-chose de son anatomie.
Je ne réfléchis plus et m’approche. De l’extérieur, je suis sûre qu’on dirait une psychopathe obsédée par un mec qu’elle fait tourner en bourrique. Le pauvre, il se montre tellement patient avec moi, je ne sais pas si, à sa place, j’aurais tenu si longtemps sans me plaindre. En attendant, je m’assieds doucement sur le rebord du lit, me glisse sous le drap et l’enlace en posant ma tête contre son omoplate sans qu’il bouge d’un poil. C’est fou comme rien que ce petit contact me fait du bien. Il sent bon, sa respiration apaisée me berce un moment, mais égoïstement, j’ai envie de plus, alors je pose mes lèvres sur sa peau encore et encore tout en caressant son dos du bout de mes doigts. Maxime commence à bouger sous moi et je recule un peu lorsque je sens qu’il se réveille.
Nous sursautons tous les deux lorsque la foudre fait encore des siennes et nos yeux se trouvent. Le châtelain semble surpris de me trouver ici, mais il me sourit et m’attire dans ses bras. Je n’oppose aucune résistance et me love contre lui.
— Désolée, murmuré-je. Je ne voulais pas te réveiller. Enfin… Pas trop. Rendors-toi.
— Mmmm, grommelle-t-il en caressant mes cheveux. Tout va bien ? Tu viens faire quoi dans mes rêves ?
Il niche sa tête contre ma poitrine et je sens une de ses mains se poser sur mes fesses pour m'attirer encore plus contre lui.
— J’étais réveillée, j’avais envie d’un câlin, et tu fais les meilleurs. Tu veux que je parte ?
— Oh non, pas maintenant que je commence à me réveiller ! Tu sais bien que moi aussi, j'adore les câlins.
Il se redresse un peu et sa bouche s'empare de la mienne alors qu'une de ses mains glisse sous mon tee-shirt et empaume un de mes seins. Cela fait longtemps qu'il n'a pas été aussi entreprenant et il faut croire que son cerveau embrumé n'a pas encore remis toutes les barrières qu'il s'impose habituellement car ses doigts viennent titiller mon téton qui durcit immédiatement. Je le laisse faire et réponds à ses lèvres avec plaisir, glissant mes mains dans ses cheveux.
J’essaie de me concentrer sur le plaisir que je ressens à être à son contact, sur les sensations qu’il me procure, et de mettre de côté ce cauchemar qui hante encore mes pensées. Je sens son excitation contre ma hanche et ondule doucement, savourant le plaisir d’être ainsi lovée contre lui. Il faut que je passe ce cap, j’en ai tellement envie, tout mon être réclame davantage que des papouilles, des baisers et des caresses. J’ai envie de plus.
Je le repousse gentiment et me redresse pour enlever mon tee-shirt, que je balance au pied du lit avant de retourner me lover contre son torse. Sentir sa peau contre la mienne m’excite terriblement. C’est encore un autre niveau, après ces câlins plus sages, et j’ai l’impression qu’il embrase ma peau rien qu’avec ce contact. Maxime est maintenant totalement réveillé, et il ne me laisse pas une seconde de répit. Il vient à nouveau m’embrasser et je me retrouve sous lui rapidement. Sa bouche glisse dans mon cou, et je pousse un premier gémissement en la sentant se refermer sur l’un de mes tétons. Le traitement qu’il réserve à ma poitrine est des plus agréables. Il alterne entre de douces caresses de sa langue et de légers pincements entre ses dents, tout en promenant sa main sur mon flanc, sur mon ventre, ma cuisse.
Je ne sais combien de temps dure ce moment, mais j’ai l’impression que c’est à la fois trop court et trop long. C’est un délice autant qu’un supplice. Toujours est-il que lorsque que ses lèvres se posent juste au-dessus de mon nombril, je suis à point et prête pour la suite des événements. J’adore sentir sa barbe me chatouiller la peau comme il le fait pendant que ses mains se saisissent de ma culotte pour la faire descendre le long de mes jambes. Il se redresse et la jette à côté du tee-shirt avant de m’observer en silence. Son regard de braise me rend toute chose et il prend le temps de me détailler de haut en bas. Suivre ses yeux qui laissent transparaître toute sa gourmandise et son désir est un vrai bonheur et c’est une expérience très excitante. Je me sens désirée, je me sens belle, je me sens vivre.
— La réalité est encore mieux que mes rêves les plus fous, Belle Étrangère. Tu as vraiment bien fait de débarquer dans ma vie, comme ça, à l’improviste.
Il se penche alors et j’ai le plaisir de sentir à nouveau ses lèvres se poser doucement sur mes seins et entamer une descente dont le but ultime est en train de me causer des picotements à travers tout le corps. C’est comme si chacun de ces contacts avec sa bouche provoquait des décharges électriques qui parcourent mon corps à une allure folle. Lorsqu’il commence à embrasser le haut de mes cuisses, je prends mes seins en mains et les caresse, me préparant à profiter du talent qu’il démontre avec ses baisers qui se rapprochent encore et encore de mon clitoris. Je ne peux retenir un petit cri quand sa langue passe dessus lentement, et quand elle se met à revenir encore et encore, que je le sens m’aspirer entre ses lèvres avides, tout mon corps se cambre sous lui et je connais un premier orgasme dont la fulgurance me surprend. J’essaie de le repousser mais il continue sa délicieuse torture et la sensation de sa barbe sur mes cuisses, de sa langue sur mon petit bouton et de ses doigts au fond de moi, ne fait qu’entretenir cette jouissance merveilleuse.
Quand enfin il recule un peu et me laisse reprendre mes esprits, je constate qu’il est en train de se débarrasser de son short. Je prends à mon tour le temps de le détailler alors que sa hampe se dresse fièrement, preuve de son excitation. Je me redresse et attire sa bouche contre la mienne, le gratifiant d’un long baiser bien appuyé. Mes mains se promènent sur son torse et mes lèvres dans son cou, sur son torse avant que je n’empaume sa verge tendue et dure pour moi. Je le caresse délicatement, à tâtons, tentant de voir ce qui lui plaît, ce qui le fait davantage réagir.
Je finis par l’attirer sur moi et son sourire satisfait me pousse à le renverser sur le matelas pour me retrouver au-dessus. Ainsi installée, j’ai tout le loisir de reprendre ce que je m’amuse à faire chaque fois que je suis dans cette position. J’ondule lentement, et les sensations sont encore plus fortes en peau à peau alors que nos sexes se caressent et se stimulent au rythme de mes balancements. Maxime se presse contre moi et m’embrasse avec ferveur en empoignant mes fesses pour imprimer le rythme. Encore une fois, il ne m’oblige pas à davantage et cette divine masturbation me suffirait presque, si l’envie de le sentir en moi ne se faisait pas plus pressante.
Je le pousse à se rallonger sur le lit et me penche sur lui pour soulever mes hanches, attrapant son vit d’une main pour le positionner. Un sourire se dessine sur mes lèvres lorsque nos regards se trouvent, son gland pressé contre mes lèvres et ses mains fermement campées sur mes hanches.
Et tout vrille en un quart de seconde. Un coup de tonnerre, mon collier qui pend contre le menton de Maxime, le petit diamant qui reflète la lumière de l’éclair… Je n’ai même pas besoin de fermer les yeux pour me retrouver dans cette salle de bain, à assister à l’horreur. Je suis saisie d’un vent de panique et me recule brusquement, manquant de m’étaler au sol en perdant l’équilibre au pied du lit.
— Je… Je suis désolée, je ne peux pas… Pardon, Maxime, je… Je te demande pardon, bafouillé-je, les larmes aux yeux, en me levant pour chercher mon tee-shirt.
— Mais qu’est-ce qu’il se passe ? J’ai fait quelque chose qu’il ne fallait pas ? me demande-t-il en se levant à son tour, derrière moi.
J’enfile mon haut en vitesse, mal à l’aise et me sentant terriblement coupable.
— Non, non, c’est pas toi… C’est moi. Moi qui suis trop conne pour tourner la page, moi qui n’arrive pas à lâcher prise, moi qui… Je… Je suis tellement désolée, Maxime.
— Désolée de quoi ? Il n’y a rien eu de toute façon, répond-il amèrement. La foudre a dû tomber ailleurs et tant pis pour moi.
Je soupire et hésite sur la conduite à tenir. J’aimerais vraiment être capable de faire les choses différemment.
— J’ai fait un cauchemar, tout à l’heure, tu sais ? Je... L’orage, ça m’a fait repenser à cette nuit-là, tu vois ? Ça revient tout le temps, tu comprends ? Je suis désolée, je n’arrive pas à passer outre. Je te demande pardon, Maxime. Ce n’est pas toi, ça n’a aucun rapport avec ce que je peux ressentir pour toi. C’est cette merde qui ne sort pas de ma tête…
— Et moi, j’étais en plein rêve mais le retour à la réalité est difficile. Ne t’inquiète pas, Miléna, ça passera. Bonne nuit et on en reparle demain, à tête reposée, en espérant que tu puisses trouver le sommeil maintenant que l’orage est passé.
Il s’approche de moi et dépose un tendre baiser sur mon front avant de m’accompagner vers la porte sans me brusquer mais avec fermeté. Je lui souhaite une bonne nuit et sors sans m’attarder, préférant ne pas abuser davantage. Je m’en veux terriblement de ce que j’ai fait. Je sais que je l’ai blessé, déçu, et j’ai peur d’avoir grillé toute chance d’aller plus loin avec lui.
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