Chapitre 20 : Accident.

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Marry était sortie à toute vitesse de sa chambre, laissant sa porte ouverte derrière elle. Elle dévala les escaliers, et tomba au sol après avoir raté une marche. Elle se releva pitoyablement en relevant ses cheveux en arrière. Son sourire et les coins de sa bouche frétillaient vers le bas, tandis que ses yeux étaient rouges, gorgés de sang.

La dame de l’accueil l’interpella en se plaignant de l’heure tardive, mais elle ne s’arrêta pas. Elle fonça hors du bâtiment et couru à toute vitesse jusqu’à l’école.

Elle était essoufflée, gorge enrouée, les yeux piquants et son cœur tabassant contre sa poitrine. Celui-ci, s’arrêta un cours instant lorsqu’elle le vu, éclairé par les phares d’une voiture passante. Shad était plus loin, sur le trottoir en face, et elle était là également.

Marry serra ses poings, trahis. Il la tenait dans ses bras, elle était dans les siens… Eglantine avait menti, elle lui avait pris. Elle traversa le trottoir, en les fixant, noire de colère.

Elle s’arrêta à nouveau, il avait mis ses mains autour de son visage. Il avait collé ses lèvres sur les siennes, avec une force, un désir, qui n’égalait pas celui qu’il lui avait montré. Ils ne la voyaient pas dans la pénombre, plaquant ses deux mains sur sa bouche et laissant tomber ses genoux sur le tarmac. La douleur était trop intense, elle ne pouvait pas le supporter.

Comment allait-elle vivre sans lui ? Comment pouvait-elle imaginer construire un avenir et fondé une famille, sans celui qu’elle avait toujours aimer ? Il avait toujours été là, depuis sa naissance. Il était là, dans la maison d’à côté, faisant ses premiers pas. Ces pas fuyant la maison qui les avaient menés à elle, dans ce jardin, où ils avaient partagé tous ses souvenirs d’enfance.

Ses parents lui avaient toujours répétés, qu’ils étaient faits pour être ensemble. C’était une chance que, seule elle, connaissait. Aucun autre Richess, n’avait eu cette facilité. Elle savait qu’elle avait trouvé sa moitié, celle avec qui elle avait grandi. Et elle pensait que ce serait lui, son premier choix, lorsqu’elle aurait dû annoncer au monde quel partenaire elle avait choisie à ses seize ans.

Ils avaient vécu tant de choses ensemble, de la naïveté de l’enfance, aux baisers ardents de l’adolescence. Elle lui avait offert, ce qui lui était le plus cher. Toutes ses premières fois, et sa virginité. Elle pensait qu’ils s’étaient liés, et qu’après cet acte d’amour, plus rien n’aura pu se mettre au travers de leur route, mais elle était là.

Elle était dans le chemin, sur son chemin.

Marry releva la tête, et se tordait de douleur à la vue de son amour embrassant une autre. Elle rêvait de se lever, et de se jeter entre eux deux. Elle rêvait de lui flanquer une raclée, alors qu’elle n’avait jamais posé le doigt sur personne, mais ses jambes ne lui obéissait pas. Le monde autour d’elle semblait s’effondrer, elle était invisible dans la pénombre. Inexistante.

La lumière de deux gros phares au loin l’interpella, « enfin de la lumière » se disait-elle. Elle puisa dans ses dernières forces, pour faire se lever ce corps fait de jambes tremblantes. Elle fit quelques pas vers eux, honteuse de sa condition.

Mais qu’est-ce qu’elle avait à perdre ? Plus rien, c’est ce qu’elle pensait.

***

Eglantine avait reçu une énième lettre. Comme toutes les autres, elle hésita à l’ouvrir, mais s’en était trop pour elle. Elle s’apprêtait à la jeter à la poubelle, quand une voix dans sa tête l’en empêcha. Sa conscience, ne lui permettait pas de ne pas la prendre en compte. Alors, elle l’ouvrit et découvrit à nouveau une lettre d’amour. C’est parce que les sentiments d’une personne étaient en jeu, qu’elle s’infligea ce supplice.

Cela faisait plus de deux semaines qu’il lui glissait des lettres sous sa porte, ou qu’elle retrouvait des mots d’amour dans son sac d’école. Mais elle n’était pas intéressée, elle ne l’avait jamais été. Celui vers qui toutes ses pensées étaient dirigées, il était tel, qu’elle n’osait même pas se l’avouer.

Il lui donnai rendez-vous devant l’école, à 20h00. Elle pensait que c’était dangereux, et qu’elle ne devrait pas y aller vu l’heure tardive.

Cependant, elle n’en pouvait plus de ces lettres. Il fallait qu’elle le voie une bonne fois pour toute, pour lui expliquer qu’il n’y aurait jamais rien entre eux.

Alors, elle décida de s’y rendre.

Il était adossé contre un muret, sur le trottoir en face de l’école. Eglantine était très mal à l’aise, mais elle prit son courage à deux mains et le rejoignit. Il lui fit un léger sourire lorsqu’il l’aperçut.

- Alors tu es venu ? dit-il d’un air soulagé.

- Oui, nous devons discuter… Ecoute Shad, je te l’ai déjà dit, mais toi et moi, c’est impossible…

- Ne dis pas ça, je sais que tu ne le penses pas, répondit-il angoissé. On est fait pour être ensemble…

- Non Shad ! Je te le dis, et ce sera la dernière fois que je te le dirai. Je suis désolé, mais toi et moi, c’est non.

- Mais pourquoi ?

- Mais parce que… parce que tu as Marry, bon sang ! s’énerva-t-elle.

- Plus maintenant… Je l'ai quitté, annonça-t-il d'un sourire.

- Quoi ?! Pourquoi as-tu fait ça ?

- Je lui ai écrit une lettre, avoua-t-il.

- Tu veux dire… que tu n’as même pas pris la peine de lui dire en face ? s'interloqua-t-elle.

- Tu rigoles ? Elle fait du judo, je voudrais pas qu’elle me casse quelque chose…

- Mais ce n’est pas une raison ! Tu aurais dû lui dire en face, vas la retrouver !

- Ce n’est pas la peine, je lui ai dit que nous allions nous mettre ensemble !

Le visage d’Eglantine se décomposa, il lui avait dit quoi ? Il avait réellement mis par écrit, qu’ils allaient se mettre ensemble ? Une angoisse montait en elle en imaginant la colère de Marry. Alors qu’elle était venue se confier à elle, et qu’elle l’avait encouragé en retour. Jamais, elle ne lui aurait pardonné.

- Que ce soit clair, je ne suis pas amoureuse de toi, dit-elle sèchement.

- Bien sûr que si, tu te mens à toi-même, et je vais te le prouver, dit-il en s’approchant d’elle.

- Quoi que tu fasses, Shad… Non, lâche-moi ! Arrê…

Il avait empoigné son visage, et collé ses lèvres gluantes sur les siennes. Elle n’arrivait pas à se dégager, il avait trop de force. Il continuait de l’embrasser, dépassant largement l’ouverture de sa bouche, et continuais à serrer son cou. Elle plissait les yeux, dégoûté et tentait de se débattre en lui donnant des coups sur le torse. L’idée de ne pas s’en sortir lui traversa l’esprit, ses yeux commencèrent à se gorger de larmes. C’est là, qu’elle vit un rayon de lumière éclairé le visage immonde de son agresseur. Une voiture approchait, il fallait qu’elle se dégage. Peut-être, il y avait-il son sauveur dans cette voiture ?

Elle s’empressa de lui coller un coup de genoux dans l’entre-jambes. Il hurla de douleur et se plia en deux par réflexe. Elle s’empressa de traverser la route, jugeant que l’autre trottoir serait moins dangereux. Dans sa chute, Shad l’aperçut.

- Marry ?!

Alors qu’elle était encore sur la route, Eglantine se retourna prise de peur lorsqu’elle entendit son nom. La voiture arrivait à toute vitesse, éclairant l’entièreté de son corps. Il en regarda une, puis il regarda l’autre. C’était Marry, son amie d’enfance, sa première petite amie, sa future femme, ou Eglantine, le fruit du désir, l’interdit et la pureté à l’état pur.

Il fit son choix.

La tête d’Eglantine claqua contre le sol dans sa chute, poussée par une force surhumaine. Marry ouvrit les yeux et la bouche en grand, aucun son n’en sortit. Elle s’étala au sol, incapable de crier, de hurler. Elle se saisit la tête, et enfonça ses ongles dans son crâne, face à cette scène. Elle se plia en deux sur elle-même, se tenant alors les côtes. Elle avait son visage entre ses deux cuisses, les dents complètements apparentes. Elle tapa son poing contre le sol, et releva son buste vers l’arrière. Ses yeux roulaient dans leurs orbites, tandis qu’elle se tenait le visage entre ses mains. Elle se laissa à nouveau tomber vers l’avant, poussant un hurlement d’horreur. Après ça, ses cris ne cessèrent plus, brisant le calme de la nuit.

Que pouvait-elle bien perdre de plus ?

***

Nous restions ébahis face à cette histoire, la peine se lisait gravement sur le visage d’Eglantine. Michael lui tenait la main en guise de réconfort. J’étais incapable de dire quoi que ce soit, même Alicia ne regardait plus rien d’autre que le sol. Elliot ne faisait pas le fier et Katerina se mangeait la lèvre. C’est Chuck qui prit l’initiative.

- Je suis désolé Eglantine, je ne me doutais pas que ce serait aussi pénible à raconter pour toi…

- Dis-toi que je ne suis pas celle à qui cela fait le plus de peine, répondit-elle difficilement.

- C’est vrai…

- Mais est-ce une raison pour te harceler maintenant ? Ce n’était pas ta faute… Katerina.

- Je pense que sa réaction est démesurée, commença Michael. Ce n’est évidemment pas une raison…

- Bien sûr que c’est une raison ! Cria Alicia en claquant ses mains contre la table.

Elle se releva de sa chaise d’une traite, et nous la regardions ébahis. Elle arborait un visage que nous n’avions jamais vu. Ses yeux étaient noirs, et son sourire si charmant avait disparu.

- Pourquoi tu t’énerves ? Est-ce que tu trouves que c’est juste ce qu’elle subit au quotidien avec Marry ? demanda calmement Michael.

- Ce n’est pas ce que j’ai dit !

- Pourquoi est-ce que tu prends la défense de Marry ? Tu penses vraiment que cette histoire, justifie son comportement ? s’énerva Katerina. La perte d’un proche…

· En as-tu seulement déjà perdu un ? la coupa-t-elle en lui jetant un regard noir.

Sa voix avait changé, rauque. Je compris dés cet instant ce qu’elle devait ressentir. J’ai compris à quoi elle faisait référence, j’avais enfin ma réponse.

- Non mais…

- Alors tu ne peux pas savoir ! Quand tu perds un être proche… c’est… c’est… répétait-elle. Toute la tristesse… et toute la haine du monde… ne sont pas suffisante pour l’exprimer… Et quand tu le vois de tes propres yeux, déglutit-elle. C’est comme si l’on te punissait à vie… parce que tu étais présent, et que tu n’as rien pu faire, finit-elle en se rasseyant la tête baissée. S’il vous plait, ne jugez pas trop vite ses personnes parce que ce sont eux les malheureux.

- Je suis d’accord, dit Eglantine. Oui, j’aurais aimé ne jamais subir ça, et je sais que ce n’était pas ma faute, mais… C’était l’amour de sa vie…

- J’ai besoin de prendre l’air, se leva Alicia.

Elle fuya hors du bar, Eglantine se leva directement pour la rejoindre et la retrouva accroupie dans l’allée permettant l’accès au parking. Elle se mit à sa hauteur pour passer sa main dans son dos.

· Je suis désolé, ça passera, répondit-elle la tête emmitoufler dans ses genoux.

· Tu as perdu quelqu’un, toi aussi ? Excuse mon manque de tact, je voudrais ismplement te comprendre...

Elle releva simplement la tête vers la douce Eglantine qui lui saisit le visage et qui essuya ses larmes à l'aide de son mouchoire de poche. Elle lui lança un sourire tendre, auquel Alicia répondu tant bien que mal. Lorsque nous arrivions tous, inquiets, elle sembla encore plus en peine. Katerina lui sauta dans les bras, désolée de l’avoir fait pleurer. Les garçons, et moi-même restions un peu sur la réserve.

- Oui, moi aussi… J’ai perdu quelqu’un, souffla-t-elle.

- Est-ce que tu veux en parler ? demanda Katerina.

- Tu n’es pas obligé, lui dit Eglantine en caressant ses cheveux.

- C'est juste que c'est difficile à dire, avoua-t-elle.

- Il s’agit de ta mère, n’est-ce pas ? dis-je à sa place.

Elle hocha de la tête. Nous étions désolés de l'apprendre. Je me remis en question par rapport à Marry. Ce n'était pas sa famille, mais son amoureux qu'elle avait perdue. Les mots d'Alicia résonnait dans ma tête. Ils m'obligeaient à me souvenir des actes de mon père, de ce qu'il faisait subir à ma mère. Elle l'avait dit : assisté au spectacle sans pouvoir rien faire, nous rend impuissant. La nouvelle nous avaient tous bouleversé, ainsi nous rentrions pour en discuter.

Les parents d'Alicia étaient antiquaires et tenait leur propre boutique. Ils se déplacaient souvent pour réquisitionner les fournitures, et voyageait beaucoup en quête de pièces d’exception. Alors elle se faisait garder par sa voisine, mais elle précisait que c'était de bons souvenirs.

La notoriété de leur magasin leur avaient permis de signer des partenariats importants. Le rêve de sa mère était de devenir restauratrice d’œuvre d’art. Elle avait même repris des études dans ce but. Pour l’un de ces stages, elle signa un contrat avec une galerie d’art qui se situait à la frontière du pays. Elle en aurait pour cinq heures de route. Cela faisait longtemps, qu’il n’avait plus profiter d’une sortie en famille, alors avec son père, ils décidèrent de louer un hôtel et de profiter de ce séjour pendant quelques jours.

Tout se déroula parfaitement, sa a mère, épanouie, et son père avait eu l’occasion de parcourir de nombreuses brocantes au bord de la plage. Mais surtout, ils avaient passé de merveilleux moments avec Alicia. Ils avaient mangé chaque soir dans un restaurant différent, de la cuisine française, à la bouffe asiatique, en passant par l’Inde et l’Afrique. Ils étaient tous les deux passionnés par les bienfaits de la différence culturelle et étudiaient l’histoire de nombreuses civilisations. Avec leur fille, ils avaient été à la fête foraine, et avaient participé à des activités nocturnes sur la plage. Ils avaient profité des soirées dansantes, des bons repas, et du sourire de leur fille.

C’est sur le chemin du retour, que le drame se produit. Ils s’arrêtèrent sur une aire d’autoroute pour se soulager, et en remontant dans la voiture sa mère n’avait pas encore remis sa ceinture. Tandis qu’elle la passait autour d’elle, et que son père accélérait pour revenir sur le chemin, une voiture leur rentra dedans. Alicia et son père furent secoués, et furent protéger grâce à leurs ceintures. Ce ne fut pas le cas de sa mère.

L'expression d'Alicia était affreuse, surement traversé par le souvenirs d'horribles images. Elle nous expliqua avoua ensuite que sa mère avait étudié à Saint-Clair, mais qu’elle n'avait aucune envie de suivre sa voie à l'époque. Mais à la mort de cette dernière, elle respecta ses dernières volontés tout comme son père, qui ajouta à sa liste le métier de rénovateur.

- Alors, c’est assez récent ? demandais-je.

- En juin, avant les grandes vacances...

- Comment est-ce possible ? s'interrogea Elliot qui tombait des nues.

- Tu as toujours le sourire, tu es incroyable, le compléta Eglantine.

- C’est vrai, ajouta Chuck. Je n’aurais jamais crû que cela puisse être aussi récent.

- Je suis d’accord, acquiesça Michael.

- Nous sommes directement allés voir quelqu’un avec mon père, ça nous à fait beaucoup de bien, expliqua-t-elle. Heureusement, car comme Marry, j’avais la haine. J’en voulais au monde entier, et surtout à ce chauffeur. Au fond, je lui en veux encore, marmonna-t-elle.

- Je comprends mieux, dit Katerina. Mais contrairement à elle, tu es incroyable, ajouta-t-elle. Tu as toujours le sourire !

- Peut-être qu’elle n’a pas eu l’occasion, contrairement à moi, de se confier. Ses parents n’ont peut-être pas eu les bons réflexes et… puis, je vous ai vous mes amis ! C’est vous qui me donnez le sourire!

Nos yeux pétillèrent en voyant les siens à nouveau rieurs. C'était un soulagement. Nous étions émus, et ses mots réussirent à apaiser notre haine. Eglantine était tout aussi incroyable, elle ne méritait pas ce châtiment, et pourtant elle l'acceptait, vivant la colère et la tristesse de Marry à travers tous ses actes malveillants.

- Je suis désolé de m’être énervée, mais d’une manière ou d’une autre… je crois que je la comprends un peu, dit-elle embêtée.

- C’est ce que je voulais aussi que vous compreniez, ajouta Eglantine.

- D’accord, mais je refuse qu’elle continue de te faire souffrir, répondit Michael en saisissant sa main.

- C’est vrai, n’oublie pas qu’elle vous à menacer toi et Michael, n’est-ce pas Chuck ? Insista Elliot.

- Ne vous inquiétez pas pour ça. Quoi qu’elle fasse, je la neutraliserais.

Chuck nous avait simplement part de la baffe et des menaces qu'elle avait proféré, et ce fut suffisant. Forcément, il ne nous racontait pas tout, et lorsqu’il avait des idées derrière la tête, il avait toujours ce sourire énigmatique collé à son visage.

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