Le bain.
Le soleil s’était levé depuis peu alors que Xanthie s'éveillait. Les rayons obliques de l’astre filtraient déjà au travers des courtines de lin bleutées des grandes fenêtres et du feuillage des treilles.
Sa lumière venait colorer les murs peints de l’immense chambre ainsi que les pilastres d’albâtre décorant la porte.
Il faisait déjà chaud, la belle esclave rejeta sur le côté les draps de soie et la fine couverture de laine blanche. Puis son premier regard fut pour sa beauté nue que lui renvoyait le grand miroir fixé au ciel du lit. Elle caressa de ses doigts délicats tous les contours du corps de son amant qui dormait profondément.
Elle songea, confusément, à l'impression qu'avait fixée dans sa mémoire la présence du Hors-Loi. Souvent il lui apparaissait dans ses rêves. Elle l’associait à la figure d'un Dieu guerrier.
De sa vie de schoeniculae, elle se souvenait des caresses contraintes qu'elle vendait pour quelques has. Elle se remémora de son désir, ou plutôt de son fantasme vague de devenir l'amante d'un dieu. Elle en parlait souvent à bord du « Saumon Rouge » à Lucius son maitre d’alors. Au mieux il se moquait d’elle, au pire il la faisait baiser par son dogue pour divertir l’équipage. Elle s'indignait non pas de cette étreinte bestiale, mais plutôt qu’on se moque des prédictions de Fabula*, la sorcière du port d’Aquilata. Celle-ci lui avait prédit sa rencontre avec un être divin. Qu’elle se donnerait à lui sur les bords d’un fleuve, dans un bois mystérieux, où le sang aurait coulé. Il la conduirait vers l'inconnu. Elle songeait à cela alors qu’elle contemplait le visage viril de Garm. Elle aimait se sentir esclave entre ses bras doués d’une force immense, prisonnière de son pouvoir et de sa science.
Elle était très jeune et belle, elle pouvait, à la fin d'un festin faire trembler d'émotion toute une assemblée en se montrant nue sur la table et en dansant comme une impudique sauvageonne.
La luxure avait passé sur son corps sa langue de feu sans la consumer. Elle avait vécu ses années de prostitution comme dans un songe. Les ardeurs, de ses clients l’avaient laissée froide, insensible et blanche comme une statue d’albâtre. Et de se voir dans le grand miroir, jeune encore, belle et fraîche comme une vierge, la faisait sourire, satisfaite d'elle-même, contente de la vie.
Elle se dressa en souriant et sauta du lit sans réveiller son maitre et amant.
Plus tard, beaucoup plus tard.
Garm se contenta de s’étirer, alors que la lumière du soleil ruisselait à l'intérieur de sa chambre. Victorine 11, sa gouvernante, ouvrit les rideaux comme à chaque fois qu'il n'arrivait pas à se réveiller de son plein gré, car il était enclin à rester éveillé au lit pendant la majeure partie de la matinée. Qui aurait pu dire qu'un Commandeur des Hors-Loi propriétaire d’entreprises prospères ne pourrait pas s’offrir le confort de son lit moelleux aux draps de soie ? Il les écarta et se dirigea vers le balcon, les paumes posées sur le rebord en marbre à motifs ouvragées. Son visage s'éclaircit alors qu'il aperçut une forme agréable en dessous, juste entrevue. Avant que la jeune fille, quasi nue ne disparaisse derrière un des bosquets de chèvrefeuilles qui poussaient dans son jardin. Les yeux bleu clair de Garm suivirent à nouveau la fillette, comme s’il était un hibou silencieux percevant le battement de cœur d’une souris qui courait entre les massifs. Il pouvait voir ses petits seins rebondir délicieusement alors qu’elle filait entre les arbustes sombres.
Garm fit quelques pas sur le côté, là où il avait fait installé une douche, un ancien modèle à l’image de ce qui se faisait jadis sur terre. Certes, il avait une baignoire en bronze dorée du dernier chic Dominien dans sa chambre à coucher, mais il ne l’utilisait que le soir. De plus, prendre une douche sur la terrasse était bien plus divertissant. Garm souriait alors que Xanthie remontée du jardin le rejoignit sous la douche. Victorine 11 lui tapa sur l'épaule.
- Voulez-vous prendre une douche maintenant, Seigneur ?
Il acquiesça distraitement, passant sous la pomme de douche.
- Seigneur, votre esclave est sale et en sueur, déclara la gouvernante.
- Je le vois bien ! Petite, enlève ta tunique ! Tu es encore allée au chenil ?
- Mais maitre, j’aime bien les chiens…
- je sens cela.
Victorine 11 tendit d’un air dégouté à la jeune fille une brosse et un pain de savon. Puis elle s’en retourna pour commander le petit-déjeuner.
- C’est beaucoup mieux. Commenta Garm, alors que Xanthie se passait le savon sur ses petits seins fermes, son ventre plat et ses longues jambes. La petite, aimait la mousse, c’était une des nombreuses choses qu’elle avait connues grâce à son maitre. Elle accumulait beaucoup de savon sur ses seins, puis elle se mit sur la pointe des pieds pour les frotter sur le bas du torse musclé de Garm.
- Ça fait du bien, petite Chienne, mmm. Alors que l'eau chaude les recouvrait. Ces yeux se mirent à briller.
La gouvernante, revenait poussant un plateau chargé du petit déjeuner.
- Victorine 11, merci, mais nourris davantage cette petite salope, ajouta-t-il joyeusement. Un bon leno devrait avoir une petite chienne avec deux beaux seins plus gros. À l’heure actuelle, je ne peux même pas la différencier d’un garçon.
Xanthie secoua la tête avec véhémence.
- Je ne pense pas… si maître. Moi déjà trop manger.
- Victorine 11, tu demanderas à Valerinus de la prendre comme élève et à Sylvie 23 de lui donner de vrais cours de danse.
- Bien seigneur Garm.
- Je la laisse entre tes mains. Je vais à la salle de com qu’on ne me dérange pas.
- Bien Seigneur.
- Et moi ! j’ai pas mot à dire ? s’insurgea Xanthie.
- Tais-toi esclave ! Et obéis à Victorine 11. Dit-il en lui claquant les fesses.
Sans s’attarder il prit un croissant enroula sa nudité dans une serviette et laissa seules les deux femmes.
Xanthie sortie de sous la douche pour entrer dans le bain où flottait des pétales de roses. Comme une transparente étole de vermeil, sa chevelure cascadait sur ses épaules et sur son dos. Elle posa un pied nus sur le fond de la baignoire en bronze doré où était incrusté en fils d’argent des motifs floraux. La chaleur du bain la surprit agréablement et la fit rire. Son rire clair creusa sur ses joues de petites fossettes. Elle se tortilla sur une jambe avant que son autre pieds ne toucha le fond.
La baignoire avait les dimensions d’un bassin avec en son centre un petit jet d’eau
Debout sur la pointe des pieds, elle avait de l’eau jusqu’à la poitrine. Elle se lança pour atteindre l’autre côté. Elle fit cela sans une éclaboussure. Elle se déplaçait d'un bord à l'autre comme une nymphe aux épaules d’ivoire, à la chevelure nénuphar rougeoyant flottait autour d’elle. Elle avait une impression étrange de puissance immérité. Ce sentiment proche de l’allégresse, elle l'avait trouvé dans son amour pour Garm. Il était dangereux, magnifique, terrifiant parfois, mais toujours majestueux. Par moments il agissait comme un être divin mais avec tant de simplicité qu’on oubliait qui il était.
- Esclave il est temps…
- Oui, d’accord. Elle soupira. Dit Victorine ! Pourquoi vous avez un numéro toutes ?
- C’est simple, ma mère s’appelait Victorine 10 cela veut dire que nous servons le seigneur Garm depuis 11 générations.
- Alors tu veux dire que la famille de Sylvie 23 le sert depuis 23 générations ?
- Tout à fait esclave.
- Vous comme moi ! Ses esclaves ?
- C’est plus compliqué que cela. Nous pouvons être affranchies si nous le voulons.
Mais dans ce cas nous devons sortir du Palais, c’est la règle.
- Donc moi aussi ?
- Oui, mais tu ne le feras pas, je me trompe ?
- Non Victorine, tu as raison.
- Je sais nous sommes toutes comme toi, nous voulons servir le maitre.
- Et toi aussi baiser avec le maitre ?
- Evidement, nous avons toutes eu cet honneur, avec la possibilité de refuser.
- Et toi jalouse ?
- Par tous les dieux… non ! J’ai un amant. Ici le sexe c’est comme pour toi. Tu ne confonds pas amour et baise.
- Mais si un homme libre veut de toi ?
- Tu veux dire si je consens à accepter un homme libre ?
- Si toi veux.
- Dans ce cas, soit je suis affranchie, soit il devient esclave. Soit et c’est mon cas, mon homme est un Hors-Loi. Mais être l’esclave de Garm, est un titre prestigieux. D’ailleurs ton collier tout comme le mien est en or pur. Et tu sais, personne, dans tout l’empire et même au-delà, ne nous manquerait de respect. Si cela devait arriver… je pleins ce fou. Il y a trois génération c’est arrivé. Alors le seigneur Garm a amputé aux coudes et aux genoux les coupables, puis il les a enchainés à l’entrée du palais.
- C’est qui Valerinus ?
- Valerinus, est un grand professeur, un Hors-Loi, il utilise des machines, des drogues, et tout un tas de choses pour faire entrer dans une petite tête comme la tienne, tout un savoir que tu ne peux imaginer.
- Et Sylvie 23 ?
- Je pense que tu aimeras plus. C’est une danseuse étoile.
- Une danseuse étoile ? C’est quoi ça.
- Tu verras, tu penses bien danser ? Mais entre Sylvie et toi il y a un gouffre. Elle t’apprendra des pas, des postures, des méthodes d’échauffement, la barre au sol et au mur. Tu verras ! Tu souffriras, mais tu aimeras cette souffrance, car comme toutes les danseuses, tu aimes la douleur.
- Et ton mari, tu dis-lui, être Hors-Loi, donc vivre très, très longtemps ?
- Mais non, c’est un Res ! Garm, est un Reg.
- Quoi être la différence ?
- Tu parles vraiment en charabia. Je plains Valerinus. Un Res c’est un citoyen qui peut voter et porter les armes. Un Reg c’est un régénéré c’est plus qu’un homme, on ne peut pas les tuer. Même si tu lui coupes la tête, même si tu le jettes dans un volcan ou une cuve en fusion, tôt ou tard, il reviendra frapper à la porte de son palais.
- Mais il est vrai que pour nous, les esclaves de Garm, la vie est plus longue, beaucoup, beaucoup, beaucoup plus longue et confortable que pour tous les autres habitants d’’Exo. Ici il y a des médecins un hôpital, des choses qui n’existent nulle part ailleurs.
- Le palais c’est grand comment ?
- Grand comment ?... Le palais est bâtie sur une des iles d’Aquilata. C’est presque un losange de 6 stades sur 4.
- C’est grand comme une ville ?
- Oui c’est même plus grand que beaucoup de villes. Et notre palais est une véritable forteresse au sein d’Aquilata. Tu t’en rendras vite compte.
- Tu dois savoir aussi, que sur notre planète, en cette année 2764 du troisième calendrier de l’Ecclésiaste, on est revenu à une représentation très réduite de la Société. Le but initial était de prévenir les guerres, les famines, les inégalités dans la mesure du possible. Mais c’était plutôt la vision délirante de l’Ecclésiaste. Pour y arriver, il a eu l’aide D’Avalon qui avait besoin de matières premières pour le bon fonctionnement de leur île. Il a donc fallu créer la Guilde Souveraine, la Ligne et refaire les classes sociales sur un modèle antique. C’est ce que l’Ecclésiaste, appelait « Une société en forme de pyramide. » Tout au sommet, il y le Cartel Suprême, qui nomme les Administrateurs des Régions, les Grands maître des Guildes et le Président de la Ligne, ce sont les Régénérés. En dessous, mais toujours au sommet, il y les Rois, les Empereurs et les milliardaires, ce sont les citoyens Alpha. Ils représentent une infime fraction de la population mondiale. Ils peuvent faire ce qu’ils veulent, sous réserve de ne pas déplaire à un membre du Cartel Suprême ou à un Régénéré et de payer l’impôt. Au milieu, il y a les citoyens Lambda. Ils n’ont aucuns rapports avec le sommet de la pyramide. Ils ignorent même l’existence du Cartel Suprême. Ils vivent sans aucune technologie, ce qui est un gage de contrôle par le Cartel Suprême ou de conflits limités. Les résidences des membres du Cartel comme ce palais leur sont dissimulées. Je veux dire que la plus grande partie leur sont interdites. En dessous et jusqu’à la base, il y les esclaves. Il y en a aussi bien chez les Alpha que chez les Lambdas. Ce sont les condamnés de droit commun pour des faits bénins : dettes, vol, prisonniers de guerre, avoir déplu à un citoyen Alpha… Les plus malchanceux, ou les condamnés pour des faits graves sont les iŭga. Dépendant du Cartel, il y a les Hors-Loi. Seuls les Hors-Loi et le Cartel et certains citoyens Alpha ont accès à la technologie. Voilà dans quel monde tu vis. Et sache que tu n’es pas une esclave mais une S-clave ce qui n’est pas pareille.
- Quoi ça veut dire ?
- Valerinus te l’expliquera. Bon il est temps que tu sortes du bain.
Elle acquiesça avec de petits mouvements enfantins et charmants. A chaque pas sur les dalles de marbre, une pluie argenté une tombait de sa chevelure. Victorine appela et fit entrer deux servantes qui l'aidèrent dans la toilette de Xanthie c'étaient des tractatrices* et des tonstrices*, chargées du massage de son corps et son épilation. Xanthie se laissa manipuler par les trois femmes qui la frottaient d’huiles parfumées et lui étiraient les membres vigoureusement pour les rendre plus légers et plus souples. Puis elle s'assit sur une chaise curule afin d’être maquillée. Elle était enfin prête à porter l’Áodàixẻtà.
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Tractatrices*: désigne celui ou celle dont la fonction est l’application des huiles, des onguents, des parfums liquides, dont on se servait avant & après le bain, occupait un grand nombre de personnes. Alors ceux qui enseignaient l’art d’administrer ces onguents ou ces huiles aux gens en santé, se firent à leur tour appeler ïatraliptes, & établirent sous eux en hommes & en femmes, des manieurs ou manieuses de jointures pour assouplir les membres, tractatores, & tractatrices ; des dépileurs & des dépileuses, alipilarii & tonstrices* ; enfin, des personnes de l’un & de l’autre sexe, pour oindre le corps des différentes huiles, onguents, & parfums nécessaires, unctores, & unctrices ;
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