Chapitre 1 : Elle n’est pas humaine

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Au milieu des flammes, elle subissait depuis des milliers d'années toutes les souffrances infligées par sa reine Lilith. Cette succube était prisonnière d'un feu éternel, désespérée, incapable d'attester que son calvaire puisse prendre fin.

Avant, la diablesse avait enduré le pilori puis laissée en offrande à d'autres démons après avoir été attachée et contrainte à obéir par sa propre reine. Souffrir était devenue naturel, son quotidien. La charmante démone était résignée.

Parfois sa reine lui accordait un semblant de pause, quelques mois sans souffrir avant de lui infliger un nouveau calvaire. Cet être vivait l'enfer. Dans ce lieu, il n'y que roc, lave, feu, cris et ossements. L'enfer ne dispose pas du modernisme que l'on connaît.

La souffrance finissait par avoir des effets très limités, cette succube était capable de supporter de tout. Parfois, Lilith la récompensait sans raison comme quand on donne un chocolat à un enfant.

La nuance réside de l'absence totale de bienveillance de l'acte, si la démone voulait être récompensée à nouveau, elle devait infliger de la souffrance.

Cependant tout était éphémère et la diablesse reperdait toute émotion, elle repartait toujours subir un nouveau calvaire pendant des années pour que sa maîtresse se réassure que son esclave considère sa souffrance comme normale.

La succube était formatée par un apprentissage sévère. La démone prisonnière ne se rebellait pas, avare de sa puissance, l'argument était la possession de divers pouvoirs dont elle ne souhaiterait jamais se séparer.

L'immortalité, la jeunesse éternelle, la possibilité de changer de forme à volonté, quatre ailes à déployer, la capacité de lire dans les pensées des humains, le voyage astral, le rêve, la pyrokinésie ainsi qu'une force et une intelligence décuplée et le mieux, la séduction la plus parfaite qui soit en étaient les exemples d'une plus longue liste comprenant même le contrôle mental des personnes séduites.

Un être si puissant qui s'avérait pourtant bien impuissant face à sa cellule de feu.

Sa maîtresse vint alors la libérer. C'était la plus puissante et la plus ancienne des succubes. Ses pouvoirs étaient incommensurables, dépassant les limites de l'entendement humain. La reine maîtrisait l'omniscience et l'omniprésence, le don d'ubiquité. La prisonnière, l'une de ses premières esclaves était à genoux, de crainte du courroux de sa reine.

«Lileva, je vais te faire un cadeau que tu n'as jamais eu, tu vas avoir la chance de voir la Terre, sois consciente de l'opportunité inouïe reçue.»

C'était l'espoir qui naissait pour la succube. Lileva avait étudié la Terre sans jamais la voir. Lileva en connaissait la description des livres et de ce qu'on dit.

Exceptionnels sont les démons qui ont la chance d'étudier la planète bleue, encore plus de voir une seule fois la Terre depuis leur longue existence. Lileva était une démone de haute classe, les succubes jouissent d'une haute position en enfer, elle était de la race la plus prestigieuse de par sa naissance mais restait démone parmi millions d'autres.

Si bien des succubes n'ont jamais la chance de voir la Terre et encore moins de la fouler, la plupart ne sont condamnées qu'à faire souffrir les damnés de l'enfer quand elles ne subissent pas à leur tour un calvaire infligé par leur reine.

Il existait une école bâtie par Lilith spécifiquement pour les voyageurs terrestres potentiels, d'un style rectangulaire et sombre. L'école avait des proportions démesurées au regard de la faible quantité de voyageurs potentiels, les salles étaient d'une hauteur égocentrique, facilement un hectomètre. La reine l'avait baptisé école terrienne. L'école était orientée, on n'y apprenait que ce que l'on avait besoin.

Lileva menait vie dure à ses martyrs afin que ceux ci racontent la vie sur Terre. La succube exigeait tout savoir. Les victimes étaient tourmentées car ces dernières n'avaient plus aucune chance de remettre les pieds dans quelque chose qui leur semble être aujourd'hui la parfaite définition du paradis.

Beaucoup regrettaient de ne pas avoir plus profité de la vie. Pour Lileva, la Terre c'était l'espoir, l'aspiration à quelque chose de mieux. L'espoir et le plaisir de faire souffrir ses victimes, c'est tout ce que ressentait la succube.

Lilith et Lileva observaient la Terre en toute discrétion.

«Tu vois Lileva, cette femme qui se fait abuser, si cet homme ne l'abusait pas, elle mourrait de la famine. Je peux prédire l'avenir. En effet, ce porc va lui accorder sa protection contre sa soumission.»

Lileva récitait la propagande de sa reine.

«Cette esclave ne peut s'en prendre qu'à elle d'être si faible. C'est son unique solution, c'est pour cette raison que je dois être forte, que je ne dois jamais pleurer, ne jamais avoir de remord, bannir la bienveillance et l'altruisme.»

C'était la justification martelée de Lilith pour faire souffrir à outrance ses subalternes, la seigneuresse exigeait n'avoir que des succubes fortes, capables de supporter et de surmonter moultes épreuves. Le mantra appris par cœur par ses subalternes et par Lileva. Toujours est-il que Lilith n'appréciait pas le comportement de cet homme, elle l'accusait de profiter de la faiblesse de cette femme, inspirant un profond dégoût à la reine toute puissante.

«Je peux décider de faire payer cet homme, c'est ma genèse d'être malveillante et de répandre la destruction. Les hommes me donnent une bonne excuse tous les jours. Je ferai mourir celui la de la peste, il brûlera dans les flammes de l'enfer et son esclave héritera. Aucune solidarité féminine, je sais qu'elle perdra tout, c'est triste mais toi Lileva, tu comprends la noblesse.»

«Oui, ce qui différencie le noble d'un misérable, c'est la soumission à des règles qu'il s'impose pour œuvrer à plus grand que lui. C'est l'humilité de ne pas se complaire dans la médiocrité. Le miséreux a besoin que l'on les lui impose, c'est lui rendre service. Les esclaves ne peuvent construire une pyramide sans pharaon pour les empêcher de rêvasser. C'est aussi l'élite qui créé la roue qu'utilise la populace, l'homme masse dans son orgueil estime que la roue lui est dû par sa simple existence quand elle a un devoir évident de reconnaissance envers les élites inventrices.»

Il n'est aucunement utile de s'inquiéter de l'avenir de la paysanne, elle finira morte de faim. Les prédictions de Lilith sont justes.

La visite terminée, la succube passera des années à faire souffrir des âmes damnées. Lileva aimait beaucoup la relation de domination avec ses esclaves. La belle démone n'attendait que d'être considérée comme une victime pour pouvoir faire souffrir un peu plus les tourmentés du royaume de sa reine.

La charmante démone pouvait faire mine d'être désolée, d'afficher de fausses larmes et de laisser paraître une faille dans le seul but de faire naître un soupçon d'espoir chez ses victimes, pour mieux les briser en affichant un rire des plus sadiques, amusée de leur espoir brisé.

La succube aimait leur montrer leur impuissance, leur incapacité à la satisfaire sexuellement ou à s'évader, elle appréciait particulièrement taillader, fouetter, mordre et étouffer ses victimes. Sanguinaire, la jeune femme était la pire bourrelle. C'est son seul moyen de ressentir des émotions positives, du plaisir.

Des centaines d'années passèrent. Alors que la succube vaquait à ses occupations, un bruit se fit entendre, un signal que connaissait la succube et attendu avec impatience.

La démone se dirigeait en vitesse vers la pièce dont provenait le signal.

Près de la chambre, la démone ralentissait l'allure, elle cachait son impatience. Dans cette chambre apparaissait un homme enchaîné pieds et mains sur une croix. Un homme surpris par la situation et son enchevêtrement, perdu.

«Ou suis-je ?»

L'incompréhension se lisait sur son visage. Le nouvel arrivant se débattait pour défaire les chaînes, vainement. Lileva adorait toujours ce moment. Un nouveau, non initié à l'enfer, c'est sa partie préférée, celle qui lui procurait le plus de plaisir. La succube prit un grand sourire et l'accueille.

«Tu t'en doutes, tu refuses d'y croire, tu chasses cette pensée mais je vais la conforter, bienvenue en enfer !»

Un rire marqué prenait la succube devant la protestation de ce nouveau prisonnier qui continuait de se débattre, dont le tintement des chaînes reprenait de plus belle.

«Quoi ?! J'ai toujours été bon musulman, je devrais aller au paradis !»

La nuisance sonore des chaînes déclenchait l'appétit de la succube. Elle adore le désespoir naissant, la douleur est plus forte les premiers jours, son plaisir n'en est qu'accru.

«Arrêtes avec les chaînes, tu ne peux pas les enlever. Peux tu répéter ?

Je suis bon musulman !

Encore !

C'est une erreur ! ...»

Le tintement des chaines continuait, le prisonnier était coupé net dans ses plaintes.

«Ferme ta gueule, quand je donne un ordre, tu l'exécutes.»

Lileva giflait le prisonnier dont la tête manquait de se détacher du corps. Le bois avait manqué de se rompre et le prisonnier était prit de convulsions, de la sueur coulait de son visage. Il crachait le sang qui dégoulinait de sa gorge. Avec une voix plus faible, il répondait encore.

«Je ne reçois rien d'une femme !»

Lileva ne répondit rien, elle se contenta d'un geste brusque de la main à bonne distance du prisonnier et sa gorge se resserra l'empêchant de parler.

—«Une erreur? Examinons le dossier de ta vie, les principales péripéties.»

Lileva prit un faux air de surprise, se jouant de lui. D'un seul claquement de doigts, un carnet de notes lui était apporté par l'un de ses esclaves. La succube prenait son temps dans la lecture pour accentuer le stress de son nouveau prisonnier et pendant qu'il rougissait progressivement, étouffé par le manque d'air.

« Hmmm, un petit bad boy ! Tu es né dans un pays développé, parti à l'étranger pour te marier à une femme que tu as lapidé, remarié avec des filles plus jeunes que toi, parfois trop jeunes. Trop jeune ! Tu récupérais l'argent de ces femmes et tu t'es enrichi grâce au commerce du pavot, en somme en détruisant la vie des autres. Tu es reparti dans ton pays d'origine, tu as eu une période grosse voiture, grosse bécane, gros train de vie jusqu'à ne plus avoir d'argent. De ce fait, tu as finit par commettre un attentat suicide. Bien du mal de causé pour aucune réalisation.»

Le regard de Lileva était équivoque, il était clair que le prisonnier ne méritait pas le paradis, sans surprise. Avec ses pouvoirs, elle desserra la gorge du prisonnier pour qu'il réponde.

«J'ai servit Allah !»

La démone fronçait les sourcils, mimant l'incompréhension.

«Que dis tu ? J'ai du mal comprendre. Tu as tué, tu t'es suicidé, tu es pédocriminel, tu as rendu accroc aux drogues des dizaines de personnes et tu essaies de me faire avaler que c'est dans le but de servir un créateur tout puissant, ni vu, ni entendu et qui aurait le moins du monde besoin de toi, être en tout point son inférieur pour exécuter ses desseins ? Non, il semblerait que ton culte, les mariages forcés, l'argent ont beaucoup avantagé ton hédonisme personnel.»

Un seul mot sortait de la gorge du prisonnier en pleine terreur.

«Iblis !»

Cette fois, la succube se tordait de rire. Puis s'arrêta et laissa la colère la gagner.

«Si par Iblis, tu entends maléfique, oui je suis maléfique mais je dois avouer que je ne comprends pas. Je ne peux ressentir du positif qu'en infligeant de la souffrance et suis prisonnière de ce lieu sordide. Vous avez la Terre, les émotions positives. Mais non, vous avez besoin de créer plus de souffrances et de problèmes, vous aviez l'Éden, vous vous acharnez à le transformer en enfer. Vous aviez besoin de si peu de discipline et de règles pour le maintenir en ordre. La Terre est si décadente.»

La succube marque un temps d'arrêt. Lileva commence un interrogatoire.

«Que faites vous de vos passions ? J'en ai un autre passionné de peinture, je n'ai ni la chance d'en faire, ni de ressentir cette passion. Et cette passion a été abandonnée, c'est bien dommage.»

Le prisonnier ne semblait rien comprendre du sens de cette intervention. Aucune réponse ne se fit entendre. Lileva accélère, pressée de passer à la suite de son programme.

«Trêve de digression, tu es un bad boy machiste, as-tu bien fait jouir toutes tes femmes ?»

Une réponse à la hâte se fit entendre, droit dans le piège, le genre de réponse attendue de la succube.

«Oui et c'est positif de procurer du plaisir !»

La succube souriait maintenant éhontément pendant que le désespoir prenait le terroriste qui comprenait s'être trompé de réponse. La scène eut pour effet d'exciter Lileva.

«Réponse que j'apprécie, tu vas tout faire pour éviter de me décevoir, je suis très active sexuellement. Je suis une sadique sexuelle. »

La peur prenait le prisonnier, qu'allait-elle lui faire ? La succube s'assoit sur une barrière, gigote ses jambes et reprends encore.

«Tu vas voir, toi qui aimes la souffrance, l'enfer est une chance, tu ne peux pas y mourir, tu te reconstitues toujours, ça ouvre bien des possibilités.»

Cette fois, le désespoir et la panique était totale. Aucune échappatoire n'est possible et la succube semble décidée.

«Épargnez moi !»

Les yeux de la succube étaient maintenant attirés par la barbe de son prisonnier. Lileva sauta de son perchoir, attrapa la barbe et jouait avec les poils de celle-ci.

«Quelle longue barbe, tu as du mettre des années pour en avoir une de cette taille ! Le prophète a ordonné aux musulmans de se différencier des polythéistes, c'est bien ça ? Sauf que tu n'es pas musulman.»

Des élucubrations incompréhensibles émanaient du prisonnier que la succube n'écoutait plus.

La succube commençait à jouer des mains et usant de sa pyrokinésie, des flammes apparaissaient dont la lueur se reflétait dans ses yeux. Lileva lançait un regard noir vers le condamné.

Le criminel suppliait, désapprouvait, c'est tout ce qu'il était en mesure de faire. Terrifié, il constatait avec horreur le bois sous ses pieds, au dessus de sa tête, derrière son dos. La succube souriait en hochant la tête, ses canines bien visibles. Un signal pour bien annoncer la couleur, elle allait faire ce qu'il redoutait. Elle se délectait de son incapacité à la faire changer d'avis, de sa terreur, elle continuait à hocher de plus en plus fortement la tête devant les cris de terreur.

Puis elle décidait que l'introduction avait assez duré, la succube mit le feu au bûcher. Après quelques secondes alors que le prisonnier lui suppliait d'éteindre le feu, elle fit mine de quitter la pièce. Lileva en profitait pour lancer une dernière moquerie.

«Ah oui j'oubliais ! Le bois ne finit jamais de brûler !»

Réalisant être condamné à brûler prochainement et pour une durée indéterminée, le criminel suppliait la succube de ne pas le laisser, de ne pas l'abandonner à son sort.

«Fais attention à ta barbe !»

La succube s'éloignait, les cris passaient dans son dos de la terreur à la douleur, la succube mouillait. Et Lileva quittait définitivement la pièce, rassasiée.

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