Chapitre 19 : La malédiction

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Sokann regarda Eddie sans sourciller, ce qu’il venait de dire ne faisait que confirmer ses hypothèses.

— Tu n’es pas surpris ? s’étonna le chasseur de relique.                     

— Quand tu t’es enfui et que Gorlon m’a raconté ce qu’il s’est passé, j’ai fait mes recherches sur toi et ta famille. Et j’ai découvert la malédiction de la famille Chafe.

— Alors tu sais déjà tout...

— Je veux que ce soit toi qui me le dises, insista Sokann.

Eddie baissa les yeux une nouvelle fois, les voix dans sa tête se firent de plus en plus pressante, elles lui hurlaient de le tuer. Il secoua la tête pour tenter de les chasser, puis commença à parler.

— Comme tous ceux de ma famille, mon père est mort à ma naissance. Ma mère m’a toujours dit qu’il était très heureux que je naisse, peu importe ce que cela signifiait pour lui. Mais le bonheur ne venait pas du fait d’avoir un fils, mais d’être enfin libre.

Sokann écoutait calmement, jamais il n’avait vu son ancien ami parler comme cela. Il se demanda si c’était le vrai Eddie qui se tenait en face de lui.

— Depuis ma naissance ils sont là, je les entends et parfois je les vois. Ils me disent de chercher des reliques, sans arrêt, encore et encore. Quand j’en trouve une ils sont apaisés pour un quelques temps, mais je dois encore en trouver d’autres. Ça ne s’arrête jamais !

Il hausse le ton malgré lui, jamais il n’avait raconté tout cela, il ne savait même pas pourquoi il le faisait.

— C’est pour cela que tu as tué Geoffroy ? dit Sokann.

— Pas vraiment, tu te rappel le temps que nous avions mis à traquer celui qui possédait l’épée enflammé ?

— Plusieurs mois, il se cachait à Aria et ici, jamais plus d’un jour au même endroit.

— Quand nous l’avions trouvé j’étais seul avec Geoffroy, Gorlon ne le laissait jamais partir sans escorte, mais à moi il me faisait confiance. Quand nous avons trouvé notre homme, il a tenté de nous attaquer et nous l’avons tué. C’est là qu’il est apparu...

— Qui ? le coupa Sokann.

— Mon père, mais pas comme une illusion, il était vraiment présent. Cette épée c’était lui qui l’avait trouvée, mais ma mère l’avait vendu après sa mort, pour éponger ses dettes. Quand il l’a revu sa volonté fu si puissante que la malédiction des Chafe lui a permis de prendre le contrôle de mon corps. Il a pris l’arme, puis il a tué Geoffroy.

Sokann trouva tout cela dur à croire, comment pouvait-il être sûr qu’Eddie n’était pas totalement fou ? L’attitude de son ancien compagnon semblait pourtant sincère, ainsi que les regrets qu’il entendait dans sa voix.

— Et tu as fuis ? Pourquoi ne pas avoir tenté de t’expliquer ? Tu aurais au moins pu me dire la vérité ! s’emporta Sokann.

— Les voix ! Elles me hurlaient de fuir ! J’ai tué le fils de Gorlon, je devais partir pour survivre !

— Alors pourquoi tu es revenu ?

— Je... Je ne sais pas pourquoi, mais être avec Luke me faisait moins entendre les voix, avec lui j’étais plus tranquille. Tant que j’étais avec lui peu importe ce qu’il m’arrivait, même mourir ne m’aurait pas dérangé...

— Pourquoi tu ne vas pas l’aider alors ?

Eddie voulu répondre, mais un visage apparu à sa droite, suivi d’un second, puis encore un autre. Ses ancêtres le regardaient tandis que leurs lèvres bougeaient sans bruit. « Tue-le, vole-le, enfuis toi ». Sokann comprit qu’il n’aurait pas d’autres réponses.

— Je n’ai pas dit à Gorlon ou tu étais, avoua-t-il. J’aurais pu directement te dénoncer, mais je ne l’ai pas fait. Mais je ne pouvais pas ne rien faire, sinon c’est à moi qu’il s’en serait pris s’il comprenait que je t’avais aidé. J’ai proposé à Gorlon de te tendre un piège, j’ai donné la position de ton ami pour qu’ils puissent l’enlever, tout en sachant qu’ils ne le tueraient pas. J’ai fait tout cela pour toi Eddie, pour te donner une chance.

— Une chance ? répéta le chasseur de relique, sans trop comprendre.

— Tu as l’occasion de prouver qui tu es vraiment, reste-tu celui à qui je faisais pleinement confiance ? Ou n’es-tu que le pantin de la malédiction des Chafe ?

— Je...

— Ton ami est encore en vie, Gorlon ne va pas se débarrasser du clou du spectacle trop rapidement, tu as encore le temps de rattraper tes erreurs.

Sokann attendit une réaction, mais Eddie ne dit rien, il n’esquissa pas le moindre mouvement. Il se dit qu’il en avait trop attendu de son ancien ami, il s’éloigna pour sortir de l’hôtel. Il ne pouvait pas laisser Luke mourir, il s’était servi de lui, mais ce dernier n’avait rien à voir avec tout cela. Sokann avait prévenu Gorlon la veille, puis avait proposé son plan, espérant que son patron ne se doute de rien. Le gérant de l'hôtel était convaincu qu'il était encore possible de convaincre Gorlon de laisser Luke partir.

— Adieu, Eddie, murmura Sokann. J'ai parié sur toi, j'ai fais une erreur.

Le chasseur de relique resta seul dans la pièce, tout autour de lui, des membres de sa famille le regardaient sans rien dire. Son père, copie conforme de son fils avec vingt ans de plus, restait face à lui.

Le brouhaha s’intensifia encore davantage dans l’arène, des gens huaient, d’autre encourageaient. Au milieu de tout ça, le cœur de Luke battait la chamade, il réalisait le danger de sa situation.

Et dire que je venais d’avoir une piste pour retrouver mes souvenirs...

Un homme se leva dans les loges, il était chauve, petit et gras. Quelqu’un lui tendit un objet, semblable à un de cor de chasse, quand il parla dedans, sa voix fut amplifiée.

— Bienvenue à tous ! clama-t-il.

Tous s’arrêtèrent de parler, pour écouter attentivement ce qu’il avait à dire.

— Nous sommes réunis comme chaque semaine pour profiter des joies de l’arène ! Mais cette semaine n’est pas comme les autres, voulez-vous savoir pourquoi ?

La foule se mit à clamer « Gorlon » tout en tapant dans leurs mains. Seul le groupe de noble restait calme, leurs magnifiques tenues blanches les faisaient ressortit du reste des spectateurs.

— Celui que vous pouvez voir en bas, n’est autre que notre invité spécial du jour ! Un ami de ce traître d’Eddie Chafe !

La clameur monta subitement, tous se mirent à huer Luke, il entendit de nombreuses insultes à son égard. Mais qu’est ce que tu leur as fait Eddie ?

— Je vous propose de commencer sans plus attendre ! reprit Gorlon. A vos paris ! Combien de temps tiendra-t-il dans l’arène ? Son lâche ami viendra-t-il à son secours ? A vous de miser !

Luke insulta mentalement le présentateur, il avait l’impression qu’on le prenait pour une bête de foire. Il regarda partout autour de lui, pour essayer de repérer une sortie. Plusieurs passages permettaient de quitter l’arène, mais une grille les bloquait et des gardes attendaient de l’autre côté. Escalader les murs pour atteindre les gradins lui paru impossible. Il entendit du bruit sur sa gauche, et trois hommes armés jusqu’au dents rentrèrent sur le terrain. Ils étaient torse nu et deux d'entre eux portaient un casque. L’amnésique pris de court, se tourna en direction du dénommé Gorlon, situé à l’autre bout de l’arène.

— Écoutez ! Il y a une erreur ! cria-t-il aussi fort que possible. Je ne connais Eddie que depuis peu, je ne sais pas ce qu’il vous a fait ! Je ne suis pas votr...

— Tu ne t’égosilles pour rien, se moqua l’un des combattants qui s’approchait. Ils ne t’entendent pas, et n’en ont rien à faire de toute façon. Maintenant ramasse ton arme, le public s’impatiente !

Luke jura, mais ramassa tout de même son katana. Ce fut en le touchant qu’il comprit ce qu’il se passait réellement. C’était Sokann qui devait garder son arme, et pourtant elle était là dans l’arène.

Ce fils de pute m’a vendu.

— Battez-vous ! s’égosilla Gorlon, sa voix encore plus amplifiée par le cor magique.

Les trois guerriers rugirent, et le premier fonça vers Luke en levant une masse d’arme. Luke contre l’injustice de sa situation, sentit la colère prendre le contrôle.

Mon dernier combat était aussi dans une arêne, quelle différence avec aujourd'hui ?

L’homme s’imaginait déjà félicité par les spectateurs, et couvert d’or pour sa victoire. Le pauvre garçon ne bougeait même pas, les yeux perdus dans le vide, il lui offrait sa vie sur un plateau.

La lame sortit de son fourreau, Luke n’effectua qu’un seul mouvement, et la tête du premier gladiateur tomba sur le sol avec un bruit sourd. Il pointa son arme pleine de sang vers les deux autres, tout en souriant.

— Qu’est-ce que vous attendez ? Le public s’impatiente.

Autant s'amuser.

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