11 — Mardi 14 janvier 2308

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2 h 21 min 16 s TFC

Nous avons passé la soirée ensemble chez moi avec Claire. En relisant les notes de la veille, je me suis rappelé pourquoi j’ai bricolé ce programme bizarre installé sur le système en soumsoum [1].

Lorsque j’ai analysé ma tablette, j’ai découvert qu’elle travaillait avec une date située dans le futur. Soit elle déconnait, soit il y avait un loup. Avec cette période d’un mois qui tourne en rond, je devais m’assurer d’une source plus sûre que cet appareil à quatre sous. J’ai donc écrit un programme utilisant un des vieux modèles d’IA du vingt-deuxième siècle. Il est tellement rudimentaire que l’incorporer à une des routines du contrôleur principal réseau fut un jeu d’enfant. La vérification d’intégrité est passée sans rien dire. Depuis, Poochi m’envoie des informations.

Oui, c’est son petit nom.

Il a scanné l’entièreté du système et a trouvé des éléments intéressants. Des « nonos » comme il a été programmé pour l’annoncer. Collé au réseau, il voit tout transiter. Par contre, la majorité des données sont chiffrées avec des clés en rotation accélérée, il est donc aveugle la plupart du temps et se contente d’extrapoler les métadonnées.

Néanmoins, il parvint à déterrer un os fascinant : les systèmes centraux travaillent eux aussi avec cette date en 2348. Alors que nos terminaux au boulot sont bien réglés à celle de 2308. La tablette ne déconnait pas, ou bien tout le serveur serait foireux, ce qui est hautement improbable. C’est comme s’il s’était mis à appliquer un second calendrier.

Pourquoi ?

Poochi continue de creuser les données. J’espère qu’il ne se fera pas repérer, les défenses du processeur central sont extrêmement avancées. Et s’il se fait gauler, il y a des risques que ça me retombe dessus. Rien que d’y penser, je flippe.

Claire m’a partagé ses informations. Ses découvertes sur le « ciel » du niveau 3, mais aussi sa conversation avec la professeure Yamaguchi. C’était du délire, comment une membre du Comité de Direction aurait-elle eu le temps de lui parler ? C’était presque une intervention qui tombait à pic.

Elle m’a montré un détail qui mit à mal l’exposé sur la soi-disant bonne santé du réacteur Renaud. Claire m’a dit que les images qu’elle avait vues étaient anciennes, ou fausses. Le propulseur numéro 1 avait fait l’objet du remplacement d’une plaque de blindage il y a de ça vingt-trois ans selon les rapports de maintenance. Elle avait été endommagée par une défaillance d’un conduit. Elle me montra des photos issues du dossier, l’équipe d’intervention avait fait une erreur en synthétisant le substitut, la couleur n’était pas la bonne. D’après Claire, la vidéo de Renaud exposait celle d’origine.

Pourquoi tous ces mensonges ? Pourquoi cette date chelou ?

Claire pense que le seul moyen d’en savoir plus, c’est de se rendre au niveau 10. Là où le Comité de Direction est installé.

J’ai eu peur quand elle a évoqué cette idée. On se met déjà en danger et le fait qu’on nous fasse tout oublier prouve qu’on ne devrait pas enquêter ainsi. Mais la connaissant, elle va vouloir grimper là-bas. J’ai vraiment peur.


Supplément : j’ai voulu lui avouer ce soir. Je me suis encore dégonflé. J’ai cru que j’allais chialer. J’en peux plus.

[1] Soumsoum : expression pour désigner la clandestinité. « Agir en sous marin »

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