Trinh Xuan Thuan ne cache pas ses convictions : ce matérialisme « réductionniste » heurte sa foi bouddhiste.

Cette défense de la foi est respectable, mais est-elle scientifique ?

Nullement !

Mais balayer la perspective religieuse d’un revers de main n’est certainement pas la bonne perspective.

Plus je vieillis, plus je comprends que l’homme a besoin de croyances et de convictions pour vivre et je ne me risquerais nullement à blâmer mes prochains pour cela.

Seulement la religion est une chose et la science et la Raison en sont une autre !

Ajoutons que d’un point de vue chrétien, on peut se demander si refuser à Dieu la possibilité d’avoir créé un Univers infini avec des milliards de moi a vraiment du sens ?

Pourquoi refuser à un Dieu infini la possibilité de créer un Univers infini à son image ?

Certains théologiens ont émis l’hypothèse que l’Univers créé par dieu ne pouvait être qu’infini. Ce point de vue était celui du théologien Nicolas de Cues.

Il me semble fort logique et la condamnation à mort sur le bûcher de Giordano Bruno me révulse !

Mais ce crime horrible n’a pas pour cause l’Idée fort chrétienne de l’infinie puissance de Dieu, mais sa conséquence logique : la répétition à l’infini de notre monde !

Si notre monde se répète à l’infini, le caractère unique, fondateur et « scandaleux » (Kierkegaard) du sacrifice du Christ disparaît.

En un sens, un Christianisme avec des milliards de milliards de Christs devient absurde voire ridicule.

Trinh Xuan Thuan est bouddhiste et il défend sa foi, ses objections et réticences seront différentes.

Le matérialisme « réductionniste » contredit le credo bouddhiste, le bouddhisme est une religion profondément spiritualiste qui nie la réalité du monde matériel.

Mais, plus profondément, la multiplication des moi à l’infini tue le concept central du bouddhisme : le concept de Karma.

Tout d’abord le karma est mon identité, une identité personnelle et non partageable : il serait aberrant d’avoir des milliards de moi avec le même moi.

Surtout le karma est le fruit de mes actions et de mes choix libres : introduire un déterminisme matérialiste c’est nier cette liberté et sa conséquence morale et religieuse.

Faut-il nécessairement choisir entre sa foi et les milliards de moi ?

La question est bien plus complexe qu’il n’y paraît !