Chapitre XI
Mystère prit la parole :
- Bonjour Horace.
- Ainsi donc, la prophétie est vraie..., dit ledit Horace.
Il examina attentivement les deux sœurs.
- Suivez-moi, leur dit-il.
Le cerf sortit de la grotte et s’engagea entre deux arbres. Mystère le suivit sans hésitation. Horace les mena vers une autre grotte, un peu plus grande. Ils entrèrent dedans et Victoire vit alors que les murs étaient peints. Les dessins représentaient des animaux, des humains et d’autres créatures plus petites et de différentes couleurs.
Le cerf se tourna vers eux. La jeune fille prit le temps de l’observer. Horace était grand, son pelage était d’un brun foncé légèrement terni par l’âge. Ses bois recommençaient à pousser et on devinait leur taille. Ses yeux bruns presque noirs exprimaient de la curiosité et une certaine sagesse.
- Bien, commença-t-il. Que s’est-il passé? Et pourquoi Uranus n’est-il pas avec vous?
Avant que Mystère n’ait pu dire quoi que se soit, Pitoucha le répondit:
- Des Nakats nous attendaient au portail. Il y en a un qui avait un aiguillon venimeux et il a piqué Victoire. Quant à Uranus, il se battait pour nous permettre de libérer Victoire et Jaréa. Depuis, il n’est pas revenu. Voilà!
Le cerf renâcla bruyamment.
- Tu ne manques pas de culot.
- Quoi? J’ai juste répondu à vos questions, riposta la chienne.
Victoire se laissa glisser sur le sol. Jaréa courut vers elle pour la soutenir.
- Qu’est-ce que sont ces dessins sur les murs? demanda-t-elle.
Horace dit:
- Je les ai examinés. Ils datent de quelques millénaires. Je pense qu’ils représentent le monde d’Événia il y a quelques millénaires. Même les Giquareux sont représentés.
- Les quoi? répéta Jaréa.
- Uranus ne vous l’a pas expliqué? s’étonna le cerf.
- Il ne nous a rien expliqué du tout, répondit Victoire.
Horace renâcla à nouveau.
- Voilà qui complique certaines choses. (Il pencha sa tête sur le côté.) Je suppose que vous vous posez des questions et que vous voulez y avoir des réponses, n’est ce pas?
- Oui.
Le cerf fit quelques pas dans la grotte.
- Qu’est ce que Uranus vous a au moins déjà dit? voulut-il savoir.
- Eh bien, dit Jaréa. On sait que nous sommes sœurs, que nous venons d’Événia et que nous devons libérer des créatures enfermés quelque part.
- Très bien. Savez-vous au moins ce qu’est le monde d’Événia ?
- C’est le monde des animaux.
- En effet, mais pas que. J’ai découvert cette grotte et comme vous pouvez le voir, des humains sont aussi dessinés. Je pense qu’il y a des millénaires, les humains coabitaient avec les animaux et les autres peuples.
- C’est la théorie la plus absurde que j’ai jamais entendu, dit Mystère.
- J’avoue être perdue..., ajouta Pitoucha.
Le cerf ferma les yeux.
- Je vais reprendre l’histoire depuis le début, pour que vous puissiez tous comprendre.
Il y eut un silence puis Horace commença son récit:
- Le monde d’Événia est le monde des animaux. Un endroit plein de magie où tous les êtres vivants vivaient en harmonie avec le monde.
- Vivaient ? Au passé ? l’interrompit Jaréa.
- Stop! Si tu me laisses pas finir mon explication, on ne finira jamais.
L’ainée se tue.
- « Au tout début, d’anciens textes mentionnaient des animaux et des peuples comme des lutins, des gnomes, des nains, des fées, des elfes, des faunes, des centaures, mais aussi des animaux surnaturels commes des licornes, des pégases, des griffons des dragons des blaireaux-marins et des Giquareux. Suels quelques textes parlent d’humains et ils devaient être très isolés et pas très nombreux. À part ceux de la dynastie des Calkansor, les humains devaient être introuvables. Au tout début du monde d’Événia, aussi loin que nos mémoires et nos textes nous permettent de l’affirmer, il n’y avait pas de dirigeant.
Mais il y a eu un énorme désaccord et pour éviter une immense catastrophe, vos ancêtres, Lewin et Scéleste, ont eu l'idée d'instaurer des dirigeants. Bien sûr, cette proposition n’a pas été bien accueillie. Les habitants sortaient tout juste d’une guerre terrible. Seuls quelques sages avaient survécu et ont changé la donne. Sachez que dans notre culture, les anciens sont très respectés pour leur grande sagesse. Lewin et Scéleste sont donc montés sur le trône et ont remis notre monde en place. Ils ont très vite été admirés pour leur justice et leur humilité.
Au fur et à mesure que votre lignée s’affirmait, vos ancêtres ont développé des pouvoirs. Celui de comprendre n’importe quelle langue et dialecte et plus incroyable encore : celui de pouvoir se transformer en n’importe quel animal ! »
Victoire leva la main.
- Oui ?
- Comment est-ce que Lewin et Scéleste ont fait pour monter sur le trône si ils ne possédaient pas la faculté de comprendre n’importe quelle langue et dialecte et celui de pouvoir se transformer en n’importe quel animal ? demanda-t-elle.
- C’est une excellente question, la complimenta Horace. Vois-tu, les animax se comprennent entre eux avec une langue particulière : l’événien. Toutefois chaque espèce à une langue ou un dialecte particulier. Si je me mettais à parler en cerf, Mystère et Pitoucha ne me comprendraient plus.
- D’accord. Et pensez-vous que si les autres peuples et les humains avaient coabités ensemble, ils auraient parlé l’événien ?
- Je n’en sais rien, avoua le cerf. Je reprends mon récit: « Tout allait bien jusqu’à ce que la guerre ne réapparaisse. Skonry, le roi lors de cette période, a mené de grandes batailles contre les Giquareux, des monstres ailés. Ils ressemblent au dragon mais sont plus grand et ne crachent pas de feu. Ils étaient craints car ils ont toujours été malveillants. Ils sont encore source de peur et ils sont montrés du doigt quand un malheur survient. Tous les Giquareux ont été éradiqués, jusqu’au dernier ! Aucun n’a survécu.
Le monde a repris son calme et son harmonie. Puis vos grands-parents donnèrent naissance à des jumeaux : Richard et Urien, votre père. Bien que jumeaux, ils sont et resteront à mon avis, à l’opposé l’un de l’autre.
Richard est du genre bagarreur, immoral dirai-je même. Il n’a aucune pitié et est attiré par le trône et le pouvoir. Urien est timide et il a au contraire beaucoup de valeurs morales. Élégant, personne ne s’est jamais senti offensé par sa présence, contrairement à son frère. Il n’a jamais ressenti le besoin d’être roi, je pense même qu’il cherchait à éviter le pouvoir.
Urien a finit par rencontrer votre mère dans l’autre monde lors d’une visite et l’a épousée. Certains se sont opposés à cette union mais cela n'a rien changé. Votre mère était curieuse et studieuse. Elle a réussit à résoudre certains problèmes. Elle avait une manière très différente de voir les choses. Elle n’était pas timide mais pas bavarde non plus. Elisabeth a toujours respecté chacun à sa juste valeur. Elle était le complément d’Urien, si vous voulez. »
- Pourquoi parles-tu de nos parents au passé ? demanda Jaréa.
Horace la regarda et déclara:
- Ils ont disparu.
- Disparus ? s'écrièrent les deux soeurs.
Il hocha la tête:
- Oui, malheureusement. Comment et où? Tout le monde l'ignore jusqu'à aujourd'hui.
Victoire sentit une boule se former dans sa gorge.
- « Votre grand-père est mort et Richard étant l’ainé, c’est lui qui succèda à son père. Beaucoup des habitants ont demandé à ce que se soit Urien qui prenne la relève.
Deux groupes se sont alors formés: ceux qui voulait que Richard reste et ceux, beaucoup plus nombreux, qui voulait Urien.
Ce que vous devez savoir et retenir, c’est que notre monde a toujours été protégé par des créatures spécifiques. Ce sont les créatures magiques; elles n’ont pas vraiment de nom. Ce sont des gardiens et ils possèdent des pouvoirs. » Vous avez déjà vu Uranus sous sa véritable forme ?
Les deux sœurs acquiesèrent. Horace reprit :
- « Alors que notre monde se divisait et les deux groupes se haἵssaient de plus en plus, une prophétie a été dévoilé:
Les créatures légendaires seront prisonnières,
Deux filles devront les délivrer,
Mais leurs origines, elles devront accepter.
Les élues seront soeurs,
Aux yeux jungle et forêt et cheveux sapin et ébène,
Leur destin les a dotées de toutes les langues d’Événia,
Et le pouvoir de transformation,
Avec la sagesse de leurs ancêtres,
Elles suivront leurs coeurs.
Une carte, elles devront chercher,
Là où les animaux sans but errent,
Dans une forêt oubliée,
Tapie au creux d'une roche blanche,
Caché par une cascade d'un bleu indéfinissable.
Les créatures magiques seront délivrées,
Une comète passera et deux astres s’aligneront,
Une légendaire créature aidera les élues et la prophétie s’accomplira,
Le plus beau des cadeaux, elles recevront et la vérité éclatera,
Mais à leurs familles, elles devront prendre garde, Car bien des surprises les dérouteront.
Il y eu un silence durant les deux filles se repassaient la prophétie. Le cerf continua :
- « Deux ans après le mariage de vos parents, Jaréa est née et encore deux ans plus tard, ce fut le tour de Victoire. C’est là que tout a encore empiré. Beaucoup ont compris que vous étiez les élues de cette prophétie. Les deux groupes se sont encore plus haient et se sont même parfois affrontés. Et du jour au lendemain, alors que vous aviez quatre et deux ans respectivement, un mal étrange est apparu et commencé à faire des victimes. Des plaques de différentes couleurs allant du vert au noir s’étendaient sur leurs corps. Le mal a pris du temps, un an et demi je crois, avant de se propager entièrement dans notre monde. Les soigneurs se sont alors penchés sur cette étrange maladie et ont découvert qu’elle n’était pas naturel et qu’il y avait donc pas de vaccin ! Ne me demandez pas comment ils en sont arrivés là. C’est bizzare mais je ne suis pas soigneur. Bien sûr, le temps qu’ils arrivent à cette conclusion, il s’est écoulé plusieurs mois. La maladie ne tue pas mais provoque d’atroces souffrances et une sensation de manque.
L’imagination des habitants s’est inflammée au quart de tour. Certains ont accusé les Giquareu, d’autres Richard... La prophétie n’a pas été mise de côté. Au contraire, certains y voyaient même un signe. Je dois vous avouer, j’étais d’accord avec eux.
Je me suis posé pas mal de questions par rapport à l’origine de ce mal. Le seul qui semblait s’amuser de la situation était Richard, je l’ai donc immédiatement soupꞔonné.
C’était logique : Richard a toujours été jaloux de son frère et plus encore avec vos naissances. Tout le monde s’intéressait à vous et pas à lui. Bref, j’avais des soupꞔons.
Richard a ensuite convoqué les créatures magiques à propos de la maladie et nous a dit qu’elle s’était déclarée au nord de notre monde. Il nous a confié la mission d’aller voir et essayer de trouver un antidote, si possible. Et si on pouvait détruire le mal, c’était encore mieux.
Je suis allé souhaiter bonne chance à Uranus et confiez ce que je pensais à Urien. Il n’était pas étonné que j’ai de tels soupçons mais m’a dit qu’il avait d’éjà questionné Richard sur ce point et qu’il l’avait nié. Urien faisait confiance à Richard, ce qui m’a étonné de sa part.
La suite de l’histoire, je ne la connais pas vraiment. J’ai entendu dire qu’Élisabeth était tombée malade et qu’elle vous a confié à Uranus. Ensuite, elle a disparu avec Urien sans laisser de traces. »
Victoire avait la certitude qu’ils leur manquaient ue grande partie du puzzle. Pitoucha demanda :
- Les créatures magiques ne sont toujours pas revenues de leur mission d’éradication du mal?
- Non, répondit Horace.
Un silence pesant s’installa dans la grotte. La chienne reprit la parole :
- Horace, qu’est ce que mange les animaux carnivores à Événia.
- Comment ça ?
- Eh bien, dans l’autre monde, il y a trois catégories d’animaux : les carnivores, qui mangent d’autres animaux, les herbivores, qui mangent des plantes et les omnivores, qui mangent d’autres animaux et des plantes.
Le cerf la regarda avec effroi.
- Des animaux qui mangent d’autres animaux. Quelle horreur ! Non non. À Événia, tous les animaux mangent des plantes mais en fonction de l’espèce, ils mangeront tels ou tels plantes.
Mystère interrogea Horace :
- Tu connais mieux Événia que nous. As-tu une idée de la marche à suivre ?
- Eh bien... je propose que nous remontions vers le nord pour recueillir des informations sur le passage des créatures magiques.
- La porphétie parle d’une cart ? lui rappela Jaréa.
- Nous ? Vous comptez nous accompagner ? demanda simultanément Pitoucha.
Horace prit un air outré :
- Bien sûr que je compte vous accompagner. Et puis quoi encore. Quant à ta question Jaréa, je sais qu’il faut trouver une carte mais je n’ai pas de meilleure solution pour le moment.
- Dis comme ça, dit l’adolescente.
- Allons-y ! ordonna Mystère. Si nous restons ici, les Nakats nous rattraperont avant qu’on ait pu commencer notre quête.
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