L'Hôte

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  Je descends tout doucement les marches de l'escalier qui craquent malgré mon poids plume. J'appréhende, car oui, derrière cette masse de muscle, se cache un trouillard qui déteste tout ce qui se rapporte au paranormal. Petit, je croyais toujours qu'un monstre se cachait dans ma chambre, et qu'il me regardait. J'avais peur d'ouvrir les yeux, car je croyais qu'en le voyant, il allait me manger. Je ne sais pas si c'est dans ses projets à lui-aussi, mais je commence à être anxieux. Je sais qu'il m'a dit de venir dans la salle à manger, mais je regarde dans chaque recoin de chaque pièce s'il ne s'y cache pas. Devant la double porte à moitié fermée menant à la salle en question, je reste immobile pendant quelques secondes, le temps que mon cerveau fasse toutes les connexions nécessaires : la lumière est allumée. Je le jure sur mon sex appeal que j'avais tout éteint avant de monter dans ma salle de bain.

J'ouvre la porte, elle ne grince pas. Je le vois, assis nonchalamment, un verre de vin à la main et du pain. Mon pain ! L'homme tourne sa tête vers moi, un sourire sincère se dessine sur son visage, et m'invite à m'asseoir, chez moi... Il a allumé la cheminée. Si l'on pouvait avoir un doute sur mon possible oubli d'avoir éteint la lumière, il ne faisait nul doute que je ne m'étais pas amusé à mettre du feu dans la salle à manger. Je prends place, le bois crépite derrière moi, c'est apaisant, et en même temps très mystérieux. On ne va pas se mentir, cet individu est beau, ses cheveux rayonnent, son regard vert est profond, il a un nez grec et des lèvres fines. Son corps est plus musclé que le mien. Il est paré d'une belle toge rouge soyeuse qui dévoile ses clavicules prononcées. Son pantalon marron le serre et fait imaginer des jambes bien bâties.

 — Puis-je savoir qui vous êtes ? Ou est-ce trop prématuré ?

Le blond décoche un sourire.

 — Vous êtes insolent.

 — Insolent ? Par Dieu non ! Je souhaite juste savoir qui habite aussi en même temps que moi, et me contemple dans les moments les plus intimes !

Il lève la main, comme pour me faire taire, il ne va quand même s'agacer ? Manquerait plus que ça tiens !

 — Mon nom est Rudy.

 — Rudy ? Oh... Enchanté... Yohann.

 — Qu'est-ce qui t'amènes à te masturber ici ? Me demande-t-il en portant son verre de vin à ses lèvres.

 — Je... Je suis le petit-fils de feu mon grand-père, il habitait ici, peut-être l'as-tu... Vu.

 — Oh ça oui ! S'exclame-t-il.

Je lui partage mon interrogation, pourquoi ce ton-là ? Il reprend son sérieux, en me regardant dans le blanc de l'oeil.

 — Ton grand-père était aussi... Explicite que toi, je ne sais pas le nombre de femmes, enfin, disons-le, de prostituées qu'il s'est ramené dans sa chambre? 

 — Mon grand-père se tapait des putes ?

 — Votre langage ! C'est un lieu d'histoire ici, et puis ces femmes sont totalement respectables.

Je m'excuse, le blond continue à me scruter tout en buvant son vin. Je ne sais pas de combien d'années il est âgé, il paraît aussi jeune que moi, et pourtant tout porte à croire que cela fait des centaines d'années qu'il habite ce lieu. Je ne sais pas si j'apprécie son regard, mon égo est forcément flatté que cet "homme" me déshabille du regard, et en même temps, je suis terriblement gêné de m'être laissé allé devant lui.

 — Êtes-vous réel ? Pardonnez cette question un peu farfelue, mais j'ai vraiment l'impression de louper quelque chose.

 — Tout porte à croire que je le suis non ?

 — Non.

Il rigole.

 — J'apprécie votre caractère, je suis aussi réel que votre imagination le laisse à penser, mais il est vrai que je n'appartiens pas au même monde que le vôtre.

 — Et vous êtes quoi ? Un fantôme ? Un vampire ?

 — Je me rapproche plus du fantôme que du vampire, même si je crains la lumière du soleil, et que je trouve le sang magnifique et très attirant.

 — Ah...

Moquez-vous de ma réaction si vous voulez, mais je trouve que je réagis plutôt bien. Il termine son verre, et se lève. Il me salue et m'annonce qu'il va se reposer dans la chapelle que son grand-père a fait construire derrière la piscine. Il avait décidément du fric à dépenser. "Rejoins-moi quand tu en auras envie, et que tu seras prêt" m'a-t-il lancé. Prêt à quoi ? A découvrir sa vraie nature ? Il va m'apprendre que finalement c'est un démon très puissant qui veut régner sur le monde et qui va tenter de me posséder ? A peine mes réflexions faites, qu'il a disparu. Je n'ai même pas remarqué que le verre et le pain ont disparu, et que les flammes se sont éteintes. Il faut vraiment que je dorme.

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