Chapitre 2 : Naissance dans les cascades

5 minutes de lecture

  Quel plaisir que celui de naviguer à travers la galaxie par soi-même ! Cela faisait à peine une semaine que je voyageais avec Descendance parmi les étoiles. J’observais déjà des changements en moi. Je me trouvais plus jovial qu’à l’accoutumée. Une assurance nouvelle m’habitait, comme une seconde peau. J’ai toujours été confiant, mais ceci dépassait tout ce que j’avais ressenti par le passé. Ma récente identité s’imposait à moi.

Il n’avait pas été aussi simple que ça de choisir l’homme que je voulais être. Se proclamer Fils du Baron c’était de belles paroles. Mais travailler dans des emplois précaires, ne pas faire d’aventures ou d’exploits fantastiques n’était pas en adéquation avec ce titre. Alors que là, face aux comètes m’accompagnant et à l’infini spatial, c’était comme si mon existence débutait.

Les gens m’ont parfois regardé avec étonnement, comme s’ils pensaient que je disais des choses absurdes. Pourtant, j’étais là à commencer mon voyage. Mais revenons à celui-ci.

J’étais dans l’espace et il me fallait une destination. J’avais autant de choix désormais que la galaxie a d’étoiles et de constellations. La planète Terre m’intéressait, car c’était le berceau des aventures de mon père. Mais je ne me sentais pas encore prêt. Une épreuve afin d’estimer ma force, un premier coup d’éclat pour écrire ma légende, était nécessaire. J’avoue avoir eu du mal à comprendre la navigation. Ce n’était pas un domaine évident pour un novice ! Fort heureusement, proche de ma position dans la zone est, se situait un lieu réputé pour sa dangerosité : les cascades turbulentes d’Angoass. Je connaissais ce lieu symbolique. On disait que ceux qui l’avaient franchi se comptaient sur les doigts d’une main.

  J’atterrissais sur la plateforme prévue au gabarit de mon vaisseau. Après avoir indiqué mon but aux locaux (des extraterrestres similaires à l’homme, mais avec la différence d’être bleu ciel), on me dirigea vers la forêt où se situaient les chutes d’eau. Je profitai du trajet pour examiner la première planète étrangère que je visitais.

Le climat était humide. Peu importe où l’on regardait, la première image qui venait à l’esprit était un lieu tropical. Les organisateurs avaient installé un peu partout des machines exploitant l’humidité. Ils ne nourrissaient pas de végétaux et en particulier de délicieux champignons. Un guide m’accompagna à travers la forêt jusqu’aux cascades. Nous en profitâmes pour parler de la valeur spirituelle de celles-ci.

« Vous avez du courage, jeune étranger. Ces cascades sont un défi dangereux. Avez-vous déjà bravé une épreuve semblable ?

— Hélas non, répondis-je. Il s’agit de mon premier challenge de taille, et j’entends construire le reste sur cette première pierre.

— Comment ? Vous n’avez aucune expérience ? Savez-vous au moins qu’il y a régulièrement des morts ?

— Ne t’en fais pas pour moi. Cependant, je veux bien que tu me parles plus de l’histoire de ces lieux, dis-je tout en détournant le sujet, car je voyais bien qu’il ne cesserait de vouloir argumenter sur mon inexpérience.

— L’eau des cascades est gelée. Elles sont hautes d’une centaine de mètres, et c’est un défi pour les plus intrépides des aventuriers. La traversée consiste à escalader la plus grande de toute grâce aux extrémités des pierres dépassant de la paroi. Ceux qui y arrivent obtiennent une gloire éternelle écrite dans nos archives. Les morts aussi ont une liste. On raconte que ce sont les esprits de ceux ayant échoué qui glacent l’eau dans le but de faire chuter les nouveaux participants.

— Il y a donc déjà eu des vainqueurs de ce défi ! » m’exclamai-je. J’étais heureux de savoir que la galaxie avait des braves en ses rangs.

« — En fait, c’est récent. C’est une épreuve qui a perdu en popularité et le grand nombre de morts n’aide pas. Je ne donne pas chère de votre peau.

— Dis-moi, aimes-tu les paris ? proposai-je au guide.

— Il m’arrive d’en faire.

— Eh bien, si je perds, tu possèderas mon vaisseau. Si je réussis, tu propageras mon succès à autant de personnes que tu le pourras. Qu’en dis-tu ?

— Ça me semble honnête », acquiesça-t-il.

  Nous finîmes par arriver au but. Je vis les cascades, qui me paraissaient bien plus grandes que l’on me les avait décrites. Une petite foule s’était assemblée en bas afin d’assister à ce défi. Loin de me faire rougir, ces yeux me parurent idéalement placés pour observer mon futur triomphe. Je n’étais pas confiant autant qu’on peut l’être, mais j’avais le sentiment que le destin veillait sur moi. Je ne pouvais pas m’arrêter alors que mon chemin avait à peine commencé.

On prit mes vêtements et l’on me donna des chaussures adaptées ainsi qu’une tenue aquatique. J’avançais progressivement dans le bassin pendant qu’un homme m’expliquait qu’un comité se situerait en haut s’il m’arrivait de réussir. Le défi pouvait débuter.

Tout en me positionnant face à la plus grande chute, je jaugeai la force de l’eau. Elle était puissante, mais surtout glacée. Bien que je sente le froid, je n’ai pas perdu mon courage et je me suis mis à grimper. Celle-ci sembla durer de longues heures. Je percevais les muscles de mes bras travaillés plus que nécessaire. J’ai préféré utiliser davantage mes jambes pour escalader cette pente abrupte. Je compris rapidement pourquoi d’autres avaient échoué. Le froid du courant, la douleur musculaire et la peur ont créé une expérience difficile pour le participant. L’épreuve était plus mentale que physique. C’est ce qui me sauva.

Outre ma détection du mensonge, ma qualité est de ne pas connaitre la vraie peur, et désormais c’était au monde de le savoir. L’absence de crainte est un moteur puissant pour qui aurait le culot d’aller tête baissée vers son projet.

Sans trembler, mes bras et jambes me transportèrent à travers le flot continu d’eau jusqu’à son sommet. Je me hissai là, à la plus haute altitude des alentours et des cascades face à la foule qui me voyait triompher du défi de leur monde. Toute l’assistance paraissait surprise. C’est dans ce silence que je levai mes poings serrés vers le ciel. Un tonnerre d’applaudissements suivit. C’était le signe de ma victoire. Mes mains, crispées au bout de mes bras fatigués, dominaient les cascades. Je regardai alors les cieux en proclamant ma fierté.

Une fois que le comité m’eut confirmé mon succès, je retrouvai mon mentor et lui demandai de tenir sa promesse. J’avais gagné un pari ambitieux. On m’interrogea à propos de mon nom. Vous connaissez ma réponse ! On me donna une belle somme de monnaie, ce qui ne fut pas refusé, car il me fallait un fond sur lequel vivre mes aventures.

  Je quittai ces lieux après m’être reposé, la tête pleine d’espérance sur la suite. Si mon guide faisait ce qu’il avait promis, mon nom circulerait progressivement à travers la galaxie. Je m’étais renseigné sur d’éventuels systèmes proches sur lesquels une histoire excitante pourrait m’attendre. On me désigna la planète Anarsee. Il semblerait que des conflits s’y déroulent.

Certains pourraient penser que je cherche la gloire et rien d’autre. Il n’en est rien. Si la portée de mon titre m’importe, c’est par la multitude d’aventures qu’elle peut provoquer. Un nom célèbre est le meilleur passeport face à l’inconnu et au danger. Et le mien venait de se présenter au monde.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Miklos Carmin ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0