Maudite Somme
Effacer les traces.
Il m’offre une promenade.
Je suis le chaînon manquant entre lui et son passé. Mais il n’en a cure, son maillage ne souffre ni de l’oubli ni du ressentiment. Il guette son histoire, sans empressement, en laissant les choses se faire comme s’il n’était pas acteur de sa vie. Et pourtant il l’est, et il en a conscience. Son existence semble dépourvue de tracas existentiels, il ne se préoccupe que d’un état à stabiliser, qu’il trouve entre la paix et le bonheur, la complétion et l’interminable. Dans tout ceci, je suis une bestiole qui vient lui chatouiller l’avant-bras un jour d’été solaire. Nous sommes de la même famille, mais si certains m’auraient soufflé dessus ou simplement écrasé du bout du doigt, lui m’accompagne du regard, et plein de bienveillance, il suit mon chemin sur son épiderme. Notre terre ne partage rien, mais notre temps se rejoint à lui-même, et il n’y a que nous pour nous rendre compte que nous sommes liés. Passés les instants d’appréhension mutuelle, place maintenant à l’exercice de la gêne, cette ancienne blessure des temps anciens, qu’il devine à travers mes cicatrices ouvertes ; la psyché ne saurait fermer les portes.
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