42. Trio noir (entrée)
Le temps de trajet fut long, une main sur la cuisse l’une de l’autre pour passer le temps. Pour éviter de perdre le contrôle par les vibrations du le trajet, j’avais gardé la perle relevée. Néanmoins ma véritable envie était que nous roulions toute la nuit, de laisser la perle vibrer, et de prendre mon pied sans restriction. Je retenais de me caresser, espérant secrètement que Geisha le fît.
Les graviers bruissèrent sous les roues. La main de Geisha quitta ma cuisse pour ôter son bandeau. Sa portière s’ouvrit et Arcan se présenta à la mienne. L’air frais du soir traversa l’habitacle. Le poids de la laisse m’indiqua de me lever. Les essences boisées du parc de la propriété suffisaient à m’indiquer que nous étions au bon endroit. Mon façonneur passa ses mains sur mon masque pour l’ajuster à sa convenance. Il replaça les chaînes qui tombaient sur mes épaules.
— Prête ?
J’opinai du menton. La laisse m’obligea à suivre le bruit des pas sur les cailloux, en essayant de ne pas me tordre les chevilles et d’ignorer le balancement du bijou contre mon clitoris. Le vigil à l’entrée nous salua :
— Bonsoir Monsieur Arcan.
— Bonsoir, répondirent mes deux partenaires.
— Vestiaire numéro 2, précisa le vigil.
— Trois marches montantes, m’avertit Arcan.
La laisse me tira et mes orteils heurtèrent la contremarche. Je trouvai rapidement la pierre stable du hall. Une porte de ferma, et le store en bois se déroula.
— Bonsoir Monsieur Arcan. Deux poupées, ce soir !
— J’essaie de maximiser les chances.
— Alors Muse et Geisha, c’est ça ?
— Exactement.
Je sentis le manteau quitter mes épaules.
— Ce sont de vraies blessures ?
— Non.
— Vous me rassurez. Vous me faites signe quand vous êtes prêts.
Le déclic du logiciel photographique m’indiqua que nous étions dans l’application. Les pas d’Arcan tournèrent autour de nous. Ses doigts effleurèrent la peau sous mon pagne pour atteindre la batterie qui activait les lumières de la bague clitoridienne. L’hôtesse commenta :
— C’est original.
— Vous pouvez ouvrir.
La fille tourna la poignée de porte, la musique classique s’invita à mes oreilles et la chaîne tendit dans la direction à suivre.
Geisha murmura :
— Yako a piqué votre idée du drapeau.
— Il n’a pas l’air d’avoir eu de difficulté à te remplacer.
— Avec des nichons pareils, il doit être au top de ses fantasmes de hentaï.
— Hmm. On rentre dans le personnage, Geisha, centre un peu plus tes pieds dans la démarche. Moins soumise que d’habitude, plus féminine. Sois féminine et fière. Voilà.
Ma partenaire devenue muette, nous continuâmes à avancer dans la foule. Nous nous approchions des autres façonneurs. Malgré le plug entre les fesses, je tâchais d’avoir la même démarche altière que d’ordinaire. La perle me perturbait beaucoup. Elle engendrait un chatoiement très agréable, auquel je doutais pouvoir y résister toute la soirée. Une voix d’homme nous accueillit.
— Et bien, vous vous êtes faits désirer.
— Deux poupées à habiller.
— Les courbes de votre nouvelle poupée sont inspirantes, mais j’avoue que la curiosité me pique davantage de voir sous ce voile.
— Geisha, montre-leur.
— Oui, maître Arcan.
Ma camarade, d’une caresse sur ma croupe, dévoila le phare rouge planté entre mes fesses. Puis elle révéla ensuite la bague dont les lumières reflétaient sur la perle. Arcan fanfaronna :
— Muse est soumise à un déferlement de sensations à chaque fois que nous nous déplaçons.
— Machiavélique, commenta un premier
— Ma poupée peut-elle poser avec les vôtres ? questionna un second.
— Oui, mais personne ne touche au bijou.
Quelques photos, et commentaires plus tard, l’exhibition régulière de mon équipement attirant les uns et les autres, ma mère finit par faire son apparition.
— Bonsoir Arcan.
— Bonsoir Sculpturine. Quels étranges mousses vous suivent.
— Ce soir ce sont des mousses, la semaine prochaine, ce seront des créatures qui auront besoin de vos talents.
— J’espère que vous ne comptez pas m’inonder de travail. J’ai déjà un projet pour la semaine prochaine.
— Rien de bien compliqué pour un artiste de votre envergure. Je vois qu’elle est revenue.
— Oui.
— A-t-elle accepté vos conditions ?
— Nous avons trouvé un accord.
— Je suis très étonnée de votre pouvoir de persuasion. Elle m’est toujours apparue comme têtue et très indépendante. Mais vous, touche après touche, vous parvenez progressivement à en faire votre esclave sexuelle. Est-ce qu’au prochain spectacle, vous la ferez manger de la nourriture pour chien dans une gamelle ?
— C’est bien loin de ma vision de façonneur, rassurez-vous.
La voix rauque de l’Impératrice intervint dans la conversation.
— La hargne perfide de vos mots révèle votre grande jalousie, Sculpturine.
— Non. Je suis dans l’incompréhension.
— Pourquoi. Trouvez-vous cet art avilissant ? Je suis certaind que cette charmante poupée garde en silence le plaisir qu’elle a à porter cette très étrange confection.
— Sans nul doute.
— Et ce maquillage raconte à lui seul une histoire sans avoir besoin de spectacle. Je suis heureuse que vous soyez retourné à votre première peinture. Et ces blessures…
— Veuillez m’excuser, l’interrompit ma mère.
Les pas de ma mère et des jumelles s’éloignèrent. L’impératrice caressa ma joue. Un sourire fit vibrer sa voix grave.
— Une poupée réservée mais joueuse.
— Elle aime le défi, répondit Arcan.
— Et la petite nouvelle a une silhouette qui ne m’est pas inconnue. Montre-moi ce que tu caches. Voilà de jolis petits seins bien faits. Tu es déjà venue, je ne me trompe pas ?
— Geisha était la poupée de Yako, expliqua Arcan.
— Ah ! Ma chérie, tu as bien fait de changer de façonneur. En tout cas, je vote pour ce trio sensuel. Ecrasez Sculpturine pour moi. Elle avait déjà l’inspiration douteuse, et je goûte fort peu les langues de vipère.
— Nous y tâcherons, répondit Arcan.
— Choix de pronom très à propos, Monsieur Arcan. Une autre aurait usé de la première personne du singulier. À tout à l’heure.
Elle s’éloigna. Arcan articula :
— L’heure tourne. Geisha, garde Muse une minute. Propose-lui à boire.
— Oui, maître Arcan.
— Si tu veux, on peut la garder à ta place, indiqua une voix malsaine.
— C’est ma responsabilité, répondit Geisha.
Elle tira sur la laisse et je la suivis en direction du buffet. La voix d’Arcan susurra par nos oreillettes :
— Je vous laisse dix secondes, hyènes et vautours guettent déjà. N’accélérez pas. Décontractées et sûres de vous.
Un homme sembla écarter tout le monde sur notre chemin :
— Laissez passer les poupées ténébreuses.
— Muse, stop, ordonna Arcan.
Je m’interrompis brutalement. La laisse se tendit, violemment et je sentis Geisha chanceler sous la surprise. Mais j’étais Muse, masquée et maquillée, je savais cette représentation unique. Je comptais donc leur en mettre pleine la vue. Quelques hommes rirent et Geisha grogna :
— Qu’est-ce que tu fais ?
Je souris et avançai d’un pas vers elle. En posant mes deux mains sur la laisse. Elle tonna d’une voix ferme :
— Tu ne bouges pas !
Je souris, suivis la chaîne jusqu’à elle et chaloupai en trouvant ses mains. Elle recula légèrement, se trouvant aculée à la table. Je caressai son visage et sa voix hésitante tremblota :
— Qu’est-ce que tu fais ?
Je glissai mon pouce sur sa bouche, tirai sa lèvre inférieure puis, d’une main, rapprochai ses hanches des miennes. J’inclinai la tête et l’embrassai langoureusement. Elle se laissa faire et accompagna mon baiser. L’échange était si suave que j’en éprouvais un plaisir intime certain. Geisha et moi avions appris à nous apprivoiser l’une l’autre et ça s’en ressentait. Arcan restait aussi silencieux que les autres convives. Plus aucune rumeur ne se mêlait à la musique. Je reculai mon visage en laissant ma langue tendue pour retenir un filet de salive. Le gardai ma main sur sa hanche et descendis l’autre sur son pubis. Entre les lèvres collantes, je trouvai l’orée humide de désir. J’enfonçai mon majeur dans son écrin brûlant. Elle retint sa respiration, alors je repartis en arrière, glissai le long de son clitoris, et refermai ma bouche autour de mon doigt. Les quelques murmures inintelligibles de nos spectateurs nous indiquaient combien nous les inspirions. Je ramenai ma main sur son bas ventre, remontai sur l’écrou de son nombril soulevai la cotte de maille, puis terminai sur son cou. Geisha retint sa respiration à nouveau, préméditant mon geste, et je la plaquai brutalement dos à la table. Le choc fut violent, des verres tintèrent, et les convives s’exclamèrent. Un gémissement plaintif échappa à Geisha. Je m’avançai entre ses genoux, et m’assurai que la cotte de maille restât relevée en massant ses seins l’un après l’autre. Les épaules en équilibre sur la pointe du chapeau, elle se tordit lascivement contre mon pagne. Je remontai mes mains en m’allongeant sur elle pour immobiliser ses bras, puis j’écrasai ma langue tout entière sur son mamelon.
— Oh c’est chaud ! s’exclama une fille.
De ressentir l’atmosphère qui s’érotisait me rassurait sur l’effet que nous provoquions. Je léchai de la même manière l’autre mamelon puis descendis mon visage contre sa peau, humant à peine l’odeur de Geisha derrière la peinture et le dissolvant. La pointe de mon nez trouva le petit écrou incrusté dans son nombril, alors je plaquai ma langue entière pour la lécher jusqu’au petit ornement. J’y abandonnai une goutte de salive, puis je relâchai délicatement ses bras, laissant les doigts filer sur ses aisselles, titillant ses flancs chatouilleux. Les convives profitaient du spectacle dans un silence religieux. Je savais que nous avions réussi le pari d’Arcan. Les ventres des spectatrices papillonnaient, les phallus des spectateurs s’érigeaient. Tandis que je caressais le ventre et les cuisses de ma partenaire, j’imaginais ma mère nous observant, l’air goguenard, me supposant incapable d’aller plus loin. Je voulais lui donner tort. Je descendis mes caresses vers les mollets de Geisha les saisis, et les plaquai brutalement vers la table, l’obligeant à un grand écart, tournant son intimité vers la lumière. Les convives eurent un sursaut. Je longeai l’intérieur de la cuisse du bout du nez, comme un vampire humant une nuque avant de savourer le sang. Chatouilleuse, Geisha ne put retenir les frissons. Le dos cambré, je dardai la langue et passai la pointe au vestibule de son intimité jusqu’à son rubis de chair. Je relevai le visage, me pourléchai de satisfaction, puis plongeai bouche béante entre ses cuisses. L’idée n’était pas de chercher la pleine satisfaction de Geisha, mais d’impressionner les façonneurs. Alors je bougeai la gorge, faisant mine de boire à flots.
— Continuez, je vous interromps dans dix secondes, avertit la voix d’Arcan dans nos oreillettes.
Geisha gémissait, son corps tremblait sans artifice, quand la laisse me tira en arrière. Je me relevai alors que des exclamations de déception s’élevaient parmi les spectateurs. Arcan gronda d’une voix posée et ferme :
— Geisha ! Je t’ai demandé de la surveiller !
Ma camarade se releva.
— Désolée, maître Arcan. Je me suis laissée envoûter.
— Toi, tu calmes tes ardeurs, ajouta notre façonneur en me tirant un petit coup par la laisse.
Je me pourléchai simplement avec un sourire satisfait.
— Vous auriez dû la laisser finir, suggéra un homme.
— Muse aurait vidé Geisha de toute énergie, inventa Arcan.
Il passa son bras autour de ma taille et me colla contre lui. Je trouvai sur son buste la main de Geisha qu’il tenait de la même manière. À quelques sons électriques, je devinai qu’on nous prenait en photo.
— La nouvelle avait l’air si proche du septième ciel, ajouta un autre.
— Peut-être les laisserais-je terminer si la satisfaction des élections m’emporte.
— Ça s’appelle du chantage, se moqua ma mère.
— Non. J’ai dit peut-être, car faut encore qu’elles en aient envie.
— Moi qui croyais qu’elle était une poupée allergique aux fruits de mer, je trouve qu’elle a l’air d’aimer beaucoup la moule.
Piquée au vif, je plaquai ma main sur l’entrejambe d’Arcan et lui léchai la joue. Pour la première fois je pris la parole malgré mon masque :
— Ma mère m’a appris à me forcer si je voulais avoir mon dessert.
Ma génitrice, les dents serrées répliqua :
— Je vois.
J’entendis ses talons s’éloigner. Arcan glissa la main sur mon pagne et fit bouger le plug au travers. Je posai mon front contre son visage en gardant la bouche entrouverte. Il déclara :
— Je crois que ça mérite une coupe de champagne. Geisha, trois coupes.
— Oui, maître Arcan.
Je me demandais si ma mère avait pris mon geste pour argent comptant ou si elle avait supposé que j’avais simplement fait ça par provocation. Geisha revint avec des coupes de champagne. Les hôtesses faisaient passer les petits fours dont je ne pouvais deviner le goût à l’aspect.
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