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Millie s’engouffra dans le flot dense des couloirs, un endroit qu’elle évitait d’ordinaire comme la peste. Elle n’aimait ni la foule ni le bruit assourdissant de la cafétéria, mais cette fois, elle avait un but clair. Abi a besoin de sourire, se répétait-elle comme un mantra, serrant son téléphone dans sa main avant de le glisser dans la poche de son sweat. Elle inspira profondément, relevant légèrement la capuche pour s’armer de courage, puis se jeta dans la mêlée.

L'allée menant à la cafétéria ressemblait à une rivière humaine : des coudes qui cognaient, des sacs qui se balançaient contre elle, des voix qui résonnaient dans tous les sens. Millie baissa la tête et se fraya un chemin tant bien que mal. Chaque pas était un combat. Elle se prit un coup dans le ventre et, par réflexe, elle plaça un bras protecteur sur son sweat, comme pour protéger un trésor imaginaire. Sa respiration était saccadée, mais elle avançait, poussant les épaules de ceux qui s’attardaient trop devant elle.

Lorsqu’elle parvint enfin au comptoir, après un combat acharné, la dame qui servait la regarda avec étonnement, visiblement pas habituée à voir Millie ici.

—Des gâteaux... et encore des gâteaux ! lança-t-elle.

Munie d’une voix légèrement rauque mais suffisamment forte pour se faire entendre malgré le vacarme, elle bougeait sans arrêt les yeux.

La dame arqua un sourcil, amusée, puis empaqueta trois gâteaux dans des serviettes en papier avant de les tendre à Millie. Celle-ci les attrapa précieusement, repliant le bas de son sweat pour en faire un sac improvisé. Elle lui murmura un petit « Merci... » presque inaudible, puis fonça vers le distributeur automatique.

Là, elle sélectionna quatre boissons sucrées, variant les saveurs avec soin : une pour chacune d’elles et une supplémentaire, au cas où, elle aurait encore plus soif. Les canettes tombèrent une à une, résonnant bruyamment dans la machine. Millie les enfourna maladroitement dans les poches et sous son bras, respirant un grand coup. Son front perlait légèrement, mais elle s’en fichait.

Elle retourna à toute vitesse vers la salle, le cœur battant aussi fort que si elle venait de finir un marathon. En arrivant près de la porte, elle ralentit un peu pour reprendre contenance, mais son souffle trahissait ses efforts. Elle entra, presque théâtrale malgré elle, et s’avança jusqu’aux deux bureaux accolés où Bianca et Abi étaient installées. Dans un geste solennel, elle laissa glisser les gâteaux et les canettes sur la table avec un léger bruit sourd.

—J’ai les gâteaux... et de la boisson fraîche, déclara-t-elle, l'air de rien, ses joues rosies par l’effort et quelques mèches de cheveux collées à son front.

Bianca et Abi échangèrent un regard stupéfait, leurs yeux s’écarquillant comme si elles venaient de voir un mirage. Bianca posa sa main devant sa bouche pour masquer un sourire, tandis qu’Abi se redressa, un éclat de surprise dans le regard. Elles ne pouvaient pas y croire : Millie, qui ne supportait pas les foules, venait littéralement de se battre contre la marée humaine pour leur ramener ces "trésors".

—Attends, attends… Tu as vraiment affronté ça pour nous ? demanda Bianca, impressionnée.

Millie haussa les épaules maladroitement, évitant leurs regards.

—C’est juste des gâteaux... Rien de spécial, murmura-t-elle.

Même si ses joues avaient encore pris quelques nuances de rouge.

Abi sourit doucement, un vrai sourire cette fois, débarrassé de toute tension. Elle tapota la chaise à côté d’elle pour inviter Millie à s’asseoir.

—Allez, viens ici. T’as bien mérité de partager tout ça avec nous.

Millie obéit, un peu raide, et rangea les boissons sur la table. Bianca éclata de rire en prenant une canette.

—Franchement, je suis trop fière de toi, Millie ! Ça, c’est de l’héroïsme.

—Ouais, on dirait que t’as traversé une bataille ! Raconte !, ajouta Abi, la taquinant avec douceur.

L'attentionnée roula des yeux mais ne put s’empêcher de sourire, sentant une bouffée de fierté intérieure. Elle s’installa entre ses deux amies, prenant une gorgée de sa boisson préférée. Elles étaient désormais trois autour de la table, partageant des rires légers et des bouchées de gâteau et de bonnes bouffes, loin du tumulte du reste du lycée.

Pour Abi, ce moment valait de l’or. Pour Millie, il représentait une petite victoire contre elle-même. Quant à Bianca, elle ne pouvait qu’être fière de ce trio improbable mais si soudé. La pause continua dans cette atmosphère complice, comme une bulle qui les protégeait des regards du reste du monde.

Dans cette compagnie, la journée de cours touchait silencieusement enfin à son terme. Abi resta un peu après les autres, choisissant de passer un moment dans la salle d'art, un sanctuaire de calme où elle pouvait se ressourcer après une journée qui l’avait laissée émotionnellement éreintée. Les pinceaux, les éclats de couleurs et l’odeur familière de peinture la réconfortaient. Elle traça quelques esquisses abstraites sur un coin de papier, laissant ses pensées divaguer, avant que ses amies ne la rejoignent.

—Alors, on rentre ? proposa Bianca, le sac déjà jeté sur son épaule.

Abi acquiesça sans hésitation, et les trois filles quittèrent le lycée ensemble. La promenade jusqu’à la station de bus était devenue une sorte de rituel pour leur trio. Bianca, fidèle à elle-même, babillait joyeusement sur mille sujets, sa voix pétillante brisant le silence. Abi, un peu dans la lune, répondait de temps à autre, mais se contentait souvent d’écouter, un sourire discret sur les lèvres. Millie, quant à elle, marchait les mains dans les poches, totalement absorbée par sa playlist. Par moments, elle fredonnait à peine, créant une étrange harmonie entre ses murmures et les rires de Bianca.

Arrivées à leur croisement habituel, elles se saluèrent avec chaleur.

—À demain, les filles ! lança Bianca en s’éloignant avec un geste de la main.

—Fais pas de bêtises, Abi, hein, ajouta Millie

Son air faussement sévère resta sur son visage taché de rousseur avant de remettre ses écouteurs et de disparaître dans l’autre direction.

Abi regarda ses amies s’éloigner, puis reprit la route vers la maison de ses mamies. Sur le chemin, son téléphone vibra. Elle le sortit pour lire un message de son frère : « Rentre tard. » Rien de plus. Elle haussa les sourcils, intriguée. Encore une de ses habitudes cryptiques... pensa-t-elle en soupirant, mais elle choisit de ne pas s’en inquiéter pour l’instant.

Quand la lycéenne poussa la porte de la maison, une scène inattendue l’accueillit. Archer, vêtu de sa plus belle chemise, se tenait fièrement au milieu du salon. Il portait une chemise verte à motif plus pâle par endroit qui ajoutait une touche adorable à son air enfantin. Ses cheveux avaient été coiffés soigneusement, et il tenait dans ses mains un jouet qu’il semblait hésitant à lâcher.

Abi lâcha doucement son sac et, sans réfléchir, se précipita vers lui.

—Mais regarde-moi ça ! Tu es tellement beau ! Trop mignon, trop adorable !

Elle le prit dans ses bras et le fit tournoyer avec enthousiasme. Le garçon éclata de rire, ce son cristallin résonnant dans toute la pièce. Ses petites mains s’agrippaient à ses épaules tandis qu’il la regardait avec des yeux pétillants.

—Arrête, 'man, tu vas décoiffer ! protesta-t-il.

Son sourire trahissait le plaisir qu’il ressentait.

—Tu viens enfin m'appeler maman ! Je n'attendais que ça aujourd'hui, fais voir grosse bouille. Trop mignon !

Les deux mamies, installées sur le canapé, observaient la scène avec un sourire attendri. Vicky croisa les bras, les yeux brillants d’émotion.

—Il va tellement nous manquer, ce petit..., murmura-t-elle à Elsa, qui hocha doucement la tête.

Entendant cela, Abi posa doucement Archer et se tourna vers elles, fronçant les sourcils.

—Ne dites pas ça, voyons. Rien n’est encore sûr. Et puis, même après votre voyage, vous pourrez le voir autant et quand que vous le voulez.

Son ton se voulait léger, mais une pointe de détermination transparaissait dans ses paroles. Les deux dames échangèrent un regard complice, amusées par cette réplique.

—Tu as raison, mon enfant. Tu nous as bien eu sur ce coup-là, répondit Elsa, un éclat de malice dans la voix.

Abi s’approcha d’elles, et chacune déposa un baiser affectueux sur ses joues, un geste qui semblait dire tout ce que les mots ne pouvaient exprimer. Elle les serra brièvement dans ses bras, sentant leur parfum familier. Elle savait que ces instants étaient précieux.

—Allez, viens, mon ange ! Dis au revoir à tes mamies !

L'enfant avança et prononça un léger “au revoir” en bougeant la main, un petit sourire faisait apparaître ces petites dents.

Il attrapa ensuite la main de sa mère sans hésiter, son visage rayonnant d’une joie simple. Ensemble, ils quittèrent la maison, Abi jetant un dernier regard en arrière pour voir les deux femmes se tenir aux pas de la porte et lui adresser des sourires pleins de tendresse.

Sur le chemin, le silence entre elle et Archer était confortable. Abi regardait le garçon, une chaleur étrange au creux de la poitrine. Il avait encore ce bouton taché un peu trop haut, et elle s’amusa à le lui ajuster tout en marchant. Un pas de plus vers leur avenir, pensa-t-elle, le cœur gonflé d’espoir.

D’un pas lent sur le trottoir, l'écolière n'allait lâché son enfant pour rien au monde, avec une douceur protectrice, comme si elle voulait ancrer le petit garçon dans le moment, et aussi se rassurer elle-même. Le soleil déclinait doucement, projetant des ombres longues sur la chaussée. Les bruits de la ville semblaient lointains, presque irréels. Elle portait les petites affaires du garçon sur son épaule, un sac léger mais dont le poids semblait amplifié par ses pensées qui la tiraient ailleurs.

—Pourquoi tu es si triste ? demanda le tout petit d’une voix douce, relevant la tête vers elle.

Sa garante sursauta légèrement, surprise par la question. Son regard croisa celui-ci, et elle tenta un sourire, un peu forcé.

—Moi, triste ? Regarde-moi ce beau sourire !

Mais son sourire ne parvint pas à dissimuler complètement ce qu’elle ressentait. Archer, malgré son jeune âge, la scrutait avec une intensité inhabituelle, comme s’il savait que quelque chose clochait. Abi serra un peu plus fort sa petite main, ses doigts tremblants légèrement.

—Tu sais, finit-elle par dire, après un silence, j’aimerais tellement te présenter à ma prof. Vivianne. Elle est incroyable... Je suis sûre qu’elle t’adorerait. Elle a été la première à qui j’ai parlé de toi, même si je n’étais pas sûre de ce que je voulais faire. Elle m’a donné plein de conseils aujourd’hui, après le cours.

Sa voix trembla légèrement. Elle prit une inspiration, fixant un point devant elle.

—J’ai un peu peur, je sais que tu ne vas pas le comprendre maintenant mais j'espère qu'à l'avenir, je pourrais t'en parler à cœur ouvert. J'ai peur de la réaction de ma famille, peur que ça ne fonctionne pas... Mais après qu’on ait parlé, elle s’est mise à peindre. Et c’était... magnifique. Je n’ai pas pu m’empêcher de rester là, à la regarder, fascinée. J’aimerais tellement être comme elle... calme, confiante, capable de créer quelque chose de beau même quand tout semble incertain. À partir de rien.

Le chérubin écoutait avec des yeux grands ouverts, absorbant chaque mot, chaque nuance d’émotion dans sa voix. Un sourire malicieux finit par se dessiner sur son visage, et un petit rire, cristallin, s’échappa de ses lèvres.

Abi, prise par surprise, rit à son tour, plus naturellement cette fois. Elle se pencha pour le prendre dans ses bras et le souleva, traversant la rue avec lui.

— Je t’aime tellement, tu sais ça ? murmura-t-elle, la voix emplie de sincérité.

Archer, dans un éclat de rire, répondit sans hésiter.

—Je t’aime, 'man

Leur marche reprit, et au détour d’une rue, la maison des Graham apparut enfin. Immense et imposante, elle se dressait comme un monument froid contre le ciel teinté d’orange. L’architecture moderne était presque intimidante, toute en lignes droites et surfaces lisses. Des vitres gigantesques reflétaient que le monde extérieur, tandis que la porte en acier noir, démesurée, semblait garder un secret. Un murmure technologique semblait émaner de la structure elle-même, comme si la maison respirait d’une vie artificielle.

Abi ralentit, fixant la bâtisse avec un mélange de crainte et de malaise. La perfection glaciale de l’extérieur, son absence d’imperfections ou de chaleur humaine, semblait presque cynique, comme une vitrine trompeuse d’une vie idéale. Mais à mesure qu’elle approchait, la tension dans son ventre s’accentua.

Lorsqu’elle ouvrit la porte, la maison révéla son autre visage. L’intérieur, en contraste avec l’extérieur, respirait une élégance classique presque déconcertante. Des boiseries sombres aux finitions vieillies encadraient les murs, et des meubles d’époque, aux détails minutieusement sculptés, trônaient fièrement. Des tapis persans aux couleurs chaudes recouvraient les sols, et les lustres en cristal semblaient appartenir à une autre époque.

Mais quelque chose clochait. Pas un bruit, pas une voix. L’endroit, d’ordinaire animé par le tumulte de la famille, était étrangement silencieux. Même l’écho de leurs pas semblait absorbé par cette ambiance feutrée.

La demoiselle fronça les sourcils, posant ses affaires près du salon tout en observant les lieux.

—Où est passé tout le monde ?

Archer, toujours dans ses bras, regardait autour de lui avec la même perplexité. La maison, si vaste et si riche en détails, semblait soudain grave dans ce vide absolu.

Ils commencèrent leur exploration de la maison. Elle voulait lui montrer chaque recoin, comme pour calmer son esprit agité et le distraire de l’atmosphère pesante.

—À partir de maintenant, tu pourras dormir et réveiller avec moi. On fera des sorties ensemble et surtout je t'apprendrai pleins de choses. J'ai tellement hâte de te montrer ma chambre. Et Alex va t'adorer, crois-moi…

Le long couloir qui descendait vers les pièces plus reculées était tapissé de papiers peints jaunes et marrons, une combinaison autrefois lumineuse, mais qui semblait aujourd’hui fanée, presque étouffante dans l’obscurité partielle. Les portraits de famille tapissant les murs racontaient une histoire figée dans le temps : des visages graves, des sourires maîtrisés, les couleurs de la lignée éclatant sous les cadres dorés.

Archer était fasciné. Ses petits doigts frôlaient les cadres, ses yeux brillants parcouraient les traits sévères ou joyeux des visages capturés. Il murmurait aussi parfois des questions qu’Abi répondait distraitement, son attention tiraillée par un malaise qu’elle ne parvenait pas à nommer.

Le crépuscule approchait. Une lumière pâle perçait à peine à travers les fenêtres, dessinant des ombres mouvantes sur les murs. La jeune fille s’arrêta devant une porte, hésitant, avant de se diriger vers la cuisine, le seul endroit d’où provenait un bruit. Le silence autour d’eux devenait de plus en plus pesant, presque maladif.

Dans la cuisine, une silhouette familière se découpait contre la lumière tamisée. Alexander, dans sa tenue de travail, s’affairait à découper quelque chose sur le plan de travail. Les gestes étaient mécaniques, sans rythme naturel, et Abi remarqua tout de suite une tâche rouge vive sur sa chemise blanche, maculée et poisseuse.

—Alex ? appela-t-elle, sa voix hésitante.

Elle posa Archer près de la porte et lui murmura de rester là, de ne pas bouger. Puis, lentement, elle s’approcha de son frère, ses pas résonnant légèrement sur le sol carrelé.

Ce qu’elle vit la glaça. Alexander coupait quelque chose avec une précision absurde, presque chirurgicale. Ce n’était pas de la nourriture qu’il tranchait. C’étaient ses propres doigts. Un à un, ils roulaient sur le plan de travail, leur chair déchirée exposant des os brisés. Il continuait, implacable, répétant dans un murmure rauque la même rengaine.

—Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ?... Est-ce assez maintenant, mère ? Est-ce assez ?

Abi suffoqua. La vue de cette horreur, le son du couteau qui claquait sur la planche, le gargouillis du sang qui se répandait en flaques visqueuses… Tout cela se mêlait dans une cacophonie cauchemardesque.

—Alex ! cria-t-elle en s’approchant davantage, les mains tremblantes, Arrête, qu’est-ce que tu fais ?

Mais il ne semblait pas l’entendre. Son visage… Ce visage qu’elle connaissait par cœur était devenu méconnaissable. Ses traits, figés dans une grimace de douleur et de démence, semblaient à la fois vides et débordants d’émotions. Ses yeux brillaient d’une lumière malsaine, perdus dans un abîme de souffrance. Ses lèvres tremblaient légèrement, répétant encore et encore ces mêmes mots, comme un refrain maudit.

Elle voulait s’approcher, mais elle hésita en voyant le marteau ensanglanté posé sur le plan de travail, ses contours macabres témoignant d’un usage récent. Elle sentit la peur monter en elle, une terreur primitive qui serrait sa poitrine.

—Alex, écoute-moi ! C’est moi, Abi ! Je suis rentré, tenta-t-elle de le ramener à la réalité.

Mais il s’arrêta brusquement, levant les yeux vers elle. Son regard… Ce regard la terrifia. Ce n’était pas Alexander qui la regardait. Ce n’était qu’un vide profond, abyssal, où la peur et la haine dansaient dans une symphonie macabre.

Archer, trop curieux, avait quitté sa position et s’approchait trop près. Trop près. La depuis peu mère voulut crier, mais sa voix se bloqua dans sa gorge. Elle tendit la main pour attraper l’enfant, mais Alexander bougea plus vite.

Il attrapa son marteau, son manche encore collant de sang. Son mouvement était rapide, brutal, et le métal fendit l’air avec un sifflement mortel. L’impact retentit comme une explosion dans la cuisine. Archer fut projeté contre le buffet, son petit corps inerte tombant au sol dans un bruit sourd.

—Non ! hurla Abi.

Sa voix se brisa, se fissura par la douleur.

Elle se précipita vers le corps d’Archer, mais avant qu’elle ne puisse l’atteindre, Alexander l’attrapa. Ses mains, froides et poisseuses de sang, se refermèrent sur son cou avec une force inhumaine. Ses grands yeux le regardaient.

—Alex… Arrête…, souffla-t-elle, sa voix étranglée.

Elle se débattait, ses pieds frappant le sol, ses mains griffant désespérément le visage de son frère. Mais il ne relâchait pas son emprise. Son visage restait figé, une expression d’égarement total, presque paisible dans sa folie.

Elle sentit ses forces l’abandonner. Sa vision se brouilla, les sons autour d’elle devenant étouffés. Ses pensées se fragmentèrent, une série d’images fugaces défilant dans son esprit : le sourire de son enfant, les rires de ses amies, le tableau lumineux de Vivianne, un portrait qu'elle attendait de voir se terminer…

Son dernier regard croisa celui d’Alexander. Ce n’était plus son frère. C’était un être brisé, marqué par des griffures, du sang séché, et une expression vide de toute humanité.

Il la lâcha soudain, et elle s’effondra lourdement au sol. Elle ne sentit que le froid du carrelage contre sa peau, le goût métallique du sang dans sa bouche, et la douleur sourde dans sa poitrine.

Au-dessus d’elle, la voix d’Alexander résonnait, creuse, répétant comme un écho funeste.

—Est-ce assez maintenant, mère ? Est-ce assez ?

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