2.11 Horreur et Désespoir
Une semaine se passe ainsi sur les deux premiers hommes. Je regarde les DVD les uns après les autres. Je crie de colère, injurie Cassandra. Je pleure. Je hurle de terreur. Je vomis de dégoût. Chen me force à manger, à me laver, à aller dormir, à faire des pauses. Je le vois parfois frissonner en se rappelant ce qu'il a vécu. Elles essayèrent de nombreuses techniques.
Le premier fut électrifié de partout. Cassandra le brûla avec sa cigarette. Il fut battu à mort. Elles réglèrent la puissance d'électrocution pour qu'il dure le plus longtemps possible. L'espace entre les séances devait à chaque fois être allongé. Le temps qu'il récupère et cicatrise. Cassandra ne prenait pas plus soin de lui entre-temps que lors des séances. Je le vis maigrir et devenir un zombie au fil des séances. Les séances s'écourtaient de plus en plus. Sa fatigue faisait lâcher son cœur de plus en plus tôt.
Lors du dernier DVD, elles essayèrent quelque chose de nouveau. Pas de coup. Pas de décharges. La médecin et Cassandra avaient découvert un vieux livre à propos de substances chimiques et de leur effet sur le corps humain ainsi qu'un exemplaire complet du Kamasutra donnant des indications sur le plaisir masculin. Elles donnèrent un mélange à boire à l'homme, des drogues censées provoquer son désir et lui perturber l'esprit pour qu'il n'ait plus les idées claires. Elles avaient trouvé une recette mélangeant une désinhibition sexuelle et un état second.
Une jeune fille fut amenée. Elle devait avoir guère plus que mon âge. Aux traces de coup et au langage employé pour lui parler, je compris que c'était une Zêta. Cassandra avait lu dans les documents que les hommes pouvaient être excités par certains stimuli visuels et tactiles.
Elles forcèrent la jeune fille à se déshabiller, à caresser l'homme, à l'embrasser, à mettre son sexe dans sa bouche. La Zêta aussi pleurait. L'homme délirait et n'avait pas vraiment conscience de ce qui se passait. Cassandra posa les mains de l'homme sur les fesses de la fille, sur ses seins. Elle le força à la caresser. Il se mit à bander très légèrement.
La jeune fille fut obligée de prendre le pénis dans ses mains et de faire une sorte de massage en va-et-vient. Quand son pénis grossit et se durcit, elle monta à califourchon sur lui, pour qu'il la pénètre. La pauvre enfant dut continuer à faire le va-et-vient malgré ses cris de protestation.
Cassandra l'électrocutait avec un petit bâton ou la fouettait avec une cravache. La jeune fille était en pleurs. Lorsque l'homme fut sur le point d'éjaculer, Cassandra jeta à terre la jeune fille et entreprit elle-même de finir le massage. Il éjacula. La femme médecin recueillie le précieux échantillon et mis fin à l'expérience onze. Je venais de voir un double viol.
L'homme se suicida une semaine plus tard. Son calvaire avait duré deux ans. Il n'était pas en bonne santé. Son sperme était de mauvaise qualité. Les deux paillettes produites ne permirent pas une bonne fécondation. Cassandra fit deux fausses-couches dans les jours suivants les implantations. Le cocktail donné à boire était un mélange de drogues et de stimulants chimiques. La jeune fille en pleurs le stimulant visuel et tactile.
Six mois après, Cassandra avait un nouveau reproducteur. MD77-34-8909-001. Les tortures recommencèrent. On lui fit boire le cocktail. On le fouetta et l'électrocuta pour qu'il pénètre la jeune fille dès que son sexe fut assez dur. Il éjacula lors de la première séance de torture. Les deux folles droguaient de plus en plus l'homme. Il devenait fou, animal. Elles continuaient de lui envoyer des décharges et mirent des électrodes sur le crâne pour voir les zones de cerveau actives.
Elles droguèrent aussi la jeune fille, pour qu'elle oublie les viols. Les deux folles forcèrent l'homme à la violer encore et encore. La pauvre enfant tint un an et demie et six viols, se suicida au cours du septième en cassant un verre et s'ouvrant le cou avec un éclat. La drogue ne lui avait pas fait tout oublier.
Les deux monstres utilisèrent une poupée et une trayeuse à vache sur l'homme perdant l'esprit. Elles n'arrivèrent plus à faire éjaculer l'homme depuis la première séance. Il devint fou et se suicida au bout de trois ans et dix séances.
Les trois paillettes produites avec le premier éjaculat furent de meilleure qualité, l'homme était en meilleure forme physique à ce moment-là. De qualité médiocre tout de même. Cassandra commençant à vieillir, elle perdit les trois inséminations au bout de quelques semaines.
Je dois faire une pause avant de regarder les tortures de Chen. Profitant de la nuit, il m'emmène deux jours dans un gîte en pleine campagne. C'est un moment merveilleux. On ne parle pas des DVD. Il est enfin câlin et tactile, pas très bavard. J'adore sa voix grave. Je savoure chaque seconde. Je sais qu'au retour, je verrai ce qu'il a subi.
Je prends conscience durant ces deux jours que Chen joue la comédie. Il se montre gentil pour me soutenir, pour que je comprenne et empêche cela de se reproduire. Il me laisse le toucher, mais les autres femmes continuent à le dégoûter. Il ne pourra jamais guérir en ayant un bracelet, en appartenant à une femme, même à moi. Je dois le libérer et lui permettre d'aller vivre ailleurs. Loin de cet État.
Cette décision me brise le cœur. Pendant qu'il se douche, j'appelle Déborah, lui exprimant brièvement la violence des tortures sans lui expliquer la raison. Je parle de punition suite à des refus d'actes sexuels. Je lui demande asile pour Chen.
Elle comprend à ma voix combien j'aime Chen. Elle aussi a adopté la libération du devoir de procréation au bout de deux enfants. Bien qu'en général, ses Libres soient plus âgés, elle accepte d'accueillir Chen sans le dire à qui que ce soit, même ses conseillères proches.
Pendant que Chen va courir de nuit, me croyant endormie, je contacte Keira. J'ai besoin d'aide. Sans avoir totalement confiance en elles, je suis sûre que Keira et Nadia ne sont pas des délatrices, mais bien des sœurs espionnes protégeant la vie.
Alors, sans révéler l'existence des délatrices, je mets Keira sur la piste pour qu'elle se renseigne, lui parlant d'incohérences dans les retours des espionnes. Je lui raconte mon recrutement d'informatrices en dehors des espionnes et surtout les mails de Cassandra à une personne non-espionne. Keira est intelligente et perspicace. Si jamais je ne parviens pas à mon but, j'aurais prévenu une personne de confiance capable de continuer ma mission.
Je demande un autre service à Keira. Les vieux documents venaient d'une ancienne clinique que Cassandra avait fait raser. La suicidée les cachait dans un coffre-fort. Me sachant surveillée, je supplie mon amie d'aller tout récupérer et d'en avertir personne, absolument personne et de ne faire confiance qu'à moi et Nadia. Je lui dis de faire très attention à elle, lui certifiant avoir la conviction qu'il y ait un loup dans la bergerie.
Chen et moi rentrons en passant par l'hôpital. Peter guérit doucement. Il pourra sortir dans une semaine et vivra en colocation avec Bruce. Il me remercie de l'avoir sauvé, de la douceur dont j'ai fait preuve à son égard, s'excusant des horreurs que je suis obligée de voir. Peter me prend dans ses bras et embrasse mes mains puis mes bras. Il se prosterne devant moi, me jure fidélité, obéissance. J'essaye de le calmer tant bien que mal.
J'ignore pourquoi, mais il appelle Chen Uno et Bruce Tertio. Peter se met à me serrer dans ses bras alors qu'il s'est agenouillé, à embrasser mon pantalon. Bruce et Chen doivent m'aider à le repousser et à l'apaiser. J'ai un mal fou pour qu'il me laisse retourner à mes films d'horreurs. Je verse quelques larmes pour lui dans la voiture. Chen s'arrête et embrasse ma main doucement, le temps que je me calme.
Une fois à la maison, je dois visionner les tortures de Chen. Plus de DVD que les deux premiers réunis. Je permets à Chen de partir, d'aller dans une autre pièce, lui demande s'il veut que je mette un casque. Il refuse tout. Toute la semaine, alors que je le regarde en train de se faire torturer, il reste à côté de moi, dos à la télévision, à me tenir la main et me prendre dans ses bras.
Les deux folles droguèrent Chen et essayèrent différents dosages. Il résistait à la drogue. Elles le dopèrent aux vitamines pour qu'il survive et reste en bonne condition physique. Les deux malades lui firent des trous dans le crâne pour stimuler des parties du cerveau et firent revenir une jeune fille.
SIBYLLE. Je pousse un cri en la voyant. Chen résista, ne touchant pas la jeune Sibylle, ne bandant pas. Chen ne montra pas le moindre signe d'excitation. Pendant trente-six séances de près d'une heure chacune, pendant trois ans.
À chaque fin de séance, quand les drogues se dissipaient, Chen subissait une série d'électrocutions de la part de Cassandra en colère, pour le punir de ne pas jouir et éjaculer, pour le punir de résister. Plusieurs fois, son cœur lâcha après les décharges. À chaque fois, je pousse un petit cri malgré qu'il soit à côté de moi. Plusieurs fois, il me prend dans ses bras pour calmer mon agitation.
Durant trente-six séances, Chen vécut les tortures cumulées de ces deux prédécesseurs, la drogue et les coups. La femme médecin essaya une nouvelle technique. À la séance trente-sept, je la vis enfoncer une aiguille dans les testicules de Chen, sans anesthésiant. La médecin préleva des spermatozoïdes directement. Je vois Chen hurler et son cœur s'affoler. Je le vois s'évanouir de douleur tandis que la femme médecin continuait son prélèvement.
La mixture qu'elle fabrique donne deux paillettes de mauvaise qualité, deux fausses-couches de Cassandra. À la séance trente-huit, elle fit de même, mais améliora sa mixture. Deux paillettes de qualité. Cassandra était vieille. Elle fit deux fausses-couches de nouveau. Le dernier embryon tint un mois et demi. À la séance trente-neuf, trois paillettes de qualité. Cassandra eu une insémination. Deux jours après son arrestation, Cassandra perdit l'enfant. Son corps rejetait les embryons. Elle débutait sa ménopause.
Le dernier jeune homme, Peter, a été torturé en même temps que Chen la dernière année, sans Zêta, mais avec des drogues. En un an, il produisit deux paillettes de mauvaise qualité, sa forme physique étant moins bonne. La femme médecin s'auto-insémina avec et perdit les deux embryons. Elle débutait sa ménopause aussi.
La folle tenta le tout pour le tout en utilisant une paillette de Chen. La femme médecin utilisa une paillette trois mois avant son suicide. Elle perdit l'enfant au bout de deux mois et demi. Sa fausse-couche la rendit encore plus folle.
Ses écrits et comptes rendus n'étaient plus cohérents. Elle recommençait avec Peter les premières tortures dès le départ. Tout en réalisant que ce qu'elle faisait était mal. Il subit un grand nombre d'électrocutions et de coups de fouet.
Au dernier DVD, je prends une douche pour me laver de cette horreur. Chen veut m'aider à me laver, mais j'exige d'être seule. J'ai besoin de reprendre mes esprits et d'être capable de prendre des décisions rationnelles. Il faut que je redevienne froide et réfléchie.
Je fais les comptes avec Chen. Je falsifie le dernier compte-rendu et marque deux au lieu de trois. Je falsifie le livre de compte et arrache la fiche correspondant à la dernière paillette. J'ouvre le fût et sort la paillette pour la briser sous les yeux de Chen.
Je veux brûler le reste. Chen m'arrête. La technique de congélation / fécondation / insémination est bonne. Avec un prélèvement volontaire et non-douloureux, je pourrais inséminer les Lambda. Je pourrais faire cesser l'esclavagisme des hommes. Il me parle de comment il a résisté. De ce à quoi il pensait pour empêcher son corps de bander. Il m'explique pourquoi la jeune fille fonctionna sur les premiers hommes. Le besoin tactile et visuel d'un homme. Il est avéré.
À l'école, on apprend aux petits garçons à se concentrer sur une belle image pour bander. À se stimuler seul par ce mouvement de va-et-vient de la main. Pour arriver à être suffisant prêt pour féconder une femme. Si j'arrive à convaincre des hommes de donner volontairement du sperme, je peux faire ressortir le bon de ces actes de cruauté. Je peux relancer la natalité, sans martyriser les hommes.
— Les autres Alpha, elles voudront voir les DVD, je murmure.
Chen me donne son accord pour faire visionner les DVD un à trente-six en cas de nécessité. Je le libère alors, l'exemptant du devoir de procréation. Je lui explique ce que j'ai compris. Je l'embrasse une dernière fois, un baiser langoureux de fille amoureuse.
Je lui fournis un nouvel appart dans l'État de Déborah et remplit son compte en banque pour les dix prochaines années. Je le mets à la porte et pleure pendant trois jours.
****************************** fin des scènes de tortures ***************************
Inès visionne des DVD de tortures. Cela la révulse. Chen arrive. Il lui parle enfin. Il reste avec elle pour l'aider à supporter la violence des DVD. Les images sont horribles. Cassandra a torturé ses trois reproducteurs. Chen a subi les pires violences.
Inès prend conscience qu'il ne pourra jamais pardonner tant qu'il aura une entrave. Elle le libère de son rôle de compagnon et fait de lui un Homme Libre qu'elle envoie chez Déborah. Là où personne ne le connaît.
Se sachant surveiller, Inès demande de l'aide à son amie Keira, dont elle est sûre dans son cœur qu'elle n'est pas une délatrice, de récupérer tous les documents relatifs aux tortures pour qu'ils ne tombent pas en de mauvaises mains. Inès prend le risque de mettre Keira sur la piste de l'existence des délatrices, au cas où il lui arriverait quelque chose, pour que son amie poursuivre la mission de destruction des délatrices.
Alors qu'Inès veut détruire les DVD, Chen l'arrête. Malgré les horreurs, la méthode peut permettre de relancer la natalité sans torture. Inès doit la protéger.
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