Mercredi 01 mai 2019
Sans aucun filet, sans préparation, l'abcès s'est crevé. Presque tout seul, comme un bouton trop mûr qu'il aura suffi d'effleurer de la plus légère des pression. J'en tremble encore… C'est fait, c'est dit : Gaston et moi, c'est fini. Me voilà donc désormais à sa merci sans possibilité de replis si les choses tournent mal.
Tout ça pour un brin de muguet… je ne sais même pas par où commencer.
C'était censé être une bonne journée : Gaston était parti aider un de ses amis et moi je profitais de cette tranquillité pour utiliser un peu de la console. Tout s'est précipité lors de son retour prématuré.
C'est qu'il en a profité pour me ramener un bouquet de premier mai. Alors oui, ça parait tellement anodin dit comme ça. En quoi une fleur offerte pourrait-elle bien accélérer la fin d'une relation ? C'est qu'il ne m'en offre que quand il veut se donner un rôle. Comme la fois où il voulait faire le mec bien devant sa famille. Il n'a m'a jamais pardonné d'avoir naïvement remercier son frère et d'avoir ainsi exposé sa petite manigance. Cette fois c'est mon manque d'enthousiasme qu'il n'a pas apprécié. Il m'a poussée, malmenée et j'ai craqué. C'est arrivé sans crier gare et une fois les vannes ouvertes, il ne m'était plus possible de revenir en arrière ou de continuer à faire semblant.
C'est ce qui se passe depuis qui est surprenant. Il est beaucoup plus calme et plus gentil que je ne l'imaginais. Je ne m'attendais pas à ça : il pleure, il dit qu'il m'aidera à économiser ou à déménager et même me dit de prendre sa précieuse console car il n'aurait plus gout à rien, plus d'envie ou de projet. Et je me sens un peu horrible de me méfier de lui et de trouver qu'il en fait vraiment des caisses.
Il répète aussi en boucle que de toute façon nous deux c'est bel et bien fini maintenant. Comme si c'était lui qui avait mis fin à notre histoire. Je le vois venir avec ses gros sabots : on va être obligé de se côtoyer le temps que j'économise. Qu'est-ce qu'il espère ? Un revirement de ma part ? Ou bien il prépare son rôle de pauvre petite victime.
Parce que bien entendu d'après lui, c'est moi la coupable. Moi qui ai laissé notre couple dépérir, moi qui suis invivable, menteuse et irresponsable. Il me reproche quand même de ne jamais lui avoir parler de nos problèmes. Oubliées toutes nos longues discussions où il se confondait en plates excuses et me promettait de s'amender, d’être moins dur avec moi. Oubliées toutes les fois où j'essayais de me défendre, de m'expliquer et où je me faisais rembarrer par des insultes et des grossièretés. Oublié son rejet systématique du moindre de mes propos parce que je ne peux pas lui sortir un agenda avec les jours et les heures précises de tous nos échanges. D'après lui je suis juste folle, hystérique ou malveillante. Rien de ce dont je me souviens n'a jamais existé de son point de vue.
Dommage que je n'aie commencé à écrire qu'une fois ma patiente épuisée et mon envie de nous sauver définitivement morte. J'aurais pu lui en sortir des entrées d'agenda. Encore que même ça il m'aurait dit que je l'avais inventé pour lui nuire.
Et si j'ai cru un moment à sa contrition, je n'avais qu'à attendre quelques instants que les excuses se transforment en reproches. Je savais qu'il avait du culot mais là vraiment, il a battu tous les records. Il a quand eu le front de me dire que fait neuf ans qu'il se doute que ça va finir ça… Et c'est moi le monstre parce que je lui mens depuis janvier et que c'est absolument impardonnable. A ce niveau de déni, je n'ai même plus les mots.
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