C'est le bon jour pour me rappeler la raison d'être de ces textes journaliers : ne plus jamais me laisser gagner par l'amnésie sélective qui finissait toujours pas me ramener vers Gaston.

Mais ça va bien au-delà et le moment est venu d'affronter la réalité en face pour ne plus jamais la reproduire. Il est plus que temps d'admettre que même si sa violence n'était pas physique c'est bel et bien un comportement de femme battue que j'ai fini par adopter.

J'ai banalisé ses agressions sous couvert d'un caractère bourru ou de soi-disant bonnes intention. J'ai accepté ses méchancetés gratuites parce qu'à force de récurrences j'ai fini par les croire vraies. Au point que j'en arrive à les faire mienne et à m'insulter, me rabaisser pour tout et pour rien de la même manière que lui,

J'ai arrêté de répondre ou d'oser me défendre pour avoir la paix mais aussi parce que j'avais totalement intégré son point de vue. A savoir que je cherchais volontairement à l'énerver juste pour l'emmerder. J'ai accepté chacune de ses crises de colères de plus en plus fréquentes avec le temps par crainte de les voir encore empirer. Et finalement j'ai accepté chacune de ses excuses en prenant sur moi parce qu'après tout c'était ma faute. J'y ai cru parce qu'à chaque fois j'avais un aperçu de l'homme charmant et attentionné qu'il pouvait être même alors que les rémissions étaient de plus en plus courtes.

Comment j'ai fait pour ne pas voir tout ça ? Je me suis cru plus maligne, ça ne pouvait pas m'arriver. Pas à moi. Moi, j'ai toujours dit que je quitterais immédiatement l'homme qui lèverait la main sur moi, Mais j'ai n'ai pas reconnu les agressions verbales régulières pour ce qu'elles étaient. J'ai laissé la violence s'installer jusqu'à être ensevelie, étouffée. Moi, l'autrice qui connait pourtant le pouvoir et la force des mots… je n'ai rien vu venir.