"VOTRE ATTENTION, S'IL VOUS PLAIT !"

En entendant l'interphone du train résonner, je sursaute. Oh, non. Par pitité, je n'ai pas le temps. Qu'est-ce qu'il va nous dire, l'énergumène ? Que le véhicule est à l'arrêt ? C'est bon, on sait déjà qu'il est à l'arrêt. Je sors mon téléphone portable et je vérifie si j'ai reçu un message. Rien. Il n'y a aucun réseau non plus. C'est bizarre. D'habitude, je n'ai aucun souci avec cela. Je range mon portable dans ma poche. Je balaye le train du regard. Tous les yeux sont rivés sur l'avant du train. Personne ne sait ce qu'il se passe, ni pourquoi le véhicule ne roule plus. Je vais être en retard, c'est gênant. Je suis déjà en retard, de toute façon.

J'ai comme l'impression que quelque chose d'étrange est en train de se passer. Tout le monde regarde en avant, ils sont tous figés, comme des statues. Mais cela n'a pas l'air naturel. Ils ne bougent plus du tout. Il fait vraiment chaud dans le train, et pourtant, un petit vent glaçant frôle ma peau. Tout semble tellement bizarre, ici. Je suis entouré de bien cinquante personnes, et pourtant... et pourtant, j'ai l'impression que je suis seule.

Une vibration secoue mon corps, sans que je comprenne d'où elle vient exactement. Soudain... Soudain, je ne sais plus ce que je fais là. Pourquoi suis-je ici ? M'a-t-on assise là, ou l'ai-je fait de moi-même ? Je ne sais pas. Je ne sais plus. Peut-être qu'il est préférable que je ne le sache pas... Tout a l'air si froid, dans ce train. J'en ai le souffle coupé. J'ai peur. Suis-je en train d'imaginer tout ce qui est en train de m'arriver ? Ai-je inventé ce voyage dans mon esprit malade ? Pourquoi ?

"VOTRE ATTENTION, S'IL VOUS PLAIT !", répéte la voix à l'interphone ; c'est une voix beaucoup plus noire et grave que la première, et beaucoup plus agressive. Mais après avoir dit cela, comme la première fois, la voix se tait.

Soudain, le wagon entier est baigné d'obscurité. Je vois à peine, si ce n'est les lumières extérieures. Je me fige lorsque j'attarde mon regard sur le fond du train, à plusieurs mètres de moi. Les jambes écartées, quelqu'un se tient debout. Grand, gigantesque. Je ne vois pas son visage, le manque de lumière lui a fait perdre tout ce qu'il possédait d'humain. Il n'est qu'une ombre dans le noir. Il tient quelque chose qui semble être un microphone relié à un cable, dans sa main droite. Il porte l'objet à ses lèvres et répète :

"VOTRE ATTENTION, S'IL VOUS PLAIT !"

Je... Comment est-ce possible ? Je pensais l'avoir semé. Je pensais l'avoir perdu. Je pensais que j'en étais débarrassée !

"VOTRE ATTENTION, S'IL VOUS PLAIT !"

Je hurle : "Qu'est-que ce que tu me veux, à la fin ?! Vas-t-en !"

Il rit.

"TU PENSAIS QUE CHANGER DE DIMENSION M'EMPECHERAIT DE VENIR TE RETROUVER ?"

Je ne réponds rien, mais oui, c'est ce que j'espérais.

"PERSONNE NE T'A DIT QUE LA DIMENSION DANS LAQUELLE TU ES AUJOURD'HUI EST PIRE QUE CELLE D'AVANT ? JE SUIS REVENU TE CHERCHER. C'EST POUR TON BIEN.

VOTRE ATTENTION, S'IL VOUS PLAIT !"