Premier CDI
Nous voilà en Normandie, nous passons environ deux mois chez mes beaux-parents avant de trouver notre premier appartement.
Le changement de région s'est avéré plus difficile que je ne l'avais imaginé. Quitter ma famille, mes amis et ma vie passée a été douloureux, même si c'était moi qui avait décidé de partir. Malgré tout, je n'ai aucun regret, car ma vie me convient telle qu'elle est et je suis prête à la changer pour l'améliorer si nécessaire.
Cependant, j'ai toujours gardé mes émotions pour moi, refoulant beaucoup mes sentiments pour le bien des autres, au risque de me mettre de côté. Il m'a fallu quelques mois pour m'adapter à cette nouvelle région et une fois que je l'ai fait, je me suis mise en quête d'un emploi.
Mes recherches étaient axées sur mes désirs et mes besoins actuels. Je ne cherchais pas nécessairement un CDI, mais je suis tombée sur une offre de serveuse à mi-temps. J'ai accepté, même si j'étais surqualifiée, dans le but de reprendre contact avec le monde du travail et de rencontrer des gens pour pouvoir trouver mieux par la suite.
Il s'est avéré qu'après ma journée d'essai, on me proposa un poste de responsable sur un second site appartenant à la même direction. ils m'ont expliqué qu'il s'agissait d'une reprise de contrat sur dix ans, avec pour objectif de fidéliser la clientèle perdue, de mettre en place des formules séminaires pour les entreprises des environs, de refaire la carte du restaurant, de gérer l'équipe en salle, etc. Ma supérieure pensait que j'avais les compétences nécessaires pour accomplir ces missions et j'ai saisi cette opportunité de participer à la croissance de leur entreprise.
Ainsi débuta pour moi cette nouvelle aventure.
Être responsable est un rôle exigeant qui nécessite de la détermination et de la rigueur. J'ai acquis toutes mes compétences sur le terrain pour être en mesure d'accomplir tout ce que j'ai réalisé jusqu'à présent. La responsabilité ne se résume pas à un salaire plus élevé, il faut également s'investir pour faire progresser l'entreprise.
Manager ne se résume pas à être sur le terrain en permanence, l'aspect administratif est tout aussi crucial. Malheureusement, certains collaborateurs ne comprennent pas que le travail effectué dans un bureau est indispensable pour assurer le bon déroulement des opérations. Sans cette composante, il serait impossible d'envoyer les salaires à temps, de valider les heures de travail, les congés ou les arrêts maladie à la comptable pour l'établissement des bulletins de salaire.
Refuser occasionnellement des demandes de congés ne signifie pas avoir une attitude discriminatoire, mais plutôt de tenir compte des périodes de forte activité et de faible activité qui déterminent les possibilités de partir en vacances. Trop de confort peut parfois entraîner un relâchement des employés et un manque de rendement.
Être responsable, c'est prendre ses responsabilités au sérieux et agir avec diligence pour assurer le bon fonctionnement de l'entreprise. Cependant, un manager ne peut réussir sans le soutien de la direction.
Pendant quatre années, j'ai donné le meilleur de moi-même dans mon poste, appréciant tant les défis que j'ai relevés. Cependant, je n'aurais jamais imaginé que cela aurait un tel impact sur ma santé mentale, me conduisant finalement au burn-out.
Je me suis investie énormément dans mon travail, sans réaliser que les abus ont commencé dès le début de ma carrière. Les responsabilités de manager et de patronat se sont mélangées, me demandant d'agir en tant que directrice sans en avoir le titre, tout en me demandant de rester à ma place lorsque cela arrangeait certains. J'ai accepté de prendre en charge des tâches qui n'étaient pas de mon ressort, motivée par ma passion pour mon métier et ma croyance en la reconnaissance de mes compétences.
Après la pandémie de COVID-19, j'ai dû gérer la partie administrative de la cuisine en plus de la partie restaurant en raison d'un important turn-over. Bien que cela ne me posait pas de problème, j'ai été blessée par le fait que certains pensaient que je me la coulais douce au bureau pendant le service, alors que j'étais constamment débordée à gérer les groupes, les absences du personnel et les problèmes en cuisine. Malheureusement, la direction n'a pas pris en compte mes difficultés et a préféré soutenir un nouveau chef qui a fini par me critiquer en mon absence et prendre le dessus.
Les reproches des collaborateurs et les critiques anonymes sur les réseaux m'ont poussée à bout, mais le manque de soutien de la direction m'a complètement détruite. Après avoir appris qu'ils attendaient de voir jusqu'à quand je tiendrais le coup, j'ai pris la décision de partir sans dire au revoir à personne, laissant derrière moi une équipe divisée.
Lors de ma consultation médicale, j'ai été confrontée à une situation difficile.
Le premier choc fut que mon médecin m'ait informé de ma perte de poids significative, de mon estime de soi en chute libre et m'ait clairement indiqué qu'il m'était impossible de retourner travailler dans mon état actuel. C'était la première fois de ma vie que je devais m'arrêter de travailler, et cela m'a profondément déstabilisée. Je me sentais démunie, coupable de laisser mon travail en suspens, et mon médecin a insisté sur le fait que je devais prendre du recul et me reposer.
Le deuxième choc a été encore plus difficile à encaisser, et c'est venu de la part de ma direction. Ils ont profité de mon arrêt de travail pour me proposer une rupture conventionnelle, arguant que j'avais été un élément précieux pour l'entreprise mais qu'il était peut-être temps que je parte. Cependant, je sentais bien qu'ils avaient déjà quelqu'un en tête pour me remplacer. Cela a été une véritable claque pour moi, comme si mon travail était une relation toxique qui me brisait le cœur.
La tristesse et la déception remplissaient mon cœur, pensant aux années d'investissement, aux clients et aux collègues que je laissais derrière moi sans avoir pu leur dire au revoir. Il était temps pour moi de tourner la page et de me reconstruire.
Annotations