Marchant à travers la nuit avec sa lanterne comme seul source de lumière, il surveillait la forêt qui l’entourait. Ce n’était que maintenant qu’il s’y trouvait qu’il commençait à regretter son choix. L’ambiance lugubre que dégageaient les arbres autour de lui était de plus en plus oppressante et il avait l’impression grandissante d’être observé. Qui sait quels dangers pouvaient se cacher au cœur de cette forêt, les gens de son village racontaient tellement de choses qu’il ne savait pas s’il devait en prendre compte. Cependant, il ne pouvait pas faire demi-tour, il devait aller de l’avant quoi qu’il en coûte. Il le devait. Pour elle !

Il secoua sa tête vigoureusement pour se donner du courage et faire partir ses pensées noires, lorsque quelque chose attira son attention sur sa droite. Il scruta l’obscurité, dans laquelle baignaient les arbres, à la recherche de quelque chose d'inhabituel. Soudain, il retint sa respiration en croisant le regard d’une paire d’yeux qui brillaient dans le noir. Contrairement à ce qu’on racontait dans les contes et légendes, ils n’étaient pas rouges mais bleus, ce qui ne rassura l’homme qu’un instant avant que les yeux ne se rapproche de lui. Paniqué, il brandit aussitôt sa lanterne dans leur direction, espérant faire fuir ce qui se tapissait encore dans l’ombre. Quelques secondes passèrent, qui lui parurent des minutes, pendant lesquelles la paire d’yeux se rapprochait inexorablement. Au moment où ils allaient rentrer dans la lumière de la lanterne, il ferma ses yeux croyant son heure venue. Il attendit. Il attendit encore. Il sentait, sans rien voir, que quelque chose était proche de lui. Quelque chose qui tourna autour de lui. Ce quelque chose devait surement avoir une grande gueule. Une grande gueule pleine de crocs. Il la sentait se rapprocher de sa main, il sentait son souffle chaud sur ses doigts. Il était tétanisé. C’était là, tout proche. Sur le point de le mordre !

Slurp !

- “Slurp” ?!

La surprise l’emporta sur la peur. Il ouvrit brusquement les yeux, totalement abasourdis et vit à ses pieds un loup, non, plutôt un chien, qui lui léchouillait la main. L’animal était adorable avec ses oreilles en triangle, sa queue touffue en forme de croissant de lune et son pelage qui semblait incroyablement doux alternant harmonieusement entre le noir et le blanc en passant par le gris. Il voulut le caresser mais l’animal repartit en direction des profondeurs de la forêt au petit trot. Avant d’être suffisamment loin pour ne plus être éclairé par la lanterne, il tourna sa truffe vers l’homme pour lui faire comprendre qu’il l’attendait. Celui-ci soupira mais suivis son guide ...

***

L’homme continuait de suivre son guide à travers la forêt tout en se posant une question. Était-ce plutôt un loup ou un chien ? L’animal avait bel et bien une apparence de loup mais aucun loup n’avait le pelage aussi touffu et l’air si amical. Perdu dans ses pensées, il faillit louper une intersection au détour d’un chêne mais revint rapidement dans les pas de son guide.

Ils marchèrent ainsi pendant plusieurs dizaines de minutes sans que la peur ne vienne le hanter de nouveau. C’est au moment où il allait se demander vers où ils allaient, qu’il entendit un craquement sur sa gauche. Tout en se rapprochant un peu plus du chien, il tourna son regard vers l’origine du bruit. Il tenta de discerner quelque chose à travers l’obscurité lorsqu’il entendit un froissement de feuilles mortes sur sa droite. Cette fois-ci, il brandit la lanterne dans cette direction en espérant profiter de la lumière pour voir quelque chose. Entre les arbres il perçut un mouvement. À priori quelque chose les suivait. Il plissa les yeux et vit ce quelque chose tourner la tête vers lui. Une tête de loup au pelage touffu, aux oreilles triangulaire et aux yeux brillant d’un bleu clair. Surpris, l’homme regarda tout autour de lui et se rendit compte qu’ils étaient escortés par une demi-dizaine d’autres chiens similaire au premier.

Rassuré, il se détendit encore un peu plus. Tous ses chiens qui l’accompagnaient lui inspiraient confiance. Se demandant toujours vers où ils l’emmenaient, il eut enfin la réponse au détour d’un bouleau.

Face à lui, les arbres formaient une allée, longue d’une vingtaine de mètres qui se finissait en falaise. Elle surplombait le reste de la forêt et offrant ainsi un magnifique point de vue sur cette large étendue de feuillage. Au bout de ce chemin était posé un énorme rocher sur lequel était assise une personne. L’ensemble était éclairé par la douce lumière de la pleine lune qui s’alignait parfaitement avec l’allée. L’homme s’arrêta et regarda autour de lui et vit que des dizaines de chiens, comme ceux qui l’accompagnaient, étaient assis entre les arbres. Il déglutit, éteignit sa lanterne et s’avança lentement le long du chemin. Maintenant qu’il était arrivé jusqu’ici il savait qu’il allait pouvoir présenter sa requête. Il jeta de furtifs coups d’œil vers les chiens qui le regardaient, faisant ainsi tourner leurs têtes de manière synchronisée. Il reporta le regard vers le rocher en face de lui sur lequel était assis la personne, une femme semblait-il. Plus il s’approchait et plus il fut ébloui par sa beauté. Elle avait de très longs cheveux argentés qui venaient mettre en valeur son teint pâle. Sous la longue et fine robe blanche qu’elle portait, on pouvait deviner une silhouette si fine que si l’on voulait l’enlacer, on aurait peur de la briser. Malgré sa taille d’adulte, elle avait un visage tout en rondeurs, rappelant vaguement celui d’une enfant. Derrière elle, la lumière de la lune venait sublimer cette vision presque irréel.

Arrivé à quelques mètres d’elle, l’homme s’inclina, posa un genou à terre et dit :

- Ô Lucereylinne, Déesse de la Lune. Merci de m’accepter dans ton domaine.

Il s’arrêta là, attendant une réponse de la divinité. Celle-ci posa son regard bleu clair sur lui.

- Tu sembles bien renseigné sur la meilleure nuit pour me rendre visite, répondit-elle d’une voix cristalline.

Il acquiesça en silence.

- Et donc ? Si tu es ici, c’est que tu à une requête à me soumettre. Qu’elle est-elle ?

L’homme releva lentement la tête.

- C’est ma bien-aimée, Ô puissante déesse. Cela fait plusieurs jours qu’elle a disparue. Au village, on craint qu’elle ait été enlevé par un monstre. Je vous en prie Ô déesse, retrouver la !

Un sourire vint effleurer les lèvres de la divinité. On racontait dans la région qu’elle avait déjà aidée beaucoup de couple dans la détresse. En revanche …

- J’accepte ta requête. Cependant, qu’a tu à m’offrir en échange ?

Il se releva, posa sa main sur son cœur et dit avec assurance :

- Si vous m’en faites l’honneur, j’accepterais de devenir votre Chevalier Lunaire.

***