1.2.1 Lestrange
J'ai finalement reçu mon courrier d'admission pour Poudlard. Je vais enfin pouvoir quitter ce manoir de malheur. La cohabitation avec Mère devient de plus en plus difficile. Ce n'était déjà pas facile depuis la mort de Père, mais c'est carrément invivable depuis qu'elle héberge ce drôle de type. Carrow. Un sale con. En plus, mon arrière-grand-mère complètement folle, Bellatrix, a repris en main mon éducation. Depuis mes six ans, quand Père est mort, elle me bourre le crâne sur l'importance des sangs purs et sur les mille et un sortilège de magie noire qui existent.
Moi, Benoît Lestrange, descendant de Bellatrix Lestrange et de Voldemort, une puissante mangemort et le mage le plus noir de notre histoire, je m'apprête à intégrer l'école de magie la plus célèbre et prestigieuse du monde magique pour en devenir le maître incontesté. Enfin sauf si mon cousin Oliver s'en mêle. C'est le seul digne de faire la compétition avec moi.
Je serais Serpentard, la seule maison valable. Ma beauté physique et mon esprit vif ne sont plus à démontrer. Je serais bientôt puissant et savant. Je suis un digne descendant de Voldemort, mon arrière-grand-père et de Bellatrix Black, mon arrière grand-mère. Personne ne le sait, tous me croit descendant de Rastaban Lestrange, frère du mari de Bellatrix, Rodolphus Lestrange. Le seul indice est le rajout d'un Basilic sur notre blason familial.
C'est un secret que seul mes plus proches savent. Ca et aussi la survie de Bellatrix depuis toutes ces années. Je crois que même mon cousin l'ignore. Je suis brun aux yeux noirs comme la folle qui me sert d'arrière-grand-mère.
Comme tous les sangs-purs, je dégage une prestance incomparable et pourrais être mannequin pour les magazines de mode tant mon port altier, ma taille svelte et tonique et ma haute stature impose le respect dû à mon rang.
La folle m'a appris le fourchelangue ainsi que la légilimancie et l'occlumancie. Je maîtrise le sortilège Doloris même si pour l'instant, il m'épuise physiquement. Cette vieille cinglée m'enseigne des potions de mort, des plantes carnivores, des poisons, l'histoire des mages noirs. Il paraît qu'il y a une vieille pièce où mon ancêtre Salazar Serpentard avait caché un Basilic pour tuer les sangs de bourbe. Malheureusement, Harry Potter l'a tué.
La démente m'a donné pour mission de ridiculiser la descendance Potter et Weasley. Vu tout le sang impur qui coule dans leurs veines, leur puissance magique doit être bien faible. Je n'aurais aucun mal à accomplir cette tâche. Une bien plus grandiose m'attend cependant, j'ignore quel est mon destin exact. La folle refuse de me parler de la prophétie.
J'ai entendu parler de mon destin à demi-mots en espionnant les adultes. Mis à part la folle, tous me vénèrent comme un Dieu, y compris Mère. J'en ai déduit que je suis amené à devenir le nouveau Seigneur des Ténèbres, à reprendre le trône de mon aïeul, à devenir un mage noir encore plus puissant que lui. Je suis persuadé que je réussirais là où il a échoué, je ne me laisserais pas tuer par un vulgaire gamin et je redonnerais à la magie noire sa splendeur écornée.
Afin de me préparer à la rentrée, mon arrière-grand-mère Bellatrix m'emmène en pèlerinage sur les hauts lieux de l'Histoire magique. Voyant mon désintérêt pour le passé, elle change de stratégie et me présente aux anciens alliés de son cher Voldemort. Je rencontre le chef des Géants et ceux des trolls, d'une idiotie aussi grande que leur taille.
Les harpies ne remportent guère plus de succès à mes yeux, je n'aime pas trop leurs aspects cannibales envers les enfants moldus. Les acromentules, en revanche, me plaisent davantage bien qu'elles soient flippantes. Ces araignées géantes, sont pourvues d'un cerveau bien rempli et leur mémoire fourmille d'anecdotes qui me ravissent.
Après avoir entendu les récits de nos anciens alliés, Bellatrix me conduit dans une forêt sombre et déserte. Une crypte y a été construite, à l'abri des regards, et elle reçoit les corps de mes aïeuls. Mon grand-père y est enterré, Lord Voldemort et Père sont présents à l'aide d'une plaque commémorative, mon arrière grand-tante y est aussi déposée. Bellatrix se recueille devant le souvenir de son amour perdu, son seigneur tout-puissant, qui lui a donné deux enfants. La photo qu'elle a choisie pour le représenter n'est pas celle de ses jeunes années, du temps où il était beau, mais celle de la fin quand il n'avait plus d'aspect humain.
Elle me parle de lui, de tout ce qu'il a fait. La folle me raconte des tonnes de souvenirs du temps des deux guerres et surtout de la dernière où son amour démontra sa suprématie. Bellatrix me dit de me méfier des incompétents et des fourbes craintifs, elle crache sur Lucius Malfoy, un peureux qui ne méritait pas sa marque, la vieille folle vomit presque à l'évocation de Peter Pettigrow, ce sale rat qui changeait de camp, non par conviction, mais par peur.
Ce qui me rassure ou plutôt me rend heureux, c'est que Bellatrix parle de ce sale con de Carrow en utilisant les mêmes termes injurieux et méprisants. Pour une fois qu'elle est d'humeur bavarde et nostalgique, je la questionne pour en savoir plus sur la prophétie et mon destin. Elle me confirme que je suis l'Elu, celui qui fera redevenir beau ce monde abject rempli de moldus. Bellatrix refuse de m'en dire plus et m'encourage à suivre avec attention les enseignements de mon école, de profiter de mon accès à leur immense bibliothèque pour engranger les connaissances.
Elle me relance sur l'Histoire de la magie, cours interminable et souvent répété. Je connais tout de A à Z avec mille détails sur la période Voldemort et surtout sur ses ennemis, Albus Dumbledore, Hermione Granger, et Harry Potter. M'avertissant des erreurs du passé et de la méconnaissance qui entraîna des défaites, Bellatrix insiste sur la magie ancienne utilisée pour créer les horcruxes et de la façon d'en créer.
Bellatrix semble détester cette magie, qui produisit Harry Potter et fut la faiblesse de Voldemort son amour, sa seule erreur. Elle me dit de faire très attention, de m'assurer maîtriser pleinement les magies que j'utiliserais pour qu'elles ne se retournent pas contre moi. Bellatrix m'interdit de créer des Horcruxes qui pourrait m'affaiblir et me rendre moins méfiant car trop confiant.
Durant la discussion, j'apprends alors comment elle fait pour conserver sa jeunesse et sa force malgré les années. Les sorciers ne sont pas éternels. Bellatrix a cent soixante cinq ans. Elle survit à l'aide d'un sortilège très particulier. Bellatrix est en possession d'une pierre philosophale quelque peu modifiée que lui a légué Voldemort avant la grande bataille de Poudlard.
Une pierre qui, plongée dans le cœur battant d'un être vivant, en absorbe la jeunesse pour la distiller peu à peu à son propriétaire qui ne vieillit pas. Cette sorte de diamant emmagasine les années restants à vivre de l'être sacrifié, prolongeant d'autant la vie de la personne qui porte à son cou le caillou. Bellatrix a assassiné trois enfants moldus, des bébés venant à peine de naître, pour rester jeune et bien portante. Des orphelins qui ne manqueront à personne.
Je suis horrifié en entendant cela. Même si ce sont des moldus, les bébés ne méritent pas de perdre la vie de cette façon. Bellatrix est si cruelle et froide. J'ai souvent honte d'être son descendant. Je ne peux pas le montrer. C'est elle qui m'a élevé à la mort de Père. Elle est ma seule référence de famille, la personne que je connais le mieux et qui me comprends sans un mot. Toutefois, elle me dégoute et aujourd'hui plus encore après cette découverte macabre.
Mon retour de vacances me laisse sur un sentiment mitigé d'horreur, de dégoût et de fantastique futur. Si je me réjouis d'être prochainement le maître incontesté, les méthodes utilisées par mon arrière-grand-père à l'époque me paraissent plus que contestables. À demi-mot, je sonde Bellatrix qui minimise mes craintes, le temps m'endurcira et me fera comprendre que les moldus et autres êtres non-mages sont de véritables cloportes bons à servir.
Son discours est extrême, si elle en avait la capacité, elle tuerait tous les moldus, mettrait en esclavage les cracmols, les sangs mêlés et les sangs de bourbe. Fort heureusement pour l'humanité, elle n'en a pas le pouvoir. Toutefois à ses paroles, je devine que j'en aurais bientôt la possibilité, ce qui me fait frissonner d'effroi et de plaisir. Je me pose toutefois des questions sur les propos tenus par ma famille depuis tout ce temps. Ils sont si surs qu'eux, cependant, rien ne me prouve qu'ils ont raison.
Un mois plus tard, sur le quai du départ, j'aperçois mon cousin avec ses potes Horace Lungtorg et Jamie Foalder. Je le rejoins, il est le seul à qui je daigne tenir compagnie. Je les connais tous les trois depuis très longtemps. On était ami, depuis la mort de Père, nous nous sommes éloignés. Horace et Jamie n'étant pas des sangs purs, ils auraient pu me contaminer avec leur médiocrité. En conséquence, j'ai eu interdiction de les voir. Seul Oliver aurait pu continuer le lien, toutefois, il n'a pas voulu, trop empêtré dans son amitié avec les deux autres. De ce fait, je n'ai plus aucun ami authentique et je me sens très seul.
La compagnie des adultes ne me satisfait pas et les autres enfants de sang pur n'égalant pas mon génie, je m'ennuie et me morfonds. Une unique personne trouve grâce à mes yeux et me fait rechercher sa compagnie. Louise Nott, une douce fillette un brin amoureuse de mon cousin et surtout la seule capable de me remettre à ma place avec tant de tact et de douceur qu'il ne me reste plus qu'à me taire et m'incliner. C'est mon amie, la seule véritable.
De par nos violentes disputes quand nous sommes loin des autres, je pense qu'Oliver doute de la supériorité des sangs purs et se fourvoie avec les impurs. Nous partageons le même esprit vif et cinglant et surtout cette haute opinion de notre personne. Nos prises de bec sont dignes de vraies tragédies bourrées de bons mots et de sous-entendus culturels. Il ne partage pas ma vision des choses et pourtant, dans mon cœur, il reste comme un frère pour moi. Il me manque, les souvenirs de notre enfance me tordent le cœur de douleur.
Mon cousin a trouvé une cabine de huit avec une fille toute seule qui dort. Tant mieux. Je n'ai guère envie de faire la conversation à une péronnelle. J'écoute distraitement la discussion d'Oliver et de ses potes. Pourquoi donc les sorciers se croient obligés de se mettre à la sauce moldue de nos jours ? Ils ne se rendent pas compte qu'ils abîment leur magie ? A force de vouloir faire sans magie, ils vont la perdre.
Je suis désespéré d'entendre le récit d'Horace et j'ai pitié de lui. Enfin non. Je ne suis pas du genre à avoir pitié. Disons que je me moque ouvertement de ses parents et de leur idée idiote, voire malsaine. Plus il étale ses déboires, plus les moldus me dégoûtent. Un tel comportement devrait être puni. Oui, quand je serais maître des sorciers, je ferais en sorte de châtier de telles idées.
Une anecdote d'Horace déclenche un rire explosif de la part de Jamie et d'Oliver et m'arrache un sourire de mépris. La donzelle se réveille en ronchonnant. Mon cousin joue les jolis cœurs pour amadouer la créature qui émerge. Ses yeux sont supers bizarres. Ils sont violets.
- Magnifiques.
Je ne peux m'empêcher de marmonner totalement fasciné en même temps qu'Oliver. Je perds le fil de la discussion jusqu'au moment où elle se dit humaine avant de recevoir sa lettre. Non mais pour qui elle se prend cette idiote ? C'est quoi cette remarque totalement stupide ? Mon cousin, fort heureusement, se vexe aussitôt et lui réponds d'un ton sec, la traitant de sang-de-bourbe.
Ouais, ça doit être ça. Une sale sang-de-bourbe qui papillonne des cils. Horace se fait avoir et lui explique quelques mots. Cette bécasse éclate de rire. Elle se marre. Elle ose se moquer d'Oliver. Un tel comportement mériterait un sort bien placé. Ce n'est pas tolérable. Il va la remettre à sa place vite fait. Mon cousin n'a pas la langue dans sa poche, c'est une de ses nombreuses qualités.
J'imite Oliver et adopte mon air le plus hautain possible, ce qui n'empêche pas cette saleté de sang-de-bourbe de rire aux éclats. Elle va vite comprendre en cours quand on la laissera foirer ses sorts et que nous ferons des prouesses.
Sarah Foalder, la sœur jumelle de Jamie, passe la tête à ce moment-là. L'idiote mal née fait un immense sourire et bavarde élégamment avec elle. Je rêve. Elle vient de se foutre de ma gueule et de celle d'Oliver. La colère me monte au nez. Je sors ma baguette et veux lui lancer un crache-limaces.
Oliver m'arrête de la main. Il va parler, cependant, il reste muet. Je m'apprête à rétorquer à cette idiote à la place de mon cousin et je plonge mes yeux noirs de colère vers ceux de l'indésirable demoiselle. Deux magnifiques yeux violets rieurs me rendent muet et me font perdre la parole.
Annotations