Le Paradis
Éduquée, enfant, par une famille aimante, soucieuse de tout me donner matériellement et affectivement, je me sentais protégée. Entourée de frères et sœurs très présents, j'étais très fusionnelle avec mon petit frère. Lors des réunions familiales élargies, je me sentais intégrée. Je jouais beaucoup avec mes cousins et mes cousines qui me suivaient volontiers dans mes créations de jeux collectifs. J'étais la plupart du temps en très bonne santé, pleine d'énergie. Notre alimentation était très variée, pauvre en graisse et en sucre. C'était pour moi la période de l'école primaire. Je me sentais réussir partout : à l'école car j'étais première de ma classe, au sport où j'étais gymnaste de compétition, première ou dans les premières des classements, dans mon quartier car j'avais des copines fidèles que je fréquentais tous les soirs après l'école, durant mes loisirs où j'excellais en dessin, avec les beaux garçons car j'avais déjà eu un petit copain, Dylan, charmant blond aux yeux bleus très populaire à qui j'avais donné mon 1er baiser, en vacances, où je randonnais ou faisais du ski dans des endroits magnifiques qui me procuraient un plaisir incroyable. Tout était parfait. Je me voyais déjà, plus tard, institutrice de maternelle, propriétaire d'une maison à moi avec un beau jardin. Mais je n'avais pas hâte de grandir, car j'attribuais mon bonheur spécifiquement à la naiveté de l'enfance. Je me rendais bien compte que mes parents étaient stressés de nous éduquer correctement, que même si nous étions moi et mes frères et sœurs, assez sages, mes parents se mettaient la pression pour nous donner une bonne éducation. Ils avaient bien conscience que nous étions une vraie responsabilité. J'ai donc grandi avec toutes les cartes en main pour avoir une base de vie future stable et équilibrée. Des racines saines.
Ce qui me transportait par dessus tout était un petit garçon de mon âge nommé Maxence. Il était plutôt petit, costaud. Ses cheveux blonds coupés au bol volaient au vent quand il jouait au football. Je regardais dans la cour s'animait ses jambes et ses avants bras musclés qui dépassaient de son T shirt numéroté. Sa peau mâte étincelait à la lumière du soleil, tout comme les reflets dorés de sa chevelure soyeuse. Sa large tête arborait un visage régulier, aux traits saillants et marqués : de beaux yeux bleus surmontés de sourcils bien dessinés blonds, un nez grecque et une bouche en relief aux contours flous. Maxence était pour moi la beauté incarnée et surtout un vrai garçon viril. En tant que fille, j'observais son comportement pour chercher comment l'aborder. J'étais ravie de sa réserve que j'attribuais aussi à la virilité. J'avais des sensations de fille pour lui le garçon, à ce moment pas encore matures, donc pas encore sexuelle, mais j'étais attirée par lui comme un aimant. Je cherchais la moindre occasion pour aller regarder son beau visage de près. J'oubliais la distance respectueuse que je lui devais en tant que fille. Puisque ce sont les garçons qui « doivent » prendre les initiatives. C'était un garçon qui aimait l'air extérieur et se plaisait à jouer dehors, dans la cour. J'avais complètement craqué pour lui. Il me semblait qu'il pouvait comprendre ma réserve à moi voire ma timidité à l'égard des autres. Car il semblait avoir la même. Tout comme moi, c'était un enfant calme. Tous les soirs, je me couchais, lisais un livre, puis passais 30 minutes à m'imaginer le rencontrer seul à seul dans un parc, sur un banc. C'était mon fantasme. C'était très sage, je rêvais, j'espérais, que nous ayons un jour plus d'intimité. Je ressentais une attirance puissante pour lui ainsi qu'une admiration sans borne pour son apparence. C'était des sensations immatures que peuvent ressentir les petites filles. Il me semble qu'un jour, il me remarqua. En effet, je lui tournais autour malgré moi, passant au dessus de ma timidité, tellement mon attirance était forte, et il finit par remarquer ma présence. Il me connaissait déjà un peu, car nous étions dans la même classe. Un jour donc, il m'aborda pour que je joue avec lui. J'essayais de refréner mon enthousiasme pour qu'il ne remarque pas mon émoi. Je ne voulais pas m'imposer à lui, je voulais que ce je ressente soit réciproque ou rien. Car je le respectais profondément. Je voulais que nous nous rapprochions naturellement ou rien. Car on ne peut pas forcer les sentiments. A partir de ce moment là, il nous arriva de temps en temps de nous retrouver. Je garde précieusement ces souvenirs en mémoire car ce fut la seule foi de ma vie où je trouvais échos à mon attirance vis à vis de la gente masculine. Aujourd'hui, j'ai retrouvé sa trace sur internet et j'ai vu que nous avions fait le même métier. Nous avons fait la même formation et nous avons travaillé dans le même milieu. Cela me rassure car je sens que je ne me suis pas trompée sur lui. Nous avions bel et bien des points communs. Un tempérament commun. J'ai cessé de fantasmer sur lui le jour où il est venu me demander si je voulais sortir avec son copain Benoît. Je lui ai répondu en bredouillant qu'il ne comprenait pas. C'était peut être une invitation à lui faire ma déclaration en abordant le sujet, mais je ne l'ai pas compris à l'époque. Quoi qu'il en soit, à partir de ce moment là, j'ai essayé de m'intéresser à Benoît pour lui faire plaisir. Benoît lui ressemblait beaucoup mais était plus efféminé. Le soir je me couchais, lisais puis essayais de fantasmer sur Benoît, mais il ne m'inspirait pas. J'ai pensé de Maxence : un de perdu, dix de retrouvé... Aujourd'hui, à trente huit ans, je n'ai plus vibré autant pour un autre. C'était mon premier amour, je le comprends aujourd'hui, et on n'oublie pas son premier amour. J'ai juste gardé cette tendance aux beaux blonds aux yeux bleus, musclés, sportifs. J'ai retrouvé il y six ans Benoit sur facebook. Je lui ai plu et nous sommes sortis ensemble. Je lui ai ensuite demandé le téléphone de Maxence mais il avait coupé les ponts avec lui. Benoit a beaucoup insisté, il insiste encore, par la suite pour qu'on se « revoit », mais je n'ai plus de courage. En réalité, aujourd'hui, je n'ai plus la force de tomber amoureuse. Au fur et à mesure de l'écriture de ce texte - témoignage, j'expliquerai mon parcours sentimentale et vous me comprendrai.
Entre temps, durant cette période de l'école primaire, mes parents nous avaient fait découvrir les camps naturistes pendant les vacances d'été. Le naturisme propose à ses adeptes de vivre des vacances totalement nus. Au début, j'avais six ans, tout s'était passé agréablement. Le soleil sur ma peau me procurait une vrai sérénité, et la nature sauvage de ces lieux reculés me donnait une liberté de mouvement que je ne connaissais pas en ville. J'arpentais seule les rivières traversant les forêts montagnardes et j'étais fière de cette indépendance que permettait cet environnement. Puis les années passant, j'entrai dans la puberté, et le regard des garçons changea. Ils se mirent à observer mon corps dont les poils pubiens et les seins poussaient. Dans un de ces campings naturistes, je rencontrai deux frêres plutôt à mon goût – ils étaient minces et blonds aux yeux bleus – et je me liais d'amitié avec eux. Je leur portais une attention modérée car je ne les trouvais pas assez viril pour me plaire totalement. Mais je passais mes journées avec eux et mon petit frêre à découvrir la nature vierge des alentours du camping. Je n'avais aucune intention envers eux sauf de continuer de partir à l'aventure. Puis, un jour, il plut, et j'allai me réfugier à la bibliothèque. Je feuilletai quelques instants les livres puis décidais de sortir. Juste avant de passer la porte, j'entendis les deux frêres faire irruption dans la pièce et soudain l'un d'eux saisit mes deux poignets et les plaqua de force au dessus de ma tête contre le mur derrière moi. Je me retrouvais, sous le choc, coinçée entre lui et le mur, maintenue immobile. Je criai ma surprise ! Le garçon colla son corps nu au mien et se frotta contre moi. Mes poignets douloureux, j'essayai de me dégager. Il essaya alors de m'embrasser la bouche et visa juste. Comprenant soudainement qu'il s'excitait sur moi, je le repoussai et sortie de la bibliothèque, bouleversée et révoltée ! Mes parents durent sentir l'incident même si je ne dis rien par honte. Ce fut nos dernières vacances naturistes. J'oubliai cet incident, mais avec Maxence, ou plutôt avec la gente masculine, quelque chose était brisé.
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