Chapitre 2 (REN)

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Je sors du bureau en faisant bien attention à garder mon calme. Ce n’est pas le moment de briser ma couverture. Je suis un guerrier du Gouverneur et en cette qualité, mon self-control est à toutes épreuves. Ces saletés de Faat nous ont retrouvé. Une fois dans l’un des isoloirs insonorisés, j’active mon implant vocal et ordonne au réseau de télécommunication interne de me mettre en relation avec mon équipage.

— Jaal ?

— Oui Commandant Ren.

— L’extraction de l’Unique se fera ce soir. 19 heures, heure terrestre locale. Je t’envoie les coordonnées. Dis-moi quand tu les as.

Je pianote sur mon télé-transmetteur transformé en smartphone pour les circonstances. J’entends le bip de réception.

— C’est bon. Et si je peux me permettre, pourquoi une telle précipitation ?

— Pour faire bref, les Faat l’ont retrouvée, nous ne pouvons plus rester ici. La zone blanche n’est plus sécurisée. La faille grandit, l’éveil commence. On doit la mener au Gouverneur.

Je sens l’excitation de mon second croitre.

— À la bonne heure, nous allons enfin quitter le Berceau !

— Oui enfin.

Sans plus attendre, je déconnecte mon implant et retourne à mon boulot de gardien. A quelques pas de mon bureau, j’ai l’impression que celui-ci est vide. Je m’active.

Ce n’est pas vrai ! Elle est passée où ? Il y a un papier sur la table où est écrit :

Désolée Max, mais je ne peux pas t’enrôler dans mes histoires personnelles.

Elle ne changera donc jamais ? Le tempérament de cette Originel m’impressionne. Sa ténacité et son indépendance sont autant d’atouts que de défaut. Je cours dans le couloir direction l’ascenseur juste à temps pour constater qu’il se trouve au parking souterrain.

Trouvée !

J’emprunte l’escaliers de service et descend chaque étage d’un seul bond, même si ce déguisement n’est pas pratique. Interdiction de perdre ma protégée. J’ouvre la porte, elle claque comme un fouet. J’entends le bruit d’un moteur qui se déplace sur la gauche. J’accours vers lui. Elle est là. Je sais qu’elle m’a vu car elle stoppe son véhicule. J’en profite pour monter à l’intérieur. Je ne lui laisse pas le temps de s’expliquer. Un seul mot d’ordre gagner du temps pour l’arrivée de Jaal.

— Tu pensais vraiment que j’allais rester là sans rien faire après avoir lu ton message ? C’est mal me connaitre, jeune fille.

Elle me dévisage comme si elle ne me reconnaissait pas. Avais-je crier ? elle semblait terroriser.

— Gallie ?

Son regard s’étiole dans le vague. Est-ce une conséquence de l’éveil ?

— Tu devrais sortir Max, finit-elle par dire d’une voix à peine audible.

J’essaie de comprendre, d’analyser ce revirement de situation mais mes pensées m’échappent au fur et à mesure que ses traits se figent. N’a-t-elle plus confiance en mon jugement ? Enfin celui de Maxime. Non. En fait, je me trompe. Mon instinct me dit que quelque chose cloche. Ses yeux ne m’observent pas, ils fixent un point qui se trouve derrière moi. Je me retourne, balaye les environs. Rien.

Tout à coup, mon indice de menaces s’affole, le bourdonnement caractéristique d’une présence en mode camouflage s’impose à mon radar interne. Les Faat sont là. Je le sens. Et si j’ai bien interprété les signaux, elle seule peut les voir. D’où sa terreur, j’en suis certain. Je fais craquer les os de mon cou. L’heure n’est plus à la négociation. Je dois montrer mon vrai visage.

Un bruit de détonation. J’ai juste le temps de la voir se jeter sur moi que les fenêtres volent en éclat. Elle me protège ? Une odeur de soufre envahie l’habitacle. Je la repousse assez fort pour qu’elle atterrisse sous le volant. Elle hurle et tombe dans les vapes. C’est de ma faute, je crois bien que je lui ai cassé le bras, j’espère rien d’autre. Je vérifie rapidement ses fonctions vitales grâce à mon implant rétinien. Tout va bien.

— Jaal, changement de programme. Tu récupères l’Unique maintenant.

Je l’entends marmonner un chapelet de juron.

C’est le moment de riposter et de leur montrer qui je suis. Je désactive mes entraves morphiques et révèle ma véritable forme. Rien que cette action et la pression malfaisante que je dégage obligent ses êtres à reculer. Le rétroviseur intérieur me renvoie les prémices de la transmutation : la couleur de mes yeux se modifie en rouge et jaune. Mes cheveux s’étirent et se teintent d’argent, mes crocs prennent possession de ma bouche. Mes muscles développés roulent sous ma peau. Je me sens enfin libre. Mon costume s’efface et mon armure d’écaille apparait comme une seconde peau. Je suis en pleine possession de mes moyens. Mes boucliers et armes de défense contenues dans ma combinaison s’activent ainsi que ma vision inter-dimensionnelle. Maintenant, je les vois.

Mon communicateur s’enclenche automatiquement. La voix synthétisée de Jaal s’impose à moi.

— Commandant, détecteurs de présences initialisés. J’envoie les informations directement sur le système de réalité augmentée.

— Trouve le spectre de l’Unique et téléporte là dans le vaisseau immédiatement. Elle est blessée et a perdue connaissance.

L’espace d’un instant, je sens le souffle retenu de mon second.

— Bien Commandant.

Avec souplesse, je saute hors du véhicule. Face à moi, trois ombres aux yeux vides m’étudient. Ils se déplace pour former un cercle autour de nous. L’un d’entre eux tente une diversion pour permettre à son compagnon de créer une brèche vers ma protégée.

Amateurs…

Je penche ma tête sur le côté, un rictus aux lèvres. Je démultiplie mon essence corporelle et créer un double de moi-même pour couvrir les deux positions. Ils reprennent position sans s’agiter pour autant. Tout est clair, ils essaient de gagner du temps aussi.

— Dis-moi que tu l’as Jaal ?

— Presque, je ne suis pas le seul qui essaie de la localiser.

— Alors soit le premier, on ne peut pas se permettre de la perdre.

Les minutes semblent s’éterniser. Je ressens l’excitation de mon double à travers notre lien. C’est trop long, bien trop long, d’autres originels pourraient survenir. Afin d’être tranquille, je décide de créer une dimension de combat. Une réalité parallèle éphémère, hors espace-temps. N’importe quel originel qui passerait dans le périmètre ne verrait rien de ce qui se trame ici.

Tout à coup, les trois Faat disparaissent. Je regarde sous le volant, Gallie n’est plus là. Et même si j’ai toute confiance en mon équipage, parfois les circonstances font que la réalité nous échappe.

— Jaal ? Tu l’as ?

Silence radio. Je rapatrie l’autre partie de mon essence corporelle et coupe la bulle dimensionnelle. Inutile de la maintenir en place. J’appelle à nouveau.

— Jaal ?

Au bout d’un temps qui parait une éternité, le commutateur grésille.

— Désolé commandant ! Notre invitée m’a donné du fil à retordre. J’ai été obligé de la neutraliser.

Je sens que ce voyage ne va pas être de tout repos.

— Ok. Dis-moi quand tu m’as ciblé.

— Cible !

— Allez !

Aussitôt mon corps est aspiré dans un vortex.

Ma vision se rétablie presque immédiatement. La communication avec Jaal est toujours ouverte.

— Où est-elle ?

— Dans la cellule d’isolement.

Je ricane.

— C’est une véritable Fureth, se permet de rajouter mon second afin d’expliquer son geste.

Je me dirige d’un pas pressant vers le pont du vaisseau.

— Vraiment ? Une espèce qui dévore leur propre enfant ?

— Elle m’a mordu.

Je ris de plus belle et bifurque vers la zone de quarantaine au lieu de poursuivre en direction de la passerelle. Quelques explications s’imposent pour le bien de tous.

— Etabli une connexion avec le Gouverneur, en attendant je vais voir la « Fureth ». Quand ce sera fait bascule la communication dans mes appartements.

— Bien commandant.

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