Chapitre 3 Falco

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Je ne l'ai pas vu venir celle-là, quel abruti... où sont passés mes réflexes d'ancien marines ?

Pourtant, je me suis aperçu de suite que le gars n'était pas net, lorsqu'il s'est greffé derrière elle sur la piste de danse. Un truc dans son regard. Je ne sais pas, appelez ça, de l'intuition. Toujours est-il que j'aurais dû continuer à l’écouter et ne pas me jeter dans la gueule de loup, comme l’abruti que je suis. Maintenant je suis étendu sur le bitume, une balle dans le corps et bordel, j'avais oublié la douleur que cela faisait, un mal de chien. Mais le pire, c'est mon cœur qui saigne car je l'ai perdue, je n'ai pas su la protéger, j'ai échoué encore une fois à protéger les miens. Le troisième échec de ma vie ! Quand cela va t'il s'arrêter !

— Va-t’en ! fuis !

Mais les paroles que je pense prononcer à voix haute, lui semble inaudible. Elle se rapproche de moi pour en comprendre le sens mais un homme vient me l’arracher. J’ai beau resserrer mes doigts autour des siens, sa main finit par me glisser, je la vois disparaitre sans pouvoir bouger.

Voici mon troisième échec, la première fois, j'avais seize ans. Mon père nous frappait dès qu'il était ivre. Ma mère, ma petite sœur de douze ans ou moi, il ne faisait pas de différence. C'était suivant l'humeur du jour et de la première personne de la famille, qu'il trouvait en face de lui. Sauf cette nuit-là, lorsqu'il s'en est pris encore une fois à ma mère et à ma sœur, je l'ai expédié au tapis d'un uppercut, me cassant le pouce au passage. Il n'a pas apprécié la rébellion, il est sorti de la maison en furie pour revenir dix minutes plus tard, avec un fusil. Je n'ai pas eu le temps de les protéger, pas eu le temps de faire quoique ce soit, il nous a tiré dessus. Elles sont mortes ! Mortes par ma faute, pour avoir voulu dire stop ! J'ai fini aux urgences, une balle dans le ventre et mon père en prison à perpétuité. J'aurais voulu mourir moi aussi de ne pas avoir sauvé ma famille.

A la sortie de l'hôpital, ils m’ont placé en foyer puis à dix-sept ans, je m'enrôlais dans l'armée, les marines. Ce fut ma famille pendant quatre ans, jusqu'à ce jour où pour la deuxième fois, j'ai perdu mon unité dans une embuscade en Afghanistan. J'ai perdu également un poumon mais gagné un ami, Ghost. Ami dont je viens de perdre la sœur ! Je ne suis qu'un déchet, capable de me battre contre une armée, mais incapable de protéger sa famille. Bon sang, je suis en train de me vider de mon sang et je ne peux rien faire, je n'en ai pas la force. Ce pourri m'a bien saigné. Il m'a terrassé mais je ne vais pas mourir ici, pas question, il faut que je la retrouve... il ...faut... que... je ne me sens pas bien du tout et le noir m'accueille la seconde suivante.

— Falco ! Falco ! bon sang, mon frère, réponds-moi ! Que s’est-il passé ? Où est Nini ? Falco nom d’un chien réveille-toi !

Je suis où ? J'entends le bip de l'électrocardiogramme. Je dois être à l'hôpital. Je ne sais pas depuis quand, je ne sais pas comment, ni pourquoi, mais j'y suis.

— Falco, il faut que tu te réveilles s'il te plaît, Falco, Nikita a disparu !

Ça c'est la voix d'Alexandra. J’ai l’impression de l’entendre pleurer, mais pourquoi ? Que m'a t'elle dit ? J'ai les paupières lourdes, j'ai du mal à les soulever. Punaise, que s’est-il passé ? Voyons voir... ah oui... l'anniversaire de Niki... nous nous sommes bien amusés dans la piscine, au jeu du chat et de la souris. J'aimerais la croquer cette petite souris mais c'est la sœur de mon pote, mon frère de cœur. Argh ! ! Tout se mélange dans ma tête, c'est un vrai concert de tambours. Mais pourquoi ils me secouent comme un prunier ? Qu'est-ce qu'ils ont tous à vouloir me réveiller ! Je ne peux plus dormir tranquille ! Nous avons fait la fête en discothèque hier soir, j'ai peut-être dû abuser ? pourtant non, je surveillais Niki car un gros lourdaud l’observait bizarrement. Quand il a commencé à se rapprocher d'elle, à la coller en posant ses mains sur son corps, j'ai vrillé. C'est pour ça que je l'ai embarqué, il fallait que la soirée se termine, que je la ramène, elle avait trop abusé des cocktails, elle était complètement pompette. Bizarrement, je ne me rappelle pas l’avoir ramené ?

« Son regard... son regard observe quelque chose, je sens la tension se faire dans son corps. Mes yeux dérivent vers le point qu’elle vise. Que regarde-t-elle ? Le type de la boite ! Que fait-il là, à la surveiller ? Je vais en faire une bouchée de ce pervers ! Attends que j'arrive mon gaillard, tu vas voir si tu vas continuer à la mater. »

« Falco non ! »

Bip ! Bip ! Bip ! Bip !

— Niki !

— Falco, c'est moi, calme-toi ! C'est Ghost ! T'es à l'hôpital, mon pote, calme toi !

— Où est Nikita ! crié-je en l'attrapant par le col.

— Je ne sais pas mon frère, je comptais sur toi pour nous le dire. Elle a disparu. Une femme s'est mise à hurler dehors. Quand nous sommes sortis, tu étais en train de te vider de ton sang sur le goudron. Il n’y avait personne d'autre. La femme nous a dit qu'elle avait vu un véhicule démarrer sur les chapeaux de roues, mais elle n'a pas pu nous en dire plus.

Tout me revient en mémoire maintenant. Un homme qui sort un glock pour me tirer dessus. Bon sang, je ne m'y attendais à celle-là.

— C'est ma faute ! il y avait ce gars au club, il la regardait bizarrement. Quand il est arrivé derrière elle pour lui coller les mains sur les hanches, j'ai vu rouge. Je l'ai viré. Mais punaise ! je pensais que ce n'était qu'un alcoolo et qu'il s'était tiré ! J'aurais dû me méfier.

— Mais nom de dieu Falco ! Explique-nous ! Qui est ce type ? L’avais tu déjà vu auparavant ? As-tu vu quelle voiture il conduisait ? Parle nom de dieu !

Ghost est dans tous ses états. Alexandra et Lewis sont suspendus à mes lèvres. Je vois dans les yeux de Madame Nicolson, toutes les larmes versées et celles qui coulent encore le long de ses joues. Elle a un regard suppliant, attendant probablement des réponses que je n'ai malheureusement pas.

— Je ne l'avais jamais vu avant. Il nous attendait dehors, du moins je pense qu'il attendait Nikita. Il avait un pick-up noir, les vitres fumées. Je ne savais pas qu'il n'était pas seul à l'intérieur. Sa vitre était baissée et il regardait dans notre direction en fumant une cigarette. Je n'ai pas réfléchi, bon sang, je n’ai vraiment pas réfléchi, j’ai foncé comme un bourrin. C’est là qu’il a sorti un flingue et m'a allumé. Je n'ai même pas eu le temps de réagir et de sortir le mien. Ensuite, deux types sont sortis et l'ont jetée sur le siège arrière. Après, je ne sais plus... j'ai dû perdre connaissance. Ce que je peux te dire du gars, c'est qu'il est moins grand que moi, un mètre quatre-vingt-cinq, quatre-vingt-huit pour soixante-quinze, quatre-vingt kilos, blond, rasé sur les côtés et un peu plus longs sur le dessus, les yeux bleu-clair. Il a un tatouage dans le cou, un oiseau... un rapace peut-être. Sur l'index et le majeur les initiales B V, c'est tout ce que je me rappelle... désolé.

— Les « Black Vultures », dit Lewis.

— Tu les connais Pa' ?

— C'est un gang de motards qui sévit dans l'Ouest des États-Unis. Ils ont plusieurs antennes, dont une à Portland Oregon dans le nord-ouest. Personne n'a encore trouvé où se planque la tête du meneur.

— Tu as déjà fait des transactions avec eux ? Tu connais le nom de leur Président ?

— Non... non... que des suspicions mais je n’ai jamais pu en savoir plus, nous dit il en regardant sa femme étrangement. Bon, je vais vous laisser, j'ai quelques affaires à régler. Tu me suis Alex ?

— Oui, je viens. Repose-toi Falco, je reviendrai te voir plus tard. Merci pour tous les renseignements que tu nous as donné, je suis sûre que Lewis va trouver quelques chose.

— Comment il pourrait trouver quelques choses ? Ils n’ont rien de rien ! S'ils ont plusieurs antennes, comment allons-nous retrouver Nini ? Ils peuvent être partout et le temps presse ! crie Ghost.

— Fais-moi confiance mon fils, je vais me mettre en relation avec quelques contacts dans l'ouest des États-Unis. Nous allons la retrouver et je vous promets qu'ils vont payer pour s'en être pris à mes enfants !

Sur ce, ils quittent la chambre me laissant seul avec Ghost.

— MAIS CE N'EST PAS VRAI ! hurlé-je.

L'infirmière arrive précipitamment dans la chambre au bruit strident que vient de faire l'électrocardiogramme.

— Monsieur, il faut vous calmer. Vous avez eu beaucoup de chance. La balle est ressortie et n'a touché aucun organe vital. Cela aurait pu être bien pire. Vous avez perdu énormément de sang et nous avons dû vous transfuser, le repos est plus que nécessaire dans votre état. Je demanderai donc à Monsieur de bien vouloir vous laisser et revenir plus tard.

— NON ! Je me fiche de ma santé ! Je veux sortir d'ici et maintenant ! dis-je en commençant à attraper la perfusion.

Ghost met sa main sur la mienne m'empêchant de joindre le geste à la parole.

— Elle a raison, tu nous as fait peur. Nous avons cru que tu allais nous quitter. Si je devais te perdre aussi, je ne suis pas sûr que je m'en relèverais. Tu es resté deux jours dans le coma et...

— ...quoi ? Ça fait deux jours que je suis ici ? Ça fait deux jours que Nikita a disparu ? Et tu veux que je reste planté là à attendre quoi au juste !

J'ai éjecté les couvertures, recommençant à mettre ma main sur la tuyauterie mais l'infirmière est revenue avec le médecin. Pendant que Ghost essaie de me retenir, ce dernier me plante une aiguille dans le bras. L'effet est quasi immédiat, je me sens partir dans le coaltar.

— Purée mec ! T'es pas cool mince... dis-je à Ghost.

— C'est pour ton bien Falco, l'infirmière a raison, tu dois te reposer. Tu nous seras beaucoup plus utile en pleine forme. Avec tout ce que tu nous as donné comme indications, nous devrions pouvoir trouver quelques choses, mon père a raison, il faut lui faire confiance. Il avait l'air sûr de lui. Je reviens te voir dans la soirée. Tu restes peinard et tu n'embêtes pas les infirmières, me dit-il avec un clin d'œil.

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