Laurène s'attabla à la terrasse d'une grande brasserie lyonnaise où elle avait ses habitudes avec Julie. Sauf qu'aujourd'hui, elle désirait déjeuner seule afin de savourer sa liberté retrouvée. Après avoir commandé une salade César, une escalope milanaise et ses pommes de terre persillées, le tout accompagné d'une eau de Perrier, la jolie blonde s'évada dans ses pensées. Finalement, mettre un terme à plus de vingt ans de mariage n'avait pas été aussi difficile qu'escompté. En attendant d'être servie, elle se mit à fredonner un vieil air de Richard Anthony, relique issue de son enfance, d'un disque suranné que sa mère avait écouté en boucle dans l'appartement familial.

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« Si seulement tu m'avais dit la vérité /

Nous ne serions pas sur le point de nous quitter /

J'aurais toujours gardé au fond de moi /

L'amour que j'ai eu peur de perdre tant de fois /

Puisque tu as triché /

À présent tu peux t'en aller... » (1)

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Avec amusement, elle se fit la réflexion qu'elle aussi avait triché, mais contrairement à Jean-Louis, elle n'avait pas traîné pour le lui avouer. En contemplant cette alliance qui ornait son annulaire depuis ce jour, qui lui parut soudainement si lointain, où elle avait dit « oui », elle se convint qu'il était temps de la retirer ; ce qu'elle fit avant de la ranger dans son sac à main.

Au moment où elle commença à surfer sur le web via son smartphone, une première assiette s'échoua devant elle. Laurène remercia laconiquement le serveur avant de reporter toute son attention sur le site qu'elle était en train de consulter. Elle avait des envies d'évasion. Hors saison, il s'avérait aisé de débusquer une chambre d'hôtes disponible pour le week-end. Le Mas des Brunes semblait idéal pour une courte retraite loin du monde et pouvait l'accueillir le soir même. Cerise sur le gâteau, ce paisible lieu camarguais aux accents authentiques était tenu par son cousin Antoine. Elle l'appela dans la foulée pour confirmer sa réservation internet ; il en était ravi. Elle ignorait encore s'il fallait que Claude et lui l'attendent pour le dîner ou si elle prendrait un encas sur l'autoroute, elle aviserait. De toute façon, elle ne viendrait pas seule. Non, Jean-Louis et elle s'étaient séparés tout récemment. Et oui, elle avait rencontré quelqu'un d'autre. Elle salua chaleureusement un Antoine abasourdi par sa nouvelle situation maritale et raccrocha.

Avant d'entamer sa salade, Laurène avait encore deux coups de fil à passer.

Le premier serait destiné à Julie pour lui signifier qu'elle s'absentait quelques jours. Cette dernière parue soulager de cette escapade, sa sœur Johanna ayant prévu de débarquer dans la soirée. La belle quadra ne se formalisa pas outre mesure ; elle indiqua à son amie qu'elle pouvait regrouper ses affaires dans un coin et qu'elle improviserait à son retour en attendant de trouver un logement convenable : soit elle séjournerait à l'hôtel, soit elle s'installerait temporairement chez Miguel. Temporairement parce que, quel que soit l'état de sa relation amoureuse actuelle et à venir, elle voulait à tout prix être indépendante.

Le second aurait dû être destiné au bel hidalgo avec qui elle avait passé la nuit. Elle brûlait d'envie de lui faire la surprise de ce voyage impromptu. Mais elle préféra lui envoyer un SMS, plus mystérieux à ses yeux.

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[Prépare ton baluchon, mi ombre (2), je t'emmène en week-end. Un petit indice pour que tu situes l'endroit : c'est la terre d'élection des flamands roses et le berceau d'élevage des plus beaux destriers sauvages... Ah, n'oublie pas serviettes et maillots de bain, il y a une piscine... Bisous de partout. Lorena]

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Son déjeuner achevé, la blonde cannelle rejoignit d'urgence le loft de son amant. Il l'attendait tout sourire sur le pas de la porte.

(1) : Paroles extraites de la chanson : A présent tu peux t'en aller

(2) : mon homme