Bouchons
Dans le brouhaha régulier de Bruxelles, le concert des klaxons acrétinés ne s'arrête pas. Coincés devant un feu rouge qui s'éternise, les automobilistes mordent leurs volants. L'attente postméridienne n'en finit pas de s'éterniser. Pour rythmer les minutes qui ne passent pas, ou trop lentement, ils usent leurs batteries en faisant souffrir les oreilles des passants innocents. Ils sont bloqués là, entre leurs boulots et leurs maisons, condamnés à une attente absurde, dans laquelle chacun est un maillon de la longue chaine qui les entrave.
Le long des grands boulevards, il ne se passe pas cinq minutes sans que l'air se déchire, en résonnant sur les façades des maisons de maitre. Dans leur rage, les conducteurs n'hésitent pas à transgresser les lois qu'ils jugent inutiles dans leur course aux pénates. L'un grille un feu rouge, l'autre double par la droite. Une voiture jaune, voyant que le carrefour dans lequel elle veut s'engager est bloqué de toute part, décide tout de même que son tour est venu, et vient rajouter une pièce dans la construction complexe et abrutie du grand embouteillage journalier.
Partout, ce ne sont que caillots et bouchons. La ville est malade de son trafic intérieur. Les voitures piétinent tandis que les piétons cheminent à travers ce qui est devenu au fil des ans un tableau familier et grotesque, celui d'une ville qui se mord les queues.
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