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Bien plus tôt que ça, Désiré était réapparut.
 C’était un jour où Roman regardait ses figurines posées par terre, une après-midi grise et sans lumière. Cela faisait trois jours qu’il se comportait en petit garçon modèle, qu’il écoutait les cours de Mademoiselle Cake, qu’il finissait son assiette même si elle était rempli de légumes, qu’il se couchait sans faire d’histoire, qu’il n’allait plus déranger son père dans son atelier.
 Il était sage, c’est vrai, mais le quotidien était plus qu’ennuyant. Rien ne lui donnait envie, il passait son temps à réfléchir, à regarder les images de ses livres sans en lire une seule ligne, à tourner en rond dans sa chambre.
 Soudain, Monsieur Devon entra dans la chambre de son fils suivit de son patient. Roman eu un frisson lorsqu’il vit Désiré entrer à son tour. Il le regardait droit dans les yeux, sans même prendre la peine de se lever pour accueillir ses invités.
 « Désiré va passer un peu de temps avec toi, pour que vous appreniez à vous connaître. Sois gentil avec lui. » expliqua Monsieur Devon en fourrant ses mains dans ses poches. Son regard un peu fuyant démontrait qu’il était occupé, et qu’il fallait qu’il retourne vite au travail. Roman avait vu ça plusieurs fois, il savait le reconnaître.
 « Je reviendrai voir plus tard si tout va bien. » Et aussitôt, Monsieur Devon était dans le couloir, sans avoir totalement fermé la porte. Roman et Désiré se retrouvèrent tous les deux dans la chambre sans un mot. Une discussion était compliqué à aborder lorsqu’on repensait au dîner de l’autre soir, le petit garçon n’arrivait pas à se sortir de la tête la couleur de l’huile et le vide du bol.
 Désiré fut le premier à oser le mouvement, il retira ses chaussures, les posa soigneusement près de la porte, puis, il se mit à genoux sur le tapis près du lit de Roman. Tout son corps craqua, des pieds à la tête, et produit des cliquetis bruyant. Il du même faire rouler son bassin et sa poitrine pour évacuer les derniers craquements. Maintenant, il avait l’air d’être confortablement installé, n’importe qui d’autre n’apprécierait pas cette position plus de cinq minutes.
 « Tu n’es pas complètement réparé. »
 Désiré exprima une surprise furtive, tout ce qu’il pouvait transmettre se voyait dans ses yeux. Il essaya ce fameux même sourire compliqué que lors de leur rencontre dans la classe de Mademoiselle Cake.
 « Est-ce que mon père t’a réparé ? Ou bien il t’a inventé ?
 — Un peu des deux. »
 La voix de Désiré ressemblait à celle de quelqu’un d’enroué. Fatiguée, elle soufflait plus qu’elle ne vibrait. Roman était un peu désorienté, il avait du mal à imaginer que son père puisse rater une de ses inventions, ou bien qu’il se soit trompé dans ses réparations. Désiré ne semblait pas du tout au point.
 "Est-ce que tes yeux sont des vrais ?
 — Oui. » Ça, en réalité, Roman en était sûr.
 Désiré tourna la tête pour observer les figurines au sol, il les regarda longtemps, très longtemps, à tel point que Roman se demanda s’il ne devait pas les ranger dans l’instant pour ne pas se faire fâcher. Désiré n’avait absolument pas l’air de quelqu’un qui puisse se mettre en colère, on pourrait même croire qu’il ressentait de la sympathie pour ces figurines.
 « Ce sont vos jouets ?
 — Papa me les a acheté parce que je les ai vu dans le catalogue de jouets pour les adultes. Je n’aimais pas ceux du catalogue pour les enfants. Et puis, maman disait que ça s’accordait mieux avec la couleur des meubles. »
 Désiré tendit la main pour en prendre une, délicatement, ses doigts craquaient plus que les articulations de la figurine. Comment interpréter cet intérêt ? Roman ne comprenait pas ce qui l’amusait tant dans cette figurine dorée, peut-être que c’est parce qu’elle provenait du catalogue pour adulte, et que Désiré était un adulte. Pourtant, ni Maman, ni Papa, ni Mademoiselle Cake n’avaient porté le moindre intérêt à ces figurines.
 « Tu l’aimes bien ?
 — Oui.
 — Je te la donne. » Perdre une seule de ses figurines, ce n’était pas grand chose, et puis, Désiré vivait ici maintenant, donc elle ne disparaîtrait pas.
 Le patient du Docteur Devon exerça un sourire encore différent, il ne ressemblait pas à un sourire.
 « Merci beaucoup. »
 Désiré posa la figurine en face de lui, puis, avec ses doigts tremblant, il étira les deux extrémités de sa bouche. Il changeait de doigts pour tenter un résultat plus convainquant, tirer avec ses auriculaires lui semblait plus facile. Roman regardait ses dents blanches, mais qui ne lui paraissaient pas naturelles du tout, comme si elles avaient toutes été proprement remplacées.
 Roman n’arrêtait plus de se poser la même question en boucle. Désiré était-il inventé ou réparé ? Une invention ne peut pas être triste, il n’y a aucun intérêt à lui intégrer le malheur. Et puis, une invention ne peut pas être raté à ce point. Les réparés eux, concernent une partie minoritaire de leur humanité, ils peuvent donc ressentir des émotions, c’est normal.

Pourtant cet après-midi, le sourire de Désiré était profondément triste.

***

Le lendemain, Roman demanda à son père si Désiré pouvait passer l’après-midi avec lui. Monsieur Devon fut bien surprit de cette requête, il s’attendait à ce que son fils ne se sente pas très à l’aise en la présence de son patient, et pensait organiser une rencontre progressive. Malheureusement, Désiré avait à faire.
 Roman n’y cru pas un seul instant. Alors, il redevint le petit garçon têtu qu’il était encore il y a quelques jours, et s’introduit dans l’atelier de son père sans se faire prendre par sa mère. Il resta caché derrière la porte fixe, l’autre était toujours ouverte, il pouvait observer discrètement.
 Monsieur Devon était en tain d’aider Désiré à retirer ses vêtements, et les posait sur la chaise en bois contre son bureau. Au milieu de l’atelier se trouvait un tapis roulant, relié à des machines et des ordinateurs sur le bureau du Docteur. Seulement un seul de tous les écran étaient allumé.
 Désiré ne portait plus qu’un pantalon quand le docteur lui demanda de monter sur le tapi. Pour la première fois, Roman constata que le patient avait du mal à marcher, ses jambes ne suivaient jamais le même axe, et ses genoux se balançaient de plusieurs côtés. Désiré du s’aider de deux barres en bois pour tenir debout sur le tapis, puis, il se mit à marcher, très lentement. L’intégralité de son corps était malmené, il faisait du bruit, comme de la vaisselle qui s’entrechoque et des roulement oxydés.
 « C’est très bien, marche doucement. » L’encourageait Monsieur Devon. Sur le tapis était dessinés des petites marques bleues régulières, et Désiré s’appliquait à marcher dessus à chaque pas. Il respirait plus fort, l’effort avait l’air intense.
 « Désiré a besoin de réapprendre marcher, il doit s’exercer tous les jours pour prendre l’habitude. Les choses ne sont pas aussi faciles pour lui que pour nous. Il ne faut pas se moquer de lui. »
 En fait, Roman n’avait aucunement l’intention de se moquer, il trouvait cela tout simplement fascinant, en quelque sorte. Marcher, c’est presque inné pour tout le monde, c’est ce qu’on pourrait croire puisque personne ne se souvient vraiment du moment où il a apprit à marcher. Un jour on acquit la conscience, et on sait déjà marcher, parler, manger, penser.
 Désiré devait apprendre tout ça.

Monsieur Devon incita son fils à entrer en posant une main sur son épaule, puis, il ferma la porte. Roman s’assît sur le petit tabouret en bois pour regarder Désiré marcher, l’exercice dura dix minutes avant que le patient ne ressente une intense fatigue. Monsieur Devon vint aider le jeune homme à s’éloigner du tapis, ses jambes étaient en train de trembler.
 « C’est du très bon travail, tu vas pouvoir te reposer. »
 Désiré ferma les yeux, peut-être qu’il venait de s’endormir une fois assis dans le fauteuil près de la cheminée.
 « Pourquoi l’as tu mal réparé ?
 — Parfois il n’est pas possible de réparer les choses parfaitement du premier coup. Ça prend du temps. » Le père de Roman déplia une couverture rouge qui se trouvait dans un petite armoire dans le fond de la pièce, et recouvrit délicatement son patient jusqu’à la poitrine.
 Avant qu’il ne soit recouvert, Roman avait vu quelque chose qui éveilla sa curiosité. La poitrine de Désiré ressemblait à l’ouverture d’un cabinet de curiosité; deux petites portes qui s’ouvraient vers l’extérieur, accrochées par des points de coutures.
 Des points de coutures dorés.
 Même un enfant comme Roman pouvait s’apercevoir que la couture était légèrement maladroite et plusieurs fois repassé au même endroit.

Ouvert, et refermé à plusieurs reprises.

Alors que Monsieur Devon s’éloignait pour éteindre le tapis ainsi que ses ordinateurs, Roman se rapprocha du patient à pas discret. Il se permis de baisser la couverture pour observer à nouveau. Il voyait d’autres chemins de fils se conduire autour de la gorge de Désiré, faire le tour de ses épaules, et l’intérieur de ses bras. Le petit garçon porta sa main sur la poitrine du patient, il avait terriblement envie de tirer sur cette ficelle qui reliait deux petites poignées, comme celles d’un tiroir.
 Désiré rouvrit les yeux, à demi, simplement pour le regarder.
 « Tu respires, ta poitrine bouge en bas et en haut. »
 Désiré l’écoutait simplement. C’était vrai, sa poitrine se soulevait à un rythme tranquille à présent, l’effort et l’essoufflement avait disparue.
 « D’habitude, les inventions ne respirent pas. » Chuchota le petit garçon.
 « Viens, Roman, laissons le se reposer. »

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