06
Le Temps ? Il n’avait plus vraiment de valeur. Roman préférerait compter en nombre de souvenirs auxquels il avait pensé dans cette malle. Des souvenirs stupides, ou dans la plupart, il ne s’était pas comporté en gentil garçon.
Maintenant, il faisait froid, et le silence était total.
Roman bougeait ses doigts pour faire disparaître la désagréable sensation d’engourdissement, il aimerait faire suivre le mouvement avec ses bras et ses jambes, le corps figé de Désiré l’en empêchait. Le petit garçon réfléchit à une solution pour réveiller son compagnon de fuite qui n’a pas soufflé une seule respiration de travers depuis le début. Il avait l’air simplement endormit, en veille.
« Hé… » Chuchota Roman. Plusieurs des attaquants de la maison pourraient encore être là, oui, ils pourraient très bien les avoir attendu dans le grand salon, si seulement il restait encore le grand salon. Le petit garçon frissonna à cette idée.
« Hé ! Désiré, on est serré, j’ai mal au jambes… »
Clic, clic, clic.
La remise en mouvement était progressive, en courbant son dos, Désiré ouvrit la malle. Il poussa la portière afin de les libérer de l’isolement. L’air froid circula immédiatement jusqu’à l’enfant, il se propageait en dessous de ses vêtements et jusqu’aux bouts de ses doigts. Afin de remédier à ce problème, Désiré pris le premier tissus qui venait pour le poser sur les épaules du petit garçon.
« Est-ce qu’on peut aller retrouver Papa et Maman maintenant ? »
Désiré poussa très lentement la porte, afin d’atténuer le son de craquement et de frottement contre le sol. Personne ne se trouvait derrière, aucun bruit, seulement un violent courant froid qui s’introduit dans la pièce.
Il ne faisait jamais froid dans la maison, Madame Devon s’évertuait à correctement chauffer toute la demeure, chaque pièce, si bien que Roman ne se souvenait d’aucun jour il avait froid. Il n’avait jamais eu besoin de porter des chaussettes épaisses dans son lit au moment d’aller se coucher, il pouvait marcher pieds nus sur le carrelage, tous ses vêtements étaient toujours à parfaite température. L’hiver, les fenêtres étaient ouvertes le remps parfait pour aérée, sans refroidir, et l’été, La fraîcheur était parfaitement conservée grâce aux volets ouverts le matin, et fermés l’après-midi.
La température parfaite, absolument tous les jours.
Roman vit de la neige sur le sol, en dessous de la fenêtre dont le verre était complètement brisée.
De la neige, dans la maison.
« Est-ce qu’on peut… retrouver Papa et Maman ? » Désiré tendit la maison au petit garçon, ses doigts avaient un mal fou à s’articuler, comme coincés ou rouillés. Après un très cour instant d’hésitation, Roman vint prendre cette main qui pourrait le réchauffer malgré tout, et ensemble, ils marchèrent prudemment sur le pallier de l’escalier. D’ici, on voyait le jardin, il avait été complètement dévasté. Toutes les plantes de Monsieur Devon écrasées ou déracinées. Un véhicule était manifestement passé sur toute sa longueur, entrée par le champs qui se trouvait complètement au fond de la propriété.
Roman ne profita pas plus longtemps de la vue dévastée du jardin, Désiré l’emmena vers le bas des escaliers, toujours en lui tenant la main et en avançant lentement. L’adulte surveillait les alentours en tournant la tête de gauche à droite, d’avant en arrière.
Ils étaient maintenant au Rez de chaussée, et l’environnement stupéfia Roman, il manquait une partie de mur dans le hall, et le sol avait été creusé. On voyait même le jardin, on pouvait y accéder sans porte, n’importe qui pouvait rentrer !
« La maison… » murmura Roman avec un air dévasté.
La cuisine se trouvait non loin d’ici, près de ces ruines là, et de celles-ci… maintenant, on voyait même le ciel blanc.
La cuisine n’existait plus vraiment. La gazinière était toujours contre la base du mur, quelque brisques encore les unes sur les autres laissaient apercevoir l’armature fractionnée. Il y avait aussi le four dont la vitre avait éclatée. Les placards étaient tous par terre, et la vaisselle complètement cassées. La neige avait recouvert le sol, et elle continuait de tomber tout doucement. Roman ne se sentait pas bien du tout à l’idée de voir les denrées alimentaires échouées dans un mélange de neige et de boue, plus de sucrerie à voler dans les placards, plus de placard du tout. La cuisine ressemblait à une terrasse qu’on aurait oublié pendant des années, le genre d’endroit qui pourrait être pris en photo et exposé dans les livres d’histoire. L’enfant se retourna pour observer sa maison. .
La maison, elle était tordue, et il manquait des morceaux.
« Où sont Papa et Maman… où sont Papa et Maman ? Où sont Papa et Maman ! »
Désiré restait silencieux malgré la crise de larme de Roman qui débutait.
« On est tout seul, et la maison est cassée ! Il fait froid partout ! Où sont Papa et Maman ! » Il se frottait les yeux à répétition, provoquant des rougeurs sur son visage. Il pleurait, reniflait, s’essuyait le nez avec ses manches.
« J’ai froid ! J’ai faim ! J’ai peur ! Où sont Papa et Maman ! »
L’estomac de l’enfant gronda pendant un arrêt de sa voix toute cassée. Désiré observait le petit garçon, la mâchoire serrée, on pourrait croire qu’elle ne s’ouvrait jamais. Le patient se dirigea vers la gazinière.
Clic, clic, clic.
Il trouva une casserole qui trainait au sol avec une vingtaine d’autres ustensiles de cuisine, et la posa sur l’emplacement le plus grand. Roman avait l’impression de ne pas être écouté. C’était vrai quoi, Désiré ne parlait pas, il ne lui expliquait pas ce qu’il venait de se passer, ne lui expliquait pas où se trouvaient ses parents, il ne lui répondait pas.
« Où sont Papa et Maman ! »
Le paquet d’allumettes était beaucoup trop humide, aucune flemme ne se déclara, même si Désiré investissait toute la force qu’il lui restait.
Il recommençait, encore, encore, et encore.
Encore.
Roman n’avait plus assez de courage pour pleurer autant, il se calmait de lui-même. La peur et la fatigue le gagnait, il s’épuisait.
Le paquet d’allumettes retomba des mains de Désiré, ses doits se grippaient à cause du froid, bouger était un calvaire. Il abandonna, et se rapprocha du petit garçon qui se cachait le visage. S’agenouiller fit claquer toutes les articulations de Désiré, il pourrait bien ne pas réussir à se relever.
Hier, il avait du mal à marcher.
Désiré pris les mains de Roman, il pouvait à présent voir son visage blanchie par le froid, et brillant par les larmes. Ils se regardaient, droit dans les yeux. Ce petit garçon aux cheveux noirs et aux yeux marrons était l’enfant le plus unique du monde. Il se jeta de lui-même dans les bras de Désiré, et se remis à pleurer à chaudes larmes. Une petite voix fluette et aiguë qui resterait à jamais gravée dans la mémoire de Désiré.
Clic, clic, clic.
« Roman Devon. Ne pleurez pas… Nous serons ensembles tant que je serais toujours capable de bouger les doigts. »
Clic, clic, clic.
Fin du prologue.
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