Accusation
Aussitôt, Scarlett se hâta pour servir son père. Elle lui versa une grosse louche de légumes cuits avant de s’occuper de sa propre assiette. Ils s’installèrent tous les deux à tables, sans un mot. La tension dans la pièce était telle que la jeune femme osait à peine respirer.
– Tu as encore traîné ce matin !
Scarlett déglutie.
– Je…
– Ne me raconte pas d’histoires, je t’ai vue arriver en courant. Si tu n’avais rien à te reprocher, tu ne te serais pas autant pressée !
– J’ai été retenue en ville, murmura la jeune femme.
La phrase ne passa pas, son père la foudroya du regard.
– Et avec qui traînais-tu ? Un des garçons du village ? Un étranger ?
Au souvenir de ce qu’il s’était passé la veille, Scarlett retint son souffle.
– Ce n’est pas…
Le poing de son père s’abattit sur la table dans un grand bruit. La cuillère tomba du bol, répandant de la soupe sur le bois poli par les années.
– Cesse de te moquer de moi !
– J’étais avec la doyenne, avoua Scarlett.
Elle espérait que cela calmerait la colère de son géniteur.
– Ha oui ? Et que faisais-tu avec elle ? Tu prenais une potion ! Une de celles qui empêchent d’avoir des enfants ! Ne me prends pas pour un idiot ! J’aurais dû t’interdire d’aller à la fête ! Tu es bien comme ta mère !
La voix de son père se répercuta sur les murs. Scarlett le fixa sans savoir si était au courant de ce qu’il s’était passé ou s’il s’imaginait des choses.
– Tu ne veux pas avoir un enfant ! Avoue-le donc !
– Mais je ne suis pas mariée !
Son père la saisit par le bras comme pour l’empêcher de fuir.
– Si ce n’est que ça, je pourrais te marier avec Pierre.
L’idée effraya Scarlett. Cet homme n’était pas connu pour avoir été bon avec son ancienne épouse. Celle-ci avait perdu la vie durant son accouchement. Le bébé la suivant de peu.
– Comme ça, tu pourrais avoir un garçon pour hériter de la ferme ! Parce que là, je n’ai que toi !
Sur ces mots, il la lâcha. Son attention revint à son bol de soupe. Il mangea sans décrocher le moindre mot, mais le mal été fait. Scarlett n’osait même plus bouger de peur de s’attirer à nouveau l’inimité de son père.
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