Prologue
Toute sa vie, Madeleine a vécu dans un cocon, un petit monde soigneusement construit par ses parents. Chez elle, loin des villes et des foules, tout était simple. Pas de télévision, pas de téléphone, et surtout, pas de contact avec le monde extérieur. Ses parents lui avaient toujours dit que le monde "là-bas", au-delà des collines, était dangereux, peuplé de gens étranges et d’idées néfastes.
"Le gouvernement espionne, les voisins trahissent, et les inconnus apportent des maladies" — c’était leur refrain quotidien.
Elle n'avait jamais mis les pieds dans une école, ses parents avaient préféré lui faire cours eux-mêmes, avec des livres soigneusement triés. Chaque jour ressemblait au précédent : lever avec le soleil, se promener dans les champs, lire les vieux romans que sa mère acceptait de lui prêter, et éviter à tout prix de s'aventurer trop loin de la ferme. Le monde extérieur n'existait pas pour elle. Et, jusqu’à ce jour, cela lui convenait.
Pourtant, une nuit, tout changea. Un simple accident domestique. Une bougie laissée allumée dans la petite salle de séjour, près des rideaux. Madeleine s’était endormie paisiblement dans sa chambre, sans savoir que sa vie entière était sur le point de partir en fumée, littéralement.
Elle se réveilla, étouffée par une épaisse fumée noire. Le feu avait déjà envahi la maison. Elle essaya de fuir, mais la chaleur et la panique l’immobilisaient. Ce fut l’arrivée fracassante des pompiers qui la sauva in extremis. Ces hommes en uniforme, masqués, leurs gestes rapides et assurés, la terrifiaient presque autant que l’incendie lui-même. C’était la première fois qu’elle voyait des étrangers, des gens du "dehors".
Elle n'eut pas le temps de protester. On l’emmena d’urgence à l’hôpital de la ville. Là où tout était encore plus étrange : des machines qui bipaient dans tous les coins, des lumières clignotantes, des inconnus en blouse blanche qui lui parlaient avec des mots qu’elle ne comprenait pas. Elle se terra dans le silence, ses yeux agrandis par la peur, refusant de parler, de répondre à leurs questions.
Madeleine était maintenant coincée dans ce monde extérieur qu’elle avait toujours craint. Et elle n’avait plus personne à qui se raccrocher.
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